pine-court
Celui qui n'a pas la capacité de mettre des œillères, pour ainsi dire, et de se faire à l'idée que le sort de son âme dépend de la justesse de sa conjecture à ce passage précis de ce manuscrit ferait bien de se tenir à l'écart de la science [...] Sans cette étrange ivresse, ridiculisée par tous les profanes ; sans cette passion [...] vous n'avez aucune vocation pour la science et vous devriez faire autre chose.

Science as a vocation
Max WEBER


COVID-19 en 2021

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   COVID-19 à un tournant

Hong Kong 2000-2002 (en anglais)

Premières hypothèses sur le SRAS

 

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arrow 31 Décembre 2020. L'identification de traces du virus SARS-CoV-2 dans les eaux usées d'une résidence a permis d'identifier un nouveau patient à Hong Kong. Après la mise en place d'un test systématique des occupants de la résidence Kai Fai du quartier Choi Wan dans le district de Wong Tai Sin à Hong Kong lorsque les échantillons d'eaux usées se sont révélés systématiquement positifs pour le virus un résident  a été trouvé infecté par le COVID-19. Cela indique que cette façon de surveiller la propagation de l'épidémie pourrait être très fructueuse. En France, le système de surveillance Obepine est destiné à fournir le même type de service, mais n'a pas encore été utilisé pour l'identification explicite de personnes infectées.
arrow 29 Décembre 2020. Selon le South China Morning post, le nombre de personnes infectées à Wuhan lors du premier épisode a été considérablement plus élevé que le nombre officiel. Plus de 4 % des 11 millions d'habitants de Wuhan, en Chine centrale, auraient été exposés au coronavirus responsable de Covid-19, selon une étude nationale testant les anticorps sanguins. Ce chiffre est complété par un autre, en dehors de la ville, qui montre que moins de 10 % de ce chiffre aurait touché des personnes en dehors de la ville. Cela démontre deux choses : que le confinement a été efficace pour empêcher la propagation de la maladie, mais qu'il est probable que les informations sur la situation réelle n'ont pas été communiquées. Bien sûr, il est encore possible que les tests aient surestimé le nombre de cas positifs, mais cela serait aussi vrai en dehors de Wuhan. La principale conclusion que nous devons tirer est qu'il est probable que nous ne saurons jamais vraiment ce qui s'est passé. Dans ce contexte, l'enquête lancée par l'OMS ressemble à une tentative bizarre de rétablir la confiance, et spécialement en raison de conflits d'intérêts évidents affectant certains des membres de la commission. C'est vraiment regrettable car cela va alimenter la diffusion d'inévitables fausses nouvelles.
arrow 26 Décembre 2020. Le SARS-CoV-2 a eu plus d'un an pour évoluer, au taux moyen de 21 mutations per génome et par an.
Cela peut sembler une infime fraction de la séquence du génome du virus, longue de 30 000 nucléotides. Pourtant, sachant qu'une grande partie est contrainte par les caractéristiques structurelles requises pour le bon repliement de l'ARN du virus, ainsi que par les propriétés catalytiques des enzymes qu'il code, ce taux est assez élevé. De nouveaux variants ont été découverts au Royaume-Uni, en Afrique du Sud et dans d'autres endroits d'Afrique. Ils semblent accroître la contagion, mais ne sont apparemment pas plus mortels. Ce qui est inquiétant, c'est que de nombreuses mutations affectent la protéine de spicule, qui est à la fois impliquée dans l'attachement du virus aux récepteurs des cellules de son hôte et dans sa reconnaissance par le système immunitaire adaptatif après la vaccination. Sachant que des personnes ont déjà été réinfectées après une première contamination, cela suggère que la protection vaccinale pourrait parfois disparaître. C'est en fait une propriété bien connue des coronavirus les plus communs. Pire encore, nous ne savons pas comment le système immunitaire réagira si une nouvelle infection est causée par un virus sensiblement différent : au lieu d'une protection, les gens pourraient avoir été sensibilisés, comme on l'observe avec la dengue. Seul le temps nous le dira. Espérons que l'atténuation spontanée du virus protégera, plutôt que de sensibiliser, comme cela a probablement été observé à Shanghai en 2003.
arrow 20 Décembre 2020. Alors que les media déclenchent la panique après que les mutants du SRAS-CoV-2 ont gagné du terrain en Angleterre (et en Afrique du Sud), il est temps de revenir aux fondamentaux.
La vie est fondée sur l'exploration et la compétition pour ses ressources. Bien qu'ils ne soient pas vivants - parce qu'ils dépendent entièrement de la machinerie de synthèse des protéines de leurs hôtes - les virus sont des parasites très efficaces. Ils tirent toutes leurs ressources de leurs hôtes. S'ils devaient les tuer à chaque fois qu'ils les infectent, cela demanderait une stratégie très compliquée pour maintenir leur pérennité. C'est pourquoi les virus les plus répandus affaiblissent leurs hôtes mais ne les tuent pas. En revanche, il y aura une forte pression naturelle pour augmenter le nombre d'hôtes qu'ils peuvent infecter. Cela signifie qu'il y aura une tendance naturelle à favoriser tous les variants qui entraînent un taux de contagion plus élevé. C'est ce que nous avons vu à plusieurs reprises avec le SARS-CoV-2, à commencer par la mutation (dite D614G) au début de l'année. Aujourd'hui, un nouveau variant, porteur de plusieurs mutations inédites, se répand très vite en Angleterre, mais, pour l'instant, sa virulence ne semble pas avoir beaucoup changé. Cependant, avec le temps, on peut s'attendre - espérons-le - à ce que la virulence ait tendance à diminuer, sans pour autant que le virus devienne moins contagieux. Et
ce type d'évolution vers l'atténuation pourrait même peut-être être souhaité, car une nouvelle forme à venir pourrait alors agir comme un vaccin naturel. Cependant, pour l'instant, le fait que beaucoup des nouvelles mutations soient dans la protéine de spicule fait penser que le virus trouvera facilement le moyen d'échapper à la vaccination.
arrow 2 Décembre 2020. Un énorme foyer de COVID-19 compromet le retour à la normale dans la ville de Hong Kong.
Hong Kong doit maintenant lutter contre la montée en puissance de COVID-19 avec des fermetures de nombreux sites, des restrictions imposées aux restaurants et une ligne de signalement destinée à dénoncer les contrevenants à la distance sociale. Un événement de "super propagation" lié à des dancings ou des karaokés a maintenant conduit à 552 cas de la maladie hier 1er décembre et cette vague ne diminue pas, faisant apparaître des infections directement et indirectement liées à la propagation de la maladie, dans les hôpitaux et les écoles. Elle déclenchera probablement la mise en place d'un test de dépistage du virus du SRAS-CoV-2 dans toute la ville.
arrow 30 Novembre 2020. Il est désormais plus que probable que la COVID-19 va devenir endémique.
Pour éradiquer une maladie, il faut l'éradiquer de ses réservoirs. La variole ne pouvait qu'infecter l'humanité et la vaccination générale a réussi à l'éradiquer (du moins jusqu'à ce que la séquence du génome soit malheureusement disponible, car une séquence du génome, qui peut être utilisée pour reconstruire un virus, ne peut plus être éradiquée de l'internet...) Il en va de même pour la poliomyélite. La plupart des maladies ont cependant des réservoirs animaux, et il est très inquiétant que des animaux domestiques aient été infectés, notamment les animaux de compagnie par le SARS-CoV-2. Bien que ces animaux ne contractent généralement qu'une maladie bénigne ou même asymptomatique, ils sont susceptibles de contaminer à leur tour leurs propriétaires ou leurs visiteurs. Au surplus, cela implique que le paysage évolutif du virus a découvert de nouvelles possibilités qui peuvent entraîner une propension accrue à la contagion, voire de nouveaux traits pathogènes. C'est la raison pour laquelle le COVID-19 risque bien de devenir endémique.
arrow 28 Novembre 2020. De nombreux candidats vaccins prétendent avoir un taux de réussite de plus de 90%, mais est-ce bien établi sans équivoque ?
Alors qu'Astra-Zeneca, avec son vaccin "classique", revendique un succès de 70 %, voire de plus de 90 % pour un sous-ensemble de patients âgés soumis à un protocole particulier, cette société a raisonnablement différé son opinion très positivse jusqu'à ce qu'il soit possible de l'affirmer à partir de meilleures données. Cette attitude est louable. En revanche, d'autres sociétes, en particulier produisant des vaccins utilisant des acides nucléiques, revendiquent toujours un taux de réussite très élevé.  Pourtant, une analyse rationnelle de leurs allégations ne les soutient pas vraiment. Il est regrettable que les gouvernements, motivés par des opinions propagées par l'ignorance coupable des media, soient incapables de résister à la pression populaire. Espérons que cela n'aura pas de conséquences catastrophiques à cause d'une mauvaise gestion d'une vaccination appropriée.
arrow 22 Novembre 2020Il est temps de faire le point. Les premières analysent indiquent que l'usage de l'hydroxychloroquine a eu un impact très négatif sur la sévérité de la COVID-19.
Comme John Ioannidis est l'un des auteurs de cet article, il faut le prendre très au sérieux. Est-ce que cela pourrait-il expliquer pourquoi le nombre de décès a été plus élevé lors de la première vague que lors de la vague actuelle ? L'information scientifique est de plus en plus difficile d'accès car les médias utilisent comme références les revues et magazines qui favorisent l'impact publicitaire plutôt que la qualité scientifique. Cela a des conséquences considérables (sauf peut-être en Asie, malgré l'accent délétère mis là aussi sur les facteurs d'impact) dans la manière dont les gouvernements établissent leurs politiques de santé. Cela a aussi eu des conséquences désastreuses dans la manière dont des études essentielles ont été abandonnées. Nous savions tous que les coronavirus étaient extrêmement dangereux, mais les travaux approfondis dans ce domaine n'ont pas pu atteindre les revues à fort impact, qui ne s'intéressent qu'à ce qui peut leur fournir des publicités lucratives. C'est pourquoi, bien qu'après l'épisode du SRAS en 2003, de nombreux articles aient été publiés, mettant en garde contre une probable récurrence de telles épidémie, cela n'a servi à rien car les médias ont continué à chercher ailleurs, essayant d'être les premiers à citer les thèmes retenus par les revues à fort impact plutôt que d'informer leur public ! C'est une rasion de plus qui explique aussi la disparition progressive des revues publiées sur papier, en particulier dans le domaine de la science. Si les gouvernements avaient correctement soutenu la recherche dans ces domaines non à la mode plutôt que de chercher à être visibles dans les médias, nous aurions déjà des antiviraux et nous en saurions beaucoup plus sur les vaccins. Même les institutions scientifiques sont incapables de résister à la pression des profits générés par la publicité, et nous en payons le prix, dans le monde entier et c'est absolument catastrophique.
arrow 19 Novembre 2020. Une fois de plus, des anticorps contre le CoV-2 du SRAS ont été découverts dans des cellules de patients prélevées en 2019.
Cela a été interprété par certains comme la preuve que le virus était présent bien avant qu'il ne soit détecté à Wuhan. Cependant, ce n'est certainement pas une preuve de la présence du même virus que celui qui a causé le COVID-19. Nous devons nous rappeler que la réponse immunitaire ne vise pas directement le génome d'un virus, mais des "antigènes", c'est-à-dire des formes reconnues comme des signaux possibles de danger pour l'hôte. Ils peuvent ou non être codés dans le génome d'un agent pathogène particulier. Ils sont souvent causés par le vieillissement naturel de certains composants de l'hôte, le plus souvent des protéines. Cela explique l'augmentation de l'inflammation à bas niveau associée au vieillissement. Pourtant, cette observation est importante car elle peut indiquer qu'une infection antérieure (ou peut-être l'âge : nous n'avons pas beaucoup d'informations sur l'âge des cellules des patients qui ont produit les anticorps en question) présentait des caractéristiques similaires à celles qui sont reconnues dans le SRAS-CoV-2 par le système immunitaire. Cela peut être protecteur (comme cela s'est probablement produit à Shanghai en 2003 pour le SARS-CoV-1), ou bien sensibiliser les patients et déclencher une tempête de cytokines paradoxale, comme dans le cas de la dengue. Il est donc particulièrement important de surveiller attentivement la réaction en fonction de l'âge pour les nombreux vaccins dont on dit actuellement qu'ils sont protecteurs. À l'heure actuelle, la surmortalité causée par la deuxième vague va être plus sérieuse que lors de la première vague, comme l'illustre le cas de la Suisse, par exemple.

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arrow 13 Novembre 2020La FDA a demandé l'interruption de l'usage du cocktail d'anticorps de la société Regeneron pour le traitement des personnes gravement atteintes par la COVID-19.
Cependant l'usage de ce cocktail, qui fait partie de l'essai européen RECOVERY reste maintenu pour l'instant. Par ailleurs RECOVERY va ajouter l'usage d'une dose quotidienne d'aspirine (150 mg) pour en tester l'effet dans l'essai en cours.
arrow 11 Novembre 2020. Au moment où Pfizer annonce à grand bruit le succès de son vaccin anti-COVID-19, son PDG Albert Bourla vend 62% de ses actions au prix record de $41.94.
Devrions-nous nous inquiéter de cette vente surprenante ? Qu'est-ce que cela signifie en termes de sécurité et d'efficacité du vaccin en question ? Nous espérons, sans trop y croire, que les gouvernements feront preuve de la diligence nécessaire lorsqu'ils achètent des vaccins pour des millions de personnes.
arrow 7 Novembre 2020. La route de l'est de l'Arctique va fermer cette année.
L'océan Arctique est resté ouvert à la navigation sur sa partie orientale pendant plusieurs mois. En août 2020, 448 voyages ont été effectués par quelque 193 navires, allant de l'Espagne à l'île de Hainan, dans le sud de la Chine.
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Le nombre des cas de COVID-19 a atteint 50 millions dans pour le monde entier.
arrow 5 Novembre 2020. L'explosion des programmes de vaccination contre la COVID-19 va compromettre les travaux sur la sécurité des vaccins.
Des dizaines de modèles de vaccins sont développés dans le monde entier contre le SRAS-CoV-2 sans aucune tentative concertée de vérification de leur sécurité. Cela risque d'aboutir à des résultats contradictoires qui empêcheront le développement cohérent des politiques de vaccination. Si la vaccination a connu des succès considérables dans le passé - la variole et la poliomyélite ont été éradiquées, tandis que la fièvre jaune, malgré son important réservoir animal, peut être rapidement combattue lorsqu'un foyer apparaît quelque part - elle n'est pas toujours couronnée de succès ni sans résultat négatif lorsqu'elle n'est pas correctement testée en termes de sécurité. Parallèlement, alors que certains vaccins, pas toujours très efficaces, doivent être changés chaque année, il reste essentiel de maintenir une vaccination généralisée. C'est le cas de la grippe, par exemple. En effet, on peut s'attendre à ce que, cette année, le nombre de cas de grippe dans l'hémisphère nord diminue, simplement en raison des mesures prises pour maîtriser la COVID-19. Cela va conduire au déclin progressif de l'immunité collective contre la grippe et pourrait créer les conditions, dans un avenir proche, d'une épidémie de grippe mortelle si la population ne rencontre pas des variants du virus comme c'est le cas normalement. La vaccination contre la grippe - son utilisation est courante depuis de nombreuses années, et elle est sûre sauf dans des cas très spécifiques dont nous avons parlé précédemment - devrait donc être maintenue à un niveau élevé, même en l'absence de la circulation du virus. En revanche, il semble difficile, à l'heure actuelle, de décider du choix d'un vaccin sûr dans le cas de la COVID-19. Des études comparatives bien conçues devraient être organisées dans le monde entier avant de choisir un type particulier de vaccin, en particulier en prenant des précautions importantes si l'on décide de choisir des vaccins de troisième ou quatrième génération (voir la première figure du 28 octobre).
arrow 30 Octobre 2020. Alors que le nombre de cas et de décès dus à COVID-19 explose, les gouvernements font semblant d'être surpris (ou est-ce de l'incompétence ?).
La croissance exponentielle actuelle de la maladie est la conséquence directe de l'attitude détendue de nombreux gouvernements face à la réalité. Fin août, il était évident que les paramètres de contagion autorisés en France, par exemple, conduiraient à la situation actuelle. On peut le voir dans la figure d'un article où l'on met en garde contre la complaisance en ce qui concerne l'évaluation correcte des éventuels vaccins.
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Mais cela nécessiterait une véritable autorité, et, sans doute, la rééducation de la majorité des personnes qui n'ont reçu aucune éducation civique (ni de simple politesse), depuis près de 5 décennies à l'heure actuelle.
Dans ce contexte, la dernière journée de l'ICG-15 à Wuhan a été rafraîchissante, avec Richard Durbin, du Centre Sanger (Royaume-Uni) qui nous a donné les grandes lignes pour les dix prochaines années avec le séquençage du génome de toutes les espèces vivantes de cette planète. La France, encore une fois, est complètement hors jeu pour des raisons qui ont été souvent expliquées.
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Plus tard, Zhihua Ou, du BGI, nous a montré que le tropisme intestinal du SARS-CoV-2 joue un rôle important dans la réinfection, et elle a aussi décrit comment le virus est combattu par l'immunité innée agissant contre la cytidine triphosphate. Cette épidémie est source de découvertes remarquables qui s'étendront bien au-delà de la virologie.
arrow 28 Octobre 2020. À la conférence ICG-15 à Wuhan après un après-midi sur la contribution de l'Afrique aux études du génome et à la réflexion sur les vaccins, Georges Fu Gao commente le manque de préparation à COVID-19.
George Gao, le directeur du CDC chinois, a résumé la présentation su les vaccins discutée lors de la session "Afrique".
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Il a aussi montré que, si diverses organisations étaient tout à fait conscientes de l'imminence d'une pandémie, nous n'étions pas préparés à y faire face.
Lors des premières sessions de la conférence, la manipulation génétique à l'aide de CRISPR-Cas9 (y compris la détection des modifications accidentelles hors cible) a été examinée en relation avec la manipulation génétique des plantes et des animaux (porcs).
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Le Global Preparedness Monitoring Board (GPMB) avait discuté cette question à plusieurs reprisses, et un exercice "event 201" à l'université Johns Hopkins avait même fait une simulation pour comprendre la préparation à une infection par un coronavirus, mais cet exercice n'a pas été correctement mis en œuvre dans le monde, sauf peut-être en Chine.
arrow 27 Octobre 2020. Zhengli Shi, directrice de l'Institut de Virologie de Wuhan, présente la découverte du SARS-CoV-2 à la conférence ICG-15 à Wuhan.

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Après une matinée (à Wuhan) de discussion sur la collecte et la disponibilité des données, Zhengli Shi a donné un exposé imprévu sur l'origine de COVID-19 du point de vue des virologistes. Elle a présenté des résultats non encore publiés sur des souris humanisées infectées par SARS-CoV-2, en soulignant un rôle important possible de l'infection du cerveau dans la sévérité de la maladie.
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L'après-midi (le matin en Europe) est consacrée aux questions éthiques, au partage des données et à la collaboration internationale. La réunion se tient à Wuhan dans une salle en grande partie vide, mais avec plus de 1 500 personnes présentes en ligne, et de nombreuses présentations à distance. Ce dispositif fonctionne remarquablement bien
arrow 26 Octobre 2020. La conférence ICG-15 a commencé aujourd'hui à Wuhan.
Pour ce premier jour nous avons eu des informations particulièrement intéressantes sur les premières étapes de la COVID-19 en Chine.
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Il est notable que les premières séquences du génome viral on été soumises à l'INSDC (GenBank) le 5 janvier 2020 et que cela a été suivi par de nombreuses autres données, ce qui justifie l'attribution du Prix Gigascience Prize pour la contibution au partage des données.
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Le nombre de virus nouvellement découverts explose littéralement, soulevant de multiples questions sur leur biologie, leur impact et leur évolution.
arrow 17 Octobre 2020. L'infection par le SRAS-CoV-2 commence à révéler certaines contraintes génétiques humaines.
Très tôt, on a pensé que les personnes appartenant au groupe sanguin O étaient moins susceptibles d'être infectées que celles appartenant au groupe A. Ce n'est pas le cas si l'on considère la gravité de l'infection par COVID-19. Il se peut qu'il y ait une certaine différence entre les groupes sanguins dans la possibilité de contagion, mais l'effet est mineur quant à l'évolution de la maladie. L'appartenance à divers types HLA devraient aussi mettre au jour des caractéristiques spécifiques de la maladie : après tout, le système HLA est utilisé pour la reconnaissance des agents pathogènes et la destruction des cellules infectées. Cependant, pour l'instant, aucune observation claire ne se dégage. Il faut cependant être ouverts aux contraintes génétiques correspondantes. Il a fallu beaucoup de temps pour découvrir que le virus de la grippe H1N1 était une cause majeure de narcolepsie chez les personnes porteuses du locus génétique HLA-DBQ1. Des séquelles neurologiques de l'infection par SARS-CoV-2 ont été signalées dans des études préliminaires comme étant liées à certains types HLA de classe I et de classe II (HLA-A33) et (DRB1*03:01 et DQB1*05:01), respectivement. D'autres études, elles aussi préliminaires mais en cours de développement, suggèrent qu'une région de notre chromosme 3, que nous avons héritée de nos ancêtres Neanderthaliens, contribue à la gravité de la maladie. Comme on l'observe souvent dans la susceptibilité aux maladies, les gènes correspondants sont impliqués dans des voies de régulation compliquées (contrôle de la synthèse ou détection des interférons, par exemple), mais l'un d'entre eux, le gène DPP9, correspond à une enzyme qui clive le dipeptide N-terminal des protéines se terminant par une proline ou un résidu alanine. On comprend que cela puisse jouer un rôle dans la maturation et la stabilité de certaines des protéines du virus. Par exemple, une protéase de maturation du virus commence par une séquence alanine-proline-thréonine-lysine qui pourrait être sensible au produit du gène DPP9, si elle est reconnue. La protéine virale Nsp6, qui aide le virus à assembler son enveloppe, a une extrémité N-terminale semblable. Cette caractéristique expliquerait l'innocuité relative du virus en Afrique subsaharienne, mais laisserait entièrement ouverte la cause de la sensibilité accrue des Afro-Américains aux États-Unis.

arrow 14 Octobre 2020. La vaccination contre la grippe saisonnière pourrait offrir une certaine protection contre la COVID-19.
La saison de la grippe commence. Elle sera probablement peu active car les gens se protégent contre toutes les maladies respiratoires lorsqu'ils adoptent un comportement protecteur contre la COVID-19. Pourtant, il reste probablement utile de se faire vacciner contre la grippe. En effet, plusieurs études tendent à montrer que la vaccination en général pourrait être protectrice. En Italie, une étude générale a suggéré que, même en tenant compte de nombreux facteurs qui pourraient expliquer la chose, la population qui tendait à se faire vacciner contre la grippe présentait des symptômes moins nombreux et plus légers de la maladie. Bien sûr il ne s'agit que de corrélations mais cela encourage à se faire vacciner cette année.

arrow 9 Octobre 2020. Comprendre comment la grippe se propage chez les phoques peut nous renseigner sur la façon dont les virus respiratoires circulent dans les populations humaines.
En 2014, dix pour cent de la population européenne de phoques a été tuée par une souche H10N7 du virus de la grippe. Cette épidémie a été causée par une mutation qui a permis au virus - provenant d'oiseaux comme tous les virus de la grippe - de se propager de mammifère en mammifère. Cette même mutation a permis au virus de contaminer les furets. Si le sous-type H10 n'est pas susceptible, à ce stade, d'entraîner une transmission d'homme à homme, il n'en va pas de même pour les sous-types H3 ou H1, qui dominent dans la grippe saisonnière. À cet égard, nous devrions surveiller les foyers H3N8 qui infectent les chiens et les chevaux. Les virus du sous-type H2 circulent chez les oiseaux et ils devraient être particulièrement préoccupants si nous nous souvenons de la létalité de l'épidémie H2N2 causé par un virus qui circulait il y a une soixantaine d'années.

arrow 4 Octobre 2020. Le polymorphisme humain joue un rôle clé dans la propagation et la sévérité de la COVID-19.
Pour le comprendre il faut prendre en compte deux aspects très différents de la susceptibilité à la maladie, et remarquer que l'Afrique échappe à la sévérité de l'épidémie, alors que les Noirs Américains y sont particulièrement atteints et sensibles. Il nous faut aussi séparer les virus avec  lesquels nous avons co-évolué, et les virus émergents. Revenons à l'histoire de l'homme.
Pour l'homme de Neanderthal, venu d'Afrique sans doute très tôt en Europe, le passage de l'Afrique, chaude, à l'Europe froide en hiver, il a fallu introduire un comportement spécifique pendant la saison froide. Les individus étaient tentés de se regrouper dans des lieux confinés où il était possible de se tenir au chaud. Cela a complètement changé le mécanisme de contagion des maladies respiratoires locales, comme on peut le comprendre. La sélection naturelle l'a conduit à voir sa descendance favoriser les individus qui possédaient toutes sortes de mécanismes de défense (en immunité innée et acquise) contre ses maladies. Lorsque Homo sapiens est lui aussi arrivé d'Afrique, il n'avait pas ces défenses et la mortalité en hiver a dû être considérable. Mais quelques uns se sont hybridés avec l'homme de Neanderthal. Leurs enfantss se sont trouvé mieux protégés, ce qui a maintenu dans le génome des Européens et des Asiatiques, une partie significative du génome de Neanderthal. Ces gènes se sont redistribués de façon inégale, et il existe aujourd'hui un polymorphisme important liés à cet ADN ancestral, conduisant très probablement à une assez grande variabilité individuelle dans les populations modernes vis à vis des maladies. Bien entendu cela vaut pour les maladies qui existaient en Europe et en Asie paléarctique, pas pour les maladies émergentes. En particulier, pour les maladies venant des régions tropicales, on doit attendre que ce soient les descendants directs d'Homo sapiens—les Africains par conséquent—qui soient les mieux protégés, ce qui pourrait en partie expliquer l'apparente innocuité relative de la COVID-19 en Afrique. Le fait qu'il fasse chaud implique aussi, bien sûr, une moindre contagion dans des endroits confinés. On devrait aussi penser que les Noirs Américains échappent à la maladie, mais il n'en est rien. Il est vrai qu'une partie de leur génome provient souvent d'ancêtres Européens, mais surtout, bien évidemment, il faut prendre en compte l'expression du programme génétique : la manifestation des capacités immunitaires dépend considérablement de l'environnement, et typiquement de l'alimentation et donc du microbiote (on a longtemps remarqué qu'une mauvaise alimentation favorisait la tuberculose, par exemple). Il s'ajoute à cela—nous l'avons remarqué dès le début de l'épidémie—une énorme variabilité génétique qui contrôle la reconnaissance individuelle des cellules, et en particulier permet, ou non, de détruire celles qui sont infectées par SARS-CoV-2. Enfin, ce virus est un virus nouveau—nous vivons une expérience biologique en vraie grandeur—et notre réponse à l'infection n'a pas été façonnée par des milliers d'années de co-évolution. C'est d'ailleurs ce qui va rendre la création d'un vaccin à la fois efficace et inoffensif très problématique. Il ne suffit pas d'avoir une réponse forte, encore faut-il que cette réponse protège, et surtout qu'elle ne sensibilise pas à une infection future.

arrow 1 Octobre 2020. Les données de la séquence SARS-CoV-2 produites en France ne sont pas disponibles pour la communauté internationale.
Suivre l'évolution de la COVID-19 dans le monde nécessite de suivre l'apparition de mutations dans le monde entier. La pratique habituelle - et imposée par principe - est que les données de séquence doivent être déposées à l'Intenational Nucleotide Sequence Data Collaboration (INSDC) qui a trois points d'entrée, un en Europe (European Nucleotide Archive) à l'EBI à Hinxton (UK) ; un au Japon (DDBJ) au National Institute of Genetics à Mishima, et un aux USA (GenBank) au NCBI à Bethesda. Malheureusement, pour des raisons qui devraient être rendues transparentes, la majorité de ces séquences ne sont pas déposées à l'INSDC mais à une structure privée, le GISAID, qui a été initialement créée pour collecter les séquences du virus de la grippe. Cette structure affirme être publique et ouverte, mais ses métadonnées, le choix des séquences (les séquences apparaissent et disparaissent de temps en temps) ne sont pas rendus transparents. En outre, la mise à disposition du public des séquences ne permet pas le téléchargement groupé, ce qui empêche en fait l'accès public aux données. Nous devons être conscients du fait que cette situation permet de manipuler les données de manière à induire les gouvernements en erreur sur le déroulement de la pandémie. Dans ce contexte, la situation en France est encore pire : malgré l'existence de centres de référence spécifiques sur les maladies virales, les institutions qui séquencent le génome des isolats de virus ne rendent pas leurs séquences publiques, que ce soit au niveau national ou international. C'est malheureusement en ligne avec la gouvernance catastrophique de la France aux plus hauts niveaux, qui fait que n'importe quel groupe de pression, quelles que soient ses valeurs ou la validité de ses intentions, qu'il soit ou non en contradiction avec les principes éthiques ou le droit, et y compris en cas d'incompétence totale, peut décider de ce qui, à ses yeux, représente le bien public. Une importante étude indienne publiée hier dans Science suggère que la majeure partie de la propagation de COVID-19 provient d'une minorité de "super-propagateurs" qui contaminent un grand nombre de personnes, alors que la plupart des personnes touchées ne contaminent personne. Cette même étude démontre aussi que les enfants et les jeunes adultes sont des propagateurs efficaces de la maladie. L'ensemble de ces observations plaide pour la publication de cartes détaillées de la présence du virus afin que les gens évitent d'aller là où la maladie a une forte prévalence.