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La vie se moque de nos théories, elle continue son œuvre, elle se propage selon ses lois, malgré tout, et elle est bonne quand même, parce qu'elle est l'action, l'effort, le mouvement.

Émile ZOLA



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Les Causeries du Jeudi
Séminaire Stanislas Noria

La Science est une activité sociale. Elle ne diffère pas des autres activités humaines, bien qu'elle ait une rationalité qui lui soit propre. L'objectif des Causeries du Jeudi (ou encore séminaire Stanislas Noria, à l'exemple de Nicolas Bourbaki) est de rassembler des intellectuels, chercheurs, artistes, juristes, poëtes, philosophes... qui sont préoccupés par les questions posées par la progression du savoir biologique (et en général par toute forme de connaissance humaine) pour discuter de sujets d'intérêt philosophique général et contribuer à la mise au jour de nouveaux thèmes pour la biologie.

Lors de ces séminaires, dans la tradition des séminaires de l'IBPC d'avant la seconde guerre mondiale, nous avons choisi de faire quelques prédictions basées sur une analyse rationnelle de la situation du monde en 1974. Nous avons abouti à quatre prédictions, dont trois étaient pleinement vérifiées 40 ans plus tard.

1. En raison de l'explosion démographique incontrôlée (la Chine n'avait pas encore mis en œuvre sa politique de l'enfant unique, bien au contraire), la consommation d'énergie basée sur le charbon et le pétrole entraînera un réchauffement de la planète, avec des changements climatiques considérables dans de nombreuses régions du monde.
2. En raison du rejet des coutumes ancestrales et de la surpopulation, une maladie contagieuse, probablement liée au sexe, deviendra une pandémie.
3. Parce que les accidents sont la règle et non l'exception, il y aura un accident nucléaire aux conséquences mondiales.
4. En raison de l'industrialisation des ressources génétiques conduisant à la sélection d'un très petit nombre de souches pour l'industrie agro-alimentaire, il y aura disparition d'une culture importante, avec des conséquences dévastatrices pour l'approvisionnement alimentaire.

1-3 ont été largement corroborés, avec : des changements climatiques considérables (1) ; le SIDA causé par le VIH (2) et aujourd'hui la pandémie de COVID-19, l'épidémie de variole du singe de 2022 montre que l'homme n'a toujours rien compris et est incapable d'anticiper ; et (3) plusieurs accidents nucléaires (Three Miles Island, Tchernobyl et Fukushima Daichi).
4 est toujours attendue. Cependant, nous avons des indications que cela va arriver : les ormes ont disparu en Europe ; de nombreux types de poissons ne sont plus disponibles sur de nombreux marchés ouverts (typiquement : anguilles, thon rouge, morue, etc), les huîtres plates (Ostrea edulis) sont maintenant très rares, certains types de fruits ne sont plus disponibles (poire Passe-Crassane, par exemple) et le plus inquiétant à l'heure actuelle est le futur de la banane, car c'est un aliment de base dans de nombreuses régions du monde.

Ainsi, l'analyse rationnelle mérite d'être mise en avant, plutôt que l'activité des fausses nouvelles propagées par les réseaux sociaux, fondés sur l'incompétence et l'anonymat. Cependant, il faut comprendre qu'aucune pratique n'est sans risque. Comme les accidents sont la règle et non l'exception, nous devons nous préparer aux accidents et à leurs conséquences. Lors du développement d'une nouvelle technologie, il faut, dès le départ, prendre en compte les accidents. Cela permet aux promoteurs de la technologie de savoir ce qu'ils feront lorsqu'un accident se produira.

Pseudonyme pour une activité collective : Au milieu des années 1980, au moment de la mise en place des programmes de séquençage des génomes entiers, les recherches en Intelligence Artificielle (IA, popularisée par le livre de Douglas Hofstadter, Gödel, Escher, Bach, paru en 1979) avaient le vent en poupe et nous avons choisi en 1989 le nom de Stanislas Noria, acronyme de Séquence Totale des Acides Nucléiques (STAN) Nouvelle Orientation de l'Intelligence Artificielle (NORIA), pour illustrer notre participation à cet effort, dans le domaine de la biologie. Il est amusant de voir que la mode de l'IA est renée plusieurs décennies plus tard, où ces techniques sont présentées comme le summum de la modernité.

Les discussions du séminaire se déroulent en plusieurs langues, car elles ne peuvent se limiter à l'anglais qui constitue désormais la lingua franca de la science (tout en en limitant extrêmement la richesse conceptuelle). Commencées en français au début des années quatre-vingt-dix, elles utilisent désormais surtout l'anglais (avec parfois des apartés cantonnais, lorsqu'elles se tiennent à Hong Kong), mais certaines discussions ont toujours lieu en français.

À la différerence des cultures Anglo-Américaines (cf Les Deux Cultures de CP Snow), les civilisations Latines (en particulier en Italie et au Portugal, mais en France aussi) ne font pas une séparation claire entre la Science, les Arts et la Littérature. Il est donc naturel que toute réflexion sur les origines historiques et conceptuelles de la Science (profondément enracinée dans le langage, et par conséquent dans la sémantique) soit développée non seulement en anglais mais aussi dans d'autres langues. Qu'on se souvienne simplement que Gao Xingjian 高行健, n'écrit pas seulement en chinois, mais aussi en français et que son activité principale est la peinture... Si l'empirisme radical est bien adapté à la nature de l'anglais (les faits d'abord, la démonstration ensuite), le cœur de la Science (une espèce particulière de l'organisation rationnelle de la pensée, fondée sur la combinaison d'hypothèses et de déductions) est hypothético-déductif ("hypothesis-driven"), ce qui fait que des langages comme le Français, le Grec ou l'Italien (et à sa manière l'allemand) auraient naturellement été plus appropriés à en assurer le développement. On en voit une survivance dans le fait qu'en mathématiques il est encore possible (mais de plus en plus rare) de publier en Français. La domination économique de l'Amérique (ce raccourci, qui omet l'Amérique latine en dit long déjà !) en a décidé autrement. Le cas du Chinois est ici très particulier, et aurait à être entièrement reconstruit, car son caractère est original (le rôle du contexte y est essentiel). C'est l'un des points centraux des discussions menées dans ces Causeries.

Nos causeries sont la poursuite des discussions du Centre Royaumont pour une Science de l'Homme, créé au début des années 1970, principalement par Jacques Monod. Ce Centre devait malheureusement disparaître peu après la mort précoce de ce dernier. Cela coincidait avec la destruction, dans la plupart des pays occidentaux où il existait encore (France comprise, hélas !), d'un système d'éducation fondé sur les Humanités (et comme l'a remarqué l'un d'entre nous, poëte, la rhétorique). Pour cette raison il devenait incongru, pour ne pas dire littéralement obscène, de parler de philosophie (ou de poésie) au sein d'un laboratoire de science "dure" ("hard-science"). Et pourtant au début des années quatre-vingt-dix, on pouvait constater un regain d'intérêt chez les jeunes chercheurs pour une réflexion sur les causes qui sous-tendent leurs propres efforts et leur insertion dans la Société. C'est ce qui présida à l'organisation de réunions hebdomadaires au sein de l'Unité de Régulation de l'Expression Génétique à l'Institut Pasteur, où les personnes interessées par la nature de la Science avaient pris l'habitude de se réunir le jeudi en fin d'après midi pour discuter de toutes sortes de sujets liés à la place de la Science dans la Société.

À cette époque aussi se déroulait au sein de l'Unité un programme de collaboration entre plusieurs Universités chinoises (en particulier l'Université de Pékin, l'Université de Nankin et l'Université Sun Yat Sen de Canton), en association avec l'Université de Bologne en Italie. Ce programme, centré sur l'Afrique de l'Ouest, mettait en œuvre une approche inhabituelle, un peu fantaisiste qui dérivait d'un colloque organisé par Anne Retel-Laurentin en novembre 1983, de l'exploration de l'Ouest par des non-Occidentaux, et donnait lieu ainsi à une "anthropologie" (non conceptualisée à ce stade, le mot était employé afin de donner un air sérieux à l'entreprise), plus poétique que scientifique, mais très révélatrice du rôle de la civilisation dans la rationalisation du Réel. Plusieurs sociologues chinois étaient d'abord venus travailler plusieurs mois au sein de l'Unité pour en étudier le fonctionnement, à partir d'un point de vue non occidental. Durant deux années, la discussion du séminaire resta centrée sur une présentation de la Philosophie Présocratique, à partir de l'observation que la citation de Démocrite qui fait le titre du célèbre livre de Jacques Monod, Le Hasard et la Nécessité, était apocryphe, et bien étrangère à l'esprit Grec.

Plus récemment le thème central des Causeries a été le concept de fonction. La discussion, avait été préparée par M. Yves Brette, ancien directeur d'un service d'innovation à la Compagnie Bull, qui discuta de la nature des fonctions dans les artefacts humains. La discussion explora ensuite toutes sortes de sujets, depuis la philosophie aristotélicienne, Cassirer, Leibniz, jusqu'à des questions très concrètes relevant de la génomique fonctionnelle et de l'annotation des génomes. Au moment de la création du HKU-Pasteur Centre Ltd , la discussion fut transférée au Département de Mathématiques de l'Université de Hong Kong, où elle commença par une discussion sur la nature de la Science et de la connaissance en général en Europe et dans les pays asiatiques. Jean Fourmentin, l'un des apôtres de ce qui devait devenir la génomique, puis la biologie synthétique, jouait aussi le rôle de stimulant. Depuis ce séminaire se poursuit à distance, avec un exposé sur place (Run Run Shaw building) au moins une fois par an (cela n'a pas pu avoir lieu en 2020 et 2021 en raison de l'épidémie de COVID-19).

À la suite de chaque discussion un compte-rendu la résumant est écrit, et envoyé par courriel non seulement à ceux qui y ont directement participé, mais aussi aux anciens membres de ce séminaire qui en font la demande, ainsi qu'à toute personne intéressée qui s'est inscrite, dans le monde entier.

Pourquoi s'inscrire?

L'objectif des "causeries" est de proposer un séminaire ouvert. Il ne s'agit pas cependant d'un groupe de bavardage (chat group) ni de l'un de ces forum** auquel n'importe qui peut assister. En fait, on attend de chacun un minimum de participation à la discussion - à la manière des disputatii médiévales - et l'on fait l'hypothèse qu'il y aura progression dans la définition de notions "prospectives" (pour reprendre le mot de John Myhill), à la suite de notre travail commun. Pour cette raison, nous devons nous assurer que les personnes connectées sont réellement intéressées, et qu'elles ont le désir d'apporter une approche constructive à la discussion. Nous demandons donc à chacun de s'inscrire et de s'identifier, et nous discutons de l'opportunité de cette inscription à chaque cas. On admet aussi que les compte rendus, commentaires, etc. ne seront pas tous en anglais : les discussions multilingues sont encouragées...

De 2001 à 2003 ces causeries ont été animées par le HKU-Pasteur Centre à Hong Kong, au sein du Département de Mathématiques de l'Université. Elles avaient lieu le mercredi après midi (14 h 30, Meng Wah Complex, room 517). Elles ont repris en octobre 2003 jusqu'aux premiers mois de l'année 2004 au sein de l'Unité de Génétique des Génomes Bactériens à Paris, sur une base irrégulière, en particulier à la suite de deux intervention de notre collègue le professeur Wang Bin 王宾 de l'Université Sun Yat Sen (Zhong Shan Da Xue 中山大學) de Canton (Guangzhou). Elles ont temporairement cessé, puis ont repris à partir de 2006. À Hong Kong, ce séminaire a été poursuivi, organisé par le Pr Ngaiming Mok, et se concentre sur certains aspects de l'analyse des génomes. Plusieurs efforts parallèles se sont développés cependant : la conférence Le Logique et le Biologique du 22 avril 2005 en a été une illustration (résumé de notre présentation). Un thème central des discussions, à partir de 2008 est la Biologie Symplectique (Synthétique). De ces travaux est issu la tentative de créer un nouveau journal en accès libre, Symplectic Biology. Cela a été un échec en raison du fait que Google a cessé de produire ses 'atomes' de connaissance ('knol'), d'autant plus que, devant le caractère très lucratif de la publication en accès libre (mais payant pour les auteurs, ce qui revient à faire sa propre publicité !), un nombre gigantesque de nouveaux journaux "prédateurs" a vu le jour, et continue à se multiplier. Le séminaire est hebdomadaire depuis plus de dix ans.

Veuillez noter qu'un résumé public (copyright) des causeries est régulièrement mis à jour, souvent, désormais, sous la forme de publications dans des journaux à comité de lecture international. Ce résumé commence avec le texte des commentaires sur les Philosophes Présocratiques qui ont été discutés à Paris au début des années quatre-vingt-dix (en Français), ainsi qu'un résumé de la discussion sur la méthode scientifique (en Anglais et nous l'espérons en Chinois dès que ce sera possible).


Notes

** En Français on ne met normalement pas de signe de pluriel aux mots provenant d'autres langues. On peut utiliser parfois le pluriel provenant de la langue d'origine : pour 'forum' le pluriel devrait être 'fora', mais l'usage répugne à utiliser les terminaisons plurielles de ce type. C'est ce qui explique le double pluriel du mot 'médias', oxymore lié à la perte du savoir de base qui était naguère transmis au lycée. On devrait écrire 'media', qui est bien sûr le pluriel de 'medium', et il aurait été normal d'écrire 'les medium'. De même 'tabou' doit être invariable, et à nouveau, l'usage d'un féminin comme 'taboue' ne fait que souligner que le baccalauréat n'est plus qu'une date dans la vie d'un individu, et n'apprend plus rien sur ce qu'il peut savoir.


Publications signées par Stanislas Noria (en Anglais)

A Danchin, PM Binder, S Noria
Antifragility and tinkering in biology (and in business): Flexibility provides an efficient epigenetic way to manage risk
Genes (2011), 2: 998-1016; doi:10.3390/genes2040998 microme

HKU_Pasteur
S Noria, A Danchin
Just so genome stories: what does my neighbor tell me
Proceedings of the Uehara Memorial Foundation Symposium: Genome Science: towards a new paradigm? H Yoshikawa, N Ogasawara, N Satoh, eds. Elsevier Science BV (2002) International congress series 1246: 3-13 pdf

A Danchin, G Fang, S Noria
The extant core bacterial proteome is an archive of the origin of life
Proteomics (2007) 7: 875-889 doi: 10.1002/pmic.200600442   biosapiens  epg

S Noria
Challenge n°1: Is the synteny around the pyrH gene in bacterial genomes significant?
Symplectic Biology (2010) 1: c390t9c12uxx.1

A Danchin, A Sekowska, S Noria
Chapter 5.
Functional requirements in the program and the cell chassis for next-generation synthetic biology pp. 81-108
In: Synthetic Biology: Parts, Devices and Applications (2018) Christina Smolke (Editor)
Sang Yup Lee (Series Editor), Jens Nielsen (Series Editor), Gregory Stephanopoulos (Series Editor), Wiley
doi:10.1002/9783527688104.ch5      ISBN: 978-3-527-68808-1