Mon avis personnel sur les disques de Vanden Plas
- Vanden Plas - Color Temple (1994) ★ ★ ★ ½
Je débute aujourd'hui la discographie d'un groupe probablement connu
surtout des fervents de metal prog, mais qui jouit quand même d'une
belle cote chez les fans du genre. Surprise pour démarrer ce premier
essai, on entend... des extraits du Sacre de Stravinski ! Une bonne
façon d'attirer les fans de classique ? Ce n'est probablement pas le but
visé, mais ça a le mérite de l'originalité, même si ça reste assez
anecdotique. Ensuite, on a droit à un cocktail assez classique pour le
genre de guitares heavy, de claviers tantôt atmosphériques, tantôt
contribuant vraiment à l'assise mélodique des morceaux, de morceaux
assez développés (jusqu'à neuf minutes pour le très intéressant Soul
survives) mais toujours lisibles, l'ensemble restant franchement
accessible (on pense assez souvent au Queensrÿche d'Operation
mindcrime, une excellente référence). Surtout, pour un premier
album, le groupe fait preuve d'une sacrée maturité (peut-être due au
fait qu'ils ont mis plusieurs années avant de pouvoir enregistrer ce
disque), l'équilibre est vraiment bon (jamais de clavier trop kitsch ou
de refrain de mauvais goût) et on ne s'ennuie pas une seconde. Manquent
peut-être un ou deux titres réellement marquants pour accéder à la
catégorie des grands albums, mais pour un début, c'est plus que
prometteur !
- Vanden Plas - The God Thing (1988) ★ ★ ★
Avec ce deuxième album, Vanden Plas semble avoir vraiment trouvé sa
voie. Le premier était pourtant déjà très abouti dans son genre, mais là
on oublie les relents de heavy un peu "facile" pour vraiment se
concentrer sur un metal prog aux claviers très présents (tantôt piano,
tantôt synthés), avec des titres moins directs et plus construits (seul
In you : I believe est assez ramassé) qui durent presque tous six
à sept minutes (la durée moyenne était déjà de cet ordre sur Color
temple mais avec moins d'enchaînements de sections contrastées au
sein d'un même morceau), et des ambiances clairement très travaillées.
D'ailleurs, je n'ai pas grand chose à reprocher à ce disque, c'est
souvent beau (l'intro instrumentale Fire blossom), parfois
puissant (Rainmaker) et ça ne se perd jamais dans des
développements techniques sans intérêt dont sont friands certains
groupes du genre que je ne dénoncerai pas. Et pourtant, globalement, je
passe un bon moment, mais il manque quelque chose pour que je sois
emballé, il n'y a aucun titre qui m'accroche définitivement et que
j'aurais envie de réécouter en boucle. En fait, je crains de ne devoir
classer l'album dans la catégorie des disques indiscutablement réussis,
mais dans un style pas totalement fait pour moi. À confirmer en écoutant
la suite de la discographie du groupe, mais je préfère finalement leur
premier opus à celui-ci.
- Vanden Plas - Far off grace (1999) ★ ★ ★ ½
On m'avait prévenu, il ne fallait pas que je m'attende à de gros
bouleversements une fois que Vanden Plas avait trouvé sa voie dans
The God thing. Pourtant, ce troisième album débute avec un titre
(I can see) nettement plus direct que ceux du disque précédent,
cherchant clairement une séduction très immédiate avec ses mélodies
accrocheuses sur fond de riffing bien gras. J'aime beaucoup, mais ce
n'est en fait pas représentatif de ce que le groupe a envie de nous
proposer, les titres musclés étant les exceptions (Into the sun)
au milieu d'autres où les synthés (et même le piano) sont souvent sur le
devant de la scène. C'est encore une fois très bien fait, parfois même
vraiment convaincant (Inside of your head et son refrain
entêtant), même si les titres plus lents penchent dangereusement vers
une guimauve bien collante (I don't miss you, malgré la belle
mélodie introductive), et les passages accompagnés au piano sont pour
moi de trop (à la fin de I'm in you notamment). J'ai quand même
globalement trouvé plus de saveur à ce disque-là qu'au précédent, sans
que ça n'atteigne encore pour moi l'excellence.
- Vanden Plas - Beyond daylight (2001) ★ ★ ★ ½
Ce quatrième album du groupe représente la fin d'une première période
très productive pour Vanden Plas (quatre albums en 7 ans, ensuite ça va
s'espacer nettement plus). Pas de profond changement de style par
contre, on reste dans un metal prog où les claviers se taillent souvent
la part du lion mais avec aussi une recherche d'accessibilité, le groupe
ne rechignant pas à laisser de la place à un versant mélodique affirmé,
et à des guitares souvent très heavy. Le titre d'ouverture
Nightwalker est d'ailleurs très représentatif de ce mélange, et
c'est une fort belle réussite ! Les meilleures chansons sont de toute
façons regroupées en début de disque, puisqu'on enchaîne avec un Cold
wind lui aussi très bon, et avec un Scarlet flower fields
sauvé par un refrain mélancolique magique (pour le reste, c'est une
bluette dispensable). La suite est moins convaincante (si le disque
était resté au niveau de ses premiers titres, il aurait sûrement eu
droit à une étoile de plus), End of all days s'étire sans
vraiment trouver son rythme, Can you hear me est franchement
mauvaise, mais on retrouve un peu d'énergie en fin d'album pour conclure
dignement ce qui est une nouvelle fois un bon disque. Peut-être même mon
préféré du groupe jusqu'ici malgré une certaine irrégularité.
- Vanden Plas - Christ-O (2006) ★ ★ ★ ★
Pour ceux qui se demanderaient à quoi peuvent faire allusion le titre et
la pochette étranges de ce cinquième album de Vanden Plas, sachez qu'il
s'agit d'un concept album basé sur l'oeuvre d'Alexandre Dumas (le comte
de Monte-Cristo donc). Je dois dire que j'ai un peu de mal à faire
cohabiter mes souvenirs du bouquin avec le metal prog proposé par le
groupe, et que le fait d'avoir été lire les paroles ne m'a pas vraiment
éclairé non plus (il y a bel et bien des références culturelles
improbables, y compris une tentative de jeu de mots foireux sur
Depardieu par exemple...). Oublions donc tout ça pour nous concentrer
sur la musique, qui elle ressemble comme deux gouttes d'eau à ce que
propose Vanden Plas à chaque fois, avec tout de même l'ajout de quelques
choeurs et des claviers "orchestraux" encore plus présents qui donnent
une dimension plus épique à ce disque. Pour le reste, c'est toujours
très touffu sans jamais sacrifier la mélodie, remarquablement maîtrisé
même si on n'évite pas quelques longueurs (sur les trois titres
dépassant les huit minutes, même s'il y a plein de bons moments dedans),
probablement moins convaincant tout de même sur les titres plus calmes
(finir sur Lost in silence, si on exclut la reprise qui conclut
réellement l'album, est à mon avis dommage car c'est un titre vraiment
plat). Le meilleur en fait, ce sont les titres "courts" qui mélangent
idéalement les claviers et l'assise très heavy, comme la chason titre ou
Somewhere alone in the dark. Mais tout l'album est de fort bonne
tenue, même s'il ne faut probablement pas en attendre une révélation si
on n'est pas déjà amateur du genre. Pas de réelle surprise, pas de titre
qui vous scotche à votre siège, simplement du bon boulot très bien fait.
C'est déjà pas mal !
- Vanden Plas - The Seraphic Clockwork (2011) ★ ★ ★ ½
Pour son sixième album, Vanden Plas a changé de label, et peut-être
voulu marquer le coup en infléchissant un peu leur musique vers quelque
chose de plus heavy, et qui lorgne plus clairement vers le symphonique.
L'intro assez dissonante et vraiment musclée de Frequency pourrait même
sembler contre nature pour le groupe (ça m'a même fait penser au Virus
de Haken, excellente référence ceci dit, mais nettement postérieure), et
puis on s'y fait et surtout on se rend compte que le titre est sacrément
efficace. On gardera cette tendance heavy sur les deux titres suivants
(la fin de Scar of an angel impressionne), puis la naturel revient au
galop : titres qui s'allongent de plus en plus (près d'une heure dix
pour seulement huit chansons, ça fait une moyenne plus que respectable
!), probablement même un peu trop, breaks dans tous les sens, retour des
claviers sur le devant de la scène, on retrouve finalement l'univers
bien calibré de Vanden Plas (et la maîtrise qui va avec, bien entendu).
Je le regrette quand même, car cette deuxième moitié d'album me semble
moins intéressante, le groupe ayant déjà sorti auparavant plusieurs
albums dans ce genre, avec une conviction plus claire (sur
Christ-O notamment). L'ensemble reste tout de même de très bonne
facture, et poursuit une belle série d'albums très solide de la part du
groupe.
- Vanden Plas : Chronicles of the Immortals : Netherworld (2014/2015) ★ ★ ★
Si Vanden Plas a désormais pris l'habitude de laisser passer plusieurs
années entre deux disques, quand ils se décident à sortir quelque chose,
on ne peut pas dire qu'ils se foutent du monde : ici un énorme
concept-album inspiré d'une oeuvre d'un auteur de SF allemand, près de
deux heures de musique réparties en une vingtaine de chansons et deux CD
complets. On est en fait pas loin dans l'idée d'un "opéra metal prog",
mais qui serait chanté quasiment exclusivement par le vocaliste du
groupe (il y a bien une voix féminine sur certaines pistes, mais ça
reste assez anecdotique). C'est peut-être d'ailleurs la principale
limite du projet, la musique de Vanden Plas a déjà un côté assez
monotone et relativement peu accessible (ce ne sont pourtant pas les
mélodies qui manquent, mais il faut toujours plusieurs écoutes pour
vraiment rentrer dedans avec eux), mais là, avec une durée doublée,
c'est encore pire (pour le coup, c'était probablement un choix judicieux
de la part du groupe que de sortir les deux albums de façon vraiment
séparée, à un an d'intervalle l'un de l'autre). On ne peut pas
s'empêcher ici de déplorer quelques longueurs et autres moments faibles,
même si l'ensemble reste, comme toujours avec les allemands,
remarquablement construit. En fait, on retient forcément les morceaux de
bravoure (les 13 minutes de Blood of Eden évidemment, mais
plusieurs titres du premier disque, notamment The Black Knight ou
New vampyre, tirent aussi leur épingle du jeu), sans d'ailleurs
qu'il n'y vraiment un titre qui arrache tout sur son passage (ce n'est
pas vraiment le style de la maison), et on oublie un peu trop facilement
le reste. Peut-être aurait-il fallu un peu plus de variété, de sorties
de route par rapport au style quand même très calibré du groupe, pour
maintenir l'intérêt constamment. Le Ghosts requiem du premier
disque, ou le Diabolica comedia du second (presque joyeux pour du
Vanden Plas), jouent un peu ce rôle de respirations, mais ce sont
vraiment les exceptions. L'expérience reste évidemment intéressante (et
la musique loin d'être mauvais, n'exagérons rien), mais à mon sens moins
convaincante que les albums "classiques" du groupe.
- Vanden Plas - The Gost Xperiment (2019/2020) ★ ★ ★
C'est apparemment devenu le mode de fonctionnement normal de Vanden Plas
: deux CD publiés à un an d'intervalle pour raconter une même histoire
fleuve, sorte d'opéra metal prog qui, au niveau du sujet et des
intentions, n'est pas loin de marcher sur les plates-bandes
d'Ayreon. Sauf qu'une fois de plus, on a un seul chanteur pour
nous accompagner (même la voix féminine du précédent projet a disparu,
dommage). Faut-il craindre qu'à nouveau la monotonie ne vienne affadir
quelque peu l'effet de la musique toujours très travaillée du groupe ?
Oui et non. Non, car le premier disque a le bon goût de se resserrer sur
six titres (mais quand même 45 minutes de musique) où le groupe tente
une approche assez directe (Cold december night pourrait presque
faire office de tube, les cinq minutes de The Phantoms of
prends-toi-garde (oui, le titre montre que le groupe continue à
flatter sa fanbase française tout en maîtrisant moyennement la langue)
passent toutes seules), et fait preuve d'une conviction qui fait mouche.
D'ailleurs, c'est bien simple, cette première moitié est probablement
mon disque préféré du groupe, qui ne révolutionne évidemment pas son
style mais laisse une belle place à des claviers vintages sympathiques,
aucun titre à part peut-être la chanson titre conclusive ne me déçoit.
Mais oui quand même, car une fois de plus la durée pose problème. Le
deuxième disque s'étale sur une heure, et même s'il y a encore pléthore
de bon momens, les coutures finissent par devenir apparentes, notamment
les refrains braillés en choeur qui se ressemblent un peu tous et qui
finissent par lasser. Pris tous seul, ce second CD serait probablement
très correct, mais à la suite du premier, c'est tout simplement trop
(après, bien sûr, rien n'oblige à les écouter à la suite). L'ensemble
reste tout de même plus que correct (probablement même un peu meilleur
que le double disque précédent, grâce à cet excellent démarrage), mais
une fois de plus Vanden Plas fait du Vanden Plas, qui ravira les fans de
longue date, et ne fera pas frémir les autres.
- Vanden Plas - The Empyrean equation of the long lost things (2024) ★ ★ ★ ★
Critique d'un album tout frais pour moi ce soir, puisque le dernier
Vanden Plas est sorti il y a à peine quelques semaines. Et alors, à part
une tentative de record du monde du titre d'album le plus abscons, quoi
de neuf ? Eh bien déjà, pour la première fois en plus de trente ans de
carrière, un changement de lineup, avec un nouveau claviériste. Je vous
rassure tout de suite, ça ne change absolument pas le style immuable du
groupe, mais on notera quand même des sonorités un peu plus modernes à
ce niveau-là (pas mal de piano notamment), ce qui ne fait pas de mal. On
oublie aussi les doubles albums monumentaux de la décennie précédente,
cette fois on a "seulement" droit à six titres pour une heure de musique
(sacrée moyenne), dont une March of the saints finale de plus
d'un quart d'heure. L'inspiration est-elle suffisamment au rendez-vous
pour faire passer ce copieux menu ? Majoritairement, oui ! On a un peu
l'impression par moment d'entendre une sorte de best-of de ce que
propose le groupe depuis plusieurs décennies, notamment dans ce fameux
titre final à rallonge, mais les pistes les plus réussies sont vraiment
excellentes (la chanson-titre majoritairement instrumentale qui ouvre
l'album de flamboyante manière, mais aussi la première partie de la
ballade They call me god, qui prouve que le groupe peut faire des
merveilles dans un style très épuré mais émotionnellement fort), alors
que celles qui sentent un peu trop le réchauffé et les procédés trop
entendus (le refrain fatiguant de My icarian flight) restent
largement écoutables. De toute façon, Vanden Plas ne tombe jamais dans
le franchement raté, comme en témoigne l'impressionnante régularité de
leur discographie. Ce dernier album en date ne fait pas exception à la
règle, et il s'agit même selon moi de l'un des sommets de leur carrière.