Critiques d'albums metal
Mon avis sur quelques albums metal
Comme l'auront bien compris ceux qui ont déjà parcouru un
peu en détail ma page web, je suis avant tout un auditeur de musique dite
classique. Mais ça ne m'empêche pas de m'aventurer occasionnellement dans
d'autres genres, et en particulier tout ce regroupe (de façon presque aussi
artificielle que pour le classique) sous l'étiquette "metal". J'entends
déjà les récriminations outrées du style : "Quoi, mais le metal, c'est ce qui
est le plus ridiculement éloigné du classique, ça n'a aucun sens !". Soyons
bien clairs : c'est complètement faux. Je sais bien qu'on trouve plus
d'amateurs de jazz (genre qui, pour le coup, me répugne assez
systématiquement) parmi les classiqueux, mais il y a un paquet d'influences
classiques dans le metal (mélodiquement et structurellement, et pas seulement
dans les groupes de metal symphoniques qui jouent accompagnés d'un bon gros
orchestre). Bon, certes, moins dans le black le plus extrême, mais ça tombe
plutôt bien, ce n'est pas le type de metal que j'écoute le plus !
Vous trouverez ici, tout simplement, une rapide critique accompagnée
d'une note pour les quelques dizaines (centaines ?) d'albums que j'ai eu
l'occasion d'écouter depuis que je me suis remis à écouter un peu
intensivement du metal il y a quelques années, classées brillamment par
groupes. Les notes sont matérialisées par des petites ★ (5 au maximum,
les ½ sont possibles pour affiner) ou un ☆ pour un 0/5 (mais si,
ça arrive). Les disques que j'estime ne pas pouvoir être jugés à l'aide de
critères habituels (ça arrive aussi !) seront notés "gozu" (allez lire ma
page cinéma pour comprendre la référence). Toutes ces critiques ont d'abord
été écrites et postées sur le forum https://classik.forumactif.com/ (et
donc légèrement réadaptées pour certaines pour les rendre indépendantes
du contexte).
Pour accéder directement aux critiques de votre groupe préféré, cliquez tout
simplement sur son nom dans la liste alphabétique ci-dessous :
- After Forever
- Amon Amarth
- Angra
- Animals as leaders
- Anthrax
- Apocalyptica
- Arch Enemy
- Avantasia
- Avenged Sevenfold
- Ayreon
- Bathory
- Black Sabbath
- Blind Guardian
- Blut aus Nord
- Celtic Frost
- Children of Bodom
- Coroner
- Cradle of Filth
- Darkspace
- Darkthrone
- Death
- Devin Townsend
- Dimmu Borgir
- Dream Theater
- Edguy - Kingdom of madness (1997) ★ ★
L'Allemagne, comme chacun le sait, est le pays d'Helloween,
groupe fondateur du speed metal, il n'est donc pas surprenant d'y
trouver quelques héritiers dans ce style que j'affectionne
personnellement. Le plus productif d'entre eux est probablement Tobias
Sammet, qui a produit depuis maintenant plus de 25 ans une ribambelle
d'albums sous la double casquette de son groupe Edguy (quel drôle de
nom...) et de son projet d'opéra metal Avantasia, que je vais a
priori traiter en parallèle (cf critiques plus haut dans cette liste).
Ici, il s'agit donc plus ou moins du premier album d'Edguy (il y en a en
fait eu un autre avant qui n'a pas pu être publié et sera repris par le
groupe quelques années plus tard), et on est totalement dans le style
attendu, avec des guitares qui galopent, de la mélodie en pagaille, du
chant clair et quelques choeurs niais pour accompagner. Le tout est joué
avec un enthousiasme appréciable, mais souffre très clairement de
limitations techniques compréhensibles pour un groupe débutant : le son
est médiocre (la batterie assez terrible, et les quelques touches
orchestrales aux claviers sonnent affreusement cheap), le chant de
Sammet pas franchement assuré, et ça manque globalement de souffle,
quand on ne tombe pas carrément dans la mièvrerie (la ballade When a
hero cries est assez effrayante). En fait, le groupe n'a tout
simplement pas (encore ?) les moyens de son ambition, comme en témoigne
The Kingdom, piste finale de 18 minutes qui n'atteint jamais la
dimension épique souhaitée. Quelques titres bien sympathiques malgré
tout, mais à réserver aux fans du genre (et même sûrement aux fans du
groupe).
- Edguy - Vain glory opera (1998) ★ ★ ★
Après un premier essai qui pêchait probablement par une ambition trop
élevée, Edguy revient avec un album nettement plus raisonnable (pas de
titre à rallonge ici), mieux produit (même si le manque de moyens est
encore flagrant dans l'emploi de claviers atroces qui rendent notamment
l'introduction de la chanson-titre risible alors que ce n'était sûrement
pas l'effet escompté), et tout bonnement mieux maîtrisé. Des choeurs
épiques, des titres souvent très speed portés par des refrains
fédérateurs (sur Out of control entre autres) et des mélodies
efficaces, que peut demander de plus l'amateur du genre que je suis ? Je
ne peux même pas me plaindre du manque flagrant d'originalité de la
chose puisque l'album est sorti au moment où le speed mélodique
refaisait surface et n'était pas encore usé jusqu'à la corde (le
Symphony of Enchanted Lands qui a propulsé Rhapsody sur
les devants de la scène, et qui est certes quelques crans au-dessus de
cet album, date de la même année). Ah si quand même, un gros bémol sur
les ballades qui n'arrivent absolument pas à faire décoller leurs
mégatonnes de guimauve (Tomorrow est d'une niaiserie
terrifiante). Sans être le haut du panier, on a là un bon petit album.
- Edguy - Theater of salvation (1999) ★ ★ ★
Ce troisième (ou quatrième, cf le suivant) album d'Edguy est censé être
celui de la maturité, un classique du speed metal qui a en tout cas
ouvert grand les portes de la célébrité au groupe en-dehors de
l'Allemagne. Autant le dire tout de suite, avec une telle réputation,
j'ai été assez déçu. Non pas que ce soit mauvais, on tient là un bon
album, farci d'hymnes speed très efficaces à défaut d'être originaux
(l'enchaînement de Babylon et The Headless game en début
d'album, The Unbeliever vers la fin). Mais il a encore trop de
défauts pour être considéré comme un classique indéboulonnable : chant
parfois pénible (Tobias Sammet abuse du vibrato chevrotant, et les
choeurs vont souvent chercher des aigus disgracieux), ballade
terrifiantes de nunucherie (et qui sonnent affreusement vieillotes par
rapport à la date de sortie du disque, Land of the miracle on se
croirait dans un mauvais trip années 70 avec ces guirlandes de piano
vintage), et tout simplement une incapacité à vraiment créer un souffle
épique qui emporte l'auditeur (non, les choeurs médiévaux et les
"Alleluia" risibles dans la chanson-titre de près d'un quart d'heure qui
conclut l'album ne produisent pas l'effet escompté). Après, même si
c'est parfois un peu au second degré, on passe quand même un bon moment
à écouter ce disque quand on est fans du genre.
- Edguy - The savage poetry (2000) ★ ★ ★
Après trois albums qui les ont propulsé au sommet du speed mélodique,
les allemands d'Edguy décident de sortir un quatrième album... qui est
en fait leur premier, qu'ils n'avaient pas pu diffuser à l'époque de son
enregistrement et qu'ils ont entièrement repris. Oui, il s'agit ici
d'une recréation, avec tous les moyens dont dispose désormais le groupe
et des arrangements complètement revus (bon, je n'ai pas écouté la démo
d'origine pour comparer). Et ils ont eu là une très bonne idée, car il y
a du bon dans la musique de ce disque. On commence même avec un
Hallowed qui est une vraie tuerie, puissant et prenant, le genre
de titre hyper accrocheur qui manquait à leurs albums précédents (et du
coup, à mon avis, la meilleure chanson de leur début de carrière). Tout
le reste n'est pas parfait, avec quelques fautes de goût (les ballades,
comme d'hab, sont inintéressantes au possible, et l'utilisation du
suraigu qui sent un peu trop l'influence Helloween peut faire mal aux
oreilles, notamment au démarrage de Misguiding your life, qui
comporte par ailleurs une citation risible de Vivaldi dans son solo),
mais avec beaucoup de titres sympathiques (le Power and majesty
final, entre autres). Rien de révolutionnaire là-dedans (mais c'est la
première tentative de gamins de moins de 20 ans), mais franchement
prometteur, et à vrai dire plus réussi que leurs classiques suivants !
- Edguy - Mandrake (2001) ★ ★ ★ ★ ½
Après la parenthèse Avantasia, Tobias Sammet retourne à Edguy et
lui fait prendre un tournant qui sera confirmé sur les albums suivants.
Nettement moins speed (même si Golden dawn ou Fallen
angels perpétuent cette tradition), une seule ballade (ouf !), et
une majorité de titres mid tempo qui sonnent résolument heavy, avec une
attention particulière portée à la mélodie. Eh ben, voilà une nouvelle
orientation qui me convainc énormément, d'autant plus que le disque est
enfin porté par quelques titres vraiment géniaux qui ressortent du lot,
ce qui manquait aux précédents efforts d'Edguy : Tears of a
mandrake est une ouverture exceptionnelle au refrain inoubliable, et
The Pharaoh, sur un thème pourtant rebattu, un morceau de
bravoure qui tient toutes ses promesses (quelle superbe utilisation des
choeurs encore une fois). On a même droit à un Nailed to the
wheel qui, après une intro acoustique trompeuse, se déchaîne avec
une agressivité inattendue pour le groupe (quel refrain monstrueux !).
S'il n'y avait pas quelques titres nettement plus faibles (le Save
us final se veut probablement comique, il est juste raté), on
tiendrait là un monument. Tel quel, c'est déjà le sommet évident de la
carrière d'Edguy.
- Edguy - Hellfire club (2004) ★ ½
Le changement de cap amorcé avec Mandrake est encore plus clair
ici : gros son, tempo ralenti (à quelques exceptions près), et une
influence Iron Maiden de plus en plus envahissante (The
Navigator, entre autres...), Edguy cherche clairement à se faire de
nouveaux auditeurs. Hélas, si la transition était plus que convaincante
sur l'album précédent, l'inspiration se tarit rapidement, et Sammet
force autant qu'il le peut pour combler les vides de façon lourdingue,
ce qui rend l'album rapidement pénible. Malgré une intro risible,
Mysteria démarre pourtant très bien l'album, c'est un titre
direct et très efficace. Mais on enchaîne immédiatement avec les 10
minutes de The Piper never dies, morceau de bravoure supposé de
l'album. Ce titre aurait été très correct... s'il avait duré cinq
minutes, mais il est rallongé de façon totalement artificielle, à coups
de refrain répété ad nauseam et de modulations foireuses (de toute
façon, il doit y avoir sur l'ensemble du disque autant de modulations au
demi-ton supérieur que dans un Goldman quelconque, c'est vraiment pas
bon signe). Le reste confirmera ce côté "passage en force permanent" :
chant outré, refrains répétés, tentatives d'humour pitoyables
(l'interlude Lucifer in love, heureusement que ça ne dure que 30
secondes), et ballades avec orchestre synthétique carrément abyssales
(finir sur The Spirit will remain fait vraiment mal). Les bonnes
nouvelles sont en fait à chercher du côté des quelques titres speed qui
montrent que les musiciens restent plus que compétents, mais le groupe
est quand même sur une pente très glissante.
- Edguy - Rocket ride (2006) ★ ★ ½
Je dois bien l'avouer, à la première écoute, ce disque m'avait
particulièrement horripilé, et je m'apprêtais à le descendre en flamme
encore plus brutalement que le précédent du groupe. Mais après posé mes
oreilles de façon un peu plus attentive sur la chose, j'ai un peu révisé
mon jugement pour faire preuve de plus d'indulgence (et je me dis que
Hellfire club mériterait peut-être que je lui donne une dernière
chance, du coup). Certes, il y a des moments très agaçants, notamment
quand Sammet essaye de faire preuve d'humour et tombe systématiquement
dans le super-lourdingue (la pochette donne le ton, en même temps) : le
solo de guitares "hilarant" de Return to the tribe, le délire
final de Catch of the century, et la pochade Trinidad sont
à mettre dans la poubelle la plus proche. Mais le reste de l'album, bien
que tombant trop souvent dans la facilité, est loin d'être désagréable à
écouter. Il y a même un effort pour proposer des titres assez
construits, avec des sonorités variées (le Sacrifice qui ouvre le
disque notamment). Si on accepte le fait qu'Edguy a définitivement
laissé tomber le metal speed pour proposer quelque chose de beaucoup
plus consensuel avec encore quelques soupçons de heavy sous influence
Iron Maiden, on peut passer un bon moment à écouter ce disque.
Mais ça ne va quand même pas chercher très haut.
- Edguy - Tinnitus sanctus (2008) ★ ★
S'il y a bien une chose qu'on ne peut pas reprocher à Tobias Sammet,
c'est de faire languir ses fans. Bien que gérant en parallèle son projet
opératique Avantasia, il continue malgré tout à sortir tous les
deux ans un nouvel album de son groupe de base. Bon, après, pas besoin
d'être très mauvaise langue pour affirmer qu'un peu moins de frénésie
créatrice ne nuirait pas à la qualité des albums, tant la routine semble
désormais installée (pour les deux projets d'ailleurs). Ce Tinnitus
sanctus ne fait pas exception à la règle : il démarre plutôt bien avec
un Ministry of saints classiquement heavy mais efficace, et
s'enfonce petit à petit dans le confort de titres trop faciles, trop
orientés rock FM (un truc comme Dragonfly), souvent très
répétitifs, et trop proches de choses déjà entendues des dizaines de
fois. Bref on sent que tout ça a été bouclé (bâclé ?) un peu trop vite,
même s'il reste assez de métier à Sammet pour qu'on ne s'ennuie jamais
totalement (un titre comme Dead or rock est même franchement
sympa). Un album trop paresseux pour être mieux qu'anecdotique.
- Edguy - Age of the joker (2011) ★ ★ ½
Tiens, Edguy nous ferait-il le coup classique du "retour aux sources" ?
En tout cas, la pochette (et le titre) de cet album fait une allusions
plus qu'évidente à Mandrake, dix ans après la sortie de ce
dernier (non, on ne va pas non plus pousser jusqu'à évoquer la première
période speed d'Edguy, définitivement révolue). Dans la mesure où il
s'agit de mon album préféré du groupe, c'est une bonne nouvelle en ce
qui me concerne, mais il faut bien avouer qu'à l'écoute, on ne voit pas
trop de différences avec les dernières propositions de Sammet et de sa
bande : un heavy passe-partout, du refrain choral anesthésié à la
guimauve sur une majorité de titres, une ballade atroce pour terminer,
et un titre celtisant un peu perdu au milieu de tout ça (Rock of
cashel, qui a le mérite d'explorer des pistes assez peu fréquentées
jusque-là par le groupe). Ah si, quand même, il y a de la nouveauté :
Sammet a manifestement récupéré au fond de son grenier une collection de
vieux claviers, et il en fout partout, avec la subtilité et le bon goût
qui l'ont toujours caractérisé (on a l'impression par moments qu'il a un
peu trop réécouté Europe période The Final countdown). Ça
donne un côté vaguement anachronique au son de ce disque, pas
désagréable dans son ensemble (Nobody's hero, par exemple, c'est
pas mal du tout) mais qui n'arrive une fois de plus pas vraiment à
dépasser le stade du divertissement sympathique. En fait, Sammet a une
fois de plus l'air de beaucoup s'amuser, mais peine à nous convaincre de
l'accompagner dans ses délires (au moins, ça fait quelques albums qu'il
a laissé l'humour de côté, et ça c'est une très bonne nouvelle).
- Edguy - Space police - Défenders of the crown (2014) ★ ★ ★
Drôle de destin que celui d'Edguy, groupe qui a révélé son leader Tobias
Sammet avant d'être peu à peu délaissé par celui-ci pour privilégier son
projet Avantasia. Même si le groupe n'a pas officiellement
disparu, il est en état de mort cérébrale depuis un certain temps,
puisque ce disque constitue sa dernière sortie (ah non, une petite
compilation pour meubler, il y a quand même 7 ans...). Après, je ne me
plaindrai pas non plus que Sammet ait un peu ralenti la cadence vu
l'inspiration pas toujours au rendez-vous de ses productions des années
2000. En tout cas, je ne sais pas si le fait qu'il s'agisse du dernier
en date qui a joué sur mon état d'esprit, mais j'ai trouvé cet Edguy
meilleur que ses prédécesseurs immédiats. Loin d'être parfait, c'est
sûr, avec ses claviers pas toujours judicieux, ses wohoho un peu niais
des choeurs qui polluent trop souvent les refrains et quelques pistes
très dispensables (Rock me Amadeus, reprise d'un tube autrichien
dont je n'avais jamais entendu parler, est une bouse assez impensable),
mais avec son lot de titres accrocheurs qui fonctionnent bien
(Sabre&Torch, The realms of Baba Yaga), et même un
Eternal wayfarer conclusif qui ose revenir à un style épique
ambitieux (près de 9 minutes) sans se casser la gueule. Tout ça n'en
fait pas un album indispensable, bien entendu, mais ça mérite un petit
encouragement.
- Emperor - In the nightside eclipse (1994) ☆
Voilà une musique qui joue manifestement beaucoup sur l'ambiance à la
fois oppressante et grandiose qu'elle essaye d'instaurer, à grands coups
de fonds choraux et autres utilisations de synthétiseurs. Pourquoi pas,
mais le disque a un énorme défaut : le son est tout pourri, on entend la
plupart du temps une espèce de bouillasse indistincte qui noie
complètement les détails, c'est quelque peu gênant. Ajoutez à ça les
glapissements répétitifs et fatiguants du chanteur et une batterie en
mode mitraillage sans âme quasiment tout le temps, et on obtient un
album essentiellement pénible à écouter. Assez frustrant dans la mesure
où, pour ce qu'on en entend, ça n'a pas l'air totalement mauvais sur le
fond (même si très très répétitif quand même). J'essaierai de jeter une
oreille à leurs autres albums mais n'en parlerai probablement pas ici,
sauf en cas de découverte majeure inespérée (ND Roupoil : j'ai bel et bien
écouté les deux autres albums officiels du groupe suite à cette critique, et
définitivement ce n'est pas de la musique pour moi).
- Ensiferum - Ensiferum (2001) ★ ★ ★ ½
Histoire de se reposer un peu les oreilles après une dose de metal
technique ou extrême, un peu de viking metal ne peut pas faire de mal.
Mais attention, du viking metal versant facile d'accès, avec beaucoup de
mélodies faciles très souvent inspirés d'un folklore médiévalisant qui
n'a sûrement pas grand chose de viking mais passons (on est plutôt
quelque part du côté dansant de gigues plus ou moins irlandaises), des
choeurs clairs joyeux comme il faut, une batterie en mode cavalcade à
peu près permanente et un côté speed épique assez prononcé, et bien sûr
une voix black pour accompagner le tout. Euh, y a pas eu erreur de
casting là ? Ah ben non, en fait, on a vraiment un chant complètement à
côté de la plaque, mais bon, vu ce que donne le chanteur principal quand
il s'essaye au chant clair (sur Abandoned notamment), on va
volontiers garder la version extrême, après tout ça donne un certain
cachet à un groupe qui se vautrerait sinon furieusement dans la
caricature. Mais en même temps, quand c'est bien fait et entraînant, et
qu'on aime ce genre de choses comme moi, que demander de plus ? Bon,
l'introduction en mode console 8-bit laisse craindre le pire, mais
Hero in a dream est un bijou de speed folklo, Guardians of
fate étale au grand jour son mauvais goût (ces choeurs, mon dieu !)
de façon complètement irrésistible, la mélodie de Little dreamer
reste en tête, les passages en guitare acoustique sonnent bien, bref on
finit par se rendre compte que, dans un genre assez peu défendable,
c'est quand même un bien bon album !
- Ensiferum - Iron (2004) ★
Après un premier album d'une fraîcheur épatante, Ensiferum allait-il
réussir à transformer l'essai ? Hélas non, là où leur disque éponyme
semblait réussir tout ce qu'il tentait ou presque, celui-ci aligne les
titres au mieux maladroits, au pire franchement ratés. La construction
des titres n'est plus aussi limpide et part même parfois dans le
n'importe quoi (Tales of revenge), la chant est toujours mauvais
quand il est clair (sur Lost of despair, dommage car c'est une
chanson où il est au coeur du concept) mais commence à également à
forcer de façon assez moche sur le versant black (Sword chant),
les influences deviennent de plus en plus difficiles à décrypter (ce ne
sont plus des gigues irlandaises qu'on entend dans l'intro Ferrum
Aeternum, mais bien une espèce d'improbable BO de western spaghetti
oublié), et surtout les mélodies sont beaucoup plus quelconques, et ça
ne pardonne pas dans ce genre de musique (la chanson titre qui lorgne
vers un style à la Rhapsody, si ce n'est pas accrocheur, ça
devient vite usant). En fait, les meilleurs moments sont peut-être
l'interlude instrumental Mourning et les dernières pistes du CD,
qui retrouve un peu d'allant avec Lai lai hei (malgré une intro
bien longuette) et se conclut plutôt joliment avec une ballade chantée
par une invitée (en chant clair, peut-être qu'ils devraient penser à
virer leur chanteur extrême finalement, histoire d'avoir quelque chose
qui colle définitivement mieux à leur musique). Bon, la note est sévère,
c'est pas nul non plus, mais il faut bien admettre que c'est le genre de
disque qui n'a absolument rien pour se démarquer du lot.
- Ensiferum - Victory songs (2007) ★ ★ ★
Après un deuxième album décevant, Ensiferum a plus ou moins écouté mes
conseils puisque le chanteur a été remplacé par un autre... dans le même
style en moins bien (le chant est toujours typé extrême, mais avec un
son vomitif particulièrement peu agréable). Bon, raté de ce point de vue
(et c'est quand même un gros point noir), mais le disque est malgré tout
nettement meilleur que son prédécesseur. En effet, l'inspiration est de
retour au niveau des compositions, avec sans surprise un mélange de
choeurs "vikings", de mélodies faciles à retenir, de cavalcades
soutenues par la batterie, d'héroïsme bon marché (après une intro "mise
dans l'ambiance" assez réussie, Blood is the price of glory
démarre très bien le disque), de danses plus ou moins folkloriques
(mention spéciale à l'addictive One More magic potion) et
d'intros aux flûtiaux quasi systématiques. Et justement, si l'album
n'arrive pas à dépasser le stade de la sympathique réussite, c'est bien
parce que ça sent quand même très fort le procédé un peu facile répété
chanson après chanson (avec tout de même la belle exception de
Wanderer, sorte de ballade lente en voix claire bienvenue) et
qu'on est en droit de se demander comment le groupe va réussir à évoluer
dans la mesure où sa musique se mord déjà bien la queue après seulement
trois albums (ça vaut d'ailleurs aussi pour les pochettes, quasi
identiques d'un album à l'autre).
- Ensiferum - From afar (2009) ★ ★ ★ ★
Je me demandais dans ma critique de leur album précédent ce qu'Ensiferum
allait bien pouvoir inventer pour renouveler un peu sa musique. La
réponse était en fait assez facile à deviner (et déjà partiellement
incluse dans certaines tentatives des albums précédents), il suffit
d'accentuer les inspirations "westerniennes" (on a carrément droit à des
citations de Morricone ou presque dans Stone cold metal, assez
jubilatoire mélange de "folk viking metal" et donc de musique de western
(y a même un piano de saloon à un moment), c'est n'importe quoi mais moi
je prends), et d'ajouter quelques touches orchestrales par-ci par-là
pour augmenter fortement le côté spectaculaire de la chose et en mettre
plein la vue, quitte à ce que ce soit un peu poudre aux yeux. On y perd
forcément sur certains aspects (les pistes plus introspectives comme le
Wanderer de l'album précédent n'ont plus trop leur place), mais
il faut quand même bien admettre que c'est rudement bien fichu. L'intro
mélancolique, la chanson à boire Twilight tavern, c'est pas
spécialement recherché, mais tant que les mélodies fonctionnent, y a pas
grand chose à redire. On sera un peu plus circonspect sur les deux
longues pistes (Heathen throne et sa suite qui conclut l'album)
qui s'essoufflent un peu sur la durée (plus de 10 minutes à chaque fois)
et ont pour le coup un côté BO de film un peu trop marqué (on pousse un
peu trop sur le côté grandiose, sur la fin de la première piste
notamment). Mais personnellement, c'est vraiment le genre de musique que
j'adore, alors je veux bien que les finlandais se calent sur ce style
pour quelques albums de plus.
- Ensiferum - Unsung Heroes (2012) ★ ★
L'album précédent d'Ensiferum avait semblé indiquer une volonté de la
part du groupe de se diriger vers quelque chose de nettement plus
spectaculaire, notamment avec l'introduction de touches orchestrales.
C'est encore autre chose pour ce nouveau disque : l'orchestre est
toujours là, mais relativement discret, et on revient à une influence
folklorique très nette, et surtout on a droit à un gros ralentissement
général du tempo pour proposer un album à l'atmosphère globalement
mélancolique, à peine entrecoupée de quelques pistes speed qui semblent
là uniquement pour contenter les fans de bourrinages épiques
(Retribution shall be mine notamment). Les mélodies sont belles,
mais gare tout de même à ne pas tomber dans la niaiserie, ce qui
s'approche dangereusement quand on a droit à du chant masculin en voix
claire (faut dire que la justesse n'est pas la qualité première du
chanteur). Ah oui, je ne l'ai pas précisé, mais on a droit ici à une
soprano qui partage les vocaux avec le chanteur usuel, pourquoi pas mais
ça a quand même tendance à pousser encore plus Celestial bond
vers un côté "ballade irlandaise un peu mielleuse" qui n'a plus rien à
voir avec du metal. On la retrouvera aussi dans la piste finale
Passion proof power, gros machin de 17 minutes qui mélange
absolument tout et n'importe quoi sans aucune cohérence (et parfois
aussi sans inspiration), on trouve déjà ça trop long quand on atteint la
moitié mais le pire est à venir avec des passages vraiment pitoyables
sur la fin (bruits de fermes, dialogues en allemand !?). Dommage car le
début était plutôt prometteur, mais globalement le groupe, dont le
potentiel reste très intéressant, n'a pas su tirer le meilleur de cet
album trop inégal (les très beaux passages chorals à la fin de
Burning leaves, ça pour le coup ç'aurait été à creuser un peu
plus).
- Ensiferum - One man army (2015) ★ ★
Après un Unsung heroes plutôt calme et introspectif, retour à
quelque chose de beaucoup plus directement épique (et à un orchestre
nettement plus présent), dans la lignée de From Afar. Dans la
lignée certes, mais beaucoup moins maîtrisé et franchement inégal une
fois de plus. Les pistes rapides tournent vraiment au bourrinage
caricatural (avec plein de choeurs histoire d'ajouter au côté épique),
comme sur Axe of judgement qui ouvre le disque (après la
sympathique intro orchestrale de rigueur) de façon vraiment trop
frontale, ou encore la chanson titre et sa batterie qui finit par
franchement taper sur les nerfs. On a à nouveau l'impression que les
influences se situent désormais beaucoup plus clairement du côté de la
BO de film un peu trop burné (même s'il y a toujours un fond de western
un peu rigolo caché derrière). Quelques réussites indéniables tout de
même, notamment un Cry for the earth pourtant pas très subtil
mais qui utilise les choeurs a cappella de façon vraiment convaincante
(de toute façon, je l'ai déjà dit, Ensiferum devrait creuser beaucoup
plus du côté des choeurs, y a clairement des choses sympa à faire avec).
Par contre, l'intervention féminine en chant clair au milieu, bof. Et
puis quand même, à côté des classiques du groupe, le disque est aussi
bien plein de trucs assez improbables, distrayants à défaut d'être
réussis : un mélange speed metal/dance improbable dans Two of
spades (c'est assez hilarant, mais objectivement vraiment pas bon),
un machin chanté en finnois (du moins j'imagine) qui sonne pourtant
comme un générique d'anime (Neito Pohjolan) et plein de bonus
plus ou moins sympa, dont une reprise de l'excellent générique de
Rawhide (original signé Dimitri Tiomkin). Globalement, il faut
bien l'admettre, c'est quand même à nouveau un album très moyen, même si
on passe de bons moments à son écoute.
- Ensiferum - Two Paths (2017) ★ ½
Ensiferum est vraiment un groupe frustrant : à chaque nouveau disque, on
aimerait aimer sans réserve la musique sympathique qu'ils nous
proposent, et apprécier les belles mélodies (il y en a encore beaucoup
dans celui-ci) sans avoir à émettre des réserves sur la réalisation.
Mais voila, leurs choix artistiques sont régulièrement suffisamment
mauvais pour gâcher au moins une partie du plaisir. Déjà, il y a un
problème récurrent au niveau des chanteurs. À leurs débuts, je me
plaignais du choix d'un chant guttural par forcément en adéquation avec
la composante folk de leur musique (mais plus avec le côté héroïque
également très présent), désormais il y a pas moins de trois chanteurs
différents... et aucun n'est vraiment convaincant ! Le chant guttural
est souvent forcé et moche (sur Way of the warrior, dommage car
le riff est assez irrésistible), le chant clair masculin est carrément
horrible (timbre laid, justesse approximative, par exemple sur l'affreux
machin pop Don't you say), et le chant féminin manque de
personnalité. Mais le principal défaut de la chanteuse, c'est surtout
qu'elle joue de l'accordéon, et que l'introduction de cet instrument
transforme hélas régulièrement la musique du groupe en gentille ambiance
kermesse de village... Mais malgré tout ça, il y a quelques titres speed
avec grosse présence orchestrale qui valent largement le coup (For
those about to fight for metal, malgré son titre ridicule) et un
excellent God is dead, dont on est toutefois bien obligé de
constater qu'il repompe allégrement la reprise de Rawhide
proposée par le groupe dans son album précédent. Au final, encore un
album qui aurait mérité un nettement meilleur traitement.
- Ensiferum - Thalassic (2020) ★ ★ ★ ★
Dernier opus en date des finlandais, cet album propose, comme on pouvait
s'y attendre au vu du titre, des ambiances globalement bien marines
(comprenez par-là que qu'il y a des bruits de vagues en fond la moitié
du temps et que la chanson de poivrots habituelle a été remplacée par
une chanson de matelots, faut pas non plus espérer trop de subtilité).
Mais surtout, les errements des albums précédents ont enfin été
corrigés, plus d'accordéon ni de chant clair faux, on a un groupe qui
tient la route, et accessoirement un retour à des orchestrations bien
tape-à-l'oeil, ce qui n'est évidemment pas pour me déplaire. C'est
parfois un peu trop (Rum, women, victory, ça tourne vraiment à la
caricature de folk-speed sans cervelle), surtout quand les chanteurs en
rajoutent (le chant clair aigu sur la fin de One with the sea
fait un peu mal aux oreilles et vient ternir un titre pourtant très
réussi). Mais la plupart du temps, ça fonctionne (Andromeda),
voire c'est carrément irrésistible (The Defence of the sampo et
son choeur sur le refrain, j'adore). Même la piste finale Cold
Northland qui en fait des tonnes dans la surenchère symphonique
(avec une belle intro au piano sur fond de vagues...) conclut de façon
efficace ce qui est peut-être bien le meilleur album du groupe. À
n'écouter tout de même que si on apprécie le genre.
- Enslaved - Vikingligr veldi (1994) ★ ★ ★ ½
Enslaved fait partie de ces nombreux groupes ayant émergé en Norvège au
début des années 90 dans le cercle qui a vu la création du black metal.
On est donc partis pour une bonne dose de blast-beat furieux et de chant
bien guttural à peine audible tellement la production est dégueulasse ?
En fait, oui et non. Oui, les guitares sont bien saturées, mais non, il
n'y a pas de volonté ici de rendre la musique la plus inaudible
possible, c'est même étrangement propre en termes de son. Oui, le chant
est teinté black (côté coassement de la force) mais en même temps ça
chante tellement peu que c'est presque accessoire. La musique du groupe
se concentre en effet sur l'exploitation très creusée (seulement 5
pistes dont quatre dépassent les 10 minutes) de riffs presque mélodiques
répétés jusqu'à créer une atmosphère prenante, et en n'hésitant pas à
mettre en avant des claviers a priori relativement incongrus dans ce
style de musique. Et franchement, ça marche pas mal du tout ! La piste
introductive Lifandi Lif Undir Hamri (faudrait que je bosse mon
norvégien pour savoir ce que ça peut bien signifier) est vraiment belle,
et la conclusion Norvegr (qui exploite beaucoup les claviers sur
la fin) est également très réussie. Entre deux, tout de même une ou deux
pistes nettement plus brutales et moins intéressantes, mais l'ensemble
forme un album tout à fait appréciable.
- Enslaved - Frost (1994) ★ ½
La pochette annonce la couleur, on va se cailler à l'écoute du deuxième
album d'Enslaved. D'ailleurs, l'intro (sobrement intitulée Frost)
confirme cette impression, avec ces effets intéressants sur les
sonorités de claviers. Hélas, après cette intro plutôt attirante,
Loke est une sorte de douche froide : moi qui avais été
agréablement surpris par la propreté du son de leur premier album, je
suis bien obligé d'avouer que là, c'est tout simplement très moche
(guitares denses, propos assez inintelligible, et rires démoniaques en
fin de chanson ridicules). Ce n'est toutefois pas vraiment représentatif
de l'ensemble de l'album, qui propose la plupart du temps un black assez
"standard" (Jotunblod ou Wotan, ça m'intéresse peu, les
claviers et les éléments mélodiques sont moins présents que sur
Vikingligr Vedi), mais aussi quelques expérimentations
inattendues qui font quand même que l'album n'est pas totalement raté.
La très curieuse Yggdrasil notamment, qui démarre comme une
espèce de ballade folk avec guimbarde et chant clair, et termine en mode
transe électrique, st indiscutablement recherchée et réussie. Ce n'est
pas assez pour vraiment me donner envie d'y revenir.
- Enslaved - Eld (1997) ★ ★ ★
Cette fois-ci, la pochette est très claire : c'est à une épopée viking
que nous convie Enslaved pour son troisième album. Et ça commence très
fort avec la plage de 16 minutes 793 (Slaget om Lindisfarne)
évoquant l'un des premiers raids vikings en Angleterre. Longue
introduction atmosphérique avec claviers presque symphoniques, chant
clair quasiment incantatoire, chant guttural utilisé avec parcimonie (on
a droit à de longs passages purement instrumentaux), c'est à la fois
très bien construit et vraiment bien fichu, sur cette piste, le niveau
est encore monté par rapport au premier disque du groupe (et l'intermède
violent de Frost semble presque oublié). Le reste de l'album, ce
sont six chansons nettement plus courtes (même si la durée atteint
souvent 7 ou 8 minutes), et plus conformes à ce qu'on pourrait attendre,
un black avec batterie monumentale et guitares bien saturées, mais qui
ne laisse pas tomber le côté mélodique qui semble cher au groupe, ni
d'ailleurs le chant clair qui est encore exploité de temps à autre sous
forme de choeurs qui ajoutent un peu à l'atmosphère épique du tout. Je
dois l'avouer, tout ça m'intéresse nettement moins, même si
Hordalendingen et Kvasirs blod sont pas mal du tout (de
façon générale, de toute façon, ce n'est jamais gratuitement brutal, il
y a toujours des ruptures de ton ou de rythme qui enrichissent le
propos). J'aurais préféré un album entier dans l'esprit de la grandiose
piste initiale. Mais rien que pour ce titre, justement, l'album mérite
d'être écouté.
- Enslaved - Blodhemn (1998) ★ ★
Vous avez demandé du viking ? Enslaved vous en ressert une bonne
tranche. Mais si le Eld qui précédait cet album s'ouvrait sur une
magistrale piste de 16 minutes aux ambiances très variées avant de se
complaire dans un black assez standard qui m'avait assez rapidement
lassé, ce nouvel opus fait dans le brutal en permanence, donc est
forcément mal parti pour me plaire. Batterie épileptique, titres
systématiquement rapides, ça pourrait même devenir franchement saoûlant
si quelques éléments caractéristiques du groupe ne maintenaient pas un
minimum d'intérêt : les claviers en fond qui se permettent même quelques
incursions franchement étranges dans le discours (sur Ansuz
astral notamment), mais surtout l'utilisation du chant clair et des
choeurs "vikings" pour contrebalancer le déferlement de violence et
provoquer des ruptures de tons bienvenues. À ce titre, I lenker til
Ragnarok ou la chanson titre réussissent indéniablement à instaurer
une ambiance intriguante. Bref, même si on est dans le domaine du "pas
de la musique pour moi", ça reste nettement plus audible que du
Emperor par exemple...
- Enslaved - Mardraum-Beyond the Within (2000) ★ ★ ½
Enslaved avait déjà montré dans ses premiers albums sa capacité à
proposer par moments une musique nettement plus recherchée que le black
brutal qui constitue son fonds musical. Mais avec ce cinquième opus, on
franchit encore un palier supplémentaire, notamment dans le titre Storre
enn tid qui ouvre l'album et qui tire un peu dans toutes les directions
: intro acoustique dépressive, mélange de choeurs clairs et de chant
guttural, courts passages dissonants assez expérimentaux, l'ensemble est
un peu décousu mais a franchement de la gueule (la première percée du
choeur par exemple est superbe), on n'est pas très loin de ce que
propose un Opeth dans ses premiers albums (c'est la même période
après tout). La piste Entrance-Espace joue dans la même cour et
est même à mon sens encore plus réussie (un peu plus ramassée et donc
plus cohérente). Et puis, hélas, le reste du disque retombe dans un
black nettement plus brutal mais surtout assez peu inspiré (Aeges
draum passe encore avec là aussi quelques passages expérimentaux,
mais à partir de Det endelege riket ça perd pour moi tout
intérêt, on est nettement en-dessous de ce que proposait le groupe dans
ce style dans les albums antérieurs). J'avoue ne pas bien comprendre la
cohérence du projet d'ensemble et ne suis donc qu'à moitié satisfait à
l'écoute de ce disque (mais bon, quelque part, une moitié de disque
excellente et une moitié pourrie, c'est mieux qu'un disque uniformément
moyen).
- Enslaved - Monumension (2001) ★
Si Mardraum contenait encore une majorité de pistes black, cette fois,
la métamorphose du groupe est complète. Certes il reste des relents de
metal extrême sur la forme (le chant alterne entre guttural, écorché et
clair, et pas seulement dans les choeurs pour ce dernier, et le son des
guitares reste assez sale), mais sur le fond, le groupe subit désormais
une influence manifeste et inattendue venant tout droit du rock planant
des années 70 (quand on écoute Hollow inside et son chant clair
ultra réverbéré sur fond d'orgue synthétique, on a même du mal à croire
qu'il s'agit bien du même groupe que sur les premiers albums). L'orgue
est d'ailleurs très présent tout au long de l'album, ce qui produit un
effet assez déroutant. En fait, tout l'album est déroutant, tant on est
au croisement de deux univers difficilement compatibles. Ca pourrait
certainement être intéressant, et c'est en tout cas indiscutablement
original, mais j'avoue avoir bien du mal à ne pas me perdre et, tout
simplement, m'ennuyer à l'écoute de ce drôle d'objet musical.
- Enslaved - Below the lights (2003) ★ ★ ★
Le virage pris par Enslaved engage le groupe de plus en plus loin du
black originel (on a encore un peu de chant extrême, mais finalement
assez peu dans la mesure où quasiment toutes les pistes sont largement
dominées par les passages purement instrumentaux, seul Ridicule
swarm, après son intro bizarrement atmosphérique, revient à quelque
chose d'assez brutal). Ici, on a droit à des pistes longues et très
contrastées, constituées d'épisodes d'ailleurs pas toujours très bien
enchaînés, en tout cas ça a un côté prog très prononcé. Et en plus de ça
on a comme dans le disque précédent des allusions au rock planant qui
passent toutefois mieux cette fois-ci (bon, quand même, l'intro de
Queen of night est très improbable). Même si l'ensemble manque
encore de cohérence à mon goût, il y a tout de même un net progrès par
rapport à Monumension, et même quelques très belles pistes :
As Fire swept clean the earth qui ouvre l'album est tout
simplement beau (encore une fois, j'entends des choses bien proches
d'Opeth là-dedans), et The Crossing propose une ambiance très
travaillée (très très peu de chant sur celle-ci). Le reste est plus
inégal, mais donne tout de même un disque intéressant, qui s'écoute avec
plaisir.
- Enslaved - Isa (2004) ★ ★ ★ ½
Bien dans la lignée du précédent, peut-être encore plus homogène
(l'ambiance est globalement assez dépressive tout du long), mélange de
chant extrême et clair, claviers, choeurs, on retrouve en effet les
mêmes ingrédients, et d'ailleurs ça s'écoute tout aussi bien, même si
j'avoue une fois de plus me lasser un peu en cours de route et ne
toujours pas être totalement transporté. Mes pistes préférées : Lunar
force (encore un album qui commence bien) et Bounded by
allegiance (belle opposition entre choeurs très sereins et les
instruments qui martèlent des motifs répétés de façon incessante).
Globalement, c'est quand même sympa à écouter, je le mettrais même un
poil au-dessus du précédent.
- Enslaved - Ruun (2006) ★ ★ ★ ½
Ce disque aura été atteint du syndrome du "j'arrive pas à taper ma
chronique". Comme ça m'arrive parfois quand j'ai un peu trop de boulot à
faire en même temps (vivent les corrections de concours), j'ai lancé à
plusieurs reprises le CD avec la ferme intention d'écouter attentivement
et de prendre quelques notes pour donner mon avis, mais à chaque fois
j'ai laissé tomber, me contenant d'écouter la musique "en fond". Mais du
coup, je finis par bien le connaitre, cet album ! C'est peut-être pour
ça qu'il me convainc encore un peu plus que ses prédécesseurs immédiats.
Les ingrédients sont les mêmes, mais avec des claviers nettement en
retrait (on a bien un côté assez psychédélique tout de même sur la
chanson-titre), et un côté très apaisé qui donne presque envie de dire
au chanteur d'arrêter les vocaux black, qui ne collent plus guère à
l'ambiance globale assez mélancolique. Mais peu importe, c'est à un beau
(mais assez court) voyage que nous convie le groupe, et si ça manque de
sommet vraiment marquant, l'homogénéité de l'ensemble fait qu'on passe
un très beau moment une fois rentré dans l'ambiance particulière de ce
disque.
- Enslaved - Vertebrae (2008) ★
Après une série d'albums convaincants, Enslaved redescend d'un bon cran
avec ce disque qui commence à sentir fort la routine. Le black metal est
définitivement oublié depuis un moment certes (la voix coassante ne
semblant être conservée que par principe) mais ce n'est pas une raison
pour imposer piste après piste la même atmosphère planante, les mêmes
choeurs diaphanes contrastant avec le chant extrême, et surtout la même
absence de véritable riff qui s'incruste un tant soit peu dans notre
cerveau. J'ai en fait très envie de faire un mauvais jeu de mots en
disant que, malgré son titre, je trouve cet album curieusement
invertébré : jamais un vrai point d'accroche, cette fois-ci je reste à
quai et j'ai la fâcheuse impression que le groupe pourrait continuer à
jouer la même musique pendant des heures sans que je ne perçoive de
réelle évolution. Bon, finalement les disques du groupe que je n'ai
vraiment pas aimé restent peu nombreux, celui-là en fera partie.
- Enslaved - Axioma Ethica Odini (2010) ★ ★
Bonne nouvelle, pour ce onzième album, Enslaved semble décidé à revenir
à quelque chose de nettement moins vaporeux que sur le précédent, c'est
plus musclé et les synthés 70's se font même carrément discrets (bon, ça
revient un peu sur la fin du disque quand même, le début de Night
sight notamment surprend tant il fait tâche par rapport à ce qui a
précédé). Sinon, on a droit aux ingrédients habituels du groupe, mais
avec des refrains en chant clair qui lorgnent carrément vers la pop
(c'est flagrant sur le titre inaugural Ethica Odini), ça ne
s'intègre pas franchement bien au reste à mon sens (notamment sur
Singular, qui est pourtant la meilleure chanson du disque). De
façon générale d'ailleurs, l'album me semble assez décousu (un titre
comme Waruun, j'ai toutes les peines du monde à comprendre où ça
veut en venir). Malgré quelques bons moments (nettement plus que sur le
précédent), je ne suis pas follement emballé, et me contenterai donc
d'achever la discographie du groupe en écoutant les quatre albums qui me
restent d'une oreille plus distraite, sans compte-rendu.
- Epica - The Phantom agony (2003) ★ ★ ★ ★ ½
Pour ceux qui ne sont pas spécialistes des potins du petit mondu du
metal symphonique, Epica c'est le groupe formé par Mark Jansen après
qu'il ait claqué la porte d'un After forever dont la ligne
artistique ne lui convenait plus. Là, pas de problème, il va pouvoir
s'en donner à coeur-joie dans le metal symphonico-gothique avec
chanteuse lyrique à la Nightwish. Pour cela (puisque la chanteuse
d'After forever, elle, est restée dans son groupe), il recrute une
petite jeunette au chant qui figure aussi en bonne place sur l'affreuse
pochette du CD. La jeunesse de la dame s'entend d'ailleurs beaucoup dans
ce premier essai, son chant imite celui de ses aînées de façon assez
scolaire et peu assurée, c'est un peu gênant mais elle a quand même une
belle voix et ça contribue curieusement au côté artisanal et pas
totalement maîtrisé de tout l'album, qui lui donne un cachet à part
assez irrésistible. En fait, on sent bien la volonté de faire un truc
hyper grandiose, naviguant entre les passages franchement épiques et les
moments plus romantiques, mais la construction des morceaux manque
souvent d'assurance et de cohérence (l'utilisation des growls notamment
n'a souvent pas beaucoup de sens, on a aussi des samples de discours
incompréhensibles sur Facade of reality). Mais malgré ces défauts
bien voyants (à la première écoute j'avais même été franchement déçu par
le disque), on finit par écouter l'album en boucle tant les atmosphères
sont prenantes et les mélodies imparables. Certes, Cry for the
moon est un tube qui tombe dans la facilité, Feint navigue
sur la frontière dangereuse entre l'envoûtant et le franchement chiant,
mais Sensorium ou la chanson-titre et son thème épique
inoubliable, je ne m'en lasse pas. Finalement, le disque n'a pas usurpé
sa réputation d'incontournable du genre, même s'il fera probablement
fuir très très loin ceux qui ont du mal avec Nightwish et consorts.
- Epica - Consign to oblivion (2005) ★ ★ ★ ★
Après un premier album encore imparfait mais tout de même diablement
séduisant, on pouvait espérer un véritable chef-d'oeuvre de la part
d'Epica pour sa deuxième tentative. Ce ne sera pas le cas, le disque est
certes très bon, mais il déçoit quand même en raison de la direction
artistique prise. Au lieu d'insister sur le côté gothique naïf de son
premier opus, le groupe a en effet décidé d'imiter ses compères de
Nightwish (et plus précisément leur album Once) de façon
même pas déguisée, en s'orientant vers un metal épique très symphonique
qui fait plus que faire penser à de la BO de films (l'introduction
Hunab K'u donne le ton, c'est du Hans Zimmer dans le texte). On
est parfois aux frontières du plagiat (Blank infinity notamment),
et on peut bien sûr regretter ce choix assez clairement commercial
(chant moins lyrique et plus passe-partout, j'en viendrais presque à
regretter que les growls soient limités à deux ou trois pistes), et se
plaindre de l'omniprésence de l'orchestre et des choeurs (qui reprennent
par ailleurs quasiment à l'identique certains motifs de The Phantom
agony) qui laissent souvent les guitares dans un lointain
arrière-plan. On jettera aussi à la poubelle la pitoyable bluette
Trois vierges chantée en duo avec Roy Khan. Mais malgré cette
longue liste de protestations, eh bien, l'ensemble passe tout seul
tellement c'est entraînant et bien calibré, les mélodies sont
imparables, les effets orchestraux efficaces à défaut d'être originaux,
et la voix de Simone Simons fait désormais preuve d'une belle assurance.
Une copie un peu facile certes, mais d'une qualité presque
irréprochable. Attention quand même à ne pas se laisser aller sur les
albums suivants.
- Epica - The divine conspiracy (2007) ★ ★ ½
Après un deuxième album encore excellent mais qui proposait un virage
très orchestral inattendu, quoi de neuf dans la troisième proposition
d'Epica (à part le fait de mettre sa chanteuse à poil sur la pochette
pour attirer le chaland) ? Eh bien, manifestement, le groupe a voulu
remettre un peu de muscle dans sa musique (batterie très en avant,
growls à nouveau présents sur beaucoup de titre, et de la double pédale
envahissante sur plusieurs titres), mais tout en laissant l'orchestre
sur le devant de la scène, avec une influence "musique de films" de plus
en plus claire (la chanson-titre finale propose autant de passages
purement orchestraux que de passages chantés). On est donc un peu le cul
entre deux chaises, et à part sur la très bonne The obsessive
devotion en début d'album, les ingrédients ne se mélangent pas
toujours de façon très heureuse. C'est varié, les mélodies sont toujours
efficaces malgré un léger abus de motifs orientalisants un peu clichés,
ça s'écoute très agréablement, et en même temps il y a peu de passages
vraiment marquants, et l'impression de fourre-tout finit par prendre le
dessus par moments (typiquement, la fin de Chasing the dragon,
qui démarre comme une jolie ballade, ne ressemble vraiment à rien). La
durée trop importante, des pistes (régulièrement 7 à 8 minutes) comme du
disque (75 minutes au compteur), joue sûrement aussi un rôle dans le
sentiment de lassitude qui finit par pointer le bout de son nez. En
fait, alors que leur premier album essayait justement de partir dans une
autre direction, ici la musique d'Epica ressemble de plus en plus à
celle d'After forever. Si ça reste qualitativement au-dessus de
la fin de carrière de ces derniers, retrouver une réelle inspiration
sera nécessaire pour relancer vraiment la (belle) machine.
- Epica - Design your universe (2009) ★ ★
Plus j'avance dans la discographie d'Epica (j'en suis à la moitié après
ce quatrième album), et plus je me dis que ce groupe est un gros gâchis.
Alors qu'ils avaient trouvé leur voie dès leur premier disque, ils se
sont ensuite perdus dans une volonté manifeste de suivre certaines modes
qui ne collent pas avec les éléments de leur musique qu'ils auraient
mieux fait de développer. Ici, encore plus que dans l'album précédent,
la volonté de se rapprocher du death mélodique est plus que visible,
avec un son nettement moins avenant que d'habitude et surtout une
batterie pachydermique qui prend toute la place au premier plan, ce qui
est tout de même ballot quand une bonne partie des subtilités de la
musique proposée est censée être produite par un orchestre qu'on entend
parfois à peine derrière. On en viendrait presque à accueillir avec
soulagement la ballade Tides of time, mignonnette et inoffensive,
mais qui a le mérite de laisser le batteur sur le banc et de nous
permettre de profiter un peu du chant de Simone Simons (qui a bien
progressé depuis les débuts du groupe, mais qui dispose hélas de moins
en moins de passages intéressants à chanter, c'est ballot). Pour le
reste, on reconnaît tout de même Epica : des titres orchestraux qui
s'éternisent un peu trop, un album lui-même nettement trop long, et tout
de même une majorité de chansons efficaces à défaut d'être
transcendantes (j'aime bien Martyr of the free world notamment).
Rien de totalement déshonorant donc, mais la direction artistique
discutable fait qu'on aura plus envie d'oublier le disque que de le
réécouter régulièrement.
- Epica - Requiem for the indifferent (2012) ★ ★ ★
Une fois le virage d'Epica vers un metal à la fois plus commercial et
plus agressif digéré, je n'attendais plus grand chose de passionnant de
la part du groupe, surtout que ce disque est considéré par beaucoup
comme le plus faible de sa discographie. Autant dire que j'ai été très
agréablement surpris de constater qu'il retrouve un certain équilibre
qui le rend plus séduisant que ses deux prédécesseurs immédiats. On
reste dans une sorte de death mélodique un peu facile et par moments
plombé par des tics d'écriture agaçants (les passages orientaux dans
Serenade of self-destruction, une grosse tendance à la surcharge
orchestre+choeurs+guitares quand on n'a plus grand chose à dire), mais
le côté extrême passe plus par le chant (beaucoup de growls sur ce
disque, mais bien intégrés) que par la batterie, moins mise en avant
(ouf). Simone Simons y retrouve un terrain d'expression un peu plus
conséquent, et confirme par la même occasion qu'elle chante désormais
vraiment bien ! L'enrobage orchestral, les mélodies efficaces et
quelques modulations inattendues (le refrain surprenant de Storm of
sorrow est assez addictif) ajoutent à l'intérêt de l'ensemble, qui
tient franchement bien la route sur une bonne moitié de disque. Le
principal défaut de la chose, en fait, c'est que c'est une nouvelle fois
trop long (80 minutes bonus compris) et que ça s'essouffle sévèrement
sur la fin (qui contient d'ailleurs, ce n'est sûrement pas un hasard,
les pistes les plus chargées). Mais ça reste tout de même encourageant,
Epica prouve qu'on peut encore compter sur eux pour nous proposer de
bons albums à l'avenir.
- Epica - The Quantum enigma (2014) ★ ★ ★ ★
Après plusieurs albums où Epica affichait clairement sa volonté de
durcir le ton et s'éloignait sensiblement de la ligne initiale de son
chef-d'oeuvre The Phantom Agony, miracle, alors que plus personne
n'y croyait (enfin, moi pas trop en tout cas), le groupe revient pour ce
sixième album à un style nettement plus proche de celui de ses débuts.
Plus de mélodies (celles de Unchain utopia semblent même faire un
clin d'oeil à Cry for the moon, on n'est pas très loin de
l'auto-plagiat), plein de choeurs, un orchestre bien exploité, une
ballade vraiment superbe (Canvas of life) et Simons qui nous sort
quelques notes de chant lyrique (bon, pas des masses quand même),
qu'est-ce que ça fait du bien (en comparaison, on comprend mieux
pourquoi les albums précédents, aussi bien ficelés soient-ils,
laissaient un goût d'inachevé). En plus de cela, on a quand même
quelques titres qui lorgnent vers l'extrême, mais qui sont eux aussi
très réussis (sur Chemical Insomnia on n'est vraiment pas loin
d'un black sympho à la Dimmu Borgir, la voix claire féminine en
plus, et ça fonctionne impeccablement). En fait, ce disque est tout
simplement équilibré et inspiré, et ça fait toute la différence ! Pas au
niveau de The Phantom Agony car il y manque le petit truc en plus qui le
démarquerait vraiment de la concurrence (ça reste assez calibré dans
l'ensemble, et le disque est une fois de plus un peu longuet avec ses 75
minutes), mais vraiment pas loin.
- Epica - The Holographic Principle (2015) ★ ★ ½
Alors que The Quantum Enigma avait fait preuve d'un très net
regain de forme chez Epica, j'attendais nécessairement beaucoup de
l'album suivant du groupe. Un peu trop peut-être, car je ne peux
m'empêcher d'être déçu par ce disque qui tient très bien la route, mais
qui voit aussi revenir au galop quelques défauts récurrents de la bande
à Mark Jansen : dès que l'inspiration est un peu moins au rendez-vous,
on surcharge les titres à grands coups de choeurs envahissants et de
rythmique bourrine, et ça finit par devenir assez indigeste, surtout
quand ça s'étale sur 70 minutes. Il y a pourtant, comme d'habitude, des
accroches sympa et de belles mélodies sur pas mal de titres (Beyond
the matrix par exemple démarre très bien), mais on retombe très vite
sur des structures répétitives qui tournent sérieusement au procédé.
Trop peu de titres avec une vraie originalité ou une ambiance qui se
démarque (Once upon a nightmare en fait partie, c'est sûrement le
sommet du disque), aucune ballade pour respirer un peu, le disque bonus
constitué de versions alternatives surprenantes de certains titres finit
par être la bonne surprise de l'album. Je suis un peu sévère au niveau
de la note car ça reste solide dans l'ensemble (Edge of the
blade, c'est du metal technicolor, mais ça fonctionne sacrément
bien), mais pour un groupe capable de faire beaucoup mieux que ça, on
reste ici au niveau du minimum syndical.
- Epica - Omega (2021) ★ ★ ★ ★
Voilà maintenant une bonne vingtaine d'années qu'Epica a fait ses
timides débuts sur la scène du metal symphonique, et le moins qu'on
puisse dire, c'est que le groupe a su se faire sa place pendant cette
période. Pour leur dernière offrande en date, les moyens sont à nouveau
démesurés : orchestre à temps plein, choeurs omniprésents (la petite
nouveauté, ce sont les choeurs de gamins, je trouve que ça donne une
fraîcheur sympathique à certains titres), production démente, c'est très
très spectaculaire, ça lorgne souvent vers la musique de film un peu
superficielle, et objectivement, on pourrait supprimer le groupe de
metal en fond sans que l'esprit de la musique proposée n'en soit
bouleversé (il faudrait quand même garder les growls qui alternent avec
le chant féminin, à nouveau assez présents sur cet opus). Et comme vous
le savez, le spectaculaire, j'aime ça, et j'ai donc une fois de plus
passé un fort bon moment à l'écoute de ce disque qui est une sorte de
best of de ce qu'Epica fait de mieux dans le versant vraiment
symphonique de sa musique. Rien de nouveau (on retrouve par exemple les
clichés orientaux dans Code of life), mais des mélodiques
efficaces à foison, et une palanquée de titres irrésistibles même on
navigue parfois à la frontière de la pop (Abyss of time,
Synergize), le groupe connaît parfaitement son boulot, et
l'effectue de façon totalement professionnelle, sans que ça n'en
devienne impersonnel pour autant.
- Faith no more - We care a lot (1985) ★ ★ ★ ★
Encore une fois, je débute l'exploration de la disco d'un groupe avec un
album qui n'en est même pas vraiment un, puisque les musiciens eux-même
l'ont à moitié renié et en ont repris le premier titre éponyme dans leur
"vrai" premier album à suivre, Introduce yourself. De fait, on
est par ailleurs plus ici dans le délire entre copains qui font joujou
avec grattes et synthés que dans quelque chose de très sérieux, les
parties vocales en particulier étant pitoyables (le chanteur principal
est une espèce de mixture improbable entre un crooner et le chanteur
d'Indochine, mais avec une notion de justesse extrêmement rudimentaire,
et quand il y a des choeurs, c'est pas du tout en place en plus d'être
largement faux). Quant à la musique elle-même, on ne peut guère parler
de metal tant les synthés occupent une place importante et tant ça
lorgne vers, euh, un peu et n'importe quoi en fait, mais majoritairement
une espèce de pop vaguement disco). Autant dire que ma notation est
complètement disproportionnée, mais je n'y peux rien, malgré les défauts
plus qu'évidents, je trouve ça assez jouissif, ces gars-là mélangent
vraiment tout et n'importe quoi sans se préoccuper de l'étiquette qu'on
pourra bien leur coller, ils se font plaisir et c'est très communicatif.
Des titres comme We care a lot et son refrain simpliste scandé,
Arabian disco (rien que le titre...) ou le foutraque Why do
you bother (attention ils essayent de chanter ensemble sur celui-là,
ça fait assez mal, et la fin avec un effet grotesque de ralentissement
des synthés suivis d'une espèce de péroraison orchestrale qui part en
eau de boudin, c'est absolument fabuleux !), je dois être un peu maso,
mais j'en redemande !
- Faith no more - Introduce yourself (1987) ★ ★ ★
Voici donc le premier véritable album du groupe, et curieusement, je le
trouve moins convaincant que leur effort précédent. En fait, on a un
truc qui est un peu intermédiaire entre le délire foutraque et la
volonté de faire quelque chose de plus sérieux, et on récupère un peu
les défauts des deux approches : manque de précision de l'ensemble (le
chanteur n'a pas encore été remplacé, il s'en sort mieux ici mais ça
reste approximatif, notamment sur l'intro de The crab song), et
en même temps la perte de la spontanéité qui rendait We care a
lot si immédiatement séduisant. De fait, le début du disque est
assez inégal, avec des titres comme Anne's song qui forcent le
trait sur le côté "différent" (voire carrément parodique par moments),
qui alternent avec de vraies bonnes idées (la vignette rigolote qui
donne son titre à l'album, ou le passage rappé de Chinese
arithmetic). On retrouve une carburation plus régulière ensuite,
avec une utilisation à nouveau prédominante des synthés et une dernière
piste assez déjantée. Un album de transition pas totalement convaincant
mais souvent intéressant quand même.
- Faith No More - The real thing (1989) ★ ★ ★ ½
Voilà un album particulièrement raccord avec quelques-unes de mes autres
écoutes récentes (ND Roupoil : jétais en train d'écluser la discographie
de Black Sabbath et de RATM au moment de taper cette
critique). D'abord parce que le groupe y reprend le War pigs de
Black Sabbath (très bonne piste, mais bon, peut-on rater une
telle chanson ?), mais aussi parce que, quelques années avant
l'explosion de RATM, l'album fait la part belle à un chant très
clairement influencé par le rap sur une majorité de pistes. Très bonne
nouvelle, le groupe a changé de chanteur et le nouveau venu (en plus de
chanter juste) a tout ce qu'il faut pour assurer sans problème à la fois
côté rap et côté pop, avec en plus une personnalité indéniable. Si je ne
suis pas entièrement emballé par le disque, c'est parce qu'il est à
nouveau trop inégal, entre les sommets vraiment excellents que sont
Epic (couplets rappés et refrain avec synthés en mode orchestral,
ils nous ont un peu refait le coup de We care a lot mais en
encore plus jouissif) et l'instrumental barré Woodpecker from
Mars, et d'autres pistes qui naviguent entre le sympathique
(Zombie eaters et son début en mode romance acoustique dont on se
demande vraiment s'il n'est pas complètement parodique, la chanson titre
qui traîne quand même en longueur), et le remplissage peu marquant
(Falling to pieces, Underwater love). Quand même, en me
refaisant la liste des pistes de l'album, quelle variété, jusqu'à la
chanson finale jazzy accompagnée au piano, on est vraiment très très
loin du metal formaté !
- Faith No More - Angel Dust (1992) ★ ★ ★ ★ ★
Non, n'insistez pas, je ne serai pas objectif concernant cet album, que
je connais depuis quelques décennies (je serai bien incapable de dire
qui me l'avait fait écouter, mais c'était une bonne idée puisqu'il
s'agit de l'un des rares disques "non classiques" qui traînent dans mes
CD-thèques à la maison ; bizarrement, ça ne m'avait jamais poussé à
écouter les autres albums du groupe !). Je ne l'avais d'ailleurs pas
écouté depuis un certain temps, mais c'est toujours excellent ! Assez
déjanté et inclassable comme il se doit avec Faith No More, mais là,
tout ce qu'ils tentent réussit, et Mike Patton passe d'un style à un
autre sans effort apparent, c'est bluffant. On a ainsi droit à de courts
passages d'orgue façon vieux film d'horreur, à un Malpractice qui
sonne industriel avec des violons grinçants en fond, à des pistes
presque "publicitaires" tant la musique y est décontractée (RV ou
A small victory), à des passages rappés (sur Everything's
ruined), mais aussi à du plus musclé (Caffeine) ou sombre
(Smaller and smaller), le tout sans faute de goût (non, non,
Be aggressive et son chorus ridicule n'est pas une faute de goût,
c'est une des pistes les plus géniales du disque !), et, encore plus
surprenant, sans qu'on ait l'impression que l'album ne tienne pas
debout. Ah si, quand même, niveau faute de goût, le reprise sirupeuse du
Easy de Lionel Ritchie qui a été ajoutée en fin d'album est à
fuir absolument. Et dire que c'est ça qui a fait vendre le disque alors
qu'on a à l'autre bout un Land of sunshine que personnellement je
peux écouter dix fois de suite sans me lasser...
- Faith No More - King for a day, fool for a lifetime (1994) ★ ★ ½
Le principal défaut de cet album, c'est tout bêtement de succéder à la
réussite exceptionnelle qu'était Angel dust. On ne peut pas
s'empêcher de se dire que c'est un peu la même chose, mais en (beaucoup)
moins bien. De fait, les ingrédients n'ont pas vraiment changé : un fond
metal (dans l'assez bon The Gentle art of making enemies par
exemple) largement agrémenté de digressions qui partent dans tous les
sens (le côté funfy/jazzy de Star A.D. avec sa trompette,
l'ambiance bossa de Caralho voador, et d'autres choses moins bien
identifiées). Le problème, patent dès le début de l'album, c'est que
l'inspiration s'est sensiblement tarie, et que le côté hétéroclite de la
chose s'en ressent nettement. D'ailleurs, comme pour compenser les
faiblesses musicales, Patton, plus caméléon que jamais, en fait vraiment
des tonnes niveau chant, quitte à tomber parfois dans le n'importe quoi,
les hurlements de Cuckoo for caca (quel titre !) ou les
bizarreries de Ugly in the morning me font presque préférer les
titres où il repasse en mode crooner (plutôt en fin d'album). L'ensemble
reste très écoutable, mais plus comme on écouterait une radio alignant
des titres de styles différents que comme un album vraiment riche et
consistant.
- Faith No More - Album of the year (1997) ★ ½
On sentait bien déjà sur l'album précédent que Faith No More avait eu du
mal à enchaîner après Angel Dust, mais c'est encore plus
manifeste sur cet album franchement plat qui ne peut que décevoir de la
part du groupe. Malgré la durée assez réduite, c'est presque déjà trop
long, les titres s'enchaînent avec toujours une variété appréciable,
mais bien peu accrochent vraiment l'oreille (citons quand même le rigolo
Mouth to mouth avec sa rengaine orientalisante au synthé, ou
l'efficace mais bien court Home sick home) et certains tombent
même dans le vraiment sans intérêt (la dernière piste Pristina
par exemple). S'il n'y avait pas Mike Patton pour animer un peu tout ça,
il ne resterait pas grand chose à se mettre sous la dent. Une
constatation d'ailleurs probablement partagée en partie par le groupe,
qui a décidé après cet album de se séparer pour une longue période.
- Faith No More - Sol invictus (2015) ★ ★ ★ ½
Il est loin d'être rare, surtout dans la sphère metal, qu'un groupe,
après plusieurs changements de line-up, revienne faire un album dans une
formation identique à celle qu'il avait eue dix ou quinze ans avant.
Mais refaire un album, sans changement de formation, après 18 ans sans
rien (le groupe ayant simplement cessé d'exister pendant une grande
partie de cette période), ça doit être un petit record que détient là
Faith No More. Du coup, la question de l'intérêt de cette résurrection
se pose forcément, surtout au vu du niveau franchement pas
enthousiasmant des derrières sorties du groupe dans les années 90.
Première bonne nouvelle, le style n'a pas du tout changé, c'est à peine
si on se rend compte que le temps a passé, et Patton chante toujours
tout et n'importe quoi avec la même aisance. Mais surtout, eh bien
l'album est loin d'être mauvais ! Varié comme il se doit, des refrains
efficaces, quelques incursions vers des domaines encore inexplorés (le
côté "western désabusé" de Cone of shame, le piano très présent
dès la première chanson titre), des progressions dynamiques assez
impressionnantes (sur Rise of the fall notamment), ça fonctionne
vraiment pas mal. Petite déception quand même : c'est assez court (à
peine 40 minutes) et à part peut-être Superhero, il y a peu de
titres qui envoient vraiment. Mais bon, pour un retour, c'est
franchement encourageant !
- Gojira : Terra incognita (2000) ★ ★ ★ ★
Ce qui est bien vu ma méconnaissance assez totale des nombreuses
ramifications et autre sous-genres du metal (note : cette critique est
une des premières que j'ai tapées, ça a forcément un peu évolué depuis),
c'est que quand je découvre un nouveau groupe, je n'ai à peu près aucune
idée de ce qui va me tomber dans les oreilles. Je me demandais la
première fois que j'ai entendu chanter Joe Duplantier (collaboration
avec Apocalyptica) si c'était représentatif de ce qu'il fait avec
son groupe, j'ai maintenant un début de réponse : Gojira c'est
effectivement du bourrin, avec des riffs bien bien lourds et chant
guttural de rigueur la plupart du temps. Mais, et c'est tant mieux,
c'est aussi contrebalancé par l'apport rythmique de la batterie, et
quelques plages plus atmosphériques (les pistes plus courtes qui servent
d'intro à certains titres) bienvenues pour respirer un coup (même si
j'avoue toujours me demander si les cris en fond dans 1990
quadrillions de tonnes ne sont pas franchement insupportables). En
tout cas, les titres les plus marquants (Clone, Space
time) sont vraiment d'une puissance dévastatrice, ça nettoie les
oreilles ! Mes petits reproches tout de même : l'ensemble reste assez
monolithique, et le type de voix utilisé n'a vraiment aucun intérêt à
mon goût (mais ça je risque de le retrouver chez pas mal de groupes). Un
très bon premier album en tout cas.
- Gojira - The Link (2003) ★ ★ ★ ★
Pas d'évolution très notable sur ce deuxième album, le groupe reprend
les mêmes recettes avec la même efficacité, même s'il y a peut-être
moins de titres vraiment énormes que dans leur premier opus. C'est
toutefois compensé à mon sens par la présence en dernière piste d'un
très bon instrumental qui joue déjà un peu plus la carte du mélodique.
Ca reste en tout cas très bon.
- Gojira - From Mars to Sirius (2005) ★ ★ ★ ★ ½
Un peu plus de variété peut-être dans ce troisième album, mais ça reste
quand même dans l'ensemble bien lourd, comme en atteste l'enchaînement
des trois premiers titres qui ne laissent que peu de répit à l'auditeur.
On pourrait presque même reprocher à Gojira de tourner un poil en rond,
le riff qui ouvre Ocean planet, avec ses espèces de glissandi de
guitare vers l'aigu, ayant comme un air de déjà entendu. Mais en même
temps, la chanson est tellement énorme qu'on ne peut que s'incliner. Je
suis moins fan de From the sky avec sa batterie en mode
mitraillette, mais ensuite, tout est vraiment excellent, de la
parenthèse Unicorn à l'intro inattendue de Global warming
(là pour le coup, on s'éloigne effectivement sensiblement du metal
bourrin), en passant par la superbe Flying whales (et son intro
plus mélodique qu'à l'habitude), sans parler bien sûr du dyptique qui
donne son nom à l'album. Si je devais mettre un léger bémol, ce serait
une certaine répétitivité dans certaines pistes, qui pourrait peut-être
disparaître avec un travail encore un peu plus poussé sur l'aspect
mélodique. Mais bon, c'est vraiment un excellent album, encore un cran
au-dessus des deux premiers à mon avis.
- Gojira - The Way of all flesh (2008) ★ ★ ★ ★ ½
Le tournant du groupe vers une musique un peu plus variée me semble plus
manifeste dans cet album que dans le précédent. Rien que l'intro du
premier titre Ouroboros, avec des guitares qu'on pourrait presque
retrouver chez Muse (bon, ok, j'exagère sûrement, mais je manque
de références, mais ça sonne plus électro que metal brutal quoi) change
d'atmosphère, et ce n'est pas un mal d'ailleurs car la chanson est
excellente. On retrouve plus loin des pistes nettement plus bourrines,
avec du mitraillage de batterie parfois très bien exploité (dans
Toxic garbage island), parfois moins (All the tears), et
aussi l'incontournable intro instrumentale "atmosphérique" dans
Silver chord. Une ou deux pistes moins inspirées (j'aime
moyennement Yama's messengers), mais toute la fin de l'album est
à nouveau assez exceptionnelle, avec entre autre un Wolf down the
earth qui s'essaye vraiment à quelque chose de plus mélodique et qui
est à mon sens aussi réussi que les incontournables The art of
dying ou la piste éponyme qui l'entourent. Bref, malgré de légers
coups de moins bien, encore de l'excellent.
- Gojira - L'enfant sauvage (2012) ★ ★ ★ ½
Peut-être une petite lassitude de ma part, mais j'ai trouvé ce cinquième
album moins convaincant que les précédents. Ca commence pourtant très
bien avec notamment la piste éponyme où la musique du groupe est
simplement belle (pas le premier adjectif que j'aurais utilisé pour
décrire même les pistes les plus réussies de leurs premiers albums).
Mais ensuite, je trouve que ça commence à tourner en rond, surtout dans
les pistes les plus brutales où le discours peine à se renouveler. Les
meilleures surprises viennent plutôt des titres un peu plus
mélodiques/électro (j'aime bien Born in winter par exemple).
Entendons-nous bien, ça reste de bonne facture dans l'ensemble, mais un
peu plus inégal que d'habitude peut-être.
- Gojira - Magma (2016) ★ ★ ★ ½
Un album dans la droite ligne du précédent, on s'éloigne de plus en plus
de la brutalité frontale des débuts (peu de pistes avec voix gutturale,
on croise de plus en plus de "choeurs atmosphériques" à la place),
pourquoi pas, mais tout n'est pas réussi (la chanson qui donne son titre
à l'album me laisse assez perplexe, dans ce nouveau genre j'aime
nettement plus Low lands par exemple) et à nouveau les quelques
pistes bourrines sont en-dessous de ce que faisait le groupe dans ses
premiers albums (The Cell par exemple, c'est moyen ;
Silvera est très sympa mais sent à nouveau le recyclage de riff
pour l'intro). Tout cela reste largement plus qu'acceptable (de toute
façon, aucun mauvais album sur ceux produits par Gojira à ce jour), mais
ma préférence va clairement plus à From Mars to Sirius et The
Way of all flesh.
- Gojira : Fortitude (2021) ★ ★ ★ ★
Les Landais les plus célèbres de la planète metal sont de retour et,
après un ou deux albums qui m'avaient (un peu) moins convaincu, c'est à
nouveau du très bon. Le groupe semble ménager la chèvre et le chou en
proposant quelques titres bien lourds faisant des allusions presque
directes à leur "premier style" (les motifs rapides de Born for one
thing ou les glissandos de guitare sur Newfound), mais aussi
des échappées vers des contrées nettement moins habituelles pour eux.
C'est d'ailleurs dans ces dernières que se trouve pour moi le meilleur
de l'album, l'atmosphère de transe de Amazonia avec sa guimbarde
pas loin d'être énervante et surtout la mélodie hypnotique de la chanson
titre reprise dans le superbe The Chant. Dans un style plus
balisé, j'aime aussi beaucoup Sphinx. Le reste de l'album ne
démérite pas, mais reste plus prévisible, ça sonne parfois un peu comme
du déjà entendu.
- Haken - Aquarius (2010) ★ ★ ★ ★ ★
Voilà un disque que j'aurai écouté un certain nombre de fois avant d'en
parler ici, mais ces écoutes répétées auront été salutaires dans la
mesure où ma première impression aurait plutôt été "Mais qu'est-ce que
c'est que cette musique de cirque ? C'est tout sauf du metal". De fait,
après avoir écouté l'album en entier, je reste assez perplexe sur ce
qu'est censée regrouper l'étiquette "metal progressif". Progressif, oui,
je vois bien (les titres qui durent 10 à 20 minutes avec de nombreux
changements de ton, les longs passages instrumentaux très travaillés),
mais metal ? On entend globalement autant les claviers que les guitares,
qui saturent fort rarement, et le chant est axé pop la plupart du temps
(à quelques incursions notables près de voix gutturales, j'avoue que
l'intrusion de l'orgue puis de la voix au beau milieu de Streams
est assez fascinante). À part un titre comme Drowning in the
flood qui est plus énergique, je n'aurais en tout cas naturellement
pas du tout classé ça comme du metal, progressif ou pas.
Bon, après tout, peu importe, l'essentiel est que ce soit de la bonne
musique. Et je dois avouer qu'après cette mauvaise première impression,
je me suis laissé peu à peu envoûter. Dès la fin de la première écoute
complète, j'avais envie d'y revenir, et maintenant je suis vraiment
conquis. Les inserts a priori étranges de musique de cirque (mais oui !)
ou les allusions orientalisantes (les percussions de Sun) ne sont
jamais gratuites, tout ça est remarquablement agencé et tout bonnement
très prenant. J'aime particulièrement The Point of no return,
Aquarium et Celestial elixir, mais chaque chanson a au
moins un moment marquant (le passage instrumental génial à la fin de
Eternal rain par exemple, qui sauve à lui tout seul une chanson
qui serait peut-être sinon plus quelconque que les autres).
Quelques petits bémols pour aller chercher la petite bête : dommage que
les deux pistes extrêmes (la première et la dernière, par ailleurs
excellentes) utilisent un peu trop les mêmes ficelles (le début des deux
chansons est vraiment très similaire), et surtout je suis assez
moyennement convaincu par le chant globalement très pop (la voix n'a par
ailleurs pas tellement de relief en elle-même), mais au pire, puisque
j'ai la réédition de 2017 sous la main, je peux tout écouter en version
purement instrumentale (ce que j'ai d'ailleurs déjà fait pour
l'intégralité des pistes !). Rien que pour le fait de m'avoir à ce point
fait adhérer à une musique a priori "pas trop pour moi", ça mérite la
note maximale.
- Haken - Visions (2011) ★ ★ ★ ★ ★
Un deuxième album dans la droite ligne du premier, formidablement lancé
par l'introduction instrumentale (on aurait presque envie de dire
"orchestrale") Premonition, qui présente en quelque sorte les
thèmes musicaux du voyage auquel nous sommes conviés tout au long de
l'album, et annonce une approche peut-être plus centrée sur la mélodie
qu'Aquarius, mais qui ne dédaigne pas pour autant les sorties de
pistes inattendues (les musiques de cirque ont été mises de côté, on a
droit cette fois à des bidouilles de synthé façon jeu vidéo vintage dans
Insomnia ou à un break jazzy dans Visions) mais toujours
aussi bien intégrées dans la progression d'ensemble. C'est de toute
façon toujours aussi magistralement construit, par exemple dans
l'enchaînement The mind's eye - Portals -
Shapeshifter qui démarre avec une rengaine presque pop, oblique
vers un instrumental chiadé et termine carrément en apothéose avec la
conclusion monumentale de Shapeshifter. Comme si tout ça ne
suffisait pas, après un Deathless plus atmosphérique qui fait la
part belle aux claviers (mais sans aucune baisse d'intensité ni de
qualité), on a droit à une dernière piste qui développe toutes les
influences du groupe sur plus de 20 minutes, avec des trouvailles
permanentes toutes plus inoubliables les unes que les autres (j'aime
particulièrement le passage un peu après 15'). Bref, sur le cul je suis,
et cet album va rejoindre le précédent dans la catégorie
"incontournables".
- Haken - The mountain (2013) ★ ★ ★ ★ ★
Jamais deux sans trois ? Eh bien oui, troisième album pour Haken,
troisième tuerie. Il est quand même fascinant de constater à quel point
ces gars arrivent à conserver une vraie personnalité tout en mêlant des
tas d'influences diverses (une chanson comme Atlas stone, c'est
totalement "hakenesque"), et à se renouveler d'un album à l'autre sans
perdre en qualité ni s'éparpiller. Cette fois-ci l'accent est mis sur le
travail de la voix, ou plutôt des voix : choeurs discrets en fond de
l'introduction assez majestueuse (c'est le thème de l'album qui veut ça
aussi, en fin d'album Somebody se termine carrément en apothéose
orchestrale), jeux d'échos à plusieurs voix sur Cockroach king,
et carrément de la polyphonie a cappella pour Because it's there.
J'avoue d'ailleurs ne pas aimer outre mesure cette dernière piste, en
partie justement parce que le chant choral ne fait pas partie des choses
qui me passionnent (et même en fin de chanson, l'accompagnement assez
minimaliste avec ces espèces de bruitages scratchisants ne me convainc
pas). Autre déception pour moi sur cet album, le court intermède As
death embraces, espèce de romance avec piano qui me semble très
dispensable. Mais tout le reste est une fois de plus absolument
monstrueux, hyper inspiré mélodiquement, super bien construit, les
titres frôlent ou dépassent les 10 minutes (pas de monstre à 20 minutes
cette fois-ci par contre) mais on a l'impression que ça en a fait à
peine deux tellement c'est bon. Je pourrais presque tout citer parmi les
morceaux incontournables : Falling back to earth assez sauvage
(là, ça ressemble plus à du metal !), la superbe Somebody et son
apogée déjà citée ou les motifs orientalisants de Pareidolia,
mais le top du top pour moi, c'est vraiment le Cockroach king
(titre peu engageant pourtant) : l'entrée des voix est géniale, le motif
principal entêtant, c'est hyper varié, l'intérêt ne retombe jamais, je
peux me la mettre en boucle deux heures sans me lasser.
- Haken - Affinity (2016) ★ ★ ★ ★
Après une intro parsemée de bip-bips façon film de SF un peu vintage, le
doute n'est plus permis quelques minutes plus tard quand démarre la
chanson 1985 (au titre certes assez peu mystérieux !), c'est à
une plongée dans le passé que nous convie cette fois Haken, avec boules
à facettes (bon, ça, on ne les entend pas, mais on peut les imaginer) et
sons de synthé qui sentent bon le disco. Le risque de tomber dans le
cliché kitshouille ? À vrai dire, oui ... et c'est tant mieux ! En
effet, ce 1985 a un côté régressif assumé hyper réjouissant, et
il emporte une fois de plus le morceau par sa construction impeccable.
On pense donc être bons pour un nouveau chef-d'oeuvre, surtout quand
débute superbement la chanson la plus longue de l'album, The
architect, avec son gros quart d'heure de musique. Et puis, bah, je
ne sais pas, mais le long développement instrumental me semble moins
imaginatif et fluide que d'habitude, l'irruption soudaine du chant
guttural pas très bien placée, bref pour la première fois peut-être avec
Haken, je me demande si la longueur du morceau est bien justifiée, même
s'il comporte de très beaux moments. La fin de l'album va un peu
confirmer cette relative baisse d'inspiration, avec des titres
sympathiques mais qui n'apportent pas la touche de génie habituelle
(Earthrise un peu trop pop, Bound by gravity globalement
assez planplan). Entendons-nous bien, ça reste un très bon album, avec
une première moitié encore assez exceptionnelle, mais, en comparaison
avec les sommets précédents, plus inégal et donc forcément un peu
frustrant. Je vais quand même me remettre 1985 une ou deux fois.
- Haken - Vector (2018) ★ ★ ★ ★ ½
Grosse surprise en découvrant ce cinquième album du groupe, il ne dure
"que" 45 minutes (soit quand même quasiment une demi-heure de moins que
leurs premiers opus). Un signe du ralentissement de l'inspiration déjà
perceptible dans la fin d'Affinity ? Pas vraiment en fait, plutôt
une volonté manifeste de se recentrer sur les fondamentaux du groupe et
de proposer un album sans fioritures (une seule piste de plus de 10
minutes, un nombre restreint de chansons), qui se confine d'ailleurs
presque entièrement dans une atmosphère assez musclée. Exit ou presque
les synthés au premier plan (à part la première minute introductive de
Veil), et seule Host tente vraiment une sortie de piste
avec sa trompette aux accents oniriques (pas ma chanson préférée de
l'album d'ailleurs). Pour le reste, après une intro aux accents
industriels redoutablement efficace (comme d'habitude), on se balade en
terrain connu, trop connu peut-être dans un Good doctor qui n'est
pas loin du recyclage, mais les titres suivants (Puzzle box,
Veil et l'instrumental Nil by mouth) montrent que le
groupe n'a rien perdu de sa capacité à créer des mélodies enivrantes et
des structures léchées où il n'y a rien à jeter. La dernière piste A
cell divides conclut en beauté l'album avec sa mélodie vraiment
entêtante, encore une très très belle réussite globale même si c'est
bien sûr un peu moins ambitieux que les trois premiers albums du groupe.
- Haken - Virus (2020) ★ ★ ★ ★ ★
Dernier album d'Haken en date, et ça annonce la couleur dès le début,
c'est du Haken tout muscles dehors auquel on a droit. Autant vous dire
que c'est parfait pour moi, d'ailleurs j'adore ce Prosthetic
initial que j'ai du écouter quelques douzaines de fois en quelques jours
: riff initial énorme, mélodie qui contraste et qui reste bien en tête,
changements de direction permanents et toujours réussis, c'est tout
bonnement énorme. Le reste de l'album ne démérite d'ailleurs pas le
moins du monde, avec des titres plus "classiques" comme Invasion
ou Carousel, et un déchaînement total dans la suite Messiah
complex qui ne laisse que peu de répit pendant un gros quart d'heure
de musique découpé en cinq morceaux. Pas sûr d'avoir tout compris aux
auto-références du groupe (on entend des bouts de Cockroach
King), mais peu importe, ça envoie sévère. On est presque tout
surpris que le disque s'achève aussi vite ensuite (après une conclusion
Only stars qui est le seul titre apaisé), mais on a quand même eu
droit à nos 50 minutes de musique de très haut niveau. Si Haken conserve
cette option plus metal en réussissant à ne pas perdre sa capacité à
créer des mélodies mémorables, franchement, j'en redemande volontiers.
Dans tous cas, puisque j'arrive au bout de leur discographie, voilà un
groupe que je ne regrette certes pas d'avoir découvert, et donc je
réécouterai les disques à intervalles (très) réguliers.
- Haken - Fauna (2023) ★ ★ ★
Ah, un nouvel album de la part des génies anglais d'Haken, chouette !
Quelle sera cette fois-ci l'orientation de leur musique, eux qui
réussissent toujours à donner une touche personnelle à chacun de leurs
albums ? Eh bien, à part la thématique animalière mise en avant par la
pochette, pas grand chose en fait, il s'agit probablement du disque le
plus éparpillé du groupe, mais aussi assez clairement celui où il
cherche le plus à produire une musique accessible (par ailleurs, le côté
très musclé de Vector/Virus est complètement laissé de
côté). Peu de titres à rallonge, des accompagnements épurés (Islands
of the clouds), et même quelques titres quasiment pop (le bizarre
The Alphabet of me, et le bien trop calibré Lovebite),
c'est franchement décevant de la part d'Haken. Alors certes, on
reconnaît quand même le style inimitable du groupe dans Taurus ou
Beneath the white rainbow (avec ces rythmes très hachés), mais
sans les envolées géniales qui donnaient le grand frisson sur les albums
précédents. Il faut en fait attendre l'avant-dernière piste,
Elephants never forget, pour retrouver un Haken vraiment
ambitieux et pleinement satisfaisant. Sans être un mauvais album (ça
reste évidemment d'une maîtrise bluffante), ce Haken soft est pour moi,
d'assez loin, le plus oubliable disque de leur discographie
exceptionnelle.
- Helloween - Walls of Jericho (1985) ★ ★ ★ ½
Je dois bien l'avouer : avant de commencer cette série de chroniques, je
n'avais écouté Helloween alors même que le groupe est considéré comme un
des pionniers d'un genre que j'adore, celui du power metal. Erreur
manifeste de ma part, désormais réparée, et franchement je ne regrette
pas, malgré les défauts évidents de ces deux premières tentatives. Ah
oui, précisons tout de suite que le disque aujourd'hui vendu comme le
premier album du groupe allemand est en fait une concaténation du "vrai"
premier album (la deuxième moitié du disque) et d'un EP sorti quelques
mois avant. Assez curieusement d'ailleurs, l'EP est peut-être encore
meilleur que la suite. Bien sûr, il faut supporter la justesse très
approximative et les départs dans l'aigu pas franchement maîtrisés de
Kai Hansen (qui abandonnera très vite le poste de chanteur), mais pour
le reste on a déjà les éléments qui feront le bonheur du genre (ça va
presque tout le temps vite, c'est très mélodique avec des refrains
souvent chantés en choeur et bien basiques, et surtout il y a ce côté
épique qui doit porter les chansons), mais avec une assise "heavy metal
classique" (l'influence de Maiden notamment est même très frappante sur
certains titres) qui évite les débordements (ça ne sonne pas encore
carton-pâte comme ça pourra être le cas pour des groupes de générations
ultérieures, il faut dire aussi qu'on est encore loin de la volonté de
créer une musique "symphonique" ici, pas de claviers à l'horizon à une
exception notable près). Bref, même si c'est un peu brouillon et pas
enregistré de façon optimale, c'est souvent assez irrésistible
(Victim of fate, ou Ride the sky, c'est vraiment très
bon), même si certaines pistes ratent franchement leur effet
(Reptile et son refrain raté ou Guardians qui sonne
presque générique de dessin animé japonais des années 80). On a souvent
l'impression que ça ne se prend pas très au sérieux (l'intro de
Starlight, ou même ce Walls of Jericho avec sa chanson
enfantine reprise aux trompettes synthétiques...), et tant mieux, c'est
rafraîchissant au possible à défaut d'être vraiment un album majeur
(honnêtement je ne le conseillerais pas à ceux qui ne sont pas déjà
emballés par le genre).
- Helloween - Keeper of the seven keys, Part I (1987) ★ ★ ★ ★ ★
Après avoir initialement hésité à les regrouper dans une même critique,
j'ai finalement décidé de séparer les deux volets de la saga culte des
débuts d'Helloween car mon jugement à leur sujet n'est pas franchement
homogène (oui, je spoile, c'est mal). Après tout, même si c'était contre
la volonté des musiciens, ils sont bien sortis séparément à l'époque,
donc soyons cohérents. Concernant le premier disque du groupe, j'avais
dit qu'il annonçait pas mal de choses "tout en restant solidement ancré
dans sa base heavy metal classique". Soyons clairs, là on fonce tête
baissée dans tous les excès qui resteront indissociables du genre de
metal qu'Helloween a contribué à créer, à tel point qu'on a l'assez
curieuse impression d'entendre parfois une sorte de parodie de choses
qui ont été faites des années après ! Le chanteur a changé (tant mieux)
mais on garde un chant (sur)aigu qui peut vite fatiguer, les refrains du
choeur sont d'une nunucherie pop assez terrifiante (sur I'm alive
et A little time), les bruitages insérés par endroits sont
risibles (le break de Future world, c'est énorme !), et on a même
droit à une ballade braillée à plein poumons dans le suraigu par Kiske
qui a de quoi faire fuir. Et malgré tout ça, cet album est absolument
jouissif, si on aime le genre, c'est épique, emballant, la chanson
(presque) finale Halloween et ses 13 minutes passe comme une
lettre à la poste (ce cri qui introduit le refrain !), et arrivé à la
fin, on court remettre le disque dans le lecteur pour profiter une
nouvelle fois des monumentaux deux premiers titres. Oh, puis allez, de
tout le reste aussi, ce serait dommage de s'arrêter en si bon chemin. De
mauvais goût, complètement caricatural, hyper daté, et pourtant
complètement indispensable.
- Helloween - Keeper of the seven keys, Part II (1988) ★ ★ ½
Un an après, voici donc la deuxième moitié des 7 clés (ça en fait trois
et demie ?) qui débarque. Difficile de passer après l'album précédent,
mais le groupe ne prend pas de gros risques en gardant une formule très
similaire : un titre de 13 minutes en quasi conclusion, quelques pistes
bien speed et épiques, une ballade au milieu, les ingrédients sont les
mêmes et pourtant l'impression est différente. D'abord on a une légère
déception en se rendant compte qu'on a effectivement droit au même type
de musique, en un peu moins inspiré (niveau morceaux rapides, Eagles
fly free joue bien son rôle de tube mais sans attendre le côté
"classique immédiat" d'un I'm alive, et March of time ne
réussit pas vraiment à atteindre le grandiose souhaité ; quant à la
ballade, We got the right tombe encore plus dans la caricature se
reposant uniquement sur la voix de Kiske). Pire, il y a des chansons
assez poussives dans le lot (You always walk alone) et surtout le
côté "délire pas sérieux" déjà constaté à quelques reprises sur les
albums précédents passe carrément au devant de la scène lors de
l'enchaînement de la ridicule Rise and fall (les bruits d'animaux
de la ferme, c'est vraiment too much, pardon "zu viel") et d'un Dr.
Stein qui me laisse grandement perplexe (intro inquiétante suivie
d'une chanson sautillante et guillerette qui prend la tête au sens
propre, c'est pour le moins inattendu sur ce thème). On ne sait plus
trop où on est, mais heureusement le disque est sauvé par la
chanson-titre, beaucoup plus calme que le Halloween concluant
l'album précédent, mais absolument superbe (l'intro, le refrain, tout
est parfait ici). Concluant ? Ah non pardon, ils ont cru bon d'ajouter
ensuite une dernière chanson qui retombe dans la mièvrerie fort
dispensable. Honnêtement, sans la chanson-titre, cet album tomberait
vraiment dans la catégorie "navet musical", Helloween s'en sort de peu
pour cette fois.
- Helloween - Pink bubbles go ape (1991) ★
En trois albums, le groupe allemand s'est fait une place de choix au
panthéon du metal, que pouvait-il lui arriver pour l'empêcher de
continuer à surfer sur le succès ? Tout simplement, perdre Kai Hansen
une deuxième fois. La première fois, ils avaient perdu le chanteur, loin
d'être un drame. Mais la deuxième fois, c'est le guitariste compositeur
qui s'est fait la malle, et avec lui toute la tendance "fantasy épique"
du groupe s'est barrée aussi. Du coup, changement de direction
artistique aussi radical qu'incompréhensible, matérialisés par un titre
et une pochette pour le moins abscons. Malheureusement, niveau musique,
c'est à peine plus cohérent, et surtout trop souvent peu inspiré.
Helloween n'était déjà pas au top de la modernité niveau son pour un
groupe de metal (mais étant le précurseur d'un nouveau genre, on pouvait
difficilement les taxer de conformisme), là on fait encore un gros pas
en arrière avec des titres qui sonnent plus rock des années 80 (voire
avant) que metal début 90 (Back on the streets ou le très laid
I'm doing fine, crazy man). Bon, pourquoi pas, mais il y a quand
même dans le lot pas mal de choses qui virent à la pop FM dont on se
serait bien passés (la batterie de Goin'Home, c'est complètement
horripilant, The Chance se vautre dans la facilité). Au milieu de
tout ça, quand même deux ou trois chansons qui jouent encore la carte du
tempo enlevé, sans approcher les classiques précédents du groupe
(Kids of the century ouvre correctement l'album, Someone's
crying est vraiment moyenne), et un drôle d'ovni qui part dans tous
les sens mais a la mérite d'essayer (Mankind et ses choeurs quand
même bien nunuches). Finalement, ce que je préfère c'est peut-être la
basique mais fun Heavy metal hamsters, en serais-je venu à
regretter les délires "happy" des albums précédents ?
- Helloween - Chameleon (1993) ☆
Si Pink bubbles go ape avait de quoi surprendre et décevoir, ce
Chameleon affiche la (ou plutôt les) couleurs sur la pochette, on ne va
pas revenir en arrière mais plutôt enfoncer le clou avec un disque qui
part encore plus dans des directions variées et assez peu cohérentes,
laissant le speed metal, et même le metal tout court, assez loin
derrière lui. Pourtant, le First time qui ouvre l'album est assez
dans l'esprit des premiers albums du groupe. Mais ce ne sera qu'une
illusion, ensuite on a droit en vrac à des guitares acoustiques (I
don't wanna cry no more, je n'ai pas une culture musicale assez
étendue pour dire à quoi ça peut ressembler, mais pas du tout à du
Helloween, ni même à du metal ou simplement du hard rock), du piano (et
effets "mandolinesques" assez ridicules, sur le très crémeux et spécial
Windmill), beaucoup de touches orchestrales (Music ou I
Believe auraient pu être intéressantes, si elles ne s'étalaient pas
sur près de 10 minutes en ayant bien trop peu à dire), et surtout des
fanfares de cuivres qui donnent franchement l'impression d'entendre un
big band qui s'est adjoint les services d'un groupe de rock pour
enrichir sa palette et pas le contraire (Crazy cat, ça a le
mérite d'être rigolo, mais bon, ce n'est pas vraiment ce qu'on est venus
écouter, et dans ce genre-là, quantité de groupes plus spécialisés ont
fait largement mieux). Mais surtout, le gros problème, c'est qu'en plus
de manquer cruellement d'homogénéité, le disque peine à convaincre tout
simplement car pratiquement aucune piste n'est marquante. On atteint au
mieux le passable (Giants mérite d'être sauvée malgré la fin trop
grandiloquente, Step out of hell retrouve un côté plus rock
sympa), au pire le franchement mauvais (In The night). Même avec
toute la bonne volonté du monde, difficile d'être emballé par cet album,
ni même d'avoir envie de le réécouter. Ah si quand même, pour son
dernier album avec le groupe, Kiske a l'air de plutôt s'amuser...
- Helloween - Master of the rings (1994) ★ ★
L'heure du grand ménage a sonné pour Helloween (il était temps vu
l'album précédent) : changement de batteur, changement de chanteur et
retour à un style beaucoup plus orienté metal et surtout beaucoup plus
lisible. L'introduction symphonique néoclassicisante est de trop, mais
Sole survivor rassure, le groupe est à nouveau capable de
produire des titres musclés, rapides et convaincants. Seule question, le
choix d'Andi Deris pour succéder à Michael Kiske est-il le bon ? Voix
moins aiguë (évidemment) mais surtout plus éraillée, on a d'abord le
sentiment que ça ne colle pas. Et puis finalement, même si ça change
forcément l'atmosphère générale (sur les titres les plus joyeux, ça
reste un peu problématique), le nouveau venu fait plutôt correctement le
job. Malgré tout, et même si le disque s'écoute agréablement, on reste
loin du chef-d'oeuvre, surtout en comparaison avec ce qu'Helloween a pu
faire auparavant (la comparaison est inévitable). Exit les titres
sophistiqués dont la durée dépasse les 10 minutes, exit les hymnes speed
à l'impact irrésistible, on a droit dans l'ensemble à des chansons
correctes, bien interprétées, mais sans grand plus (Where the rain
grows et son côté épique, la ballade In the middle of a
heartbit), et quand même à un ventre mou assez net avec des
tentatives de varier un peu le discours qui tombent à plat (Perfect
gentleman est assez bizarre, et avec The Game is on et ses
bruitages de vieux jeux video, on retombe hélas dans le comique pas
totalement volontaire). En fait, il faut être honnête, même si le nom
est resté le même, ce n'est plus le même groupe qu'avant, et celui-ci
est tout simplement moins intéressant (en première écoute, à peu près
tous les albums de la période Deris m'ont laissé cette impression "pas
si mal, mais peut clairement mieux faire", je ne suis pas sûr de
m'attarder sur tous, dans la mesure où il y en a quand même une longue
série !).
- Helloween - The time of the oath (1996) ★ ★ ½
Deuxième album du groupe avec Andi Deris, et la nouvelle formation
semble déjà bien en place. Niveau style un vrai retour à un metal axé
speed semble acté, ce qui est plutôt une bonne nouvelle. D'ailleurs le
disque débute avec un We Burn un peu brouillon mais surtout très
court et rapide, avec refrain basique qui tente le coup de la séduction
immédiate, c'est plutôt pas mal. Malheureusement, à force justement de
jouer la carte de l'immédiateté, le groupe finit trop souvent par tomber
dans la facilité, avec une overdose de mélodisme (si c'est moi qui dit
ça...) dans Power ou A Million to one, voire même du sirop
dégoulinant dans les ballades Forever and one et If I knew
(ceci dit, à ma grande surprise, Deris passe très correctement dans ces
chansons que je n'aurais pas du tout imaginé taillées pour lui).
J'aurais nettement préféré plus de tentatives épiques, même si on peut
quand même noter le retour d'un titre long (Mission Motherland et
ses neuf minutes), hélas très inégal (le refrain mielleux ne colle pas
du tout à l'ambiance lourde de l'intro, et le passage plus ou moins
planant vers la fin me laisse perplexe), et si la chanson-titre qui
conclut l'album tente aussi des choses intéressantes (même si j'entends
plus le Led Zep de Kashmir que du Helloween là-dedans).
Finalement, je me rends compte que peu de titres me semble réellement
convaincants (peut-être que je mettrais Steel tormentor en haut
de ma liste), alors même que l'écoute continue de l'album passe quand
même très bien. Je reste donc mi-figue mi-raisin, un peu comme pour
l'album précédent, même si celui-ci me semble un peu meilleur.
- Helloween - Better than raw (1998) ★ ★ ★ ½
Après deux albums pas franchement mauvais mais sans grand relief, je
n'attendais plus grand chose de la part d'Helloween période Kiske que
des disques plaisants mais sans plus. Bonne surprise inattendue donc, je
trouve que celui-ci dépasse assez nettement ce niveau-là, réussissant à
convaincre sans se prendre la tête et retrouvant une certaine efficacité
perdue depuis quelques albums par les citrouilles. Peut-être ai-je été
influencé par la pochette (d'assez mauvais goût mais que du coup je
trouve forcément très réussie !), qui résume finalement assez bien
l'esprit festif gentillet globalement à l'oeuvre. Pourtant, après une
intro symphonique (au clavier, hein, faut pas rêver non plus) assez
étendue dont je me garderai de donner le titre complet, le premier vrai
titre, Push, est inhabituellement agressif pour le groupe.
Disons-le tout net, Deris qui s'essaye au suraigu ça foire complètement,
mais pour le reste ça surprend, et c'est plutôt pas mal. Le reste sera
toutefois plus léger, parfois même trop (les bruitages électro et
l'ambiance pop de Hey Lord, bof bof, par contre le délire en
latin de Laudate dominum est absolument excellent), mais les
titres classiquement speed sont vraiment bons (I can, qui
retrouve le côté directement entêtant des premiers succès du groupe, ou
Midnight sun qui achève le disque). Quelques tentatives de se
renouveler également (l'etonnant Time), un titre de huit minutes
presque intéressant de bout en bout (Revelation), on n'est pas
revenu au niveau chef-c'oeuvre, mais franchement, dans l'ensemble, c'est
plus que pas mal du tout.
- Helloween - The Dark ride (2000) ★ ★ ★ ½
Ayant volontairement sauté le disque de reprises Metal Jukebox
(il faut cependant écouter Hocus Pocus pour constater que les
allemands sont capables d'aller très loin dans le délire...), j'entame
les années 2000 à la suite d'Helloween avec une proposition qui annonce
d'entrée (pochette et titre) une couleur beaucoup plus sombre qu'à
l'habitude. En réalité, le groupe n'a pas non plus embauché de musiciens
norvégiens, Andi Deris ne s'est pas converti au growl monstrueux, ça
reste un album d'Helloween tout à fait normal et globalement assez
joyeux. C'est d'ailleurs frappant dès la première chanson, Mr.
Torture, qui exhibe un refrain bien entraînant en contradiction à
peu près totale avec le thème de la chanson (on n'est pas si loin d'un
Dr Stein de ce point de vue). Peu importe d'ailleurs, ça
fonctionne très bien ! Allez, pour être honnête, on notera quand même un
ou deux riffs vraiment plus lourds qu'à l'habitude (sur I Live for
your pain par exemple) et des guitares accordées un peu plus bas
(Escalation 666 a une couleur plus sombre, on ne peut pas le
nier). Mais ce qui fait vraiment l'intérêt du disque, ce sont des
refrains qui font mouche quasiment à chaque fois, sauvant d'ailleurs une
ou deux chansons à l'accompagnement un poil paresseux (The
Departed, We damn the night). On a aussi droit à un If I
could fly au piano envahissant (je n'arrive pas à me convaincre que
ce machin n'est pas de mauvais goût, mais personnellement j'aime), et
surtout une conclusion sur un titre plus long qui tente une nouvelle
fois de renouer avec les grands classiques épiques du groupe... en
réussissant à moitié (c'est tout à fait correct, mais loin d'un
Keeper of the seven keys (la chanson)). Un peu à l'image de
l'album : très bien, mais rien d'exceptionnel non plus.
- Helloween - Rabbit don't come easy (2003) ★ ★ ½
Après deux albums réussis, Michael Weikath, plus ou moins leader du
groupe depuis un certain temps, a décidé qu'Helloween faisait fausse
route et viré deux des musiciens qui avaient permis au groupe de
remonter la pente après son trou noir du début des années 90. Voila
quelqu'un qui a le sens de l'à propos. Quand en plus on constate que le
premier album du nouveau line-up présente une pochette pour le moins
étrange et un titre qui va avec, de douloureux souvenirs remontent à la
surface... Mais en fait non, ce lapin n'est pas aussi raté que le singe
ou le caméléon qui l'ont précédé. C'est même du Helloween pur jus, speed
la plupart du temps (Just a little sign, Hell was made in
heaven, deux titres qui fonctionnent bien), "happy" régulièrement
(The tune, franchement énervant à force de jouer le côté
gnangnan), et même sombre à l'occasion (Back against the wall,
réussite qui prouve quand même que Weikath n'a pas complètement fermé la
porte au style entrevu dans The Dark ride). Tout ça se laisse
tranquillement écouter, mais sans jamais sauter au plafond, et même
parfois avec une certaine perplexité (les couplets reggeaeisants de
Nothing to say). Au fond, un album qui revient à ce qu'Helloween
a régulièrement produit depuis l'arrivée de Deris, du "pas mal mais peut
mieux faire", en retrait tout de même par rapport aux deux disques
précédents.
- Helloween - Keeper of the seven keys - The legacy (2005) ★ ★ ★ ½
Franchement, donner une suite (enfin non pardon, rendre un hommage, rien
à voir avec une suite !) à leurs disques cultes près de 20 ans après, et
bien entendu avec un groupe qui n'a plus grand rapport avec le line-up
de l'époque, ça sentait très fort la mauvaise idée (ou plus simplement
le besoin de faire du buzz et un peu de fric par la même occasion). Mais
le groupe assume crânement en proposant un double CD (bon, un double
dont la durée totale n'atteint pas les 80 minutes, ceci dit) dont chaque
volet est introduit par une piste qui dépasse allègrement les 10
minutes. Et même si on se sent un peu le cul entre deux chaises au
début, entre hommage forcé aux équivalents plus vraiment au goût du jour
des premiers Keeper et tentation de singer les groupes qui ont pris le
devant de la scène depuis (l'intro parlée et le caractère épique me font
penser à un Rhapsody certes beaucoup moins clinquant, mais il a
probablement des tas d'autres groupes qui ont produit des choses
similaires entre temps), force est de constater que The King for a
1000 years tient fort bien la route, une sorte de grand spectacle
bon enfant (touches orchestrales, choeurs, on a la totale) qui donne
simplement le sourire et la banane, du bon Helloween quoi. En
comparaison, Occasion avenue qui entame le second CD me semble
nettement moins maîtrisée (on a les mêmes éléments, mais avec un côté
nettement plus heavy que speed héroïque, et surtout ça part un peu dans
tous les sens, malgré l'hommage rigolo aux classiques du groupe pour
introduire la chanson). De façon générale d'ailleurs, le deuxième disque
ne propose rien de mémorable (allez, la conclusive My life for one
more day est assez réussie), les titres sont agréables mais pas
marquants, alors que le premier disque est vraiment très bien (j'adore
la trop courte Mrs God, et les plus classiques titres speed
Pleasure drone et Silent rain fonctionnent bien). Avec un
ensemble plus équilibré (ou bêtement un seul CD en fait...), on
atteignait facilement les quatre étoiles. Comme quoi les citrouilles en
ont encore sous le pied.
- Helloween - Gambling with the devil (2007) ★ ★ ★ ★
Au premier abord, je dois être honnête, j'ai vraiment peu apprécié ce
nouvel album des citrouilles, la faute principalement à une tentative à
mon avis malvenue de faire évoluer les sonorités du groupe vers quelque
chose de beaucoup plus électronique que précédemment. Quelques sons
"orchestraux" par-ci par-là pourquoi pas, mais les voix trafiquées de
façon aussi voyante, non, vraiment pas (sur As Long as I fall, y
en a vraiment un qui aurait du se calmer sur le vocodeur). Mais malgré
ça, je suis emporté une fois de plus par un bon nombre de titres qui
envoient généreusement et qui font mouche au niveau des refrains :
Kill it (malgré la voix, en plus des traficotages, Deris part
trop dans un aigu qui ne lui convient pas), Paint a new world,
l'excellente The Bells of the 7 hells ou la bien chargée
Dreambound. Mine de rien, une part non négligeable de l'album qui
tire vraiment bien son épingle du jeu. Le reste est un peu plus
quelconque, avec notamment quelques titres qui lorgnent vraiment trop
vers une pop sucrée un peu facile (ça marche toutefois très bien sur
Fallen to pieces et son refrain irrésistible, moins sur Final
fortune), et un passage obligé par la case "happy metal" avec un
Can do it qui n'est pas la réussite la plus éclatante du groupe
dans ce genre. Mais l'ensemble est vraiment plus qu'agréable à écouter,
Helloween prouve une fois de plus sa capacité à faire du solide malgré
les années qui passent et les quelques changements de personnel subis.
Allez tiens, pour les récompenser de leur ténacité, on monte à quatre
étoiles pour cette fois (même si je considère cet album à peu près au
même niveau que le précédent).
- Helloween - 7 sinners (2010) ★ ★ ★
Une décennie de plus qui s'ouvre, et les citrouilles sont toujours là,
plus en forme que jamais (ou presque). Cette nouvelle proposition
cherche assez manifestement à surfer sur le succès de la précédente : on
retrouve quelques traces de sonorités électroniques (moins que sur
Gambling with the devil toutefois) mais le plus marquant est la
volonté délibérée de rendre le son assez lourd et dense, pas franchement
l'habitude de la maison et surtout un virage assez surprenant quand on
sait que le dernier remaniement du groupe avait fait suite à un The
Dark ride jugé trop sombre (ben franchement, il est plutôt gentillet
en comparaison de celui-là, le sieur Weikath aura eu le temps de
retourner sa veste en quelques années). Quoi qu'il en soit, un Long
live the king très heavy fonctionne à mon goût fort bien, et un
titre assez basiquement bourrin comme Are you metal est aussi
efficace. Mais on a quand même droit à un certain nombre de titres speed
mélodiques dans la plus pure tradition du groupe (le bon duo de fin de
disque If a mountain could talk / The Sage, the fool, the
sinner, mais aussi la très "prise de tête" World of fantasy)
et bien sûr à la ballade de rigueur, ici The smile of the sun.
Cette dernière est d'ailleurs la transition rêvée pour évoquer les
défauts du disque, qui tombe parfois franchement dans la facilité :
cette ballade donc (aucune saveur), mais aussi la "suite" de Perfect
gentleman (intitulée Who is M. Madman) qui tire son principal
intérêt de ce qu'elle reprend sans vergogne de la chanson originale, et
quelques facilités d'écriture par-ci par-là, notamment des modulations
franchement téléphonées (eh les gars on est pas chez Goldman, la
modulation au demi-ton supérieur pour relancer la chanson en fin de
course, ça se voit !). À noter aussi une incongruité dont je n'arrive
pas à déterminer si c'est juste grotesque ou rafraîchissant : le solo de
flûte "Jethro Tullesque" au beau milieu de Raise the noise.
Encore un disque très agréable, mais un cran en-dessous de ses
prédécesseurs immédiats, attention à ne pas trop tomber dans la facilité
quand même.
- Helloween - Straight out of hell (2013) ★ ★ ★ ½
Le temps passe et Helloween continue à sortir un disque tous les deux ou
trois ans. Encore mieux, la qualité reste au rendez-vous sur celui-ci.
Un peu moins de modernité dans le son (les traficotages électroniques
sont concentrés sur la ballade Hold me in your arms, loin d'être
le meilleur moment de l'album d'ailleurs), le groupe semble plutôt se
replier sur ce qu'il sait faire de mieux, du speed accrocheur et très
mélodique, avec refrains chantés en choeur qui vous restent bien dans la
tête (comme sur le très bon Burning sun par exemple). Le disque
commence avec Nabataea, une véritable tuerie (une petite touche
orientale, et surtout un titre bien épique, sûrement le meilleur composé
par le groupe depuis un certain temps), et enchaîne fort jusqu'à la
fameuse ballade déjà citée (Waiting for the thunder, avec son
intro au piano, n'est pas d'une originalité folle, mais fonctionne très
bien aussi). Et puis, il faut bien l'avouer, la deuxième moitié du
disque ne retrouve jamais le niveau totalement convaincant, entre un
hommage à We will rock you déroutant (Wanna be god, pas
désagréable mais légèrement hors propos) et des titres poussifs ou
téléphonés (Asshole par exemple). Une dissymétrie qui me pousse à
poser une question qui est déjà souvent revenue dans mes chroniques :
était-il vraiment nécessaire de faire un disque de plus de 70 (un ou
deux petits bonus compris) si l'inspiration s'essouffle avant d'avoir
atteint les trois quarts d'heures ? La première moitié était pas loin de
l'excellence, le tout ne sera que très solide.
- Helloween - My God-given right (2015) ★ ★ ½
Trente ans de carrière, quinzième album studio, il y avait de quoi
marquer le coup pour Helloween non ? Il faut bien l'admettre, le
résultat est un peu décevant de ce point de vue, même pas vraiment à la
hauteur du Keeper Legacy sorti dix ans plus tôt et qui avait le
grand mérite de tenter (et même de réussir sur le premier disque) de
faire revivre les plus glorieux moments du groupe. Cette fois-ci, les
citrouilles semblent avoir décidé de ne surtout prendre aucun risque, se
contentant de faire (plutôt bien quand même) ce qu'ils ont toujours su
faire, à savoir du speed mélodique aux refrains fédérateurs, avec
quelques touches de sons électroniques comme ils nous y ont habitué
depuis quelques albums. L'entrée en matière Heroes, bien musclée,
est plutôt réussie même si bien courte (on est loin du Nabataea
qui ouvrait leur précédent album), mais ensuite, on a droit à quelques
titres sentant le réchauffé (et même à un flagrant cas d'auto-repompage
sur If God loves rock'n roll), des lignes de chant pas très
inspirées, et encore une fois une fin d'album un peu à la peine
(dommage, You, still of war qui est l'une des très rares compos à
dépasser nettement les cinq minutes, ne convainc pas vraiment en
conclusion du disque). Heureusement, les allemands sont toujours
capables d'insérer un ou deux titres vraiment entraînants (Lost in
America), voire à la limite du comique (Russian roulé, dont
on aurait aimé que l'utilisation de choeurs graves "à la russe" ne soit
pas aussi courte), pour relancer la machine. Mais les moments vraiment
marquants sont trop rares, on se contentera donc d'une moyenne en mode
"peut mieux faire", ce qui n'avait pas été le cas depuis un certain
nombre d'albums.
- Helloween - Helloween (2021) ★ ★ ★
Les ruptures et autres reformations de groupes sont fréquents dans
l'univers du metal, mais Helloween a quand même réussi à faire très fort
en proposant une nouvelle formation qui voit le retour des mythiques Kai
Hansen et Michael Kiske (qui avaient quand même quitté le navire une
trentaine d'années auparavant !) tout en conservant l'intégralité du
line-up de la décennie précédente. Du coup, on se retrouve avec un
mega-groupe avec pas moins de trois chanteurs (oui, oui, Hansen chante
aussi, certes moins que les deux autres) et trois guitaristes.
Forcément, la question se pose : les compositions arriveront-elles à
laisser de la place à tout ce beau monde sans que ça ne devienne lourd
ou artificiel ? Peut-être faudra-t-il alléger un peu et alterner les
chanteurs ? Eh ben non, le groupe a décidé de jouer carrément la
surenchère, avec des refrains doublés en permanence (quitte à tomber
dans l'outrance à la fin de Down in the dumps), des choeurs et
des claviers orchestraux par-dessus, on est souvent dans la
grandiloquence un peu gratuite (l'intro de Out for the glory ou
celle de Cyanide). Je vais être franc, au premier abord, ce côté
choucroute ne m'a vraiment pas plu. Et puis après quelques écoutes
supplémentaires, on retrouve quand même les qualités indéniables du
groupe, avec des refrains hyper efficaces (Indestructible et les
interventions de Hansen, Fear of the fallen en mode plus épique),
des pistes plus classiquement heavy (Mass pollution,
Cyanide), et même, ce que tout le monde attendait forcément, une
composition de plus de 10 minutes signée Kai Hansen (qui tire toutefois
en longueur avec des passages instrumentaux un peu forcés, on est assez
loin des meilleurs chefs-d'oeuvre du groupe). On oublie par contre un
peu l'élément "happy metal" dans l'ADN du groupe depuis plusieurs
décennies (seule la bondissante Best time joue sur ce registre).
Finalement, la note est surtout pour le plaisir de retrouver les membres
historiques du groupe (et puis bon, ça en fout quand même plein les
oreilles), point de vue musical, on est dans la moyenne correcte des
derniers albums d'Helloween, sans réel plus.
- Iced earth - Iced earth (1990) ★ ½
Groupe testé sur les conseils de bons amis, dont je n'avais jamais
entendu parler auparavant (faut bien faire des expériences aussi). Le
nom du groupe et le look des pochettes pouvait laisser imaginer un metal
"nordico-épique", pas du tout, au moins dans ce premier album (il y a eu
énormément de changements dans le groupe, notamment niveau chant et
batterie, pour la dizaine d'albums ultérieurs), c'est du thrash bien
balisé qui marche très clairement dans les pas de Metallica (un
peu trop même) ... mais en beaucoup moins emballant : chanteur
franchement mauvais, batterie essentiellement inexistante, en gros il
n'y a que les guitares pour assurer (malgré quelques solos qui ne savent
pas trop où ils vont), c'est un peu léger. Dommage car les compositions,
à défaut d'être originales, sont assez sympa. Curieux quand même de voir
l'évolution du groupe, qui semble avoir bifurqué assez rapidement niveau
style.
- Iced Earth - Night of the stormrider (1991) ★ ★ ★
Déjà, preuve d'un certain bon sens chez le leader du groupe, on a changé
de chanteur et de percussionniste depuis le premier album. On est par
ailleurs beaucoup plus clairement dans le trip épique que j'imaginais à
la vue des pochettes : une histoire de stormrider (comme l'indique le
nom de l'album) qui va tataner du vilain, soulignée par une intro
symphonique assez hilarante décalquée sur le O Fortuna de Orff,
des bouts de choeurs insérés à certains moments et on a même droit au
son de la pluie. Ces ajouts d'un goût discutable rebuteront peut-être
ceux d'entre nous qui tolèrent moins bien le kitsch que moi,
personnellement j'aime assez. Pour le reste, on est en nets progrès, les
chansons sont assez maîtrisées, du classique bien fichu qui fonctionne.
Quelques bémols tout de même : certains enchaînements mélodiques ou
harmoniques assez space, une pseudo-balade très dispensable (Reaching
the end) et, bien entendu, le nouveau chanteur qui n'est certes pas
pire que le précédent, mais dont les piaillements réguliers laissent
percer une certaine attirance pour le chant "à la Mustaine", ce qui en
soit est assez inquiétant. Parmi les meilleures pistes à mon sens :
Stormrider ou Pure Evil. La longue dernière piste
Travel in Stygian est plutôt réussie même si inégale.
- Iced Earth - Burnt offerings (1995) ★ ★ ★ ★
Retour du groupe après une pause de quelques années et ... avec un
nouveau chanteur (qui réussira à tenir quelques années, bel exploit) !
Encore une fois, surprise, l'atmosphère de l'album est très différente
de celle du précédent (et du premier aussi), on a toujours un metal
assez classique, mais clairement plus sombre, avec des riffs lourds et
même l'utilisation de voix parlées dans l'introduction de certains
titres pour renforcer le côté pesant. C'est d'autant plus dommage du
coup d'avoir pris un chanteur à la voix très claire qui ne colle pas
tellement (mais bon, ne nous plaignons pas, il y a du progrès quand même
de ce point de vue là), et qui rend rapidement mièvres les passages où
le tempo redescend (le début de Last December en particulier).
Bizarrement, l'avant-dernière piste, The Pierced spirit, passage
calme avec accompagnement de piano et guitare acoustique, n'est pourtant
pas si mauvaise que ça. Mais là où je groupe brille, c'est quand il se
contente d'aligner riff sur riff, comme dans Brainwashed ou
Creator failure. Surtout, il ose terminer le CD par une plage de
16 minutes, Dante's inferno, qui tient la route tout le long,
chapeau ! Un très bon album qui mérite sa place aux côtés des classiques
du genre.
- Iced Earth - Dark saga (1996) ★
Les gars de Iced Earth sont même tellement inconstants qu'il est
franchement difficile de croire que cet album a été fait par les mêmes
gusses que ceux qui ont pondu la dernière piste du précédent : ici,
l'ambition est dramatiquement revue à la baisse puisque le disque aligne
les chansons de "pop metal" (honnêtement, vocalement, c'est vraiment de
la mauvaise pop) basiques, avec certes des guitares qui font encore un
peu de bruit mais surtout une volonté manifeste d'aller vers le
commercial sans âme (à écouter I died for you ou la dernière
piste A question of heaven avec ses inénarrables choeurs
féminins, on a vraiment envie de fuir en courant). Dans son genre, ce
n'est pas si mal fait, mais en ce qui me concerne, ce n'est pas ce que
je suis venu entendre...
- Iced Earth - Something wicked this way come (1998) ★ ★
Après avoir changé de style à peu près systématiquement dans leur quatre
premiers albums, je ne sais plus trop à quoi m'attendre en m'apprêtant à
écouter le disque suivant de Iced Earth. Eh bien, ils ont en quelque
sorte encore réussi à me surprendre : désormais, c'est au sein d'un même
album qu'on a droit à des changements de style permanents ! En effet, on
alterne ici de façon assez systématique les pistes heavy, classiques
mais très efficaces malgré le chant toujours criard (en gros, toutes les
pistes impaires sauf la 11) et les espèces de bluettes commerciales avec
tout le groupe qui chante en choeur (toutes les pistes paires sauf la
12, dans ce genre un titre comme Watching over me est quand même
assez terrifiant). Le tout est couronné par une dernière chanson qui
semble tenter de renouveler avec une certaine ambition : près de 10
minutes, une intro au piano assez dispensable, et une conclusion avec
choeurs pseudo grégoriens sur fond d'accompagnement orientalisant puis a
cappella, pas sûr que tout ça soit vraiment maîtrisé mais au moins ça
renouvelle l'intérêt de l'écoute. Un album beaucoup trop inégal donc,
mais si on se contente d'écouter les pistes impaires c'est loin d'être
mauvais...
- Iced Earth - Horror show (2001) ★ ★ ★ ★
Pour ce sixième album, le concept est de revisiter les principales
figures de la littérature et du cinéma fantastique. Pourquoi pas,
l'essentiel étant d'arriver à en tirer quelque chose de cohérent. Et là,
je trouve que c'est nettement plus le cas que dans l'album précédent. Un
ou deux égarements (Jack ou la dispensable ballade Ghost of
freedom qui est d'ailleurs la seule piste hors-thème du CD), mais
surtout une inspiration mélodique vraiment intéressante, et beaucoup de
bons titres, de l'inaugural Wolf qui envoie du bois à un
surprenant Phantom opera ghost faisant intervenir une voix
féminine (et un peu de synthé sur la fin) de façon efficace, en passant
par un Frankenstein bien massif et réjouissant. Mais le meilleur,
c'est peut-être Damien avec son introduction chorale vraiment
réussie. Tout ça est encore un peu inégal, mais dans l'ensemble un très
bon album.
- Iced Earth - The Glorious burden (2003) ★ ★ ★ ½
Tiens, pour ce septième album, le groupe a changé de chanteur (ça
faisait longtemps). Le nouveau est plus passe-partout que les
précédents, ce qui à mon avis n'est pas un mal, même s'il a une tendance
à se rater quand ça monte dans l'aigu. Quoi qu'il en soit, album
ambitieux avec presque une heure 20 de musique, dont une espèce de suite de plus
d'une demi-heure consacrée à la bataille de Gettysburg (suite qui
constituait le deuxième disque du double album à l'origine). Ah oui, je
n'ai pas précisé, le thème cette fois-ci c'est en gros "grands moments
historiques". Voilà qui est original, et peut-être un poil casse-gueule
: quand le disque commence par une reprise de l'hymne américain, puis
enchaine sur ou trois titres très grandiloquents et larmoyants, comme le
sirupeux When the eagle cries (qui évoque le 11 septembre),
honnêtement, on n'a pas très envie de continuer. Eh bien on aurait tort,
car la suite recèle de bonnes surprises, comme un Attila assez
réjouissant, un Waterloo plutôt maîtrisé, et surtout, surtout,
The devil to pay (première partie de la trilogie finale) qui,
bien qu'étant clairement en mode "allez on balance tout ce qu'on peut"
(orchestre symphonique, beaucoup de choeurs, comme dans tout l'album
d'ailleurs, et même une canonnade à un moment), est absolument
excellent, peut-être tout bonnement le meilleur titre du groupe dans
tout ce que j'ai écouté jusqu'ici. Les deux derniers épisodes sont moins
emballants (au bout d'un moment ils en mettent vraiment trop dans le
grandiose, ça en devient un peu lourd). Bref, même si c'est (encore) un
album très inégal, il faut au moins tester la deuxième moitié (si on n'a
pas trop peur du kitsch du moins).
- Iced Earth - Framing armageddon (2007) ★ ½
Après quelques années d'interruption, le groupe revient avec un projet
ambitieux : deux albums complets contant une histoire d'aliens se
vengeant des humains qui était déjà à l'origine des derniers morceaux de
l'album Something wicked this way come. Bon, je n'avais pas
tellement aimé ce dernier, mais pourquoi pas, ça donne une unité
bienvenue à l'ensemble et amène assez naturellement le groupe vers
quelque chose de plus épique (énormément de choeurs sur cet album) et en
même temps varié qui n'est pas pour me déplaire. Le problème, c'est tout
bonnement que tout ça est assez mal fait. Déjà les aliens de l'histoire
ne viennent clairement pas de Mars mais plutôt du Moyen-Orient, vu
l'utilisation de gimmicks arabisants dans pas mal de pistes (l'ouverture
du disque est une mélopée de violoncelles sur fond de tamtam, l'un des
moments les plus réussis de l'album). C'est original mais ça donne un
résultat discutable, par exemple dans l'intermède Invasion où ça
se mélange assez moyennement aux bruitages de lasers... Le reste du
temps, on oscille entre des morceaux lents peu inspirés (le central
The clouding, on n'est plus dans le domaine du metal, mais plutôt
du côté des mauvais titres de Scorpions... en pire), et des
morceaux plus rapides qui font absolument systématiquement appel à des
choeurs grandiloquents (la fin de A charge to keep, ouille !)
malgré tout assez bien exploités, mais surtout qui mettent à peu près
systématiquement la batterie en mode mitraillage sans l'ombre d'une
variation, et là pour le coup c'est totalement insupportable. Dommage,
l'ambiance générale est intriguante, mais la musique pas franchement à
la hauteur.
- Iced Earth - The Crucible of man (2008) ★ ★ ½
Suite (et fin) du dyptique consacré aux martiens, avec un album
logiquement dans la lignée du précédent, mais qui va quand même moins
chercher les effets bizarres (plus de bruitages de lasers notamment) et
se recentre globalement sur des chansons d'un classicisme plutôt
bienvenu. Plus vraiment de trace d'orientalisme non plus, sauf dans
l'assez immonde A gift or a curse et dans la piste finale qui
reprend la mélopée de violoncelles ouvrant l'album précédent. Toujours
beaucoup de choeurs un peu grandiloquents mais ça ne marche pas si mal
(un titre comme I walk alone est réussi), une vague tentation
"gothique" par moments (la piste initiale), mais aussi le retour du
chanteur précédent du groupe que j'avoue ne pas tellement apprécier. Ca
manque par ailleurs de titres vraiment marquants, mais l'ensemble
s'écoute plutôt agréablement...
- Iced Earth : Dystopia (2011) ★ ★ ★ ½
Tiens, ça faisait longtemps, un nouveau chanteur pour le groupe pour cet
album ! Mine de rien, le groupe atteint là son dixième album studio, et,
encore mieux, c'est un bon cru. Rien que du très classique, on ne se
disperse pas, le chanteur est bon, l'utilisation des choeurs efficace,
et les riffs sympathiques même si ça ressemble parfois beaucoup aux
précédents albums du groupe, que demander de plus ? Eh bien peut-être,
une fois de plus, de ne plus s'éterniser sur des ballades pseudo-pop qui
ne sont vraiment pas à la hauteur du reste (Anguish of youth
passe encore la rampe, End of innocence beaucoup moins), et
surtout de ne plus commettre de faute de goût comme l'introduction
triomphaliste complètement ratée de la dernière piste Tragedy or
triumph (dommage, c'est la plus longue du CD et passé la première
minute, elle tient la route...). Un bon album dans l'ensemble tout de
même.
- Iced Earth - Plagues of Babylon (2014) ★ ★ ★ ½
Avant-dernier album à ce jour de mes amis d'Iced Earth, qui semblent
avoir retrouvé un nouveau souffle avec l'arrivée du dernier chanteur en
date : après un Dystopia pas totalement abouti mais intéressant,
ce nouveau disque commence par un titre (celui qui donne son nom à
l'album) à la fois ambitieux (près de 8 minutes, dont une bonne minute
d'intro recherchée, utilisation de passages parlés et de choeurs) et
très réussi mélodiquement, mais qui va surtout puiser dans une
inspiration "épique sombre" qui convient vraiment bien au groupe et que
celui-ci n'avait plus vraiment exploitée depuis trop longtemps (on tient
le successeur de Night ot the stormrider, plus de 20 ans après
?). Vraiment emballé par ce début, et plus généralement par le premier
tiers de l'album, jusqu'à un Among the living dead très sympa
avec son ambiance "film d'horreur retro" (celui-ci c'est sur Horror
show qu'il aurait eu sa place !). Et puis ... eh ben il faut bien
admettre que ça a beaucoup de mal à tenir la route sur la distance, la
fin du disque aligne les compositions anecdotiques à la limite du
remplissage, avec recours aux ballades quand on ne sait plus trop quoi
faire (dont la bizarrement zozotante Spirit of times), et ce au
point de conclure l'album sur une piste de 20 secondes de rigolade entre
les membres du groupe qui laisse perplexe. Dans la mesure où le disque
dure une bonne heure, n'aurait-il pas été préférable d'élaguer un peu ?
Un album entier de la tenue des quatre premières pistes, franchement,
c'était une tuerie...
- Iced Earth - Incorruptible (2017) ★ ★ ★
Tournée d'adieu pour Iced Earth ? Si les événements récents
(emprisonnement du chanteur et leader de toujours) laissent penser qu'il
s'agit bel et bien de leur dernier album, il s'agira d'une sortie sans
faire de vagues, mais pas indigne non plus. Un disque très très
classique en fait, un peu trop même, rien de raté mais peu de pistes
mémorables également (même la piste finale, ambitieuse avec ses 9'30 au
compteur et son intro mélancolique sur fond de cornemuses, tourne un peu
à vide une fois vraiment démarrée, ça manque de subtilité). Pourtant,
c'est assez varié, le groupe tente même un instrumental intéressant
(Ghost dance, une espèce d'hommage aux indiens, peut-être le
sommet de l'album) et n'a pas perdu en termes de technique. En fait, je
n'ai pas grand chose de particulier à reprocher à cet album, mais c'est
globalement trop passe-partout pour vraiment s'imposer.
- In Flames - Lunar Strain (1994) ★ ★
Retour à un genre assez calibré pour moi avec les débuts d'un des
groupes suédois majeurs de death mélodique (ce qui constitue quasiment
un pléonasme tant le genre est attaché à ce pays !). Pour ce premier
album, eh bien, on a des défauts assez caractéristiques d'un premier
album : manque de cohérence (la plupart des pistes donnent effectivement
dans le death mélodique à guitares grésillantes et riffs mélodiques
assez inspirés, mais on a plusieurs fois droit à une irruption pas
franchement convaincantes de passages folk, et le chant féminin sur
Everlost pt.2 semble hors de propos), chant en décalage complet
avec l'habillage instrumental (pour ce premier disque, ils ont emprunté
le chanteur à un autre groupe, il ne participera pas aux albums
ultérieurs), timidité dans le développements des compositions (le tempo
s'accélère enfin sur les deux derniers titres, mais ils sont trop courts
pour vraiment emballer complètement). Il y a malgré tout de bonnes
choses dans ce disque (Behind space, vraiment pas mal), mais
c'est encore assez inabouti.
- In Flames - The Jester race (1996) ★ ★ ★ ½
En écoutant ce deuxième album du groupe suédois, on comprend fort bien
pourquoi il est considéré comme le vrai point de départ de sa
discographie, et même comme un des disques fondateurs du death mélodique
"à la suédoise". Oubliés les errements et hésitations de Lunar
Strain, cette fois-ci ils savent vraiment où ils veulent aller : le
chanteur a changé mais ça n'a qu'une importance relative, le chant
extrême étant mixé assez étouffé et dominé par les guitares très
mélodiques qui se taillent ici la part du lion (avec tout de même
quelques touches de claviers par moments). Les petites touches folk sont
désormais complètement intégrées à l'ensemble, et on entend surtout des
riffs heavy très mélodiques qui s'enchaînent de façon probablement un
peu trop monotone au fil des pistes (ça ressemble toujours un peu à la
même chose). Peut-être un côté un peu trop appliqué aussi, ça manque de
folie. D'ailleurs, à la première écoute, j'avais trouvé ça franchement
décevant, mais à la réécoute c'est quand même vraiment bien ficelé, et
souvent simplement beau (les guitares acoustiques sur Moonshield,
le riff inspiré de Lord Hypnos, l'énergie de Dead god in
me pour conclure l'album). Manque quand même cette petite étincelle
supplémentaire pour faire décoller les choses à un niveau supérieur, on
se contentera pour l'instant d'un bon album efficace.
- In Flames : Whoracle (1997) ★ ★ ½
Après avoir trouvé sa voie avec The Jester Race, In Flames ne
semble pas décidé à en dévier, et revient donc avec un troisième album
extrêmement proche dans l'esprit du second. Mêmes titres aux guitares
mélodiques prédominantes avec une voix death planquée au fond du mix
histoire de dire que quand même on est censé faire du metal extrême,
même utilisation de guitares acoustiques sur certaines intros (celle
réussie de Gyroscope, celle immonde de Jester script
transfigured avec son chant "susurré malsain" hideux), mêmes
instrumentaux disséminés sur le disque pour rompre un peu la monotonie.
On notera quand même un effort pour rendre les riffs un peu plus
accrocheurs... du moins sur les deux premiers titres, mais toujours rien
qui décolle vraiment au-dessus du joli (Jotun par exemple est
sympa, mais avec une tonalité presque trop optimiste pour moi), et
quelques ratés (Worlds within the margin). Bref, ça tourne un peu
en rond, et si l'album précédent m'avait conquis après quelques écoutes,
celui-ci confirme que je commence déjà à me lasser un peu de la musique
des suédois (même s'il reste largement écoutable). Dans la mesure où
leurs premiers disques sont censés représenter l'apogée de leur
carrière, je crains un peu la suite !
- In Flames - Colony (1999) ★ ★ ★ ½
Je n'en suis qu'au quatrième album de la longue discographie d'In Flames
(qui en contient quand même 14 à ce jour, mais je ne suis pas du tout
certain d'aller jusqu'au bout), et les mots commencent déjà à me manquer
pour décrire ce que j'entends, tant ça reste homogène à l'intérieur de
chaque disque, mais aussi d'un disque au suivant. On commence toutefois
sur celui-ci à comprendre l'évolution globale du groupe (et à anticiper
pourquoi les disques postérieurs à 2000 sont assez unanimement
considérés comme moins recommandables que les précédents), qui se dirige
de plus en plus manifestement vers la séduction immédiate, un côté easy
listening prêt à toucher à un peu tout pour faire passer la pilule
auprès d'un public large (même si le chant reste très majoritairement
typé death sur ce disque). C'est d'ailleurs la plupart du temps assez
convaincant, et même parfois irrésistible (le survitaminé Embody the
invisible qui ouvre l'album est vraiment un tube), parfois nettement
plus douteux (le chant clair et les guirlandes de piano de Ordinary
story, les traces de chant "slipknotien" de Scorn), mais
l'ensemble est largement sauvé par une inspiration mélodique au
rendez-vous (le petit instrumental Pallar anders visa est très
bien). Simplement, le death mélo déjà beaucoup plus mélo que death du
groupe est en train de glisser petit à petit vers une sorte de death pop
n'ayant plus vraiment de sens (pas étonnant que le chant clair se soit
de plus en plus imposé sur les disques ultérieurs du groupe, en fait).
Sans être très profond, ce Colony est en tout cas probablement le plus
agréable à écouter par les disques du groupes que j'ai déjà parcourus.
- In Flames - Clayman (2000) ★
Enregistré au tournant du millénaire, ce cinquième disque du groupe est
souvent considéré comme étant le dernier de la première période du
groupe, celle centrée sur le death mélodique, avant qu'il ne vire à un
gloubi-boulga commercial teinté d'électro et de chant clair qui le fera
irrémédiablement détester par une partie de ceux qui l'avaient adulé
jusque-là. En ce qui me concerne, ça ne risque guère de m'arriver
puisque mon sentiment concernant le groupe était déjà assez mitigé, et
le devient encore beaucoup plus dès cet album (j'ai un peu écouté la
suite, et mon parcours de leur discographie s'arrêtera en effet
bientôt), tant les mauvais penchants du groupe prennent déjà le dessus.
Quasiment plus de riffs mélodiques vitaminés comme il y en avait à la
pelle sur les albums précédents (seule Swim joue encore cette
carte-là), mais à la place un acharnement à détruire des chansons
correctes (car le fond reste plus qu'acceptable) en y insérant des
bruitages ineptes (sur Satellites and astronauts typiquement) et
surtout des passages en voix claire quasi systématiques alors que leur
chanteur est manifestement très mauvais pour ça. Bon, il était pas
spécialement bon non plus pour le chant extrême, mais ça passait
complètement inaperçu, alors que là, les efforts pour produire un chant
qui se veut inspiré sont juste pitoyables (sur Square nothing ou
Suburban me), sans compter les effets bizarres régulièrement
ajoutés par-dessus. Bref, à vouloir plaire à tout le monde, In Flames a
fini par faire de la bouse. C'est dommage, mais vu qu'ils continuent à
sortir des albums qui ont du succès encore aujourd'hui, ils n'en ont
probablement pas grand chose à foutre.
- In Flames - Reroute to remain (2002) ★ ½
Peut-on vraiment en vouloir à un groupe de se fondre dans l'air du temps
pour gagner un peu plus de pognon ? Une question qui aura été au coeur
des débats de générations de metalleux concernant un bon paquet de
groupes, mais qui est particulièrement pertinente à propos de ce sixième
albums d'In Flames. Si l'évolution était déjà inquiétante sur leur
disque précédent, elle est désormais complète, on a droit sur absolument
toutes les pistes à au moins un passage irritant tentant de singer la
mode de ce début des années 2000 : sons électroniques (dès la
chanson-titre qui ouvre l'album, et encore plus sur Cloud
connected), choeurs en chant clair façon pop sur tous les refrains,
chant clair "inspiré" également de la part du chanteur principal (et là
c'est vraiment le désastre, ce gars ne sait pas chanter sans prendre une
pose geignarde totalement insupportable, ça plombe par exemple
définitivement System), quand ce ne sont pas d'ineptes
traficotages électroniques sur la voix (sur Transparent). Pire
que tout, même le chant death est devenu très mauvais, avec une
influence Spliknot (ou assimilé) délétère (Minus, entre autres).
Et tout ça est fort frustrant, car sur le fond, l'album est à mon sens
nettement meilleur que le précédent (d'où la note moins mauvaise), on
retrouve de belles mélodies (sur Trigger ou Cloud
connected) et le côté plus électro que d'habitude aurait pu passer
s'il avait été mieux exploité. En réponse à la question initiale, c'est
donc un non assez franc, pas le droit de massacrer de la potentiellement
belle musique ainsi ! Mais le groupe ne l'entendra pas de cette oreille,
et tous ses albums ultérieurs seront dans ce style, ce qui va me faire
arrêter ici l'exploration de leur discographie.
- Iron Maiden - Iron Maiden (1980) ★ ★ ★ ★ ★
Pour une fois, un groupe dont je connais la musique depuis un certain
temps (j'ai du écouter il y déjà bien longtemps presque tous les albums
du groupe jusqu'à Fear of the dark), et qui font pour moi partie
des classiques indémodables. Bien sûr, le poids des années se ressent,
avec ces chansons encore plus rock que vraiment metal, les guitares
volontiers geignardes et surtout la batterie en plastique (pour le coup,
un vrai point faible), mais même si on est (forcément) influencé par ce
qu'a pu produire le groupe ensuite, je crois honnêtement que, si on
devait juger tous les groupes de metal uniquement sur la première
chanson publiée, le Prowler de Maiden lui assurerait une place
parmi les plus grands. Toute la première moitié de l'album est
excellente, avec notamment un Phantom of the opera qui cherche à
sortir des sentiers battus, un léger coup de moins bien sur la fin
(c'est surtout la partie chantée de Strange world qui me plait
moins, je trouve qu'elle ne colle pas bien au reste), mais qui ne suffit
pas à réfréner mon enthousiasme (au pire, vu qu'on était encore à
l'époque où les disques faisaient entre 30 et 40 minutes, on se remet
les premières chansons). Et puis, détail supplémentaire, j'adore les
pochettes des premiers Maiden !
- Iron Maiden - Killers (1981) ★ ★ ★ ★ ★
Un tout aussi grand classique que le précédent, sur le même format ou
presque, qui aligne les moments forts quasiment sans interruption
(l'intro héroïque Ides of March, l'excellente chanson titre, le
break instrumental de Another life, l'instrumental tout court
Gengis Khan avec sa vague tentation d'exotisme qu'on retrouvera
de temps à autre dans les albums du groupe). Bon, en fait, je pourrais
presque citer tous les titres, y a pas grand chose à jeter (si je devais
à nouveau trouver une chanson qui me plait un peu moins, ce serait
peut-être Prodigal son que je trouve un poil plus lisse que le
reste). Ce qui est fascinant, c'est à quel point ça semble simple de
faire du bon metal quand on écoute tous ces classiques.
- Iron Maiden - The Number of the beast (1982) ★ ★ ★ ★ ★
Avec l'arrivée de Dickinson, on a vraiment le son "maidenien" inimitable
: voix plus aigue, lignes vocales plus étendues (le début de la chanson
titre, typiquement), le groupe gagne en complexité ce qu'il perd
peut-être en efficacité directe. Dans tous les cas, l'intégration du
nouveau chanteur est impressionnante (dès le titre d'ouverture,
Invaders, on est entré sans la moindre phase d'adaptation dans
cette nouvelle ère), et l'alignement de tubes tout autant : Children
of the damned, The prisoner, 22 Acacia avenue et
Number of the beast sont toutes des réussites exceptionnelles.
Petit coup de moins bien à nouveau en fin d'album (le refrain choral de
Run of the hills est assez peu inspiré, et Gangland qui
suit ne vaut pas mieux) mais ce sont les deux titres les plus courts, et
Hallowed be thy name conclut en beauté un nouvel album absolument
incontournable. Mais si on suit l'espèce de numérologie présente dans
certains titres d'album ultérieurs, ce "six six six" n'aurait-il pas eu
sa place un peu plus tard dans la liste ?
- Iron Maiden - Piece of mind (1983) ★ ★ ★
Je l'avoue, parmi les albums des années 80 du groupe, qui sont en
général uniformément considérés comme des classiques, il y en a un avec
lequel j'ai toujours un peu de mal, c'est celui-ci. Pourtant, ça
commence très fort avec un excellent Where eagles dare introduit
par un motif de batterie spectaculaire (le nouveau batteur du groupe
aura eu droit à une sacrée entrée !), mais ensuite, le creux que je
ressentais souvent en fin d'album dans les disques précédents, là je le
retrouve un peu partout. Emploi presque systématique des choeurs pour
des refrains pas franchement recherchés (celui de Flight of
Icarus, franchement...), des ostinatos rythmiques qui servent
quasiment d'unique structure sur plusieurs chansons, voire même des
modulations assez artificielles (dans Die with your boots on ou
l'intro de To tame a land), l'évidence qui ressortait d'une
grande partie des chansons jusque-là a pour moi momentanément disparu.
Reste un album solide et agréable à écouter, mais loin pour moi des deux
mastodontes qui l'entourent dans la discographie maidenienne.
- Iron Maiden - Powerslave (1984) ★ ★ ★ ★ ★
Comme l'appréciation de la musique passe avant tout par le ressenti, je
serais objectivement bien incapable de dire pourquoi certains des
défauts que je trouvais à Piece of time, le précédent album du
groupe, ne me gênent pas du tout ici (pourtant, par exemple, la tendance
à abuser des choeurs sur les refrains est aussi présente ici). À
nouveau, tout me semble cette fois d'une fluidité remarquable, et pour
une fois, même pas vraiment de baisse de tension en cours d'album. Ca
commence très fort avec Aces high et surtout 2 Minutes to
midnight, on a droit à un instrumental sympa (c'est rare chez
Maiden, faut en profiter), aucune des chansons qui suit ne démérite et
après une chanson-titre déjà exceptionnelle, on achève en apothéose avec
un dantesque Rime of the ancient marriner de 13 minutes, qui est
tout simplement l'une de mes chansons préférées du groupe. Un
chef-d'oeuvre.
- Iron Maiden - Somewhere in time (1986) ★ ★ ★ ★
Avec sa pochette futuriste et l'introduction de synthétiseurs, cet album
semble vouloir inaugurer une nouvelle époque pour le groupe, ou du moins
renouveler sensiblement ses sources d'inspiration. En pratique, les
claviers restent discrets, et on alterne en fait entre quelques pistes
qui collent effectivement à cette nouvelle image (l'excellent
Somewhere in time inaugural, ou un Stranger in a strange
land que j'aime beaucoup aussi) et une majorité d'autres qui
recyclent beaucoup plus clairement des recettes déjà éprouvées (le
refrain de Wasted years, Loneliness of the long distance
runner, qui fonctionnent par ailleurs très bien), parfois un poil
poussivement (Heaven can wait, Déjà vu), avant d'achever
le tout sur un morceau "classiquement épique" (Alexander the great) pas
déshonorant du tout mais qui fait quand même pâle figure à côté de la
dernière piste de l'album précédent. Un ensemble qui fonctionne bien
mais qui me semble quand même bien en retrait par rapport à
Powerslave.
- Iron Maiden - Seventh son of a seventh son (1988) ★ ★ ★ ★ ★
Le classique incontournable en ce qui me concerne, je crois bien que
c'est le premier album du groupe que j'ai découvert, et je l'ai adoré
immédiatement. Je n'essaierai d'ailleurs même pas d'en faire un semblant
de critique objective, il n'y a de toute façon pas une chanson sur
celui-là qui ne me convainque pas.
- Iron Maiden - No prayer for the dying (1990) ★ ★
Bon alors, ce huitième album mérite-t-il vraiment sa (mauvaise)
réputation ? Ce qui est manifeste dès le départ, c'est qu'il y a un
changement de direction et même un retour en arrière assumé de la part
du groupe : aucune chanson longue (seule le dernier titre dépasse les 5
minutes), plus de sons synthétiques, le but affiché est de se recentrer
sur l'efficacité des premiers albums (et même plutôt des tout premiers,
avant l'arrivée de Dickinson au chant). Pourquoi pas, mais le gros
problème, c'est que ce retour en arrière s'accompagne de fait d'une
grosse régression en terme de qualité des compositions. Dès la première
piste, le bât blesse : jusqu'ici Maiden avait toujours démarré ses
albums avec un tube énergique qui lançait parfaitement la machine, là
malgré un riff initial tout ce qu'il y a de plus maidenesque,
Tailgunner s'enlise en cours de route, faute à un refrain choral
vraiment peu subtil. Et en fait, aucune des dix chansons de l'album ne
réussira à s'élever au-dessus d'un niveau correct sans plus (Holy
smoke, Run silent run deep par exemple sont des titres tout à
fait acceptables), avec même de vrais ratés qui font tâche (les choeurs
du refrain de The assassin, ouille), et un titre final
sympathique mais tellement anecdotique par rapport aux conclusions
épiques auxquelles Maiden nous avait habitués. Un peu l'impression en
fait d'un album entier constitué de ces "titres de remplissage" qu'on
trouvait parfois dans la deuxième moitié des albums précédents.
Objectivement pas si mauvais que ça, mais pour un groupe de ce calibre,
forcément très décevant.
- Iron Maiden - Fear of the dark (1992) ★ ★ ★ ★
Après un album assez uniformément décevant, en voilà un qui a au moins
le mérite de relancer la machine, avec des chansons plus variées et même
certains titres qui s'éloignent franchement de ce que propose
habituellement le groupe, pas toujours pour le meilleur il faut bien
l'avouer (notamment dans les chansons lentes, Afraid to shoot
strangers ne commence à ressembler à du Maiden qu'au bout de 4
minutes mais les ponctuations de batterie de la première partie c'est
vraiment pas terrible ; quant à Wasting love, c'est carrément une
balade mièvre sans intérêt), mais parfois avec de bonnes surprises
(The apparition et son riff qui évoque le Kashmir de Led
Zep). Surtout, les chansons plus "classiques" du disque sont quand
même d'une qualité nettement supérieure à celles du précédent, avec un
bon Be quick or be dead introductif, ou les efficaces From
here to eternity ou Childhood's end. On regrettera tout de
même un refrain choral foireux sur Chains of misery, une ou deux
chansons de trop (Week-end warrior, c'était vraiment pas la peine
de la laisser), et un Bruce Dickinson qui, pour le dernier album de sa
première pige chez Maiden, force parfois son talent jusqu'à
l'auto-caricature (Judas be my guide typiquement).
Pourquoi alors une note aussi indulgente après avoir cité autant de
défauts ? Eh bien, simplement parce que, si une chanson peut rattraper
tout un album, celui-ci en est un bon exemple, et la chanson-titre qui
clotûre Fear of the dark est pour moi l'un des incontournables du
groupe (la ligne mélodique qui débute le premier couplet, c'est
tellement Maiden !). Tant pis si le reste est (très) inégal.
- Iron Maiden : The X factor (1995) ★ ★
À propos du précédent album du groupe, j'avais répondu par l'affirmative
à la question "Une chanson qui tue peut-elle sauver un album ?". Cette
fois-ci c'est à la question plus épineuse "Un chanteur qui pue peut-il
flinguer un album ?" que je vais devoir m'attacher puisque j'arrive à la
fameuse "période Bailey" où le chanteur charismatique du groupe Bruce
Dickinson s'est fait remplacer par le très décrié Blaze Bailey. Bon, je
n'ai rien contre ce dernier a priori, mais soyons clairs tout de suite,
c'est effectivement un choix assez incompréhensible. Si chercher un
remplaçant dans le même style "lyrique" que Bailey était clairement une
mauvaise idée, il aurait toutefois fallu trouver un nouveau chanteur
avec une grosse personnalité, quitte à tirer un peu le groupe dans une
direction différente. C'est tout le contraire qui a été fait : Bailey
manque d'aigus, de puissance et surtout énormément de charisme, on a
peine à imaginer qu'il n'y ait pas eu beaucoup plus intéressant à
recruter parmi les chanteurs de l'époque (à vrai dire, il parait assez
étonnant que Bailey ait pu se faire une place dans un groupe pro, alors
le retrouver chez Maiden...). Qui plus est, la chanson la plus épique de
l'album est située en première piste, c'est forcément la moins adaptée
pour Bailey et ça irrite l'auditeur immédiatement (j'ai écouté ce même
Sign of the cross chanté en live par Dickinson à Rio, il n'y a
pas photo).
Bon, assez parlé du chanteur, que vaut au moins la musique de ce dixième
album ? Eh bien, dans l'ensemble pas mal mais inégale et avec quelques
défauts, un peu comme dans Fear of the dark. Ici, la chanson qui
aurait du tout exploser sur son passage est la première : malgré le fond
de chants grégoriens qui fait vraiment gadget, le titre est ambitieux et
maîtrisé, de l'excellent Maiden. Un bon début pas totalement confirmé
ensuite : beaucoup de tempos lents qui certes conviennent mieux au
chanteur mais s'enlisent en cours de route, une tendance de plus en plus
affirmée à répéter ad nauseam les refrains, et surtout un album qui n'en
finit pas, avec des derniers titres vraiment dispensables. Pourquoi donc
avoir poussé jusqu'à 70 minutes de musique s'il n'y avait pas vraiment
de quoi les remplir correctement ?
- Iron Maiden : Virtual XI (1998) ★ ½
Deuxième et dernier album du groupe avec Bailey au chant, et il s'agit
probablement de l'album le plus unanimement descendu par les fans.
Pourtant, de bonnes nouvelles pour commencer : la pochette est nettement
plus réussie que la précédente (et ça, quand même, c'est important !),
et le disque démarre avec un Futurreal énergique et convaincant.
De façon générale, la voix de Bailey me semble mieux mise à contribution
ici, avec même de vrais bons moments (il assure bien dans Lightning
strikes twice par exemple) même s'il y en a aussi de mauvais (il en
fait vraiment trop dans When two worlds collide). Dernier point
positif, l'album revient à un format "classique" pour du Maiden avec
seulement huit chansons et une durée globale d'un peu plus de 50
minutes. Hélas, il faut bien avouer qu'il y a peu de titres à retenir
musicalement parlant. À part le Futurreal déjà signalé et un
Clansman qui tient la route dans le genre long titre épique (même
si Maiden a déjà fait mieux dans le genre), le reste est au mieux
correct mais beaucoup trop répétitif (combien de fois entend-on le
refrain de The Angel and the gambler sur les 10 minutes, dont
cinq sont en trop, que dure la chanson ?), au pire carrément raté (toute
la fin de l'album après The Clansman est plus que poussive).
Finalement, la réputation de l'album est assez méritée, vraiment trop
peu de bonnes choses à retenir.
- Iron Maiden - Brave new world (2000) ★ ★ ★
L'an 2000 est pour le groupe une période de changement, qui semble de
toute façon annoncée par le titre de ce nouvel album. Bon, en fait de
changement, c'est plutôt un gros retour en arrière puisque le groupe
récupère, outre Bruce Dickison au chant, Adrian Smith à la guitare,
autre pilier de la période faste du groupe. Même au niveau musical, on
commence en terrain très très connu, puisque le Wicker man qui
ouvre le disque est une sorte de caricature du style maidenien, jusque
dans les "Wohohoho" du choeur. Mais bon, on est tellement contents de
retrouver l'identité du groupe qu'on ne s'en plaindra pas. Encore mieux,
le titre qui suit, Ghost of the navigator, est carrément
excellent, au niveau des classiques du groupe, tout ce qu'on peut lui
reprocher étant justement de ne pas chercher du tout le moindre
renouvellement. Avec la chanson-titre, le niveau redescend d'un coup, le
refrain étant vraiment trop pauvre (les paroles, sérieusement...) et
répété. En fait, on a déjà passé le meilleur de l'album, même si
quelques autres titres sont tout à fait corrects (les neuf minutes de
The nomad et son inspiration orientalisante notamment), on a trop
souvent des refrains sans grand intérêt (sur Blood brothers par
exemple) et les quelques touches de synthé sont assez malvenues, sans
compter que l'album est à nouveau probablement trop long. Bref, pour
être honnête, ce n'est pas totalement l'album du renouveau pour le
groupe, mais retrouver "le son Maiden" presque intact et (au moins) deux
ou trois chansons à la hauteur suffit déjà à être partiellement heureux.
- Iron Maiden - Dance of death (2003) ★ ★ ★ ★
Si l'on devait juger les albums d'Iron Maiden uniquement à leur
pochette, ce treizième opus serait sûrement à reléguer très loin en bas
de la liste. Mais fort heureusement, il est beaucoup plus intéressant
musicalement que graphiquement. Lancé par deux titres courts et d'humeur
assez résolument optimiste (le Wildest dreams d'ouverture, avec
son "one-two one-two-three-four" initial, semble même nous convier à une
séance régressive de "rock à papa"), l'album est à la fois varié,
intéressant presque du début à la fin malgré une longueur qui dépasse à
nouveau allègrement les 60 minutes, et comporte quelques excellentes
chansons, comme No more lies ou le très orchestral
Paschendale. C'est de toute façon la caractéristique la plus
notable du disque par rapport aux précédents opus de Maiden, les violons
synthétiques sont extrêmement présents, et pas seulement en simple fond
cosmétique comme dans Brave new world. Même si ça donne un côté
kitsch, je les trouve très bien employés dans le Paschendale déjà
signalé (ça rajoute vraiment à l'ampleur du morceau), mais nettement
nettement moins dans la dernière piste, un Journeyman dégoulinant
qui frise franchement la grave faute de goût. Dommage, car il s'agit en
fait de la seule piste franchement ratée du disque (bon ok, Age of
innocence qui la précède est pas un chef-d'oeuvre non plus, et la
piste titre Dance of death ne méritait probablement pas cet
éclairage). Pour le reste, on a vraiment un bon album, qui, comme son
introduction pouvait le laissait espérer, donne beaucoup de plaisir sans
trop se prendre la tête !
- Iron Maiden - A Matter of life and death (2006) ★ ★ ★ ★ ½
Un album totalement dans la lignée du précédent, sans surprise mais
hyper efficace. Le groupe a tout de même réussi un sacré retour après sa
période creuse des années 90, et je trouve même ici qu'on retrouve le
côté fascinant de l'alignement de chansons toutes hyper efficaces sans
qu'on ressente l'effort de composition derrière. Bon, on est pas tout à
fait au niveau des albums mythiques des années 80, notamment car il
manque une ou deux chansons qui se détacheraient vraiment du lot, mais
il y a par ailleurs bien peu de déchet dans les dix titres proposés ici
(qui sont tous relativement développés, la durée totale de l'album
dépassant cette fois-ci les 70 minutes !). Du tout bon.
- Iron Maiden - The Final frontier (2010) ★ ★ ★
Déjà le quinzième album du groupe, et on ne peut pas dire que
l'inspiration se tarisse, puisque l'album est encore plus long que le
précédent. Quoique, niveau inspiration, pas sûr que celui-ci soit le
plus mémorable du lot. Pas non plus le plus désastreux certes, mais on
reprend en gros les recettes des deux précédents (très peu de prise de
risques, des titres très calibrés Maiden) avec un métier qui ne fait
certes aucun doute mais aussi des longueurs par moments. Pourtant, le
disque commence de façon assez imprévue avec l'introduction futuriste de
la première piste (un peu gadget mais personnellement j'aime beaucoup)
qui débouche ceci dit sur un titre assez caractéristique de l'album :
pas mal mais rien de transcendant (et encore une fois un refrain trop
répété). La première moitié de l'album tient quand même très bien la
route, mais ensuite on se perd dans une série de chansons très
développées qui semblent trop souvent courir après les grands succès du
groupe sans vraiment les rattraper (des intros avec nappes de synthés en
veux-tu en voilà, de l'épique qui s'essouffle, des thèmes déjà abordés
plusieurs fois dans de précédents albums, mais surtout des
développements instrumentaux qui n'apportent pas grand chose sauf une
durée oscillant entre les 7 et les 11 minutes). On sent même parfois que
ça force un peu (Dickinson gueule pas mal sur The Talisman par
exemple). Maintenant que j'ai bien noirci le tableau, je peux quand même
conclure en précisant que l'ensemble reste très agréable à écouter, si
on n'avait pas déjà entendu ça en mieux de la part de Maiden, ce serait
un excellent album.
- Iron Maiden - Book of souls (2015) ★ ★ ★ ★
Eh bien, nous y voilà, au dernier album (à ce jour...) d'un groupe qui,
qu'on l'aime ou pas, est un pilier indiscutable du metal depuis plus de
40 ans. Et ils ont mis les bouchées doubles, puisqu'à force d'inflation,
ça ne tient même plus sur un seul CD ! Mais si la volonté de pondre un
album grandiose est assez manifeste (rien que l'intro solennelle de
Eternity should fail avec cette trompette, ça en jette pas mal),
elle est finalement assez bien assumée. Oui, bien sûr, il y a du refrain
répétitif, des choeurs un peu puérils (les wohohoho dans The red and
the black), une utilisation franchement abusive d'effets d'échos sur
les voix (à croire qu'ils ont découvert le gadget récemment et ne
peuvent pas s'empêcher d'en mettre un peu partout) et même quelques
pistes de remplissage dont on se serait volontiers passé pour que
l'album revienne à une durée plus standard (When the river runs
deep ou The man of sorrows). Mais la majorité du temps, c'est
quand même très bon (peut-être que l'effet pshychologique "dernier
album" joue aussi dans cette impression). Une chanson comme The great
unknown est super efficace, mais ce sont surtout les pistes longues
et ambitieuses qui tiennent la route, à commencer par la chanson-titre
qui, sans rien révolutionner, conclut superbement le premier disque.
Pour la conclusion du deuxième, il y avait de quoi craindre le gros
dérapage : une chanson de 18 minutes qui débute avec un solo de piano
kitschouille bientôt accompagné de violoncelle, à première écoute, ça
semble vraiment trop loin du style Maiden et trop caricatural pour
passer la rampe, et puis en fait on s'y fait et il y a même de très
beaux moments dans cette chanson (bon, qui reste quand même un peu
longue pour son contenu à mon goût). Comme pour l'album dans son
ensemble finalement, ce n'est clairement pas le sommet du groupe, mais
c'est quand même diablement attachant.
- Iron Maiden - Senjutsu (2021) ★ ★
Nouvelle livraison de la part du groupe le plus célèbre de la sphère
metal, et comme pour le précédent, c'est du volumineux, avec un double
CD et un peu plus d'une heure vingt de musique. Je vais être très
honnête : à la première écoute, j'ai trouvé l'album complètement raté.
Je suis un petit peu revenu depuis de cette première impression très
négative : il reste quand même dans tout ça un savoir-faire indéniable,
tant au niveau de la composition que de l'interprétation, et la patte
Maiden reste bien présente et audible. On atteint même dans quelques
titres le très satisfaisant : la chanson-titre introduit de façon
efficace le double album (c'est peut-être d'ailleurs la seule à tenir
vaguement la promesse d'une inspiration japonisante), et parmi les
titres à rallonge qui clôturent le disque, The Parchment est une
réussite même si on a l'impression d'avoir déjà fait cent fois le tour
de ce genre d'atmosphères et de thèmes avec Maiden. Justement, les
défauts, tout de même, restent nombreux : le son globalement indigne
d'un groupe aussi reconnu en 2021 (sur le single Stratego, c'est
carrément désastreux, comment ont-ils pu laisser passer ça ?),
l'impression persistante que Maiden se repose vraiment sur des recettes
éprouvées (le Empire of the clouds conclusif de Book of
souls était une prise de risque autrement plus manifeste que toutes
les pistes de Senjutsu réunies), et surtout un manque de conviction qui
fait que les titres s'éternisent sans accrocher suffisamment pour
justifier leur durée (forcément, y a plein de solos, faut bien faire
bosser les trois guitaristes, mais même s'ils ne sont pas infâmes, on
est à peine au-dessus du remplissage la plupart du temps). Encore une
fois, pourquoi remplir 80 minutes si ça ne tient pas la route
musicalement (dans un format beaucoup plus ramassé, Days of a future
past fonctionne assez bien par exemple) ? Bref, un album qui
s'écoute très bien, mais mineur au vu de la gigantesque discographie du
groupe.
- Judas Priest - Rocka rolla (1974) ★ ★
C'est à un des plus gros poids lourds du metal que je m'attaque avec cet
album, sorti à une époquen où le genre était encore balbutiant. À tel
point d'ailleurs que ce premier essai, outre sa pochette et son titre
assez ridicules, a le gros défaut... de ne pas être du tout un disque de
metal, mais bien du rock tout ce qu'il y a de plus standard, avec un
certain groove plutôt appréciable sur quelques pistes (One for the
road, Never satisfied), mais aussi des choses plus
expérimentales d'un intérêt très limité (Deep freeze) et un
Run of the mill où on a l'occasion d'entendre pour la première
fois Rob Halford monter dans les aigus, mais c'est pas franchement beau
(le même Halford surprend plus en mode quasiment crooner sur Dying to
meet you). Globalement, ce n'est pas désagréable mais ça n'a quand
même qu'un intérêt très limité tant ça manque d'originalité et de
personnalité. Si on compare aux débuts de Black Sabbath quelques
années plus tôt (groupe qui est censé avoir fortement influencé Judas
Priest), on est quelques catégories en-dessous.
- Judas Priest - Sad wings of destiny (1975) ★ ★ ★ ½
Après un premier disque oubliable, je ne suis pas encore entièrement
séduit par ce deuxième album de Judas Priest, même si les écoutes
répétées me l'ont quand même fait pas mal réévaluer (oui, oui, j'étais
initialement parti pour une note plus sévère). Soyons honnêtes, même
s'il s'agit encore d'un album beaucoup plus rock que metal, il y a quand
même pas mal de pistes très intéressantes : un prélude assez
grandiloquent avec piano et "orchestre" qui lance bien les choses
(enfin, si on n'a pas une version de l'album où il se retrouve en plein
milieu...), suivi d'un Tyrant vraiment réussi (le duo vocal à un
moment fonctionne vraiment super bien), et puis bien sûr le morceau de
bravoure Victim of changes qui serait excellent... si Halford ne
se lançait pas sur la fin dans des piaillements suraigus complètement
délirants et à la limite du supportable. Ce n'est hélas pas la seule
piste où ce genre de gag vient tout gâcher, Dream deciever
(espèce de ballade mélancolique à l'atmosphère très prenante) peut
difficilement être écoutée jusqu'au bout à cause d'un passage en voix de
tête risible (non, désolé, je ne comprends vraiment pas, du chant aigu
"normal" très bien, mais là c'est pas possible). Et puis on se serait
quand même extrêmement bien passé de l'espèce de parodie de Queen
que constitue Epitaph. Bon, je suis méchant mais pour le reste
c'est quand même vraiment pas mal hein.
- Judas Priest - Sin after sin (1977) ★ ★ ★
Troisième étape dans ma découverte de la discographie de Judas Priest,
je continue à trouver ça très sympa, mais pour moi ça ne monte pas
au-dessus (c'est même un peu moins bon à mon sens que l'album
précédent). Déjà, c'est à nouveau trop rock et pas assez metal pour moi
(le titre d'ouverture Sinner, par exemple, même pour l'époque ça
renverse pas les tables, encore une fois ça n'a vraiment rien de
comparable avec ce que produit Black Sabbath un peu avant à mon
sens), et puis il y a quand même un ventre mou de chansons assez
quelconques en milieu d'album (de Last rose of summer à Raw
deal, rien n'est franchement mauvais mais ça s'oublie aussi tôt). Le
reste est bien, voire très bien : Dissident agressor est le seul
titre qui dépote un peu plus, Starbreaker fonctionne très bien
sans chercher midi à quatorze heures, mais le meilleur dans cet album
c'est pour moi Diamonds and rust, c'est-à-dire une reprise (ceci
dit, j'ai été écouter l'original de Joan Baez que je ne connaissais
évidemment pas, et ça n'a quand même pas grand chose à voir !). Sans
être franchement déçu, j'attends toujours un titre du groupe qui me
donne vraiment envie de l'écouter en boucle.
- Judas Priest - Stained class (1977) ★ ★ ★
Toujours la même chose en ce qui concerne Juas Priest pour moi, c'est
sympa mais pas inoubliable. Pourtant, la pochette laissait imaginer un
album beaucoup plus metal que les précédents, c'est vaguement le cas (la
première piste Exciter bien speed, ou encore Saints in
hell) mais toujours sur un modèle de riff très répété certes
efficace mais qui lasse un peu à la longue. Je préfère en fait la
chanson titre, vraiment sympathique, et (encore une fois) la reprise
Better by you, better than me qui reste bien en tête. Le disque
se termine bien avec la ballade Beyond the realms of death (mais
j'ai lu un peu partout que c'était le Stairway to heaven du
groupe, je trouve la référence écrasante) et un Heroes end qui ne
se prend pas la tête mais qui est bien réjouissant dans un style hard
rock plus classique. Le reste est correct mais vite oublié, c'est encore
une fois un bon album mais vraiment rien de plus pour moi. Je crois que
je vais arriver à cours d'inspiration pour les disques suivants si ça
continue comme ça.
- Judas Priest - Killing machine (1978) ★ ★ ★ ½
Grosse année 1978 pour Judas Priest, puisque cet album déboule à peine
quelques mois après Stained class. Pas vraiment de baisse
d'inspiration pour autant, on a même droit à quelques titres qui
figurent pour moi parmi les meilleurs que j'ai écoutés du groupe pour
l'instant : l'introductif Delivering the goods, hyper efficace,
et surtout Hell bent for leather qui, en plus de fixer le fameux
look cuir du groupe, possède un refrain irrésistible (le motif de
guitare est excellent). On a aussi droit (comme d'habitude !) à une
reprise réussie avec The green manalishi. Mais hélas, un album de
Judas Priest ne semble pas pouvoir être convaincant de bout en bout, et
celui-ci aussi a droit à ses pistes plus quelconques et datées (Rock
forever, Evil fantasies), et même à du franchement douteux
(le refrain de Evening star, le retour de la caricature de
Queen avec Take on the world). Inégal donc, même si les
hauts sont suffisamment hauts pour en faire l'un de mes disques préférés
du groupe jusqu'à présent.
- Judas Priest - British steel (1980) ★ ★ ★ ½
Je continue finalement mon parcours tranquille de la discographie de
Judas Priest, et je change enfin de décennie. Après le fameux live
Unleashed in the East, le groupe revient avec la volonté
manifeste de faire efficace : neuf titres tous assez calibrés (on
n'atteint jamais les cinq minutes), et une certaine simplicité dans la
construction des chansons, jusqu'à devenir presque caricatural
(Breaking the law, 2 minutes 30 qui reposent sur quasiment rien,
et pourtant c'est très efficace !). Et ça marche de fait assez bien,
Rapid fire, Grinder ou même The Rage (malgré son
intro surprenante à la basse) sont des titres qui ne vont pas chercher
midi à quatorze heures et qui se dégustent avec plaisir. À côté de ça,
comme d'habitude, on a toutefois des tentatives nettement moins
réussies, le refrain choral de Living after midnight ou l'enième
tentative de faire un tube queenesque United sont assez ratés.
Surtout, même si l'album reste globalement très bon, je ne peux toujours
pas crier au chef-d'oeuvre, tant j'ai l'impression que par rapport aux
groupes vraiment novateurs de la même période (le premier album de
Maiden date de cette même année 1980...), Judas Priest se
contente de faire un boulot correct mais qui n'a rien d'exceptionnel.
- Judas Priest - Point of entry (1981) ★ ★ ½
Pour ce début de nouvelle décennie, le groupe continue encore à aligner
les disques avec une régularité impressionnante, mais celui-ci a
nettement plus mauvaise presse que ses prédécesseurs (et successeurs,
d'ailleurs) immédiats (et pas seulement à cause de la pochette). Je ne
suis qu'à moitié d'accord. Sur le fond, ça reste pour moi un album de
Judas Priest assez cohérent avec ce qu'ils font depuis un certain temps,
des titres bien calibrés et globalement plus rock que franchement métal,
avec quand même une ou deux pistes qui envoient un peu plus. Bon, ok,
sur celui-ci, c'est vrai que ça manque quand même de chansons vraiment
efficaces, il y a bien Heading out to the highway et son
excellent riff qui ouvrent parfaitement l'album, mais ensuite rien de
très impressionnant (Desert plains et son motif presque
hypnotique est réussie mais on est dans un autre genre). Et par contre,
on a comme toujours un ou deux titres vraiment douteux qui semblent
s'être égarés (les bruitages de Solar angels, le refrain de
You say yes qui vient gâcher l'excellente intro). Le tout
s'écoute encore agréablement, mais sans plus, on s'éloigne encore un peu
du concept d'album mémorable (que selon moi le groupe n'a de toute façon
encore jamais produit).
- Judas Priest - Screaming for vengeance (1982) ★ ★ ★ ★
Après un Point of entry, le groupe reprend du poil de la bête.
Là, pour la première fois de toute la discographie du Priest, on a
vraiment un très grand moment, avec l'entrée en matière exceptionnelle
que constitue le très court The Hellion (intro instrumentale qui
réussit l'exploit d'être grandiose sans donner dans le pompeux) enchaîné
avec un Electric eye ravageur malgré les voix assez robotiques
dont je ne suis pas fan (m'enfin, en termes d'effets bizarres,
Fever est nettement pire). Alors, ça y est, on le tient, le
chef-d'oeuvre ? Eh ben non, pas encore, car le groupe semble
définitivement incapable de faire un album entier homogène et réussi de
bout en bout. On a donc une qualité assez décroissante au long de la
première moitié du disque (Riding on the wind est très bonne, la
plus rustique Bloodstone fonctionne encore malgré une
répétitivité certaine, mais ensuite c'est vraiment moins bon), mais
heureusement, quelques bonnes surprises nous attendent en fin de course,
avec un You've got another thing coming où Judas Priest réussit
(enfin !) à créer un tube "queenesque" immédiatement séduisant, et le
Devil's child final qui sent bon son AC/DC (ce qui
personnellement ne me dérange pas). Magré un gros ventre mou, c'est
quand même un excellent album.
- Judas Priest - Defenders of the faith (1984) ★ ★ ★ ★
Approchant de la moitié de la discographie de Judas Priest, je n'ai
toujours pas trouvé d'album justifiant totalement à mon goût leur place
au sommet du panthéon du metal, mais eux sont manifestement tout à fait
convaincus de leur talent et n'hésitent pas à se déclarer ici en tant
que défenseurs de la foi métallique. Cela prend la forme d'un diptyque
qui clôt l'album en mode "faisons lever les foules dans les stades"
(Heavy duty/Defenders of the faith), on est vraiment à la limite
du ridicule, mais c'est finalement assez cohérent avec d'autres
tentatives antérieures du groupe de créer des hymnes fédérateurs. Et le
reste de l'album ? Pas de tuerie absolue comme l'intro du précédent,
mais quasiment que du (très) bon (seule la ballade Night comes
down me semble assez quelconque), une entrée en matière efficace
avec Freewheel burning, des refrains qui fonctionnent (Love
bites, Eat me alive) et même un The Sentinel épique
qui lorgne presque du côté de Maiden. Bref, encore une fois, sans être
une révélation absolue, ça reste très solide.
- Judas Priest - Turbo (1986) ☆
Ah, les années 80, le bon vieux son des synthés en plastique et la
musique "easy listening" qui cache juste un manque total d'inspiration
sous quelques kilos de paillettes ! Bon, ok, c'était à la mode à
l'époque, et même Maiden a mis des synthés dans son Somewhere in
time la même année. Mais Judas Priest ne se contente pas du tout de
saupoudrer un peu de sons futuristes dans ce Turbo, non non non, sous
prétexte de racoler le marché américain (pour lequel ils devaient donc
avoir sacrément peu de respect, soit dit en passant !), ils se vautrent
allègrement dans les pires clichés de cette musique facile : guitares
synthé qui bzouibzouitent à longueur d'album (l'intro de Out in the
cold, c'est vraiment pas possible), batterie en mode pilotage
automatique surmixée pour claquer de façon complètement artificielle, et
surtout des compositions qui ne sauvent même pas le disque, avec des
refrains chantés en choeur sucrés au possible (Private property,
Rock you all around the world). Aucun titre qui ne soit pas à
jeter dans cette tentative honteuse (apparemment, Turbo lover est
tout de même considéré par beaucoup comme un classique du groupe,
pourtant il combine tous les défauts cités ci-dessus...), surtout de la
part d'un groupe qui s'était déclaré Defenders of the faith deux
ans plus tôt !
- Judas Priest - Ram it down (1988) ★ ★
Initialement, l'horrible Turbo devait être un double album (la
vache, déjà qu'un simple était de trop...). Du coup, ce Ram it down
sorti deux ans après contient des bouts prévus pour aller dans le disque
précédent, est-ce un signe du fait qu'on va encore devoir faire preuve
d'un certain masochisme pour aller jusqu'au bout de l'écoute ? Non,
heureusement, si on retrouve quelques caractéristiques sonores (niveau
batterie notamment), le ton est beaucoup plus musclé, et donc
intéressant. D'ailleurs, la chanson titre qui ouvre l'album est une
bonne surprise, ça va vite et c'est efficace. Je suis ensuite un peu
perturbé par des réminiscences thématiques (bon, pour Heavy
metal, c'est parce que j'ai triché, j'ai déjà écouté
Painkiller, et le motif de All guns blazing est quand même
plus que reconnaissable ; quant à Love zone, j'y entends
Antisocial et ça crée un décalage pour le moins curieux), mais il
y a globalement du bon sur une moitié du disque (Come and get it,
c'est très bien !). Et puis... bah ça s'effondre un peu, Blood red
skies retrouve des sonorités insupportables (ça a un petit côté
Final Countdown par moments, mais sans le côté jouissif du titre
d'Europe), puis on a droit à une reprise incompréhensible de
Johnny B. Goode (j'adore l'original, mais là ça ne ressemble à
rien) et on conclut avec un Monsters of rock inhabituellement
lent et lourd pour du Judas Priest mais qui remonte un peu le niveau.
Avec quelques ratés et pas franchement de vrai tube, on a un album très
mineur dans la discographie du groupe.
- Judas Priest - Painkiller (1990) ★ ★ ★ ★ ½
La versatilité de Judas Priest est quand même extraordinaire. Après
s'être vautrés dans un heavy disco-FM immonde pour Turbo, voilà
que, seulement deux albums plus tard, ils sortent l'album le plus brutal
(et de loin !) de leur discographie, comme s'ils s'étaient soudain
rendus compte que, quitte à essayer de coller à la mode, il y avait
aussi un truc appelé thrash metal qui s'était bien développé ces
dernières années et que peut-être ce serait cool de s'y mettre aussi.
Mais le pire, c'est qu'ils font ça extrêmement bien : le nouveau batteur
est manifestement dans son élément (cette intro sur le titre éponyme !)
même si c'est loin d'être subtil, les guitares s'en donnent à coeur joie
avec une avalanche de riffs acérés et de solos efficaces. En fait, le
seul auquel cette nouvelle ambiance très musclée ne convient pas, c'est
Halford qui force dans l'aigu en permanence jusqu'à devenir franchement
pénible (c'est lui qui coûte à l'album la note parfaite). Pour le reste,
même si c'est un brin monolithique (les cavalcades de Hell
patrol, Leather rebel ou Metal meltdown, toutes
réussies qu'elles soient, sont un peu sur le meme modèle), quelle
efficacité ! On notera quand même une tentative sur la deuxième moitié
de disque de créer des atmosphères inquiétantes un peu plus vintage qui
collent peut-être plus à l'image traditionnelle du groupe (l'excellent
Night crawler, et surtout la surprenante A touch of evil
avec la résurgence des synthés). Mais en ce qui me concerne, c'était
presque inutile, du bourrin aussi bien fichu et prenant que
Painkiller ou All guns blazing, j'en redemande !
- Judas Priest - Jugulator (1997) ★ ½
Après un Painkiller pourtant excellent, il aura fallu attendre
sept longues années avant de voir une nouvelle proposition de la part de
Judas Priest. La faute, bien entendu, à la rupture avec son chanteur
emblématique Rob Halford. Mais alors, maintenant qu'ils ont trouvé un
remplaçant en la personne de l'inconnu Tim Owens, que faut-il attendre
de leur musique ? Eh bien, si Painkiller était inhabituellement violent
pour le groupe, ça restait encore bien léger par rapport à ce que
propose ce Jugulator. Rythmique ultra lourde, guitares hyper graves et
saturées, on reconnait à peine le groupe, on a plus l'impression d'être
en train de découvrir un épigone du premier Sepultura, voire pire
(Judas Priest a tourné à l'époque avec Pantera, après tout...).
Au niveau des bons points, Owens s'en sort très très bien (capable
d'aller dans l'aigu façon Halford mais loin de se limiter à ça) et
quelques introductions qui mettent dans l'ambiance (bien sombre, on
l'aura compris). Côté mauvais, un abus de bruitages ineptes (sur
Decapitate, ça frise le mauvais goût), un son beaucoup trop
chargé (guitares saturées donc, mais aussi batterie ultra bourrine) et
une musique qui ressasse en permanence le même type de structures (riff
répétitifs et peu mélodiques), ça finit assez rapidement par fatiguer.
En fait, on a en face de soi un album assez lambda de thrash bien
bourrin, genre qui ne jamais passionné outre mesure. Judas Priest nous a
habitués à mieux que ça.
- Judas Priest - Demolition (2001) ★ ½
Les années 90 auront vraiment été années de vaches maigres en ce qui
concerne Judas Priest, puisqu'il faut attendre 2001 pour voir débarquer
le deuxième (et dernier) album du groupe avec Tim Owens au chant. Si
Jugulator était assommant de bourrinitude, ce Demolition, malgré
son titre (et sa pochette franchement cheap) l'est moins. Certes, on
garde un son assez désagréablement lourd et saturé, mais c'est beaucoup
plus varié et mélodique que l'opus précédent. Là où le bât blesse, c'est
que c'est en fait trop varié, ça part dans différentes directions
contradictoires, c'est très long, et on a bien du mal à comprendre le
but de l'ensemble. Un peu de synthés datés (sur l'horrible ballade
Close to you ou sur Lost and found), des effets au mieux
discutables, au pire douloureux (la voix robotisée du refrain de
Cyberface, on tombe vraiment très bas), beaucoup d'intros plus ou
moins bruitistes sans intérêt, d'autres qui lorgnent assez clairement du
côté de Metallica (Hell is home ou In Between, on a
aussi une sensation de déjà entendue pénible sur les lignes de chant de
Subterfuge, qui est par ailleurs un bon titre), mais aussi un
One on one aux forts relents de Rammstein (c'est à la fois
inattendu et assez raté), et le Metal messiah qui conclut l'album
est une atroce bouse avec couplets rappés qui confirme vraiment que
Judas Priest a mis de tout et de n'importe quoi dans ce disque. Ce n'est
pas toujours mauvais (Feed on me par exemple), mais il aurait au
moins fallu faire un peu de tri dans tout ça...
- Judas Priest - Angel of retribution (2005) ★ ★ ½
C'est l'album du grand retour pour Judas Priest. Grand retour de Rob
Halford au chant, bien entendu (mine de rien, même s'il n'y a eu que
deux albums publiés pendant la période Owens, 15 ans se sont écoulés
depuis Painkiller). Mais aussi le retour à un style beaucoup
moins agressif et moderne pour le groupe, qui semble vouloir renouer
avec la tradition de ses albums des années 80 plutôt que de faire une
suite à Painkiller (ou aux deux bouses qui l'ont suivi). C'est à la fois
rassurant et en même temps un peu décevant, à l'image d'un album tout à
fait honnête mais qui ne transporte jamais complètement. Le début est
pourtant pas mal, Judas rising profitant d'un son assez massif et
d'une énergie communicative, et Deal with the devil ayant un
refrain qui fonctionne bien. Mais petit à petit, on se met en mode
service minimum et les titres "corrects sans plus" s'alignent (la
ballade Angel, la cavalcade Hellrider qui veut remettre du
rythme dans l'ensemble mais n'y parvient pas totalement). On se dit même
par moments qu'il serait temps de passer à autre chose (les cris
d'Halford à la fin de Demonizer ne passent pas), ce qui sera
d'ailleurs plus ou moins le cas avec la très longue Lochness
conclusive, qui a le mérite de tenter vraiment autre chose, tout en nous
laissant un peu sur notre faim. Pas un mauvais album, mais on pouvait
espérer mieux pour les retrouvailles du groupe avec son chanteur
mythique.
- Judas Priest - Nostradamus (2008) ★ ★ ★ ★ ★
S'il y a une chose qu'on ne peut pas reprocher à Judas Priest, c'est de
rester trop longtemps campé sur ses acquis. Le groupe avait déjà opéré
plusieurs changements de direction aussi abrupts que surprenants, mais
celui de Nostradamus est probablement le plus invraisemblable de tous :
après 35 ans de carrière et alors qu'ils viennent de récupérer leur
chanteur emblématique pour un album qui pour le coup regardait
clairement en arrière, voilà qu'ils reviennent avec dans leur poche un
double disque consacré donc à Nostradamus, sorte de rock rock opera où
les chansons sont entrecoupées de nombreux titres de transition
atmosphériques, avec grand renfort de claviers symphoniques (par
moments, on a l'impression que le Michel de Notre-Dame, en plus de
prédire des conneries, avait inventé le voyage dans le temps et fait un
petit tour à bord de l'Enterprise). Sur le papier, ça ressemble
franchement à une très mauvaise idée, le groupe ne semblant pas du tout
le plus indiqué pour ce genre de projet (ils m'ont jusqu'ici rarement
convaincu quand ils essayaient de dépasser le stade de la chanson à la
structure basique, simple mais percutante). Et de fait, l'album a été
très controversé chez les adeptes du Priest classiquement heavy. Eh bien
moi je trouve que c'est tout simplement leur plus grand réussite...
Certes on reconnaît à peine le groupe, mais l'ambiance (globalement
sombre) est vraiment hyper prenante, Halford évite les piaillements
aigus et chante sobrement mais de façon réellement habitée, et les
titres mémorables s'enchaînent (Prophecy, War,
l'enchaînement de Sands of time et de Pestilence and
plague avec son refrain en italien, les plus épiques Conquest
ou Nostradamus, la très belle Alone). En fait, je pourrais
citer quasiment toutes les "vraies" chansons de l'album, qui ne tombe
dans la mièvrerie qu'à une ou deux reprises (la ballade Lost love
est vraiment mauvaise, le plus gros point noir, et l'enchaînement
Hope/New beginnings sur le CD2 est aussi d'un goût fort
discutable). Mais ces petites erreurs de parcours ne suffiront pas à
réfréner mon enthousiasme, je suis vraiment fan de cet improbable machin
!
- Judas Priest - Redeemer of souls (2014) ★ ★
Le temps passe et les albums de Judas Priest se font de plus en plus
rares (douze entre 1974 et 1990, seulement cinq entre 1990 et 2014). On
a même pu croire le groupe définitivement mort après Nostradamus
(qui aurait été un magnifique adieu !) : tournée présentée comme étant
la dernière, départ de l'un des membres fondateurs (le guitariste K.K.
Downing), ça sentait vraiment la fin, et puis en fait non, un nouvel
album est enfin arrivé, six ans après le précédent. Point de projet
ambitieux cette fois-ci, on revient, comme dans Angel of
retribution, à un heavy des familles tout à fait classique et
prudent. D'ailleurs, on a vraiment le petit frère de l'album cité, mais
en moins bon, notamment à cause d'un son très brouillon qui rend même
quelques pistes quasi inaudibles (Metalizer, c'est de la bouillie
sonore), et à quelques éléments pourtant caractéristiques du groupe mais
qui ne passent plus (les aigus d'Halford sur Halls of Valhalla ou
sur Battle cry sont plus douloureux qu'autre chose, la ballade
Beginning of the end est vraiment médiocre, même si c'est un
chef-d'oeuvre comparé au Never forget qui conclut le CD bonus
pour les courageux qui ont opté pour la version complète de presque une
heure et demie de l'album). On se console quand même avec des
compositions dans l'ensemble correctes (Redeemer of souls et son
côté épique presque maidenien, la rigolote March of the damned,
ou le groovy Crossfire), mais l'ensemble manque tout simplement
trop de conviction pour être plus qu'un album acceptable mais très
oubliable dans la discographie du groupe.
- Judas Priest - Firepower (2018) ★ ★ ★ ½
Judas Priest perd ses membres historiques un à un (c'est désormais Glen
Tipton atteint par Parkinson qui laisse sa place) mais continue à
produire un album de temps à autre. Ce dernier en date semble annoncer
via sa pochette un retour à l'époque de Defenders of the faith,
mais c'est vite contredit par ce qui nous est envoyé dans les oreilles :
au moins niveau son, on a droit à quelque chose de nettement plus
moderne et puissant que le moyen Redeemer of souls précédent, ça
envoie vraiment, et la piste éponyme inaugurale est vraiment excellente.
D'ailleurs, tout le disque s'écoute vraiment tout seul, même si on
pourra reprocher au groupe de se laisser un peu porter par cette
excellente production et de ne pas toujours se fouler niveau
compositions : refrains en choeur à gogo (qui tombent parfois dans
l'énervant, comme sur Children of the sun), influences qui vont
de Metallica (Lone Wolf) à Maiden (Traitor's gate), sans
jamais atteindre de sommet inoubliable (à part la première piste, ça
manque de titres vraiment marquants, même si j'aime beaucoup
Necromancer ou Rising from ruins) mais sans non plus
souffrir du phénomène du ventre mou, ce qui est en soi un bel exploit
pour un disque proposant pas moins de 14 chansons. En fait, le groupe
nous propose simplement un tour d'horizon du heavy metal avec la belle
assurance des vétérans qu'ils sont désormais devenus, mais qui sont loin
de proposer de la mauvaise musique.
- Judas Priest - Invincible shield (2024) ★ ★ ★ ★
Les papys du metal sont de retour ! Ben oui, Judas Priest ne pouvait pas
laisser passer l'année 2024 sans proposer un nouveau disque, exactement
un demi-siècle après le Rocka rolla inaugural de leur
discographie. Bien sûr, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis, le
groupe et le style ne sont plus vraiment les mêmes, mais on retrouve
quand même, et c'est bien l'essentiel, un Rob Halford impressionnant au
chant. Les mauvaises langues diront que la technologie moderne fait des
miracles, mais peu importe, sur CD il reste vraiment excellent, et on a
même droit à quelques-une des aigus qui ont fait sa légende (sur The
serpent and the king notamment). Et pour le reste, que fallait-il
attendre après un Firepower vraiment convaincant il y a déjà six
ans ? Eh bien, la même recette, à savoir un heavy très classique et
calibré (galopades et refrains mélodiques à gogo, solos qui vont bien
sur chaque piste ou presque) qui ne sort de ses rails que très
ponctuellement (l'atmosphère plus mélancolique de Crown of horns,
le solo acoustique de Giants in the sky), porté par une
production moderne hyper efficace. Que de l'attendu donc, mais la bonne
surprise de cet album, c'est qu'il n'y en a pas de mauvaise : tout est
parfaitement maîtrisé, aucune piste ne semble franchement hors de
propos, et la plupart sont des tubes irrésistibles (Panic attack
qui ouvre le disque, la chanson titre, Trial by fire, mais je
pourrais citer les deux tiers des chansons en fait). Classique, mais
amplement suffisant pour faire la leçon à quantité de groupes qui n'ont
pas le quart de l'ancienneté de Judas Priest.
- Kayo Dot - Choirs of the eye (2003) ☆
Album écouté sur les conseils d'un camarade fan de metal assez
expérimental, je dois bien avouer que je n'ai pas du tout aimé. Déjà, je
suis très surpris de l'étiquette metal collée à ce disque (bon, ok,
"metal d'avant-garde" apparemment) tant il s'agit de musique qui n'a
strictement rien à voir avec du metal : en gros de la musique
contemporaine avec des influences jazz jouées sur une grande variété
d'instruments (cuivres notamment !), avec des guitares qui sont en mode
acoustique les trois quarts du temps. Le seul moment vraiment metal est
à la fin de The Manifold curiosity, avec guitares saturée et
chant rauque ... sous-mixé et complètement inaudible en fond (mais ça
fait apparemment partie du concept puisqu'il y a plusieurs moments où on
se demande s'il y a vraiment quelqu'un en train de chanter ou pas). Le
reste du temps, une musique d'une prétention abominable (et que je
t'envoie un accord planant et trois notes de guitare parcimonieusement
étalées dessus pendant 30 secondes, on imagine rien qu'à l'écoute les
musiciens jouer ça avec la pose inspirée de rigueur), des pistes
ultra-longues mais vides de contenu, et une volonté insupportable de
rendre le chant le plus abscons possible (parfois le texte est juste
dit, c'est toujours mieux que le chant désincarné en voix de tête de
The Wayfarer qui donne envie de baffer le chanteur), il y a une
telle volonté là-dedans de faire de la musique intelligente que ça en
devient totalement détestable. Mais je suis quand même tout à fait
content qu'on m'ait fait découvrir ça (il faut bien tenter de toute façon
pour savoir quoi en penser !), je n'imaginais même pas que ce genre de
musique existe à vrai dire !
- King Diamond - Conspiracy (1989) ★ ★ ★ ½
J'ai finalement bien fait de persévérer un peu avec King Diamond malgré
mon allergie initiale pour son chant si particulier. Après deux albums
avec Mercyful Fate, il a lancé un projet solo (et alternera
d'ailleurs un bon moment entre les deux après la reformation de son
premier groupe dans les années 90) qui va lui permettre d'évoluer
sensiblement musicalement : on passe petit à petit d'un style heavy à
tendance sombre à quelque chose de beaucoup plus clairement gothique et
théâtral (la plupart de ses albums solo sont des concepts albums centrés
sur une histoire qui fleure bon le film d'horreur un peu désuet), avec
adjonction progressive de claviers (sur cet album ils ne sont encore
qu'assez rarement sur le devant de la scène) et utilisation différente
de la terrible voix aiguë du King. Les changements permanents et abrupts
de registre ont été oubliés (ouf, ça devient supportable pour moi après
quelques albums encore trop piaillants), désormais le suraigu est plus
souvent utilisé sur les refrains ou de façon très mélodique pour
accentuer l'ambiance de certains passages, et ça passe mieux (même si ça
reste un point noir du disque, sur Sleepless nights ou The
Wedding dream notamment). C'est en tout cas suffisant pour que je
puisse enfin m'attarder sur le fond instrumental, et là il faut bien le
dire, c'est bon, et même souvent très bon, guitares incisives (malgré
une production pas terrible), mélodies efficaces, ambiances recherchées,
il y a plusieurs titres vraiment excellents dans le lot : les neuf
minutes d'At the graves (et son intro au clavier), A visit
from the dead (probablement mon préféré du disque) et bien sûr
l'instrumental final Cremation qui réussit à bien intégrer sa
citation du motif principal du Mars de Holst (y en a combien, des
groupes de metal qui ont repris Mars ?). Bref, un vrai bon disque qui
serait un classique immédiat si le chant n'était pas encore repoussoir
par moments (mais je crains que King Diamond ne se soit jamais vraiment
totalement assagi de ce point de vue, faudra bien que je fasse avec pour
la suite !).
- King Diamond - The Eye (1990) ★ ★ ★ ★
Pour ce nouvel album concept, King Diamond s'empare d'une histoire de
nonnes possédées s'adonnant à des cérémonies sataniques et lubriques
orchestrées par un confesseur lui-même manifestement sévèrement atteint
(histoire vraie très proche de celle des Diables de Loudun de
Penderecki, mais l'illustration musicale n'est pas vraiment dans le même
style). Un sujet en or pour lui, bien entendu, qui s'en donne par
exemple à coeur joie en rejouant à lui tout seul une scène de procès où
il interprète tour à tour tous les personnages. S'il en fait
probablement un peu trop, il faut quand même bien reconnaître que le
style musical pratiqué par son groupe s'adapte à merveille au récit, les
passages atmosphériques sont parfaits (le vraiment inquiétant Two
little girls, l'emploi intelligent des claviers, notamment la
ritournelle au clavecin qui démarre Behind these walls), ça reste
mélodiquement très solide, et les titres excellents s'enchaînent presque
sans discontinuer (l'instrumental Insanity est en-dessous du
reste, mais il met encore mieux en valeur l'énorme 1642
Imprisonment qui lui succède et reprend son thème). Franchement,
j'en viendrais presque à oublier la voix du King (elle colle
parfaitement au thème, sans que ça la rende spécialement agréable pour
autant !). Un très bon album, encore un peu au-dessus du précédent à mon
sens.
- King Diamond - The Spider's Lullabye (1995) ★ ★ ★ ½
Alors que son projet solo semblait avoir pris son rythme de croisière à
la fin des années 80, les quelques années qui vont suivre montreront un
King Diamond hésitant sur l'évolution à donner à sa musique :
dissolution du projet solo en question pour reformer Mercyful
Fate (deux albums sortiront, mais je préfère définitivement la
facette King Diamond à Mercyful Fate), puis reformation du projet, et
finalement alternance entre les deux, avec parfois une influence
manifeste de l'un sur l'autre. Justement, pour ce premier disque après
cinq ans d'absence sous ce nom, King Diamond semble ne pas vouloir
prendre trop de risques et scinde son disque en deux : une première
moitié constituée de titres heavy (presque speed par moments) sans grand
rapport entre eux, où Diamond essaye de donner de la personnalité en
abusant de sa voix aiguë, ce qui bien entendu a plutôt pour effet de
gâcher un peu les choses (Moonlight notamment), même si ça reste
très correct. Mais il faut attendre l'espèce de suite constituée des
quatre derniers morceaux (où on retrouve une sorte de mini-album concept
centré sur les araignées qui ont donné son titre à l'album) pour
retrouver le côté atmosphérique et les ambiances géniales propres au
groupe, et là, malgré le début de la chanson titre (où Diamond chante
aigu et faux de façon insupportable), c'est du très très bon, notamment
les 8 minutes de Room 17 avec son clavecin, et l'étonnante To
the morgue finale (qui parait presque joyeuse malgré le thème). Ouf,
Diamond n'a pas perdu son savoir-faire, et comme les albums suivants
vont revenir à du véritable album-concept, ça promet de bien belles
choses.
- King Diamond - The Graveyard (1996) ★ ★ ★ ★ ★
Avec ce nouvel album, King Diamond renoue avec le principe d'un album
concept entièrement dédié à une histoire gentiment horrifique (on nage
dans les clichés du genre, à l'image d'ailleurs de la première piste
gothique à souhait du disque), où il interprète bien entendu à lui tout
seul tous les personnages (ceci dit, c'est surtout le personnage central
qui chante sur une grosse majorité des pistes). Niveau accompagnement,
on alterne comme d'habitude entre de bons titres heavy très mélodiques
(Black hill sanitarium, I'm not a stranger), tous solides
à défauts d'être géniaux, et titres plus atmosphériques avec claviers
très en avant qui dominent notamment la fin de l'album. Et là, la barre
est mise très haute, Diamond est à fond dans son histoire et livre une
prestation hallucinante (les 'Die' concluant I am !!), qu'on
pourra certes juger légèrement exagérée, mais qui personnellement me
fait plonger complètement dans l'ambiance exceptionnelle du disque (les
très tristes Sleep tight little baby et Daddy, mais
surtout Heads on the wall et l'extraordinaire Digging
graves avec son motif obsédant et sa marche inexorable sont pour moi
les sommets de l'album). De façon assez irrationnelle (les recettes
restent les mêmes que d'habitude), je suis vraiment séduit sans réserve
par ce disque-là, au point même que je ne puisse pas l'imaginer mieux
servi par une autre voix que celle de King Diamond (quand on sait
l'allergie initiale que j'ai eu pour son chant, c'est quand même assez
fort). Il va d'ailleurs rejoindre illico ma liste de classiques à
réécouter régulièrement.
- King Diamond - Voodoo (1998) ★ ★ ★ ½
Après un The Graveyard particulièrement réussi, King Diamond nous
embarque pour un voyage en Louisiane sur fond de malédictions vaudou
(vous ne l'auriez pas deviné) mais tente de rester dans la lignée de son
album précédent : une histoire plus ou moins horrifique qu'on est pas
vraiment obligé de prendre la peine de suivre en détail, beaucoup de
titres heavy narratifs où Diamond fait le spectacle sans trop abuser de
son chant aigu, des claviers atmosphériques un peu partout, et des
mélodies qui restent dans la tête par dizaines. Mais, sans surprise vu
le coup de coeur que j'avais eu la dernière fois, je trouve ce disque-là
en tous points moins bon que sans prédécesseur, tout en restant
largement recommandable : un peu trop de titres "simplement heavy"
(d'ailleurs plus bourrins que d'habitude) qui finissent presque par
lasser (et c'est dommage, quand Diamond joue plus sur l'ambiance, le
niveau remonte immédiatement, comme sur le très bon Life after
death), une chanson titre où les percussions ethniques s'intègrent
relativement mal, mais surtout très peu de passages qui jouent la carte
du "triste/inquiétant". On passe quand même un très bon moment, mais
rien d'inoubliable cette fois-ci.
- King Diamond - House of God (2000) ★ ★ ½
Si Mercyful Fate est mort avant d'avoir atteint l'an 2000, le
projet solo de King Diamond, lui, continuera pendant encore quelques
années à aligner des disques dans lesquels, il faut bien l'avouer, la
prise de risque frise le néant absolu et l'inspiration commence aussi à
manquer quelque peu. Pas l'ombre d'une surprise donc, il s'agit encore
ici d'un album concept centré sur une histoire contée par un King
Diamond qui s'évertue toujours à créer de l'ambiance avec ses
changements de registre. Même s'il en fait un peu trop par moments
(Catacomb par exemple est un peu pénible), on ne peut pas dire
que ce soit superflu car l'accompagnement instrumental est un peu en
mode routine sur cet album. Rien d'affreux non plus, ça reste du bon
heavy bien mélodique, mais on a quand même un peu trop souvent
l'impression d'avoir déjà entendu des choses extrêmement ressemblantes
sur les disques précédents du groupe. Par ailleurs, les claviers qui
donnaient une partie du sel à sa musique semblent ici avoir un peu été
oubliés, c'est dommage. Restent une majorité de titres efficaces malgré
tout (Follow the wolf, Just a shadow), mais aussi cette
impression d'avoir fait plaisir à un vieux copain en écoutant sa
dernière oeuvre tout en sachant très bien qu'elle est assez mineure par
rapport à ce qu'il a produit auparavant.
- King Diamond - Abigail II - The Revenge (2002) ★ ★ ★ ½
Curiosité pour moi aujourd'hui, je chronique un disque qui est la suite
d'un autre... que je n'ai pas chroniqué auparavant puisqu'il fait partie
de la période où je ne supportais pas encore les piaillements de l'ami
King Diamond (il faudra quand même que je redonne une chance à ces
premiers disques). Peu importe d'ailleurs, cet album pourrait tout aussi
bien (quitte à changer un peu l'histoire racontée) être la suite de
n'importe quel autre disque commis par le King, tant il y recycle une
nouvelle fois des thèmes et procédés déjà utilisés cent fois les années
précédentes. Absolument rien de nouveau sous le soleil donc, mais du
mieux par rapport à House of God : au lieu de se contenter
d'écouter avec une oreille bienveillante un disque qui tournait un peu
en rond, on est à nouveau pris par les talents de conteur de Diamond, et
surtout par quelques titres heavy vraiment bien troussés : The
Storm malgré ses bruits d'orages téléphonés, Broken Glass
(superbe ambiance sur celle-ci) ou The Wheelchair. Quelques
tentatives timides aussi pour renouveler légèrement, avec des sonorités
orientales par moments (plus anecdotiques qu'autre chose) et un More
than pain très étrange. Bon, en fait, c'est aussi bien quand on
reste dans la routine habituelle, tant que c'est bien réalisé, et c'est
globalement le cas ici.
- King Diamond - The Puppet master (2003) ★ ★ ★
Ecouter un des derniers albums de King Diamond (ça fait une quinzaine
d'année qu'il n'a plus rien sorti de nouveau), c'est un peu comme
s'installer devant sa télé pour revoir un épisode d'une vieille série
légèrement démodée qu'on a adoré étant jeune : le scénario ne sera guère
surprenant, la musique non plus, mais on se laissera prendre quand même
et on passera un bon moment. Ce disque-ci n'échappe pas à cette sorte de
routine, même s'il tente de nous surprendre en ajoutant pour la première
fois des voix féminines (c'est en fait assez anecdotique, Diamond
propose à lui tout seul un échantillon vocal suffisamment varié pour ne
pas avoir besoin de ça, mais c'est cohérent avec l'histoire racontée, et
le duo de So sad est tout de même sympa). Pour le reste, la
recette n'a pas changé, beaucoup de heavy mélodique dans l'ensemble
inspiré (Blue eyes, Blood to walk), quelques titres plus
atmosphériques avec claviers (Emerencia) même si ces derniers
sont relativement discrets sur l'ensemble de l'album, tout ça est assez
inattaquable même si on a toujours l'impression d'avoir déjà entendu les
trois quarts des morceaux dans les disques précédents. C'est pour cela,
mais aussi parce que la fin d'album pêche un peu plus (Darkness,
Living dead) que je mets une note un peu plus basse qu'à la
majorité des disques précédents de King Diamond. Mais le néophyte qui
débuterait sa découverte de la discographie du groupe par cet album ne
serait sûrement pas déçu.
- King Diamond - Give me your soul... please (2007) ★ ★ ½
Vous en reprendrez bien un dernier pour la route ? Sorti quelques années
après le précédent, ce disque est le dernier à ce jour publié par King
Diamond, et il propose à nouveau une sorte de tour d'horizon de procédés
déjà vus et revus dans les albums précédents du groupe (au point que les
lignes vocales semblent souvent recopiées telles quelles). Même si cette
paresse finit par devenir problématique à la longue, force est de
constater que ça marche encore une fois relativement bien, avec même
quelques titres vraiment réussis, comme The girl in the bloody
dress (même si cette conclusion brutale laisse perplexe) ou
Mirror mirror. Mais on a aussi droit à d'autres chansons moins
convaincantes, comme ce Cold as ice peu convaincant
mélodiquement. L'ensemble reste agréable à écouter, sans plus (surtout
en comparaison avec les meilleurs disques des années précédentes),
Diamond a probablement eu raison d'en rester là (freiné par des
problèmes de santé), sans prendre le risque de décliner complètement.
- Korn - Korn (1994) ★ ★
En 1994, le metal ne va pas très fort, et un groupe obscur va sans le
savoir lancer avec son premier album une révolution en créant un nouveau
genre rapidement connu sous le nom de "nu metal". Cet acte fondateur
vaudra au groupe d'être absolument rejeté par une partie des metalleux
(il faut dire que le nu metal en question est le genre auquel se
raccrocheront tout un paquet de groupes peu recommandables comme
Slipknot et consorts), et d'être adulé par une frange non
négligeable de la jeunesse des 90's (ils vont rapidement devenir les
superstars du genre). Bon, qu'en est-il musicalement parlant, pour un
auditeur comme moi que l'étiquette collée au groupe ferait a priori
plutôt fuir ? Déjà, pour ceux qui craindraient que ce ne soit trop pop,
Korn (ok, je sors), pas du tout, c'est une musique aux marqueurs forts
qu'on peut même qualifier d'assez expérimentale : motifs très
minimalistes assénés par des guitares très graves et grasses qui ne font
objectivement pas grand chose de plus que poser une ambiance, beaucoup
de bruitages et autres bidouillages qui vont de l'intéressant au
franchement pénible (sur Ball Tongue ou Clown par exemple,
c'est plus agaçant qu'autre chose), quelque chose d'au fond assez
abstrait qui se base finalement beaucoup sur les performances vocales du
leader Jonathan Davis (qui utilise à peu près tous les registres
imaginables en en faisant régulièrement beaucoup trop, le summum étant
le Daddy qui conclut le disque), clairement habité par les textes
là aussi assez minimalistes mais pour le moins brutaux qu'il nous
propose (la pochette le laisse imaginer, on n'est pas vraiment là pour
rigoler, les ambiances sont presque systématiquement sinistres). Il y a
dans cette tentative de transcription musicale d'un (gros) malaise
quelque chose qui peut expliquer le succès du groupe (et de fait, c'est
vraiment assez différent de ce qui existait à l'époque, avec aussi
quelques influences "musiques urbaines" qui prendront encore plus
d'importance dans la suite de la carrière du groupe), même si je ne suis
personnellement pas vraiment séduit (ok ce n'est pas le but, disons
plutôt que je ne suis pas assez marqué par ce que j'entends), du fait
d'un contenu musical trop léger et surtout inégal (si Blind ou
Faget fonctionnent bien à mon sens, la moitié des chansons ne me
donne pas vraiment envie de les réécouter). À écouter quand même, au
moins comme une curiosité révélatrice de son époque.
- Korn - Life is peachy (1995) ★
Le premier disque de Korn, bien qu'inabouti, était intriguant, on
pouvait donc s'attendre à un deuxième essai vraiment intéressant. Sauf
que, si on en croit une bonne majorité des fans du groupe, l'éponyme
inaugural serait le meilleur album de toute la discographie du groupe.
Il est hélas bien possible qu'ils aient raison au vu de cette deuxième
tentative, où on passe d'intriguant à énervant. Les ingrédients,
pourtant, sont les mêmes que sur leur premier disque, avec ces guitares
minimalistes, ces bidouillages électroniques toujours plus omniprésents,
et un chanteur en totale roue libre (dès l'intro Twist où il
éructe de façon démente, on sent même qu'il va en faire beaucoup trop).
Mais là où Korn réussissait à instaurer des ambiances glauques et
perturbantes qui faisaient tout le sel de l'album, ce Life is peachy
laisse complètement de côté l'illustration d'un malaise générationnel,
devenant au mieux insignifiant, comme sur le tube simili-pop
A.D.I.D.A.S. (non, non, ça ne parle pas d'équipements sportifs,
c'est beaucoup plus trivial que ça...), et au pire pénible (les effets
de No Place to hide, pourtant l'une des pistes les plus
intéressantes du lot). Comme si le groupe, tout étonné d'être propulsé
comme leader d'un nouveau type de metal, essayait d'asseoir le plus vite
possible sa popularité en niant complètement la personnalité de sa
musique et en cherchant à tout prix à la rendre accessible (on peut
imaginer que la reprise rap Wicked plantée au beau milieu du
disque, et qui est pour moi à zapper obligatoirement si on ne veut pas
enlever encore deux étoiles à la note déjà pas élevée de l'album, est
censée y contribuer). Le pire, c'est que cette tentative a de fait été
couronnée de succès à l'époque...
- Korn - Follow the leader (1998) ☆
Eh oui, en à peine deux albums pourtant pas franchement mémorables, Korn
est devenu un leader, et entend manifestement le rester vu le titre
choisi pour cette troisième offrande. Et pour cela, tous les moyens sont
bons : encore plus de rap (pas moins de trois titres complets, rien que
ça suffit pour moi à rendre le disque pénible), des tonnes de samples et
autres bidouillages électroniques (on attend parfois une bonne minute
qu'une guitare daigne pointer le bout de son nez sur certains titres),
chant qui part dans tous les sens, et, comme dans leur disque précédent,
une tendance forte à la facilité pour aguicher le client (sur Got the
life typiquement, qui pourrait être écoutable s'il n'était pas
plombé par un chant insupportable). Bref, même si ce n'est pas nul (le
It's on introductif renoue même avec une sorte d'urgence glauque
intéressante, Dead bodies everywhere réussit aussi à créer
quelque chose), c'est tellement truffé de détails irritants qu'on finit
bel et bien par avoir envie de jeter l'album à la poubelle (façon de
parler en ce qui me concerne puisque je n'écoute évidemment pas une
version physique). Comme d'habitude, j'écouterai le reste de la
discographie du groupe, au moins d'une oreille, mais mes critiques sur
Korn s'arrêteront là.
- Kreator - Endless pain (1985) ★ ★ ★
Il y a des branches du metal qui ont un fort ancrage géographique : par
exemple, le black metal fera immédiatement penser aux amateurs à de
froides contrées nordiques (typiquement norvégiennes). Pour le thrash,
sans contexte, on est au coeur de l'Amérique. Et pourtant, il existe un
cousin moins connu du genre notamment pratiqué par le fameux Big Four,
le thrash allemand. Et Kreator en est un de ses fers de lance. En 1985,
un trio d'ados teutons déboule donc en ayant vaguement assimilé les
bases du genre, mais surtout en n'en conservant sciemment que les
aspects les plus bourrins et extrêmes : ça va quasiment tout le temps
super vite, souvent à la limite de ce que leur technique leur permet (et
même un peu au-delà, les solos notamment ne ressemblent à rien), le
chant n'est pas loin d'anticiper les sous-genres plus extrêmes qui ne
vont pas tarder à fleurir à côté du thrash, et le batteur en fait des
tonnes en permanence (la version manifestement remasterisée que j'ai
entendue l'affuble par ailleurs d'une curieuse réverbération, mais le
son global est très correct, surtout comparé aux horreurs que sont les
pistes de démo proposées en complément d'album !). C'est beaucoup trop
simpliste et répétitif pour ne pas lasser rapidement (pourtant l'album
n'est pas long), mais au moins sur quelques pistes, c'est un défouloir
assez réjouissant (la chanson titre, Tormentor ou Cry war
qui tente d'alterner des moments un peu plus posés), une sorte de
Slayer des débuts... mais en pire !
- Kreator - Pleasure to kill (1986) ★
J'avais qualifié le premier album de Kreator de sympathique défouloir
qui pourrait faire passer Slayer pour des gentils. Mais ça
c'était avant d'écouter ce deuxième opus, sorti la même année que le
célèbre Reign in blood du groupe américain sus-nommé, et qui a
largement de quoi concurrencer sa réputation d'extrême violence. C'est
simple, on reprend les mêmes éléments que dans le premier disque, à
savoir une vitesse d'exécution folle et un batteur déchaîné (que ses
camarades suivent comme ils peuvent, à savoir assez mal la plupart du
temps), on ne se fatigue même plus à chanter, et et on assène le tout
sans temps dans un déferlement de brutalité que le titre et la pochette
pouvaient laisser entrevoir, mais que la piste inaugurale Choir of
the damned semblait démentir (c'est une belle intro calme et bien
mélodique !). Bon, ok, l'album est culte pour son ultra violence, il le
mérite, mais est-ce de la bonne musique ? Eh bien pas du tout, le
"chant" est totalement rédhibitoire, c'est hyper répétitif et
globalement peu inspiré, à une ou deux exceptions près (Under the
guillotine est un titre sympa). On touche ici les limites d'un
jusqu'au-boutisme forcené...
- Kreator - Terrible certainty (1987) ★ ★ ½
Après un Pleasure to kill qui avait vraiment poussé bien trop
loin le curseur de la violence gratuite, Kreator revient pour ce
troisième album à quelque chose de plus mesuré (enfin, tout est relatif
quand même, on conserve quelques éléments fondamentaux, comme les solos
bordéliques ou le son très cru et saturé, et certains titres comme
One of us jouent encore la carte du tempo effréné), et surtout de
mieux construit. L'énergie est évidemment toujours là, le chant est
nettement plus acceptable que sur le disque précédent (même si ça reste
très basique), et les riffs carrés mais efficaces, avec une volonté de
remettre un peu de mélodie au premier plan, font mouche, on passe donc
un bon moment si on arriver à passer outre la production très datée.
Gros problème quand même, j'aurais presque pu dire "Le riff fait mouche"
plutôt que "Les riffs font mouche" tant certaines pistes semblent basées
sur le même motif (entre Blind faith et Storming with
menace qui lui succède, difficile de voir une différence, et on
retrouve un riff bien similaire un peu plus tard sur Behind the
mirror), ça fait quand même un peu tâche pour un album court. Le
groupe semble pourtant capable de plus de variété (la belle intro calme
de Behind the mirror, le riff nettement plus pesant de la chanson
titre), mais en est encore à faire ses gammes, à la recherche d'un
équilibre pas encore totalement présent.
- Kreator - Extreme aggression (1989) ★ ★ ★
Il n'y a pas à dire, les titres des albums de Kreator sont toujours
d'une remarquable subtilité. Mais celui-ci est en fait assez mensonger,
tant ce quatrième disque du groupe ressemble à une sorte de nouveau
départ pour eux, s'éloignant encore plus nettement que sur le précédent
des excès de leurs débuts pour proposer un thrash beaucoup plus
"classique", plus technique et construit et misant moins
systématiquement sur la vitesse. On a même l'impression, à vrai dire,
que le groupe répète ici ses gammes pour montrer justement qu'il est
capable d'autre chose que de pousser à fond le curseur de la violence.
On pourrait de fait croire à un premier album, avec ses accélération
soigneusement amenées et un poil téléphonées (sur Some pain will
last notamment, dont la première partie inquiétante est toutefois
extrêmement intéressante), et ses musiciens qui s'appliquent à produire
des riffs volontiers alambiqués, mais encore assez accrocheurs pour
provoquer une certaine jubilation, sur la chanson titre notamment. Tout
cela est un peu scolaire mais très prometteur, on verra si le groupe
persiste et progresse dans ce nouveau style.
- Kreator - Coma of souls (1990) ★ ★ ★ ½
Kreator est un groupe qui apprend vite : alors que Extreme
Aggression, leur album précédent, représentait une tentative un peu
trop scolaire de se réorienter vers un thrash plus mainstream, carré et
technique, les voilà déjà de retour avec un disque qui montre qu'ils ont
parfaitement assimilé ce changement de style. Titres rapides sans excès,
solos parfaitement alignés, nombreux breaks et changements de tempo
(l'alternance entre lourdeur et rapidité sur Agents of brutality
par exemple fonctionne très bien), il n'y a pas grand chose qui dépasse,
tout ça est parfaitement maîtrisé, et le disque sonne comme un classique
du genre. Et pourtant, je me mets à regretter un peu la folie de leurs
débuts, non pas qu'on s'ennuie, mais les quelques moments où le groupe
sort de zone de confort, notamment le break final fantasque de Terror
Zone, montre qu'il aurait pu transformer l'album en véritable pépite
en y ajoutant le petit supplément d'âme qui lui manque parfois. Tel
quel, ça reste un bon disque, solide et efficace.
- Kreator - Renewal (1992) ☆
Alors que le groupe allemand semblait avoir trouvé son rythme de
croisière avec le thrash plus posé de ses deux albums précédents, voilà
qu'il décide au début des années 90 de prendre ses auditeurs par
surprise avec un sixième disque dont le titre et la pochette absconse ne
laissent qu'en partie imaginer le contenu : oui, il y a du (re)nouveau,
mais la direction prise a de quoi faire grincer des dents. Atmosphère
sombre et froide, musique austère et chant que je ne peux qualifier
autrement que de volontairement moche (à lui seul, il détruit notamment
la piste inaugurale Winter martyrium, mais c'est plus que rude
sur quasiment tous les titres), expérimentations incompréhensibles (la
batterie en plastoque déconnectée du reste des instruments, l'intermède
bruitiste Realitätskontrolle), il faut vraiment s'accrocher pour
percevoir des bribes de choses intéressantes dans ce machin (Karmic
Wheel serait probablement le titre que je sauverais le plus
volontiers du marasme). Personnellement, je n'y arrive pas, malgré
quelques titres plus classiquement énergiques en fin de disque.
- Kreator - Cause for conflict (1995) ★ ★
Après un Renewal particulièrement osé et assez mal reçu par son
public habituel, Kreator s'est fait tirer les oreilles par sa maison de
disques, en mode "bon, les gars, on arrête les conneries, vous êtes un
groupe de thrash bourrin, alors vous allez nous faire du thrash
bourrin". Et le groupe de s'exécuter avec ce disque particulièrement
rentre-dedans et monolithique (ça va quasiment tout le temps très vite,
avec même un ou deux titres ultra courts qui débordent largement des
frontières du thrash, Dogmatic en tête), au son bien massif (mais
assez typique des productions des années 90), et à l'inspiration assez
pauvre. Les riffs se ressemblent, sont rarement renversants, et une
sorte de routine pas totalement désagréable (les gugusses assurent quand
même) mais tout de même bien décevante s'installe. Les quelques
tentatives d'innovation (essentiellement limitées aux courtes intros) ne
font pas vraiment mouche, et les cris d'animaux qui ponctuent la
dernière piste de l'album sont complètement grotesques. En fait, on a
vraiment l'impression que le groupe a juste assuré un service minimum
pour se relancer. Un album pas totalement mauvais, mais très mineur dans
sa discographie.
- Kreator - Outcast (1997) ★ ★ ★ ★
En comparant ce disque aux deux qui l'ont précédé dans la discographie
de Kreator, on pourrait croire que le groupe était vraiment perdu dans
les années 90, ne sachant pas dans quelle direction faire évoluer sa
musique. En fait, il confirme juste que Cause for conflict était
une sorte de disque de commande, et que les allemands sont prêts à
repartir vers d'autres contrées, assez éloignées de leur thrash initial
: tempos souvent très retenus, ambiances très dépressives, et quelques
touches indus (voire même des traficotages de voix franchement
dispensables), on n'est pas là pour rigoler, mais la musique proposée
est nettement plus accessible que celle de Renewal quelques
années plus tôt (c'est même franchement mélodique pour du Kreator, et
les titres sont courts et très calibrés). Mais elle est surtout
nettement meilleure ! On touche même à l'excellent par moments
(notamment le début du disque, l'enchaînement de Leave this world
behind et de l'hyper efficace Phobia tape dans le mille), et
à l'exception des sonorités électroniques datées, pas grand chose à
reprocher à ce disque qui est tout simplement mon préféré du groupe à ce
jour.
- Kreator - Endorama (1999) ★ ★
Le Kreator des années 90 est vraiment un groupe insaisissable. Alors
qu'il avait réussi avec Outcast un album vraiment convaincant par
son approche froide et ses sonorités limites industrielles pourtant bien
éloignées de son thrash metal initial, voilà qu'il pousse encore dans
une autre direction avec le suivant. On retrouve clairement cette fois
une volonté de simplifier la musique et de la rendre plus accessible
(riffs très simples et répétés, le Golden age qui ouvre le disque
n'est pas loin de faire penser aux premiers albums de Rammstein,
qui sont après tout contemporains), mais en oubliant totalement les
ambiances glauques et en poussant carrément vers une sorte de hard-rock
teinté d'électronique et... d'une sorte d'influence "gothique
pleurnichard" au niveau du chant, qui est complètement à côté de la
plaque sur une écrasante majorité des pistes (des chansons
potentiellement sympathiques comme Chosen few ou
Pandemonuim sont gâchées par le chant). Ajoutez à ça des morceaux
qui semblent vraiment perdus sur un disque de Kreator (le piano et les
touches orchestrales de Everlasting flame), et on se demande bien
ce qui est passé par la tête des allemands. Le fond musical, quoique
simpliste, n'est pas mauvais, mais on ne peut pas quand même pas dire
que l'album convainque...
- Kreator - Violent revolution (2001) ★ ★ ★ ★
Après avoir exploré des territoires variés au cours des années 90, il
semblerait bien que Kreator ait envie de se recentrer sur quelque chose
de plus clairement thrash : retour sur la pochette de la peu sympathique
trombine déjà présente sur Coma of souls, présence de titres
comme Reconquering the throne ou Violent revolution, les
indices ne sont pas vraiment discrets. Et de fait, alors que les ténors
du thrash sont aux abonnés absents (les sorties du Big Four aux
alentours de 2001, ça fait assez peur à voir), et quelques années avant
que d'autres groupes "de seconde zone" ne lui emboîtent le pas
(notamment Overkill), le groupe allemand propose un revival
thrash tonitruant, avec production moderne et une forte touche mélodique
qui distingue tout de même bien ce nouveau Kreator de celui des tous
premiers albums des années 80 (le côté quasiment easy listening de
certains des albums des années 90 n'a pas été complètement jeté aux
oubliettes). Et on ne va pas le cacher, c'est une grosse réussite !
Plusieurs titres bien dévastateurs (les deux déjà cités, mais aussi
Ghetto war ou Slave machinery), des breaks bien sentis qui
viennent compenser la simplicité des motifs mélodiques, c'est très
soigné et vraiment super efficace. Quelques titres font un peu office de
remplissage (notamment sur la fin de l'album), mais l'ensemble est
vraiment extrêmement solide. Une belle preuve que le thrash est loin
d'être mort avec le changement de millénaire.
- Kreator - Enemy of god (2005) ★ ★ ★ ½
Après un retour au thrash remarqué (et de fait remarquable) avec
Violent revolution, Kreator se décide enfin à garder le même
style deux albums de suite, comme le confirme la pochette
quasi-identique à la précédente. On peut même dire qu'ils enfoncent le
clou : le disque démarre tambour battant avec une chanson-titre rouleau
compresseur assez impressionnante, et propose une première moitié de
galette assez monolithique dans la brutalité (double grosse caisse à
fond sur le bien nommé Impossible brutality). Il faut attendre
Dystopia pour avoir un titre un peu plus aéré, et Voices of
the dead pour une intro lente et un titre globalement plus complexe
qui fait du bien. L'ensemble restera tout de même jusqu'au bout très
calibré, avec des titres qui dépassent rarement les 5 minutes, mais
nombreux (douze, là où une petite dizaine de chansons plus développées
aurait à mon sens été préférable). Après, on ne peut pas nier que, comme
dans leur album précédent, c'est redoutablement bien fichu (la
production est dantesque) et efficace, mais l'effet de surprise n'y est
plus et ça manque un poil de variété. Un très bon album de thrash
moderne malgré tout.
- Kreator - Hordes of chaos (2009) ★ ★ ★ ½
J'avais dit que la première moitié de l'album précédent de Kreator était
un peu trop monolithique, je n'aurais pas du... Celui-ci pousse encore
nettement plus loin le curseur du côté bourrin, avec qui plus est une
production plus brute que dans les deux précédents. À peine 40 minutes
de musique pour neuf pistes (plus une intro instrumentale avant la
dernière), très peu de moments de respiration, à part la curieuse
introduction d'Amok run, seul moment du disque où un Mille
Petrozza (par ailleurs habité jusqu'au passage en force) chante au lieu
de hurler. Bref, même si le groupe fait l'effort d'alterner passages
mélodiques et rythmiques marteau-pilon (de façon d'ailleurs un peu trop
systématique), ça fonce dans le tas, souvent de façon très convaincante
(le refrain "everyone against everyone" de la chanson titre fais
indiscutablement son petit effet, l'accélération démentielle de Amok
run aussi), parfois trop décousu (le Demon prince final
notamment) ou vraiment trop forcé. L'ensemble est quand même très
efficace, avec le petit bémol qu'on a souvent l'impression d'avoir déjà
entendu quelques dizaines de fois les motifs et rythmiques sur lesquels
sont bâties les chansons.
- Kreator - Phantom antichrist (2012) ★ ★ ★ ★ ½
Début des années 2010, le revival du thrash bat son plein, et les
vieilles gloires du genre s'engouffrent dans la brèche à grands coups
d'albums agressifs mais portés par une production moderne
(Overkill avec son Ironbound, Testament et son
Dark roots of earth). Kreator, qui a anticipé le mouvement depuis
une dizaine d'années, décide en 2012 de frapper un grand coup en
montrant qu'ils sont les maîtres du thrash mélodique (il y a pourtant
une sacrée concurrence, notamment avec les deux albums cités ci-dessus).
On oublie le son plus brut de leur précédent opus et on revient à
quelque chose de franchement clinquant (ceux qui aiment leur thrash un
peu sale s'enfuiront en courant) mais d'une puissance folle, et on
alterne entre titres vraiment violents (le chant death de
Civilization collapse) et d'autres très mélodiques (l'excellent
Your heaven, my hell notamment). Le tout introduit par une
chanson titre qui met tout le monde d'accord en deux minutes tant elle
est imparable (là même ceux qui aiment le thrash sale devraient rendre
les armes tellement c'est une tuerie). Quelques titres sont moins
énormes (le choral United in hate ou le speed Victory will
come) mais dans l'ensemble, rien à redire, les allemands ont
parfaitement réussi leur coup, leur album rejoint ceux des camarades en
tant que classique incontournable du thrash récent.
- Kreator - Gods of violence (2017) ★ ★ ★ ★
Après nous avoir collé une baffe monumentale avec Phantom
Antichrist, Kreator a pris son temps avant de lui proposer un
successeur. Il faut dire que le risque était grand de décevoir, ou de
trop en faire en surenchérissant encore dans le mélange désormais bien
ficelé de riffs mammouthesques et de mélodies presque easy listening. Et
de fait, c'est un peu ce qui se produit avec ce disque. Pourtant, les
premières pistes laissent espérer un nouveau miracle : l'intro
symphonique est clairement "too much" mais incroyablement efficace, et
enchaînée sur un World war now qui, sans atteindre les sommets de
Phantom antichrist (la chanson) est une ouverture tonitruante au
refrain imparable. Mieux, le riffing génial de Satan is real
hausse encore le niveau ! Et puis, petit à petit, apparaissent les
défauts qui font finalement de ce disque un petit frère un poil moins
convaincant de Phantom Antichrist : batterie envahissante sur les
passages les plus bourrins (sur Totalitarian terror notamment),
un peu de facilité dans les choeurs de la chanson titre, quelques titres
anecdotiques en fin de disque, et une tentative d'introduire du chant
clair sur Death becomes my light pas vraiment satisfaisante (ce
titre conclusif s'étire de toute façon inutilement et conclut l'album
sur une note un peu amère). De petites imperfections qui n'empêchent pas
ce Gods of violence d'être un excellent album, mais que voulez-vous,
quand on a été habitués à du très haut niveau (la disco de Kreator
depuis le début des années 2000 est tout de même assez époustouflante),
on finit par devenir exigeant.
- Kreator - Hate über alles (2022) ★ ★
Bon, il fallait s'y attendre, à force de reconduire avec bien peu de
variations le même thrash mélodique depuis le tournant de Violent
revolution, Kreator allait finir par faire l'album de trop. Ce Hate
über alles (un titre d'une subtilité assez typique du groupe) y
ressemble pas mal : production nettement moins convaincante que sur les
albums précédents (le son est trop dense), recettes usées jusqu'à la
corde (la chanson-titre précédée d'une intro symphonique n'est pas
mauvaise en soi, mais ressemble trop à d'autres... sans le côté "baffe
dans la tronche" habituellement réussi par les allemands), innovations
pour le moins douteuses (mais qu'est-ce que c'est que cette chanteuse
qui débarque sans crier gare sur Midnight sun ?), ça fait un peu
trop de points négatifs. Restent un savoir-faire indéniable et quelques
titres vraiment réussis (Demonic future par exemple), mais on est
quelques bonnes coudées en-dessous des cinq disques précédents.
Probablement le moment de se renouveler un peu pour Kreator, mais le
groupe en est-il encore capable ? L'avenir nous le dira peut-être.
- Lamb of God - New American Gospel (2000) ★ ★ ★ ½
Au tournant du millénaire, un énième groupe américain se présente pour
tenter de raviver une fois de plus la flamme du thrash, dans les traces
plus ou moins claires d'un Pantera. Pour ce premier essai, on a
donc droit à du bien bourrin, avec une rythmique ultra lourde mais qui a
un certain cachet notamment du à un son de batterie très brut qui donne
du relief à l'ensemble (faut aimer quand même, c'est assez spécial).
Niveau purement musical, c'est assez minimaliste, des motifs basiques
étant souvent beaucoup répétés et les vrais riffs mélodiques assez
rares. C'est un peu dommage dans la mesure où justement les pistes
lentes et hypnotiques qui jouent un peu plus la carte de la mélodie
(The black dahlia, Pariah) sont de loin les plus réussies,
j'irais d'ailleurs même jusqu'à dire que je les trouve personnellement
excellentes. Les pistes plus rapides sont globalement moins percutantes
(sauf la rigolote piste bonus Nippon, à l'ambiance étonnante)
mais ne déméritent pas totalement non plus (c'est quand même un peu trop
homogène). Mais le plus gros point d'interrogation c'est la prestation
du chanteur, qui braille des choses inintelligibles en fond
(apparemment, il chante vraiment des "paroles" qui n'ont aucun sens sur
certains titres, à cause d'un manque de temps lors de l'enregistrement
de l'album !), on pourrait carrément l'effacer qu'on n'y perdrait pas !
Mais malgré quelques bémols, c'est un premier album dont l'ambiance m'a
vraiment convaincu, à suivre.
- Lamb of God - As the palaces burn (2003) ★ ★ ★ ½
Pour son deuxième album, Lamb of God affine la recette entrevue dans son
premier essai : les rythmiques implacables martelées sans répit sont
toujours de la partie, mais sans le côté lent et hypnotique qui était
présent sur une partie des titres de New American gospel. Ici, ça
va vite, et même souvent très vite, on ne s'attarde pas (les titres
tournent autour de 3 ou 4 minutes, seul le Vigil final dépasse
cinq minutes, mais c'est du à sa partie introductive calme). C'est
carré, presque trop (on aimerait de temps en temps que ça respire un peu
plus), mais on ne peut pas nier que ça donne un résultat implacable qui
est souvent assez impressionnant (Ruin, 11th hour). Je
crois que je préfère quand même à titre personnel leur premier album (on
a un peu perdu en feeling ce qu'on a gagné en maîtrise), mais celui-ci
est une réussite assez indiscutable.
- Lamb of God - Ashes of the wake (2004) ★ ★
Ce troisième album est celui de la consécration pour Lamb of God, avec
une reconnaissance de la part des fans qui perdure encore aujourd'hui
puisqu'il est souvent cité comme le sommet de la discographie du groupe.
Après un certain nombre d'écoutes (avec la rentrée, je traîne pour taper
mes critiques !), je comprends pourquoi, mais je reste relativement
déçu. On a clairement ici une sorte d'aboutissement dont As the
palaces burn était le brouillon, mais sans le côté urgent de ce
dernier. Là c'est vraiment hyper carré et maîtrisé, dans un tempo
toujours retenu, et avec une volonté manifeste de refuser la facilité au
niveau des riffs, qui les fait malheureusement dériver régulièrement
vers une sorte de technicité stérile, limite prog mais sans les
constructions savantes qui en feraient l'intérêt. Et puis ça manque
cruellement de renouvellement par rapport à leurs premiers disques (les
triolets sur The faded line, par exemple), sauf peut-être
l'insertion de passages parlés probablement censés augmenter l'immersion
dans une ambiance froide et oppressante. De fait, ce disque est froid,
probablement trop pour moi, même si je ne peux pas nier que, pris un par
un, la plupart des morceaux sont réussis.
- Lamb of God - Sacrament (2006) ★ ★ ★ ★ ½
Alors que leur précédent album (et soi disant classique) Ashes of the
wake m'avait déçu, celui-ci me réconcilie avec Lamb of God. C'est
celui-ci qui devrait être considéré comme leur classique ! C'est hyper
maîtrisé (comme d'habitude) mais surtout entraînant en permanence, la
mélodie n'est pas sacrifiée, l'ensemble est d'une efficacité
impressionnante. On commence très fort avec un Walk with me in
hell qui emporte tout sur son passage, mais je crois que je préfère
encore le Again we rise qui lui succède (certes les "Rise"
beuglés en choeur sont d'une subtilité toute relative, mais qu'est-ce
que ça fonctionne bien quand même !). Les titres du milieu de disque
sont un peu moins monstrueux, mais on retrouve sur la fin de quoi ne pas
rester sur une note affadie, avec un Requiem qui combine les
qualités déjà décrites (urgence, belle utilisation des choeurs), et un
Beating on death's door final qui joue la carte de la vélocité
sans perdre en efficacité. Vraiment, sans rien révolutionner de son
style une fois de plus, le groupe réussit là un quasi sans faute.
- Lamb of God - Wrath (2009) ★ ★ ★
Après un petit mois passé à écouter autre chose que du métal, reprise en
douceur et en force de mes petites chroniques. En douceur car avec Lamb
of God on a toujours un peu l'impression d'écouter une sorte de digest
(très bien fichu) de beaucoup de choses à la mode à l'époque de la
sortie du disque. Mais en force quand même, car le groupe joue
volontiers ici la carte du brutal (In your words, ou encore pire
le très défouloir Contractor, rigolo même si relativement
limité), ou du speed qui cherche à tout défoncer. C'est comme toujours
exécuté de main de maître, tournant même par moments à la démonstration
technique un peu vide (Set to fail), en tout cas on ne peut pas
nier que ça s'écoute très plaisamment. Je me serais quand même bien
passé des sonorités de batterie souvent "plastoque pas beau", et la
comparaison avec son prédécesseur fait de ce Wrath un bon album, mais
qui ressemble à un album de transition pour le groupe (à supposer qu'ils
veulent faire évoluer un jour leur style, ce qui n'a rien d'évident).
- Lamb of God - Résolution (2011) ★ ★ ½
Je me demandais, à propos de leur album précédent, si une évolution
pouvait être à l'ordre du jour pour Lamb of God. La réponse au vu de
celui-ci est nette, c'est un non franc et massif. Le groupe assène ici
son credo habituel en mode passage en force : guitares puissances (et
batterie assez laide), touche technique toujours présente avec un
riffing volontiers alambiqué (The Undertow), et surtout un chant
gueulé vraiment trop uniforme qui contribue à la lassitude qui envahit
assez rapidement l'auditeur (faut dire que le disque contient pas moins
de 14 pistes, c'est beaucoup). On ne peut pourtant pas nier une nouvelle
fois la maîtrise technique évidente, et une certaine efficacité quand on
prend certains titres séparément (Desolation, Invictus),
c'est l'ensemble qui est un peu indigeste (sans tomber dans le mauvais,
n'exagérons rien). D'ailleurs, un signe qui ne trompe pas, c'est que les
quelques tentatives de changement paraissent très inspirées en contraste
avec le reste de l'album : quelques touches de guitare sèche, les
étonnants choeurs clairs de Insurrection, et surtout la
conclusion King me qui dénote carrément avec son côté symphonique
inattendu pour le groupe. Là, on se dit vraiment que le changement de
cap serait une bonne façon pour Lamb of God de proposer quelque chose de
beaucoup plus frais. Mais, sincèrement, on n'y croit pas trop.
- Lamb of God - VII : Sturm und Drang (2015) ★ ★ ★ ★
Pour son septième album studio, Lamb of God décide à la surprise
générale d'enregistrer des reprises de symphonies de Haydn. Ah non, ce
n'est pas pour ça qu'ils ont intitulé leur disque Sturm und Drang ? Peu
importe à vrai dire la raison profonde de ce choix, il illustre en tout
cas un renouveau très palpable de l'inspiration et de l'envie de
proposer des choses accrocheuses après deux albums en demi-teinte. Il
faut dire que la période qui a précédé la parution de cet album a été
pour le moins difficile pour le chanteur du groupe, qui a fait un petit
tour par la case prison après le décès d'un fan lors d'un concert
(accident pour lequel il a fini par être disculpé). Sans surprise, la
musique de ce nouvel opus est influencée par ces évènements, avec une
urgence inquiète qui explose dès le titre d'ouverture, l'excellent
Still echoes, et qui culminera dans un 512 assez
impressionnant de maîtrise. En fait, c'est toute la première moitié du
disque qui voit le groupe retrouver son meilleur niveau, comme quoi
finalement le fait d'avoir des choses à dire, même sans vraiment
renouveler le style, suffit à élever le niveau de la musique produite.
Ca ne tient pas totalement sur la durée du disque (la pseudo-ballade
Overlord est inutile, les quelques passages en chant clair
disséminés ça et là ont pour seul mérite de surprendre), mais on a
encore droit à quelques titres bien sentis, notamment Engage the
fear où la maîtrise technique (toujours présente chez Lamb of God de
toute façon) ne prend pas le pas sur l'inspiration mélodique. Tout ça
est largement suffisant pour produire un disque hautement recommandable,
l'un des meilleurs de ses auteurs.
- Lamb of God - Lamb of God (2020) ★ ★ ★ ½
Après un Sturm und drang vraiment réussi, Lamb of God a de
nouveau connue une période troublée marquée par le départ d'un de ses
membres, une première depuis la création du groupe (en gros 20 ans de
lineup intact, c'est une constance rare pour un groupe de métal). Les
mauvaises langues diront que c'est peut-être un mal pour un bien, une
occasion d'enfin changer un tout petit peu leur recette. Eh bien pas du
tout, comme le choix du titre éponyme pouvait le laisser penser, Lamb of
God revient asséner avec force un credo déjà entendu quesiment à
l'identique sur tous ses albums précédents : le son est immédiatement
reconnaissable, le chant n'a pas bougé (quelques rares incursions dans
le domaine du chant clair qui semblent tout aussi anecdotiques que sur
le disque d'avant), les riffs assez techniques sont toujours déclinés
avec une maîtrise assez redoutable même si l'ensemble manque très
clairement de renouvellement (et puis bon, on sent un peu le service
minimum, 10 titres pour moins de trois quarts d'heure de musique, on
invite un ou deux potes, donc le chanteur de Testament, pour
remplir la deuxième moitié de disque, et hop ça passera tout seul). En
même temps, on ne peut pas nier qu'il s'agit à nouveau d'un album
réussi, qui s'écoute tout seul (Momento mori ou Reality
bath, c'est du bon Lamb of God, indiscutablement).
- Lamb of God - Omens (2022) ★ ★ ★
Après avoir traversé une période trouble, Lamb of God a repris son
rythme de croisière, cet album sortant deux ans après le précédent. Une
sorte de routine pour un groupe qui a remarquablement peu évolué depuis
sa création. De fait, ce neuvième album présente bien peu de surprises
par rapport aux précédents, on reconnaît rapidement le style du groupe
et la plupart des titres auraient pu figurer sans aucun problème sur à
peu n'importe lequel des albums de la discographie du groupe, la seule
exception notable étant le September song conclusif et ses
touches orchestrales inattendues (des claviers discrets, puis carrément
des violons synthétiques, ça a le mérite de renouveler un peu le
discours). En même temps, "pas de surprise" signifie aussi "pas de
mauvaise surprise" : le groupe maîtrise toujours son sujet et, sans
faire de vagues (façon de parler, ça reste très rentre-dedans, mais
aucun titre ne se démarque vraiment du lot), aligne sa dizaine de
chansons qui s'écoutent agréablement (encore une fois, on la joue un peu
service minimum avec un album de trois quarts d'heure). Tout à fait
correct donc, et en même temps d'une inutilité totale puisque le groupe
a déjà fait pareil... en mieux.
- Liquid Tension Experiment - Liquid Tension Experiment (1998) ★ ★ ½
C'est avec une certaine appréhension que j'ai abordé mon écoute
attentive de LTE (j'avais déjà écouté distraitement leur troisième et
dernier album en date à sa sortie), pour deux raisons : le line-up est
très proche de celui de Dream Theater (au moins à une certaine
période), groupe avec lequel ma relation reste très compliquée ; et le
côté "improvisations lorgnant vers le jazz" avait de quoi me faire fuir.
C'est dire à quel point j'ai été scotché par le Paradigm shift
qui ouvre l'album : oui c'est hyper virtuose, oui ça s'écoute un peu
jouer sur les solos vers la fin, mais ça n'oublie jamais de faire de la
musique, et qu'est-ce que c'est bon ! Si tout l'album avait été de cet
acabit, j'hurlais au chef-d'oeuvre, mais c'est malheureusement loin
d'être le cas. On navigue ensuite entre recherche de sonorités
intéressantes (le très liquide Osmosis, pas mal), le franchement
platounet (j'ai encore une fois du mal avec les claviers, surtout quand
c'est du piano à la limite du dégoulinant, la première moitié de
Freedom of speech et tout State of grace, c'est vraiment à
la limite du chiant), le comique qui n'atteint pas son but (la fin de
Universal mind, je trouve ça juste complètement foiré) et le truc
impressionnant mais vraiment trop ambitieux (Three minutes
warning, c'est loin d'être mauvais, y a même plein de bons moments,
mais quasiment une demi-heure, faut quand même s'accrocher !). Bref, si
techniquement il n'y a évidemment rien à redire, musicalement, je suis
trop souvent loin d'y trouver mon compte. M'enfin, quand même, un album
qui alignerait des pistes de la force de Paradigm shift, ce serait
sacrément fort ! Rien que pour ça, je ne peux pas me résoudre à être
franchement négatif à propos de ce premier album.
- Liquid Tension Experiment - Liquid Tension Experiment 2 (1999) ★ ★ ½
On prend les mêmes et on recommence : un an après le premier volet, le
quatuor de virtuoses se remet en scène et propose un deuxième disque qui
ressemble fort à un faux jumeau du premier. Une première piste
trépidante (Acid rain, encore un titre complètement
impressionnant qui suffit à lui tout seul à assurer une note acceptable
à l'album), puis des choses beaucoup plus atmosphériques et jazzy, pour
ne pas dire nunuches par moments (les quelques apparitions de synthé
type piano bar m'insupportent, ce qui rend par exemple Biaxident
très dispensable à mon goût malgré de bons passages), des pistes plus ou
moins improvisées (Chewbacca a un titre attirant et de bons
moment, mais sur la fin ça s'éternise vraiment alors que ça n'a plus
rien à dire) et des tentatives dont on ne sait pas trop si c'est de
l'humour ou non (l'accordéon de Another dimension...). On échappe
cette fois-ci à la plage d'une demi-heure pour conclure le disque (même
si à mon sens When the water breaks est déjà bien trop long pour
ce qu'il propose, sans compter la conclusion ridicule), mais ça
n'empêche pas que je reste à nouveau sur ma faim du point de vue du
contenu strictement musical. En fait, je pourrais presque faire un
copier-coller de ce que j'avais dit pour le premier : après une première
piste qui laisse espérer un chef-d'oeuvre, le reste n'a rien de
déshonorant mais me passe entre les oreilles sans réellement
m'accrocher.
- Liquid Tension Experiment - Liquid Tension Experiment 3 (2021) ★ ★ ★
Entre leurs deux premiers albums, les quatre membres de LTE avaient à
peine laissé passer un an, et sans surprise, le deuxième opus était dans
la droite ligne du premier. Entre les deux suivants, pas moins de 22 ans
se sont écoulés et... le troisième est toujours dans la même droite
ligne que les deux premiers ! À croire que le temps ne fait pas effet
sur nos virtuoses, qui nous refont le coup de la piste inaugurale
monstrueusement rapide (en même temps, en l'appelant Hypersonic
on aurait été déçus du contraire), même si probablement moins énorme que
les intros de leurs deux premiers disques, nous gratifient d'une version
personnelle de Rhapsody in blue (c'est assez impressionnant mais
bon, ça reste une reprise, qui me semble légèrement vaine) et
remplissent un double CD de quasiment deux heures de musique. Il faut
dire aussi qu'ils ont fait cette fois-ci le choix intelligent de bien
séparer les choses : des pistes écrites, de durée globalement
raisonnable pour le premier CD, et des bouts de cessions d'improvisation
interminables sur le deuxième CD. Vous l'aurez compris, je m'attarderai
uniquement sur le premier disque, auquel j'ai attribué une note
légèrement supérieure aux deux premiers LTE car je le trouve mieux
calibré : des ambiances variées, peu de pistes vraiment ratées, on passe
globalement un bon moment, le clavier "disneyien" sur fond de rock à
papa de Beating the odds passe curieusement bien la rampe, Key
to the imagination (seule piste à dépasser les 10 minutes avec le
Gershwin) est vraiment bien construit et intéressant de bout en bout.
Malgré tout, encore une fois une impression de déception après la
première piste tonitruante, et je me serais tout de même fort bien passé
de l'espèce de solo de contrebasse électrique de Chris and Kevin's
amazing odyssey et surtout de l'adagio larmoyant piano-guitare
Shades of hope qui est absolument terrifiant. Mais le bilan reste
très honorable. Seront-ils capables de faire aussi bien quand deux
décennies de plus auront passé ?
- Lunar Aurora - Weltengänger (1996) ★ ★ ★
Les terres sombres du black metal allemand n'étaient a priori pas
destinées à m'accueillir à bras ouverts. Sans grande surprise, le
premier contact avec cette musique assez peu hospitalière a été
difficile : batterie en mode mitraillette continue (y a vraiment pas une
seconde sur tout le disque où ça se calme, je me dis que ça doit être
absolument épuisant d'être batteur dans ce genre de groupe...), son de
guitares hyper dense et grésillant (même si ça reste écoutable),
chanteur qui croasse de façon lugubre, la tentation était forte de
mettre ce disque dans la pile "bouses inaudibles à la Emperor".
Eh bien, je dois maintenant l'avouer, j'aurais eu tort de ne pas
insister un peu, car il y a un élément en plus de tout ça qui change
tout, ce sont les claviers. Alors qu'on aurait pu s'attendre pour
accompagner le reste à de simples nappes d'accords sinistres, pas du
tout, c'est là que se trouve la touche mélodique non négligeable du
groupe, qui se mêle de façon surprenante au fond black (parmi les bribes
mélodiques , on a des passages limite folklorisants ou primesautiers,
c'est vraiment inattendu et sympa) et lui donne un rendu finalement très
intéressant. Sur Grabgesänge et Conqueror of the ember
moon, on atteint même une réelle beauté musicale. Bon, ça ne marche
pas tout le temps non plus, ce qui rend quand même certaines pistes
fatigantes (Rebirth of an ancient empire), et l'écoute d'un seul
bloc des trois quarts d'heure que dure le disque est un poil éprouvante
tant c'est monolithique, mais franchement, c'est à tenter.
- Lunar Aurora - Seelenfeuer (1998) ★ ★
Pas de changement de cap par rapport au premier album, mais de subtils
ajustements tout de même : un son un peu plus étouffé et sale (un point
négatif pour moi, mais quand on écoute la piste bonus Auf einer
Wanderung présente sur la version deezer du disque, on se dit que ça
aurait pu être encore très largement pire), mais surtout une volonté de
laisser quelques instants de respiration dans cette musique généralement
oppressante. On a ainsi droit à une intro pseudo-orchestrale inquiétante
et assez sympa, à quelques passages de guitare sèche (l'excellent break
de Mein Schattenbruder, l'intro de Der Geist der
Grausamen), et à quelques interruptions de clavier pendant
lesquelles la batterie arrête de mitrailler. Mais en même temps, ces
mini-breaks sont plus frustrants qu'autre chose dans la mesure où ils
sont la plupart du temps coupés après à peine quelques notes par un
déferlement de sauvagerie, comme si le groupe n'assumait pas totalement
de proposer des plages plus calmes. Franchement dommage, car du coup on
a l'impression que le groupe se cherche un peu sur cet album, qui
convainc moins que le précédent. Tout de même, la première "vraie" piste
Schattenbruder est à nouveau très réussie, et il y a beaucoup de
choses intéressantes dans la très longue Kerker aus Zeit (un bon
quart d'heure).
- Lunar Aurora - Of Stargates and bloodstained celestial spheres (1999) ★ ★ ★ ½
L'intro Kampfork de ce troisième album donne immédiatement le ton :
espèce de délire bruitiste aux sonorités spatiales, il annonce l'ajout
à la musique déjà assez chargée du groupe d'une composante "fumette
d'outre-espace" qui ne risque pas vraiment de la rendre plus accessible
! Ca donne parfois franchement n'importe quoi, notamment dans les
quelques intermèdes instrumentaux qui parsèment le disque (Moorleiche,
avec ses espèces de samples de cris d'oiseaux, c'est vraiment fascinant
!), mais, un peu comme dans leur premier album, les allemands arrivent
régulièrement à transcender ce mélange improbable pour en tirer des
ambiances franchement prenantes (Blutbaum, Der Leidensweg,
ou le quasiment épique Drachenfeuer). Les claviers ont repris une
place plus importante, la batterie est beaucoup plus variée
qu'auparavant (il y a eu un changement de batteur, très bénéfique de mon
point de vue), et même si les guitares continuent à se contenter de
créer une espèce de brouillard hyper saturé, c'est quand même
globalement moins frénétique, probablement pour laisser la place aux
nombreuses expérimentations sonores du disque (les voix souvent très
trafiquées, jusqu'à l'espèce de geignement halluciné en fond sur
Gebirgsmystizismus, ça va quand même assez loin). Encore un album
trop inégal pour prétendre au statut de chef-d'oeuvre, mais quand même,
c'est sacrément original et souvent inspiré.
- Lunar Aurora - Ars Moriendi (2001) ★ ★
Après un troisième album vraiment très original, on était en droit
d'attendre avec une grande curiosité la suite des évènements pour Lunar
Aurora. Autant l'avouer tout de suite, c'est un peu décevant. Après une
intro sympatique au clavier qui sonne bon le film d'horreur désuet, on
retrouve plutôt le côté brutal du deuxième album du groupe que les
délires du troisième. Claviers trop souvent en retrait, grosse densité
du son, ça reste assez bien fichu, mais bon, ils ont déjà fait la même
chose en mieux (un titre comme Kältetod est vraiment décevant).
Heureusement, on retrouve un peu plus de couleurs et de mélodies dans la
deuxième moitié de l'album, nettement meilleure (à partir de Beholder
in sorrow). La batterie mitraille moins dans Flammen der
Sehnsucht, et le derniers tiers de Aasfresser et de Geist
der Nebelsphären, avec les claviers qui retrouvent le devant de la
scène, arrivent à créer ces ambiances oniriques fascinantes qui font
tout l'intérêt du groupe. La piste finale, curiosité bruitiste avec
quelques notes de clarinette, intrigue, mais c'est un peu tard. Dommage,
le disque dans son ensemble laisse une impression de régression, sans
être franchement raté, l'absence de prise de risques par rapport aux
opus précédents déçoit forcément.
- Lunar Aurora - Elixir of sorrow (2004) ★ ★ ★ ½
Après un quatrième album un peu en retrait, Lunar Aurora retrouve de
l'inspiration et nous invite une fois de plus à un voyage halluciné vers
des contrées qu'on n'est jamais totalement sûr de vraiment vouloir
visiter. L'introduction donne le ton, beaucoup de bruits étranges (même
des grognements !) pour créer une ambiance résolument flippante, parfait
pour se mettre en condition. D'ailleurs, d'autres intermèdes parsèmeront
le disque, à l'intérêt parfois discutable (Gesteir, c'est
vraiment juste du bruit, la piste conclusive Irrlichter aussi).
L'un d'entre eux sort nettement du lot, l'inattendu A wandering
winterdream avec ses mélodies de piano ! Après tout, pourquoi pas,
sur un album à l'ambiance gothique assumée. Le reste du temps, Lunar
Aurora fait du Lunar Aurora, guitares denses et claviers en folie de
rigueur (ils ont une place vraiment prépondérante sur ce disque,
globalement assez mélodique), ça tourne parfois au n'importe quoi
(Kerkerseele) mais quand ça fonctionne, c'est vraiment prenant
(Augenblick, Hier uned jetzt). encore une fois, sans que
ce soit à mon sens un chef-d'oeuvre incontournable (car inégal et par
moments vraiment trop space), c'est franchement réussi dans son genre.
- Lunar Aurora - Zyklus (2004) ★
Pour ce sixième album, les allemands franchissent un pas en proposant
une sorte d'album concept consacré aux quatre périodes de la journée (le
disque est constitué de seulement quatre pistes sobrement intitulées en
allemand "Le matin", "Le jour", "Le soir" et "La nuit") mais aussi, plus
allégoriquement, les quatre âges de la vie humaine. Bon, pourquoi pas,
ils ont déjà prouvé par le passé être capables de produire de la musique
inspirée en créant des atmosphères improbables, ça peut être
intéressant. Pourtant, je ne sais pas si j'étais mal luné (ah ah), mais
cet album est le premier du groupe à vraiment m'ennuyer au plus haut
point. Chacune des quatre pistes débute par environ deux minutes de
bruitages clichés (le chant des oiseaux pour le matin, les insectes au
soleil pour le jour...), puis enchaîne sur une musique typique de ce que
propose le groupe depuis ses débuts, mais version peu de mélodie et
claviers discrets, il faut vraiment accrocher à l'ambiance pour ne pas
s'endormir (et ça n'a donc pas été mon cas). Seules les dernières
minutes de Die Nacht (à partir de 10 minutes en gros, au moment
du break apaisé) réussissent enfin à créer quelque chose d'assez
fascinant, mais il est vraiment trop tard. Un album raté à mon goût.
- Lunar Aurora - Mond (2005) ★ ★ ★ ★
Les plus attentifs d'entre vous auront peut-être remarqué qu'il s'agit
là du troisième album sorti par le groupe en moins de deux ans (les deux
précédents dataient de 2004). En fait, ils n'ont pas été soudain pris
d'une frénésie créatrice sans précédent, mais ont simplement gardé sous
le coude quelques années une partie de leur production faute de trouver
un distributeur qui leur convienne. Comme quoi, quand on donne dans les
sous-branches un peu exotiques du metal, se faire entendre est déjà une
belle performance. En tout cas, après un Zyklus expérimental qui
m'avait laissé sur le bord de la route, Lunar Aurora revient à un format
plus standard (les titres restent en nombre limité et assez longs tout
de même), et surtout une musique nettement plus rapide (pas de longue
plage complètement atmosphérique ici, ça avance tout le temps), directe,
mélodique, en un mot accessible. Surtout, nouveauté assez notable, les
guitares quittent leur registre habituel de "on fait un fond bien saturé
et puis voilà" pour contribuer à la mélodie, ce qui est fort appréciable
et laisse accessoirement de la place pour que les claviers proposent des
choses plus inattendues (les appels de cuivres du début de
Rastlos, c'est assez excellent !). Le groupe retrouve également
un côté presque optimiste par moments (la piste finale Grimm
démarre de façon presque bondissante) qu'on avait un peu perdu de vue
depuis leur tout premier album, et c'est vraiment une bonne chose. Peu
de choses à jeter dans cet album de toute façon, à part un Welk
un peu bouche-trou, les autres pistes sont toutes réussies et prenantes,
Aufgewacht et Heimkehr en tête. À mon sens le meilleur
album du groupe à ce jour.
- Lunar Aurora - Andacht (2007) ★ ★ ★ ★ ½
En 2007, alors qu'il semble à son pic de créativité, et qu'il a
désormais son propre label pour diffuser sa musique sans difficultés,
Lunar Aurora prend l'étonnante décision de tout arrêter, non sans avoir
gratifié ses fans d'un dernier disque (il y en aura en fait un autre
plusieurs années plus tard). Décision assez rare mais au fond courageuse
dans le petit milieu du metal (d'habitude, les groupes ne disparaissent
pas vraiment, on a juste droit à une recomposition hasardeuse avec de
nouveaux membres), qui rend d'autant plus précieux cet album testament.
Le groupe se conforme ici à des structures classiques de leur part
(intro bruitiste relativement longue sur chaque titre, avec des
sonorités bien sinistres pour ne pas dire carrément glauques, il y a
même des samples assez dégueu qui interviennent au milieu des morceaux
par moments), avec comme principale nouveauté l'insertion de quelques
bribes de chant grégorien en fond. L'effet parait initialement assez
raté mais en fait ça ajoute encore au côté étrange et malsain qui fait
nettement plus qu'émaner de cette oeuvre (c'est pas le genre de
promenade dans les bois à laquelle on aurait vraiment envie d'être
convié). Mais de ce marasme se détache une musique à la fois simple (les
longues pistes sont souvent basées sur deux ou trois motifs basiques et
très répétés), très mélodique, mais surtout et tout simplement
magnifique. Glück qui ouvre le bal et Dunkler Mann (avec
une sorte de refrain bien identifiable, chose rare chez Lunar Aurora)
sont deux joyaux noirs étincelants, Findling impressionne avec sa
montée en puissance, d'un début assez désenchanté jusqu'à une conclusion
frénétique. Les allemands maîtrisent vraiment parfaitement leurs
ambiances, et auraient mérité la note maximale sans un gros bémol à mon
goût : la piste finale, subtilement intitulée Das Ende, semble
vouloir tenter une conclusion grandiloquente mais se plante complètement
avec son chant criard très pénible, c'est vraiment triste de finir comme
ça alors que le reste du disque est un sans faute (à mon sens, une fin
apaisée aurait été nettement plus adaptée). Malgré tout un album à
découvrir absolument.
- Lunar Aurora - Hoagascht (2012) ★ ★ ★
Cinq ans ont passé, et Lunar Aurora décide de se reformer ... le temps
d'un unique album, avant de disparaître à nouveau. Pourtant, pour ce
disque, les deux membres les plus importants du groupe ne s'étaient
entourés de personne et avaient géré toute la musique à eux seuls. Du
coup, changement de son assez net pour le "groupe", avec une batterie
très parcimonieuse qui n'a plus rien à voir avec les blast beats furieux
des premiers albums (à vrai dire, la batterie ne serait pas là que ça
s'entendrait à peine sur certains titres), et des claviers en mode
planant qui prennent beaucoup de place (mais proposent peu d'envolées
mélodiques). Bref, on s'éloigne vraiment du black initial pour se
rapprocher d'une musique très atmosphérique, contemplative, qui prend
souvent son temps (ça s'anime un peu plus vers la fin de l'album, avec
Habergoass et Wedaleichtn). Pas vraiment la facette de
Lunar Aurora que je préfère, ça manque pour moi d'accroche mélodique,
mais certaines pistes sont quand même très belles (celle qui ouvre le
disque, Im Gartn, où les guitares mettent 2'30 à pointer le bout
de leur nez, et celle qui le ferme, Reng), et créent un sentiment
curieux d'inéluctabilité. Moins accessible que les deux qui le
précèdent, ce dernier album reste quand même une réussite.
- Machine Head - Burn my eyes (1994) ★ ★ ½
Je dois bien l'avouer, je n'avais à peu près jamais entendu parler de
Machine Head avant de le mettre sur ma liste de groupes de metal à
découvrir. Pourtant, ce premier album semble régulièrement cité comme un
des piliers du thrash américain "deuxième génération" né au début des
années 90 sous l'impulsion de Pantera. Et de fait, il y a du
Pantera dans ce que propose cet album, que ce soit dans le très gros son
bien monolithique (c'est rarement très rapide, mais extrêmement pesant
en permanence), comme dans la manie d'insérer des notes aiguës
inattendues dans les riffs qui me fait irrésistiblement penser à
Cemetary gates. Quoi qu'il en soit, voici un premier album assez
inattaquable et de fait dévastateur, c'est techniquement très au point,
ça déménage, c'est bien construit... et ça me laisse de marbre les trois
quarts du temps. Le titre d'ouverture Davidian est pourtant très
bon (même si j'aime assez moyennement le chant, une constante tout au
long de l'album d'ailleurs, ça tourne trop souvent à la scansion limite
rappée pour moi). Mais ensuite, sur chaque titre, j'ai beau me dire que
l'intro est soignée, que je n'ai vraiment rien à reprocher, je ne suis
pas transporté : aucune chanson que j'aie envie de réécouter en boucle,
aucun moment qui me fasse décoller de mon siège. En fait, je retrouve
mes problèmes récurrents avec les albums de thrash trop "tête dans le
guidon", c'est très bien mais je crois que ce n'est simplement pas
vraiment fait pour moi.
- Machine Head - The More things change (1997) ★ ★ ★
N'ayant guère été emballé par le premier album du groupe, je tentais
donc ce deuxième avec une certaine méfiance. Premier aperçu avec le très
brutal Ten ton hammer, on peut au moins créditer le groupe d'une qualité
: ils savent ouvrir leurs albums avec des titres bien frappants (à tous
les sens du terme), même si celui-ci pâtit un peu pour moi de son chant
presque rappé sur les couplets (mais les oppositions chant scandé dans
les couplets/refrain très clair semble être un leitmotiv sur ce disque).
Comme dans l'album précédent, des riffs parsemés de notes aiguës aux
guitares, un son très dense, les trois premières pistes me laissent sur
mon appréhension, ça ressemble beaucoup à Burn my eyes. Et puis
arrive Down to none, plus lourd, plus lent, plus atmosphérique,
globalement plus intéressant (pour moi du moins). Et le reste de l'album
va alterner entre titres rouleaux compresseur (Blistering et ses
bruits de roulette de dentiste en intro !) et chansons plus sombres et
mélodiques (le réussi Violate, le plus discutable Blood of the
zodiac), Machine Head se la joue un peu plus varié et moins bourrin,
et c'est une évolution qui ne peut qu'être bénéfique pour le groupe.
Sans être encore enchanté, je trouve déjà plus encourageant (et ça reste
quand même, soyons honnêtes, globalement très bien fichu).
- Machine Head - The Burning red (1999) ☆
J'avais décelé dans le deuxième album du groupe une évolution qui ne
pouvait qu'être intéressante. Eh bien, je m'était lourdement trompé. Il
faut dire que ce troisième disque part vraiment dans une direction assez
éloignée des deux précédents : même si le son reste bien lourd, on
reconnaît peu la patte du groupe, qui a troqué son metal légèrement
bourrin pour des motifs basiques répétés à longueur de chanson au niveau
des guitares, et surtout pour un chant qui ne se contente plus de
s'approcher du rap, mais se vautre allègrement dans la déclamation
hip-hopisante insupportable (pour moi, ça va de soi, nul doute que ça
peut plaire à ceux qui s'intéressent à ce genre de musique). Sur des
titres comme Desire to fire ou From this day, c'est
carrément rédhibitoire. Mais bon, si le fond instrumental était bon, ça
pourrait encore sauver l'affaire, mais en plus d'être simpliste (la
chanson titre conclusive, ça s'étale bien trop pour quelque chose
d'aussi minimaliste), il est souvent pénible sans raison (les bruitages
de Nothing left ou toute la fin de Five, c'est censé
apporter quelque chose ?). Que peut-on alors sauver ? Une ou deux
ambiances réussies (Exhale the vile, malgré une intro
insupportable, ou I Defy qui n'est gâchée que par le chant).
C'est très loin d'être suffisant.
- Machine Head - Supercharger (2001) ☆
Je ne m'étendrai pas très longtemps sur cet album dans la droite ligne
du précédent... en encore plus fatiguant et donc pénible. Après une
intro aux bruitages futuristes sans intérêt, on embraye sur un
Bulldozer qui donne déjà envie de fuir (chant rappé, riff mal
amené), puis sur un White-Knuckle blackout qui ressemble
carrément à une blague tellement c'est caricatural (la fin avec ses
"fuck you" toutes les secondes, comment dire...). Il y aura quand même
quelques spasmes de vraie musique par moments dans la suite (Only the
names à l'atmosphère intéressante malgré l'abus de bruitages
parasites, le début de Black generation), histoire de montrer que
le groupe est quand même capable de faire de bonnes choses quand il le
veut, mais ça ne dure même pas l'espace d'une chanson, et quand il faut
se farcir au milieu une bouse du genre American High, difficile
de vraiment se motiver. D'ailleurs, la chanson titre qui conclut le
disque donne direct envie de se coucher tellement elle est épuisante
(chant braillé ou scandé, il faut choisir ? Non, non, les deux à la
fois, c'est encore mieux... ou pas). Le groupe a remonté la pente
ensuite ? C'était difficile de tomber plus bas...
- Machine Head - Through the ashes of empire (2003) ★ ★ ★ ½
Après deux albums franchement indigestes, nouveau changement de cap pour
Machine Head. On n'abandonne pas complètement le chant scandé mais il se
fait quand même nettement moins présent (ouf) pour laisser la plupart du
temps la place à un chant simplement énervé (avec tout de même de belles
alternances avec du chant bien clair, dans Seasons wither par
exemple). Surtout, instrumentalement, on retrouve un fond beaucoup plus
travaillé et bien rentre-dedans, même si le groupe se permet quelques
belles échappées "hors-style" (l'intro acoustique de Descend the
shades of night). De façon générale, c'est beaucoup plus varié que
les quatre albums précédents, ce qui pour moi ne peut qu'être gage de
plus grand intérêt. On atteint d'ailleurs l'excellence par moments,
notamment l'inaugural Imperium (ce passage instrumental avant la
conclusion, superbe !) ou un Days turn blue to gray au motif
obsédant. Quelques autres pistes très efficaces à défaut de
révolutionner le genre (Left unfinished, In the presence of my
enemies), il y a largement de quoi faire un très bon album. Pas plus
cependant, car on trouve aussi des pistes où le chant devient pénible
(Vim), voire où la musique est carrément peu inspirée (Wipe
the tears). Mais bon, globalement, c'est un retour aux affaires
franchement inespéré de la part du groupe puisque ça dépasse pour moi
leurs deux premiers disques.
- Machine Head - The Blackening (2007) ★ ★ ★ ★
Le cinquième album de Machine Head était prometteur, le sixième sera
celui de la confirmation. Dans la droite lignée du précédent dont il
reprend même sans vergogne certaines structures (le titre initial,
Clenching the fists of dissent, est calqué sur celui qui
introduisait Through the ashes of empires avec notamment cette
lente intro acoustique avant le déferlement de violence), il arrive
toutefois à le surpasser en faisant preuve d'une réelle ambition qui
fait plaisir (quatre chansons durent plus ou moins 10 minutes, c'est
long pour ce style de metal) et en arrivant à gommer les chutes de
tension qui affaiblissaient un peu l'effort précédent. On retrouve des
éléments caractéristiques du groupe (les notes aiguës sur le très bon
Halo) mais aussi des choses assez nouvelles (beaucoup
d'utilisation de chant très clair, sur les refrains notamment, des
motifs assez obsédants comme sur Aesthetics of hate). Il n'y a
pas à dire, c'est de la belle ouvrage. Que me manque-t-il pour être
vraiment totalement emballé ? Un chant un peu moins primaire (quand on
n'a pas droit aux interludes en chant clair, c'est quand même bien
bourrin), et un titre qui provoque vraiment l'étincelle qui donne envie
de le repasser en boucle (aucun morceau faible sur ce disque, mais pas
vraiment non plus de tuerie ultime). Mais je chipote, c'est quand même
vraiment recommandable.
- Machine Head - Unto the locust (2011) ★ ★
Jusqu'ici, Machine Head avait proposé un changement de discours assez
net tous les deux disques. Fallait-il donc s'attendre, quatre ans après
un The Blackening très réussi, à de nouvelles surprises ? Pas
franchement, même si l'introduction a capella de I am hell
(curieusement sous-titré Sonata in C#) a de quoi intriguer. Elle
est toutefois assez réussie et débouche très naturellement sur un riff
assez magistral qui laisse penser qu'on tient déjà la tuerie qui
manquait à l'album précédent pour en faire un incontournable absolu.
Hélas, on déchante un peu sur la durée (seulement sept titres sur
l'album, tous aux alentours des 7 minutes, on reste dans la volonté de
proposer des choses assez fouillées), avec un chant qui vire à nouveau
au pénible mais surtout des développements instrumentaux où les
guitaristes se font sûrement plaisir mais qui ne convainquent pas
vraiment. C'est en fait une image assez fidèle de ce que propose le
disque : des intros souvent réussies qui donnent envie d'écouter la
suite (les gamins sur Who we are, c'est rigolo, cette chanson est
d'ailleurs à mon avis la meilleure de l'album), puis une relative
déception due à un manque global de percussion et à la répétition de
passages techniques sans grand intérêt. Assez frustrant au fond, car
tout ça semble réellement travaillé (et reste écoutable, hein,
n'exagérons rien) mais la machine tourne un peu à vide.
- Machine Head - Bloodstones and diamonds (2014) ★ ★ ★
Après un Unto the locust qui m'avait déçu, pouvait-on espérer un
nouveau soubresaut de la part d'un groupe qui a déjà connu des hauts et
des bas dans le passé ? Plus de 70 minutes de musique, en tout cas, ce
n'est pas l'inspiration qui a fait défaut. Ce n'est peut-être pas la
meilleure nouvelle qui soit, dans la mesure où plusieurs pistes tiennent
du remplissage sans grand intérêt, notamment au niveau des passages
solos où les guitares semblent parfois réciter leurs gammes (la fin de
Ghosts will haunt my bones, par exemple, ou Eyes of the
dead). Autre souci, le chant est souvent forcé, que ce soit dans le
côté hurlé (mais on a l'habitude) ou au contraire quand un chant clair
"inspiré" est censé prendre le relais, ça devient vite maniéré et
agaçant (sur Game over notamment). Dommage car par ailleurs il y
a vraiment de bonnes choses, dans un style classique pour le groupe
(Night of long knives et son refrain efficace), mais aussi dans
un registre moins attendu, avec notamment l'introduction
d'orchestrations plutôt bien vues (à commencer par le titre qui ouvre le
disque, Now we die, dont l'intro laisse vraiment douter du fait
qu'on ait pas eu un bug de deezer !). Tout cela ne suffirait pas
vraiment à dépasser le moyenne, mais voila, au beau milieu de ce disque
inégal, déboule sans crier gare une merveille complètement improbable
pour un groupe comme Machine Head, Sail into the black et ses
choeurs a cappella d'outre tombe, ce piano intriguant, cette note grave
martelée par les guitares, franchement c'est du grand art. Après avoir
écouté ça, une question me taraude : pourquoi le groupe n'a-t-il pas été
capable (ni sur cet album si sur un autre, à mon humble avis) de
produire une musique aussi mémorable sur la durée d'un disque ? Allez,
même juste un demi-disque ? C'est un brin frustrant...
- Machine Head - Catharsis (2018) ★ ½
La musique du groupe commençait déjà sérieusement à tourner en rond dans
les deux albums précédents, mais c'est encore nettement plus manifeste
ici. Harmoniques de guitares, opposition entre des choeurs en chant
clair et des couplés énervés et/ou scandés (Betond the pale, Screaming
at the sun, Grind you down), lignes vocales peu inspirées que le
chanteur tente de surcompenser en en faisant des tonnes (sur
Kaleidoscope), c'est à la fois très prévisible et assez saoulant même si
ça reste exécuté avec une certaine efficacité. Mais surtout, quitte à ne
pas avoir grand chose de nouveau à dire, il aurait fallu avoir la
présence d'esprit de ne pas allonger inutilement le disque. Or là, c'est
à pas moins de 15 titres et 75 minutes de musique que nous convie
Machine Head, beaucoup trop vu le contenu proposé. Il y a pourtant
quelques bonnes choses vers la fin de l'album (si on a tenu jusque là
!), notamment un Heavy lies the crown assez orchestral et bien
construit, et le Psychotic qui suit, premier titre à vraiment
retrouver l'énergie dévastatrice qui est une des marques de fabrique du
groupe. Et puis le tout se conclut avec un très étrange Eulogy où
on ne comprend pas bien la raison d'être de cette voix extrêmement
trafiquée. Ce n'est pas le pire album de la carrière de Machine Head
(faut dire qu'il y a de la concurrence), mais c'est quand même
globalement bien décevant.
- Machine Head - Of Kingdom and Crown (2022) ★ ★
Nouvel album de Machine Head, mais aussi un nouveau line-up avec
changement de la moitié des postes. Un détail qui n'a pas énormément
d'importance dans la mesure où le groupe a toujours été avant tout le
bébé de Robb Flynn, et a de toute façon sorti des disques assez peu
semblables tout au long de sa discographie. Le précédent ne m'avait pas
emballé, celui-ci me laisse assez perplexe. Il s'agit d'une sorte de
concept-album dont je n'ai pas vraiment creusé le scénario, qui doit en
tout cas certainement justifier les O barrés nordiques présents sur tous
les titres de pistes (et celui de l'album, j'ai donc triché) et les
trois interludes bruitistes sans l'ombre d'un intérêt parsemant le
disque. Mais mon problème vient du reste, où j'ai bien du mal à cerner
l'objectif musical : on alterne des titres hyper frontaux (certes une
habitude du groupe) pas franchement passionnants (Choke on the ashes
of your hate ou Bloodshot, c'est vraiment trop bourrin) et
des passages qui sonnent carrément soupe FM (Unhallowed,
Arrows in words from the sky) avec également quelques tentatives
pour le coup bienvenues d'insérer des morceaux de chant clair et de
choeurs (même si ça me fait à chaque fois penser à Sail into the
black, chef-d'oeuvre du groupe à côté duquel la comparaison ne peut
que faire très mal). Mais tout n'est quand même pas à jeter dans cet
album, loin de là, l'ambitieux premier titre Slaughter the martyr
est très bien construit, quelques autres titres sont réussis (j'aime
assez Kill thy enemies par exemple), et techniquement c'est assez
impressionnant, le groupe assure quand même sacrément (bon, je n'aime
toujours pas énormément le chant agressif de Flynn, mais il n'a rien
perdu niveau voix). Dommage que ce ne soit pas au service de
compositions plus inspirées.
- Mass Hysteria - Le bien-être et la paix (1997) ★ ★ ★
Depuis que j'ai commencé mes chroniques metal, j'ai passé en revue un
certain nombres de groupes anglais ou américains, quelques paquets de
formations venant du Nord de l'Europe, mais bien peu oeuvrant dans
l'Hexagone (en fait, à part Gojira, rien de français, me
semble-t-il). Il faut dire aussi que le metal franchouillard n'a pas
vraiment fourni des masses de groupes mémorables dans le genre. À propos
de masses, c'est donc à Mass Hysteria que je m'attaque aujourd'hui. Il
ne faut pas attendre bien longtemps sur ce premier album pour se rendre
compte que les influences du groupe sont particulièrement variées :
guitares bien acérées qui virent même parfois au metal brutal (sur la
bien nommée Hard corps notamment), beaucoup de sons et samples
électroniques qui lorgnent assez régulièrement du côté de la techno ou
assimilé (L'effet papillon, ou le très bon Respect to the
dance floor), mais aussi une influence metal industriel manifeste,
et côté vocal on est carrément du côté du hip-hop. On pourrait craindre
que ce mélange ne tourne au gloubi-boulga indigeste, mais en fait les
différents éléments sont très bien intégrés (surtout tout ce qui est
électro) et défendus avec une belle énergie par les musiciens, ce qui
donne de très bonnes choses par moments (l'effet glissando sur le riff
de Shine, le très efficace Donnez-vous la peine). Le
(gros) problème, c'est quand même le chant qui est pour moi complètement
inintéressant (et ce n'est pas un effet pervers du chant en français,
une rareté dans le metal, puisque les rares fois où ça chante en anglais
c'est exactement pareil) et plombe un peu le tout. Mais ce disque reste
dans l'ensemble une belle surprise, avec un vrai style assez accrocheur.
- Mass Hysteria - Contraddiction (1999) ★ ★ ½
Pour ce deuxième album, Mass Hysteria reste tout à fait dans le même
esprit "on mélange tout et n'importe quoi" que le premier, ajoutant même
une composante tribale (et même vaguement orientalisante par moments) à
tout le reste (résultat mitigé de ce côté-là, sur Aimable à
souhait, je me serais très bien passé du passage avec percus
exotiques, mais Le plus juste effet avec son intro tribale
fonctionne bien). Légère évolution niveau chant également, un peu moins
de scansion et plus de "lyrisme", surtout au niveau des refrains. Pas
certain qu'on y gagne malgré le mal que je pensais du chant sur le
premier album, les paroles ressortent plus et ce n'est pas forcément
positif (allez, les allusions mathématiques de P4 m'ont bien fait
marrer même si elles n'ont aucun sens, mais par exemple sur Finistère
amer ça fait assez mal). Reste le bon mélange de riff bourrins (mais
moins que sur Le bien-être et la paix) et de musique électro, qui
porte le début de l'album (la chanson-titre est excellente) avant de
s'essouffler assez sérieusement sur la deuxième moitié, malgré les
tentatives de varier les atmosphères (Furia, dans un style
relativement proche, est vraiment trop basique pour rivaliser avec
Respect to the dance floor, et la piste finale hispanisante n'a
absolument rien à foutre là). Bref, malgré la bonne volonté, un peu de
mal à tenir la distance pour le groupe.
- Mass Hysteria - De cercle en cercle (2001) ☆
Après deux albums au style très éclectique mais quand même centré sur un
mélange techno-metal-chant scandé particulièrement énergique, gros
changement de cap pour Mass Hysteria. C'est manifeste dès le début de la
première chanson Remède, on part beaucoup plus vers de l'easy
listening nettement moins métallisé (quant à l'influence techno, à part
dans Coup2Mass, elle a carrément disparu), avec claviers souvent
envahissants et chant "lyrique" (comprendre "chant pop pas terrible") en
permanence. Bon, pourquoi pas, mais bon, quitte à entendre du
sous-Calogero (j'exagère à peine par moments), autant aller écouter
l'original (contre lequel je n'ai d'ailleurs rien). On a quand même
encore quelques riffs musclés (au début de La puissance,
Millenium appauvri) mais qui se mélangent assez mal à ce chant
vraiment gnangnan, et les quelques expérimentations sont vraiment ratées
(La Aventura humana est assez douloureuse à écouter, le featuring
rap sur Immixtion, en plus d'être mauvais, n'a aucune raison de
se retrouver là, et les pistes purement instrumentales sont terriblement
creuses, sur Temps mort on attend une bonne minute que la chanson
démarre et en fait ça n'est jamais le cas mais ça en dure quatre). En
fait, on passe surtout son temps à se demander où le groupe a bien voulu
en venir avec cet album, et la seule réponse qu'on trouve c'est qu'ils
se sont assez largement plantés...
- Mass Hysteria - Une somme de détails (2007) ★ ★ ★
Ayant volontairement sauté l'album éponyme de 2005 qui insistait dans la
veine rock FM ouverte par le précédent (mais en plus cohérent, pour ceux
qui aiment le style, ça se laisse gentiment écouter), je retrouve Mass
Hysteria quelques années plus tard, au moment où le groupe revient à son
style initial, avec des guitares à nouveau très présentes et parfois
bien lourdes (même si les bidouillages électro ont toujours une présence
importante). Eh ben ça fait du bien ! Toutes les pistes ou presque sont
sur le même format : petits samples électroniques pour créer une
ambiance, riffs musclés aux guitares, chant à nouveau scandé sur les
couplet (mais avec des refrains plus mélodiques en général), la prise de
risque est très faible (c'est d'ailleurs le principal reproche qu'on
peut faire à ce disque, on ressent une certaine monotonie à force
d'exploiter systématiquement la même recette, pas d'échappées vers des
mélanges encore plus improbables cette fois-ci) mais c'est quasiment
tout le temps bien fichu (Babylone et Echec sont moins
convaincantes, et comme d'habitude, le featuring de la dernière piste
n'a aucun intérêt), avec même des titres vraiment sympathiques comme
Nous sommes bien (j'adore les petites interventions des gamins),
Regarde le monde ou la chanson titre (malgré une fin abrupte qui
laisse penser que le groupe ne savait plus quoi faire de sa chanson,
c'est dommage). Sympathique, c'est d'ailleurs un qualificatif adapté à
l'album dans son ensemble : pas un chef-d'oeuvre, mais vraiment un
disque qu'on prend plaisir à écouter.
- Mass Hysteria - Failles (2009) ★ ★ ★ ½
Avec ce sixième album, Mass Hysteria enfonce le clou en assénant encore
plus de gros son que dans le précédent. On sent même la volonté de
partir dans une direction moins "positive" que leurs premiers albums, la
pochette et l'introduction assez anxiogène de la première piste donnent
d'ailleurs le ton de ce point de vue. Ce World of fire est en
tout cas une excellente entame, avec son chant et ses paroles qui
peuvent presque faire penser à Trust (mais sur un fond de
guitares plus massif, évidemment). L'enchaînement avec un Plus
qu'aucune mer qui retrouve quant à lui un côté industriel plus
rammsteinien et sacrément efficace permet d'espérer un album vraiment
monumental. Ce ne sera pas tout à fait le cas, le reste du disque
revenant à des formules déjà explorées par le groupe (présence de
bidouillages électro), et tombant souvent dans le simple "correct sans
plus" (L'archipel des pensées ou Le magnétisme des
sentiments) sans devenir toutefois vraiment décevant. Le niveau
remonte sur la fin, avec une belle doublette Rien n'être plus
(pas sûr de bien comprendre ce titre mais peu importe, la chanson est
vraiment très bien) / Come on qui achève en beauté ce qui sera
pour moi le meilleur album de la discographie provisoire du groupe (mais
il reste encore trois disques pour monter un peu plus haut !).
- Mass Hysteria - L'armée des ombres (2012) ★ ★ ★ ★
"Il y a un temps pour tout, mais jamais pour la guerre", ces paroles
d'actualité (NdRoupoil : chronique écrite au lendemain de l'invasion de
l'Ukraine) sont celles du premier titre de ce nouvel album de Mass
Hysteria, où le groupe enfonce le clou dans la direction plus sombre
prise depuis trois albums. La pochette annonce une nouvelle fois le ton,
et l'ambiance est souvent tendue ou angoissée, le côté "festif nawak"
des tout premiers albums est désormais assez loin et je dois dire que je
préfère vraiment ce Mass Hysteria là. Encore une fois, le début d'album
est énorme, les sonorités industrielles et autres bruitages superbement
utilisés pour créer une ambiance froide qui colle parfaitement aux
paroles revendicatives bien énervées de Mouss. La doublette initiale
Positif à bloc / L'Homme s'entête est vraiment excellente,
mais d'autres pistes méritent aussi d'être citées, comme Même si
j'explose avec sa très belle utilisation du piano (le genre de
détails qui augmentent encore la qualité de ce disque et qu'on aimerait
entendre plus souvent de la part du groupe) et son excellent break, ou
un Serum barbare plus classique mais diablement efficace.
Quelques pistes tout de même où ça pêche un peu au niveau des lignes
vocales (Commedia dell'inferno, Raison close) mais
l'ensemble, assez court, est sacrément percutant. Le groupe continue son
ascension vers les sommets, jusqu'où ira-t-il ?
- Mass Hysteria - Matière noire (2015) ★ ★ ★ ★ ★
Après une montée en puissance remarquable sur les trois albums précédent
celui-ci, ne restait plus qu'une question à se poser à propos de Mass
Hysteria : étaient-ils capables de franchir la dernière marche et de
nous proposer un disque réellement marquant, qui puisse s'inscrire
durablement dans l'histoire du metal ? Eh bien, pour moi, avec ce
Matière Noire à la pochette recherchée, la réponse est largement oui.
L'ambiance est sombre, très sombre, mais entre deux pistes défouloir (ça
démarre très fort avec un Chiens de la casse très énervé, mais en
fait, on restera dans du lourd assez dépressif tout le long, à la seule
exception d'un Plus que du metal hommage aux joies du live, un
poil forcé d'ailleurs même s'il fournit une respiration bienvenue en fin
de disque), Mass Hysteria réussit à nous placer des percées de beauté
lumineuse qui hissent le disque à des sommets nettement plus
impressionnants que tout ce qu'ils avaient produit jusque là (le refrain
de L'Enfer des dieux, l'atmosphère splendide de la conclusive
Mère d'Iroise, c'est vraiment superbe). Comme en plus ils ont
écouté mes conseils et qu'ils multiplient les détails inattendus dans la
gestion de la part samples/électronique de leur musique (un peu de
violons sur Chiens de la casse, un harmonica sur Vae Soli,
les nappes de synthé de Tout est poison, on a même droit à
quelques notes chantées par un choeur classique sur la géniale Vector
equilibrium), il y a vraiment bien peu à jeter dans cet album
(allez, quelques pistes plus "quelconques" dans le lot, comme cette
chanson titre presque décevante par rapport aux joyaux qu'elle côtoie,
mais vraiment rien de raté), qui constitue une référence de très haut
niveau pour le groupe et même probablement plus généralement pour le
metal français. Pour le coup, ils auront du mal à faire mieux.
- Mass Hysteria : Maniac (2018) ★ ★ ★
Dernier album du groupe à ce jour, ce Maniac a la lourde tâche de
succéder à un Matière Noire qui avait placé la barre très haut.
Impossible de ne pas jouer le jeu de la comparaison, et elle est
logiquement douloureuse pour le petit dernier, qui ne retrouve pas les
instants de magie irrééls du précédent et fatigue même parfois à force
de jouer la surenchère dans le côté brutal et sombre (Partager nos
ombres a une atmosphère intéressante mais que la batterie est
fatigante, Chaman acide bien revendicatif et efficace mais ça
manque de respirations). Si on essaye d'être un peu plus objectif, on se
rend compte malgré tout que le disque ne tombe pas non plus dans la
médiocrité, loin de là : on n'a pas le temps de s'ennuyer (il est
sensiblement plus court que le précédent), aucune piste n'est à jeter,
et le groupe réussit quand même par moments à trouver de nouvelles idées
qui fonctionnent (les choeurs et le côté épique de Se brûler
sûrement, et surtout la très intéressante piste finale, quasiment
sans paroles avec juste sa citation de Pulp fiction dont je ne sais pas
trop ce qu'elle fait là, en tout cas ça donne envie d'y revenir). En
gros, après un petit chef-d'oeuvre, on est simplement redescendu au
niveau d'un album solide, correct mais sans génie.
- Mastodon : Remission (2011) ★ ★ ★ ★
Je ne savais pas spécialement à quoi m'attendre en tentant ce premier
album, mais le titre de la première piste donne déjà une idée :
Crusher destroyer, ça va être du bourrin. Eh bien en fait, pas
tant que ça, ou plutôt pas seulement. Certes, il y a une composante
"metal bien burné" un peu à la Pantera qui est indéniablement
présente, mais qui est tempérée par une volonté de faire à la fois du
technique (la batterie a une très grosse présence sur beaucoup de
titres, le gars envoie du lourd) et du mélodique qui rendent beaucoup de
pistes très intéressantes, surtout parmi les plus longues
(Trainwreck ou l'instrumental Elephant man qui clôture
l'album, c'est vraiment très bon). Dommage quand même que le son assez
brut renforce encore le côté très dense des compositions plus courtes
(notamment les quatre titres qui ouvrent le disque), c'est limite
fouillis par moments et personnellement je trouve ça nettement mieux
quand ça respire un peu plus (Ol'e nessie fait du bien de ce
point de vue là avec son intro calme). Autre bémol, le chant
essentiellement sans intérêt, mais bon, ce n'est pas trop grave dans la
mesure où d'une part ça ne chante pas énormément, et même quand ça
chante c'est assez noyé dans le reste. Encore inégal donc, mais pour un
premier album c'est quand même vraiment très intéressant, j'ai envie de
découvrir la suite.
- Mastodon : Leviathan (2004) ★ ★ ★ ★
Pour ce deuxième album, le groupe a corrigé certains des "défauts" que
je ressentais dans le premier : son un peu moins brut, chant moins
uniformément crié, et surtout un très bon équilibre trouvé entre les
différentes inspirations du groupe (on pourrait même dire que le côté
mélodique domine maintenant pas mal de titres, ce qui me convient très
bien). Comme en plus il y a une cohérence manifeste dans cet album et de
très bons morceaux (Blood and thunder démarre le disque sur les
chapeaux de roue, Iron tusk est tout aussi excellent), que
demander de plus ? Eh bien, on va dire que je suis difficile, mais je
trouve dommage que le groupe se soit recentré sur une collection de
titres courts et donc forcément moins creusés que les plus longues
plages de leur premier album. Une seule plage (très) longue (13'30) en
fin d'album, mais hélas ce Hearts alive manque un peu de
substance pour justifier sa durée. Globalement, la fin de disque me
semble un peu moins inspirée, l'instrumental final étant nettement plus
anecdotique que le Elephant man auquel il semble pourtant faire
référence via son titre (John Merrick). Bref, pas déçu parce que
ça reste un très bon disque, mais peut-être pas aussi exceptionnel qu'il
n'aurait pu l'être.
- Mastodon : Blood Mountain (2006) ★ ★ ½
J'ai attendu plusieurs écoutes de cet album avant d'en parler, et à vrai
dire, même après ces écoutes supplémentaires, je ne sais toujours pas
trop quoi en penser. Au premier abord, c'est vraiment une assez mauvaise
surprise : le groupe semblait avoir trouvé un bon équilibre dans
Leviathan, et là, changement de cap, il semble tout à fait
volontairement éliminer de sa musique tout ce qui pourrait la rendre
immédiatement séduisante. Plus de riffs brutaux, plus de mélodies
accrocheuses, une certaine uniformité d'atmosphère et des développements
techniques peu attrayants à base d'arpèges et de gammes, c'est
franchement austère et ma première réaction a été "c'est vraiment raté".
Et puis, curieusement, j'ai quand même eu envie de réessayer (et plus
qu'une fois !), et j'ai commencé à y trouver de l'intérêt : les mélodies
ne sont pas si absentes que ça, et les titres sont quand même construits
quand on fait l'effort de se plonger dedans. De là à dire que j'aime
vraiment l'album, il y a un pas que je ne franchirai pas malgré tout (il
y a même des pistes, comme le curieux Pendulous skin final ou
l'instrumental Bladecatcher avec ses bruitages assez pénibles,
que je peux confirmer ne pas apprécier), d'où une note "moyenne" qui ne
reflète à vrai dire pas grand chose. Sûrement un disque à continuer à
approfondir...
- Mastodon - Crack the skye (2012) ★ ★ ★ ★
Un détail extramusical toujours sympa avec Mastodon, c'est que les
pochettes sont très réussies. Niveau musique, on est plus ou moins dans
la continuité de l'album précédent, avec un metal ambitieux et pas
facile d'accès et même des tendances "prog" de plus en plus marquées
(deux pistes qui dépassent les 10 minutes). Mais dans le même temps, le
disque est quand même beaucoup moins austère que le précédent, car plus
varié et surtout plus maîtrisé, avec de vrais moments fascinants où
l'ambiance vous prend littéralement à la gorge (le début de la première
piste Oblivion, la très belle Ghost of Karelia et surtout
l'une des deux pistes les plus développées, The Czar,
magnifiquement construite et magnifique tout court, pour moi le sommet
de l'album). Bon, à côté, il reste des chansons dans lesquelles j'ai
plus de mal à rentrer (la chanson titre, Divinations, ou même le
Last baron conclusif et ses treize minutes, hyper riche et
fouillé mais qui part dans tellement de directions qu'on finit par s'y
perdre un peu). Notons en passant que le chant qui était assez brutal
dans le premier disque du groupe a peu à peu laissé place à une majorité
de chant (très) clair, avec même des accents limite pop sur ce
disque-ci, c'est assez surprenant. En tout cas un album à nouveau
passionnant à défaut d'être tout le temps emballant, et je pense de plus
en plus que Mastodon est un groupe auquel il faudra revenir quelques
fois avant d'en avoir fait le tour.
- Mastodon - The Hunter (2011) ★ ★ ★ ½
Le moins qu'on puisse dire, c'est que ce groupe a le don d'être
imprévisible. Alors que Crack the skye lorgnait très clairement
du côté du prog avec ses deux titres dépassant les dix minutes et ses
structures bien touffues et alambiquées, voilà que l'album suivant est
une suite de morceaux courts (13 titres, 53 minutes) qui lorgnent
carrément du côté de la vignette pop ! Pour le coup, l'aspect mélodique
est très clairement de retour, avec chant très clair de rigueur presque
tout le temps (seul Spectrelight est un curieux aparté de métal
bourrin qui aurait plus eu sa place sur le premier album du groupe). Je
dois dire que ça me plaît pas mal (un petit bonbon comme
Stargasm, c'est vraiment sympa, j'aime aussi beaucoup la chanson
titre, l'une des rares pistes de cet album globalement "positif" qui ait
une atmosphère plus mélancolique), même si parfois ça part quand même un
peu trop dans le délire sans intérêt (les bruitages et rires de l'intro
de Creature lives, bon, c'est assez superflu, même si ensuite la
chanson est réussie). On peut quand même légitimement se demander ce qui
a bien pu justifier ce nouveau virage chez un groupe qui semblait quand
même jusqu'ici avoir une ambition un peu plus élevée que celle de
produire un (bon) album de rock commercial (parce qu'honnêtement, c'est
un peu ça qu'on a ici).
- Mastodon - Once more 'round the sun (2014) ★ ★
Avant-dernier album en date du groupe, qui reste plutôt dans
la lignée du précédent (beaucoup de pistes courtes), mais avec un
penchant pop moins prononcé et une variété d'atmosphères plus nette.
Plutôt un point positif a priori, sauf que justement ça a sévèrement
tendance à s'embourber dès que ça veut vraiment devenir sérieux (je
trouve par exemple la piste finale Diamond in the witch house atrocement
poussive). Dommage, car je trouve le triptyque initial assez réjouissant
: Tread lightly super efficace avec un retour à une certaine lourdeur,
The Motherload qui tourne au contraire totalement du côté léger,
beau contraste avec la chanson précédente, et High road
basiquement bourrin, un peu gras et répétitif mais c'est ça qui est bon.
Bref, on était parti pour un album très agréable à écouter sans prise de
tête (comme le précédent, mais en plus varié), mais je ne trouve
malheureusement pas grand chose à quoi m'accrocher ensuite. Je devais
plus être d'humeur (m'enfin, je l'ai quand même tenté plusieurs
fois...).
- Mastodon - Emperor of sand (2017) ★ ½
Si le groupe avait multiplié les changements de direction inattendus en
début de carrière, ils semblent (hélas) s'être stabilisés dans l'espèce
de pop-rock métallisée (avec quand même de vrais morceaux de metal bien
lourd dedans par moments) depuis The Hunter. Le problème c'est
que, si ce dernier avait encore un certain pouvoir de fascination, on
tombe vraiment avec cet empereur qui n'apporte pas vraiment de sable
dans ses chaussures (on pourrait attendre des influences vaguement
orientales, mais à part l'intro de Scorpion breath, titre plutôt
sympa par ailleurs, pas grand chose qui justifie ce titre) dans de la
musique sans âme qui aligne les titres certes plutôt agréables à écouter
d'une oreille distraite, mais vraiment pas marquants. Le Sultan's
curse qui ouvre l'album était pourtant prometteur, mais ensuite,
entre les chansons vraiment trop pop comme le Show yourself qui
suit, les solos de guitare beaucoup trop basiques ou les bruitages
électroniques peu inspirés, on regrette vraiment le Mastodon première
manière qui avait une sacrée personnalité. Là, malgré les tentatives un
peu trop évidentes d'opposer chant clair et guttural sur certains
titres, je décroche assez vite.
- Mastodon - Hushed and grim (2021) ★ ★ ★ ½
Après des débuts fracassants sur la scène metal, puis un virage tout
aussi saisissant vers le progressif quelques albums plus tard (le
passionnant Crack the skye), Mastodon s'était enlisé depuis
quelque temps dans une espèce de pop metal de moins en moins
intéressant. Malgré tout, un nouvel album du groupe est un évènement,
surtout quand il s'agit d'un double totalisant quinze pistes et près
d'une heure et demie de musique. Le signe d'une ambition retrouvée ?
Oui, clairement, on peut mettre de côté les vignettes pop, les titres
sont longs, denses, et l'ambiance n'est pas à la fête (comme le titre et
la pochette le laissent entendre), l'album étant en partie inspiré par
la disparition du producteur de longue date du groupe. Et, très
honnêtement, au moins le temps de deux titres, on croit tenir un album
monstrueux. Pain with an anchor est une intro hyper accrocheuse,
avec batterie tentaculaire et guitares presque spatiales, suivie avec
The Crux d'un coup de poing dans la tronche tout aussi efficace,
rendu encore plus spectaculaire par un break planant complètement
inattendu. Si tout avait été de ce niveau, on aurait eu sous la min un
grand chef-d'oeuvre, mais ce n'est pas franchement le cas : rien de
mauvais, des ambiances variées et toujours intéressantes (presque
enjouée dans Peace and tranquillity, limite urbaine dans
Pushing the tides, plus roots dans The Beast), mais il
faut bien admettre que ça s'étire quand même pas mal et que quinze
chansons d'un coup c'était peut-être beaucoup. Malgré tout, pour qui se
sent motivé pour un long voyage introspectif, ça mérite le détour.
- Mayhem - De Mysteriis Dom Sathanas (1994) ★ ★
Je ne pouvais décemment pas effectuer un tour d'horizon de la scène
black norvégienne sans évoquer le plus culte de ses groupes. Certes,
culte pour des raisons souvent extra-musicales, mais le simple fait que
cet album soit le seul enregistré par (une partie des) membres
fondateurs, et que l'enregistrement lui-même ait été fortement compliqué
par la soudaine indisponibilité pour longue durée (emprisonnement après
avoir trucidé un collègue) ou même définitive (suicide, trucidage par le
collègue) d'une proportion non négligeable des musiciens du groupe lui
donne forcément un statut à part. Toutefois, les délais subis lors de
l'enregistrement auront au moins deux effets néfastes pour le disque.
Déjà, il sortira un certain temps après d'autres albums de la scène
black (notamment le A Blaze in the Northern Sky de
Darkthrone démoli par votre serviteur sur cette même page, qui
lui est antérieur de deux ans) qu'il est censé avoir contribué à créer,
et qui pousseront encore nettement plus loin le style dans ses
retranchements, ce qui écorne forcément son statut d'album fondateur.
Mais surtout, il a fallu recruter des musiciens pour terminer l'album,
et le groupe a subi l'invasion d'Attila Csihar pour gérer le chant. Le
gros problème, c'est que le compère hongrois n'a pas du tout la même
vision de cette musique que ses camarades norvégiens. Là où les
instrumentistes s'appliquent très sérieusement à créer une atmosphère
glauque (et y parviennent d'ailleurs plutôt bien, ici le son est moche
mais c'est écoutable et ça contribue même aux bons moments de l'album,
avec notamment des descentes de toms qui sonnent lugubres comme il
faut), lui joue la carte du grand-guignol en faisant dans la parodie
outrancière en permanence. Grognements grotesques, pseudo-chant lyrique
qui ne ressemble à rien, c'est un peu comme si Clavier en mode
Jacquouille débarquait dans un film historique sérieux, ça ne colle pas
du tout (franchement, il faut l'écouter dans la chanson-titre qui
conclut l'album, c'est vraiment du grand n'importe quoi !). Et c'est
dommage, car côté instruments, même si ça reste très primaire (des riffs
répétés jusqu'à plus soif, zéro développement vaguement technique), il y
a vraiment quelque chose au niveau de l'ambiance (sur Freezing
moon ou Pagan fears notamment). Un album qui mérite quand
même d'être écouté, au moins à titre de curiosité.
- Mayhem - A Grand Declaration of War (2000) ★ ½
Au tournant du millénaire, voilà que Mayhem refait son apparition, avec
un lineup forcément renouvelé, mais quand même constitué de musiciens
ayant déjà une histoire avec le groupe. Fort heureusement, Attila Csihar
n'en fait pas partie. Pas sûr ceci dit que celui qui le remplace chante
beaucoup mieux mais (ça tombe bien), il chante en fait très peu sur
l'album. Un peu de cris, beaucoup de passages scandés ou simplement
parlés, voix robotiques trafiquées, et même un peu de rap, ça
expérimente beaucoup niveau vocal. D'ailleurs, du côté des instruments
non plus, on ne retrouve pas la moindre trace du "premier Mayhem"
fondateur du black norvégien. On a une production relativement standard,
avec une batterie bien mise en avant (bonne idée d'ailleurs, car ça
assure bien à ce niveau), mais surtout une musique qui oscille entre
metal très martial (le titre de l'album n'est pas mensonger) comme sur
la chanson titre qui ouvre le disque, et des choses nettement plus
expérimentales et franchement peu convaincantes (les sonorités électro
de A Bloodsworth and a colder sun ou les délires de
l'interminable Completion in science of agony). Tout ça donne un
album peu cohérent qui laisse franchement perplexe malgré quelques
excellentes pistes (j'aime beaucoup To Daimonon). Surtout, on se
pose franchement la question : pourquoi avoir sorti ça sous le nom de
Mayhem alors que ça n'a pas le moindre rapport avec les antécédents du
groupe ? Est-ce un nom suffisamment mythique pour simplement permettre
de gagner plus de pognon ? En tout cas les fans de black ont du être
sacrément déçus...
- Mayhem - Chimera (2004) ★ ★ ★ ★
Après un album expérimental finalement décevant, Mayhem revient avec un
nouveau disque nettement plus cohérent et centré sur ce qu'on attend
d'eux : huit pistes pour à peine trois quarts d'heure de musique, et une
concentration d'atmosphères lourdes et mortifères assaisonnées de
nombreux blastbeats, y a pas de doute, on est revenu à quelque chose de
beaucoup plus clairement black (le seul détail qui change c'est que la
production est soignée, je ne m'en plaindrai pas). Accessoirement, ça
chante "normalement" sur ce disque. Encore mieux, alors que je ne suis
pourtant pas vraiment fan de ce style, j'ai trouvé la plupart des
compositions fort convaincantes, il y a certes un côté un peu fatiguant
à la longue, mais un titre comme My Death réussit vraiment à
imposer son côté glaçant et, encore plus fort, Slaughter of
dreams m'a définitivement convaincu que le blastbeat bien employé
pouvait être très efficace. Globalement, l'album monte en puissance,
Impious leper lord et la chanson titre conclusive étant aussi
d'une efficacité redoutable. Ce n'est pas le type de metal que
j'écouterais tous les jours, mais dans son genre, c'est vraiment une
excellente surprise.
- Mayhem - Ordo ad chao (2007) ★ ★ ½
Si le précédent album de Mayhem avait vu la résurgence d'une grosse
composante black metal, celui-ci va encore nettement plus loin, en
revenant à une production bien sale quoiqu'encore audible (le son des
toms de batterie !), mais aussi en rembauchant le terrible Attila Csihar
au chant ! Argh, vite, fuyons ! Ou pas en fait, car pour le coup, son
style inimitable essentiellement fait de grognements convient bien à
l'épure (si on peut dire) à laquelle nous convie le groupe : de longues
plages lentes et très répétitives, une atmosphère uniformément glauque,
c'est à une sorte de messe noire angoissante que nous assistons, au
point même que l'invention musicale passe franchement à l'arrière-plan.
À écouter comme un disque standard, ça mérite sûrement une note proche
du zéro (on est vraiment proche du foutage de gueule sur les parties de
guitare), mais à se mettre dans les oreilles dans le noir, après avoir
légèrement abusé de substances illicites, l'effet peut être saisissant.
Bon, je n'ai pas vraiment testé l'écoute dans ces conditions là, mais il
y a quand même un côté lancinant et hypnotique loin d'être désagréable
dans cette "musique". Quelque part, on est beaucoup plus proche ici
d'expériences bizarres de musique contemporaine que de musique
"commerciale". Je ne me suis pas mouillé au niveau de la note mais c'est
plutôt un "j'adore ou je déteste selon mon humeur du moment".
- Mayhem - Esoteric warfare (2014) ★ ½
Cinquième album après vingt bonnes années de carrière (et le premier
depuis 2007), on ne peut pas dire que Mayhem risque la surchauffe. En
l'occurrence, il y a (encore) du changement au niveau du lineup, puisque
c'est le guitariste et unique compositeur des trois précédents disques
qui s'est fait la malle. Curieusement, alors que les trois albums en
question étaient très différents les uns des autres, cette nouvelle
tentative composée donc par un nouveau venu est quant à elle la suite
directe du disque précédent du groupe, au point même que le titre
introductif Watchers est quasiment un auto-plagiat. Mais il y a
quand même ensuite une volonté de varier un peu, notamment en ajoutant
quelques sonorités plus modernes. Curieusement, ça ne fonctionne pas
vraiment comme prévu, car le disque perd en intensité ce qu'il gagne en
variété, et finit quand même, après quelques titres intéressants (le
premier est le meilleur, en fait) par tourner terriblement en rond dans
une deuxième moitié où les blastbeats fatiguants se succèdent sans qu'on
y décerne grand chose d'intéressant. À la fois trop proche du disque
précédent mais beaucoup plus plat, c'est un effort insuffisant.
- Mayhem - Daemon (2019) ★ ★ ★ ½
Sixième album (et dernier en date) pour le groupe qui garde son rythme
de croisière "un album tous les cinq ans". On garde quasiment le même
lineup que pour le précédent, mais il y a du mieux au niveau des
compositions : plutôt que de jouer sur une production sale et des
atmosphères lugubres, c'est ici tout en puissance que le côté malsain
(qui est toujours bel et bien présent !) est créé. Un peu trop même,
j'ai toujours du mal avec les pistes qui jouent uniquement le bourrinage
speed sur fond de batterie qui blastbeate en permanence (donc j'aime
moyennement Worthless abominations destroyed ou Of Worms and
ruins). Mais l'album est largement sauvé par d'autres chansons
vraiment réussies au coeur de l'album : Malum avec un Attila
d'outre tombe très convaincant, Falsified and hatred et son motif
de trois notes repris... aux claviers, et Aeon demonium avec sa
très efficace montée en puissance. Un album tout à fait correct et
finalement plus classique que les précédentes tentatives du groupe.
- Megadeth - Killing is my business ... and business is good ! (1985) ★ ★
Début d'une nouvelle série consacré à un groupe mythique. Assez
curieusement, alors que j'ai découvert il y a un certain temps déjà
l'intégralité de la discographie de Metallica, je ne connais de
Megadeth que le génial Rust in peace. Il est grand temps de
réparer cet oubli, et la solidarité inter-rouquins devrait logiquement
me pousser à être indulgent... Petit rappel pour ceux qui ont séché les
cours d'histoire du metal à l'école primaire : après avoir été viré
comme un malpropre de Metallica, Dave Mustaine, autoproclamé meilleur
guitariste du monde, est très vénère et veut montrer au monde entier ce
dont il est capable. Mais le temps qu'il monte un groupe (une bonne
nouvelle pour le metal) et qu'il se décide à y chanter (une nettement
moins bonne nouvelle pour le metal), Metallica a déjà sorti deux albums,
dont un Ride the lightning qui est déjà une sacrée référence.
Soyons clairs, à côté, le premier essai de Megadeth n'a aucune chance de
rivaliser. En fait, ce qu'on entend surtout, c'est effectivement que
l'ami Dave est bien énervé, mais ce côté metal brut de décoffrage est
vraiment mal géré : son moyen (même si la version remastérisée est tout
à fait correcte), chant moyen (j'avoue quand même être devenu nettement
moins allergique à la voix de Mustaine avec le temps), et un côté très
très brouillon dans les développements (les solos surtout, celui de
Chosen ones est franchement bordélique) qui rend parfois les
chansons compliquées à suivre (Rattlehead ça va à 100 à l'heure,
mais on ne sait pas trop où...). Même constat sur Mechanix, qui
va certes plus vite que le Four Horsemen de Metallica (pour ceux
qui ne suivent toujours pas au fond, c'est à peu de choses près la même
chanson), mais qui fonctionne finalement moins bien. Dommage, car sur le
fond les compos sont intéressantes, la chanson titre par exemple
fonctionne bien. Bon, on va dire que ça reste prometteur pour la suite,
mais vraiment pas assez abouti pour l'instant.
- Megadeth - Peace sells... but who's buying ? (1986) ★ ★ ★ ★
À peine un an après un premier essai perfectible, la bande à Mustaine
est de retour, et le moins qu'on puisse est qu'il ont fait de sacrés
progrès ! C'est même incroyable à quel point cet album parait pro par
rapport au précédent (et ce n'est pas du à la remasterisation pour le
coup, qui à mon avis a plutôt tendance à desservir certaines pistes en
mettant les voix trop en arrière alors que la version originale est très
bien) : bon, Mustaine chante jours pareil bien entendu, mais le son est
nettement plus maîtrisé, et surtout le bordel énervé a laissé place à un
thrash certes toujours agressif, mais d'une rigueur et d'une efficacité
assez redoutables. À tel point d'ailleurs que j'en viendrais presque à
regretter par moments que ça ne parte pas un peu plus en vrille, on
n'est pas loin d'une certaine froideur (sur The Conjuring par
exemple). Mais on ne peut pas nier que la majorité des titres sont très
bons, à commencer par Wake up dead qui montre la voie, et bien
sûr la chanson titre avec son intro à la basse qui met immédiatement
dans le bain et sa progression jusqu'à un refrain choral un peu planplan
mais qui reste en tête. On a également droit à un excellent Good
mourning/Black friday qui joue plus la carte de la balade triste
(même si on n'a pas un tempo retenu tout le long non plus) et My Last
words termine efficacement un album sans gros raté, à part peut-être
la reprise rock I ain't superstitious assez anecdotique. Malgré
tout, même s'il s'agit indiscutablement d'un (très) bon album, il me
manque un petit quelque chose côté émotionnel pour être totalement
subjugué.
- Megadeth - So Far, so good ... so what ! (1988) ★ ★ ★ ½
Manifestement, Dave Mustaine avait une certaine attirance pour les
points de suspension aux débuts de son groupe. Quoi qu'il en soit, cet
album est nettement moins souvent cité que les deux qui l'entourent
parmi les classiques de la discographie du groupe, et ... c'est assez
mérité. Non pas que l'album soit mauvais, loin de là, c'est du bon
thrash bien maîtrisé (malgré le changement de line-up), la plupart des
chansons fonctionnent très bien (l'étonnant instrumental Lungs of
hell qui ouvre l'album, In my darkest hour qui joue la carte
d'un tempo plus lent et d'une ambiance plus lourde parfaitement assumés
par le groupe), quelques autres semblent superflues (encore une reprise
inutile, cette fois-ci de Anarchy in the U.K., un Liar
dont le refrain ne ressemble à rien), et je retrouve un peu le côté
"manque d'émotions" qui m'avait un peu freiné dans le disque précédent.
Tout cela reste plus que très correct (je précise que pour cette fois je
n'ai écouté que la version remasterisée, apparemment l'original souffre
d'un son vraiment pas terrible), mais semble forcément un peu en retrait
après la progression fulgurante du groupe entre ses deux premiers albums
(et encore plus en comparaison du suivant dans la liste, mais ne brûlons
pas les étapes).
- Megadeth - Rust in peace (1990) ★ ★ ★ ★ ★
Alors même que le line-up du groupe n'arrête pas de changer (encore deux
nouveaux par rapport à l'album précédent), Megadeth a réussi avec Rust
in peace un exploit assez invraisemblable en proposant un album
quasi-parfait de bout en bout, classique absolu qui fait tout simplement
partie des meilleurs albums de metal, toutes obédiences confondues. Dès
les premières notes de l'énorme Holy Wars, on sent que le groupe
a réussi à accrocher ce petit truc en plus qui lui permet de franchir
encore un gros palier par rapport à leurs (bons) albums précédents.
Peut-être simplement un supplément de mélodie ? En tout cas ici, tout
colle, et le disque aligne les titres mémorables avec une régularité
époustouflante (seul Dawn Patrol me semble dispensable avec la
voix curieusement désincarnée de Mustaine). C'est rapide, technique sans
que ça ne devienne jamais insipide (il y pourtant quantité de solos,
mais toujours justes), la rythmique est au top (le tout début de Take
no prisoners !), instrumentalement c'est vraiment exceptionnel. Bien
sûr, il faut quand même se farcir le chant de Mustaine, mais même ça ne
suffit pas à tempérer mon enthousiasme. Rien que pour Tornado of
souls, de toute façon, la note avoisinerait déjà les cinq étoiles.
- Megadeth - Countdown to extinction (1992) ★ ★ ★ ½
Me voici donc arrivé à ce premier album post-Rust in peace qui a
déçu beaucoup de fans du groupe. Ca se comprend sans peine, surtout pour
ceux qui espéraient un disque dans la continuité du précédent, car le
groupe a vraiment opéré un changement de direction assez net. La
vitesse, la technicité, les solos de dingues et autres breaks inattendus
vantés dans le précédent opus ont quasiment disparu ici pour laisser
encore plus la place à la mélodie et à des structures très classiques,
au point que certains accuseront Megadeth d'avoir voulu faire son
Black album. En soi, ça ne me dérange pas (d'ailleurs, j'aime
beaucoup le Black album !), à condition que la qualité musicale suive.
Ici, c'est majoritairement le cas, même si on reste honnêtement un bon
cran en-dessous du chef-d'oeuvre précédent. Il y a encore des titres
bien pêchus, comme le direct et efficace Skin o' my teeth qui
ouvre l'album, ou Ashes in my mouth qui le conclut, quelques
tentatives d'originalité qui fonctionnent bien (l'intro surprenante de
Symphony of destruction, et surtout l'excellente Sweating
bullets avec son refrain super groovy), mais aussi une ballade
oubliable (Foreclosure of a dream), quelques riffs moyens ou trop
similaires (la chanson titre, par ailleurs intéressante, et This was
my life), et deux ou trois titres peu inspirés (High speed
dirt, tout le début de Captive honor). Un peu décevant vu les
antécédents du groupe, oui, mais franchement ça tient encore très bien
la route.
- Megadeth - Youthanasia (1994) ★ ★ ★ ½
Ceux qui avaient été déçu par Countdown to extinction ne risquent
pas de faire volte-face avec ce nouvel album : le choix du groupe de se
diriger vers une musique beaucoup plus mélodique, cadrée, et surtout
nettement moins agressive (il a quand même une sacrée différence dans
l'esprit avec leur tout premier album !) est complètement confirmé ici,
ça ne va pas très vite, les développements techniques sont carrément
absents (il reste des solos plutôt sympathiques mais beaucoup plus
"standard" qu'auparavant), et, incroyable mais vrai, même ce cher Dave
chante de façon plus posée et presque correcte. Après, si on n'a rien
contre cette nouvelle orientation (ce qui est plutôt mon cas), on tient
encore un album qui tient fort bien la route, avec même d'excellents
titres (le Reckoning day initial, l'un des plus énervés
d'ailleurs, avec son riff prenant), des riffs qui fonctionnent bien (un
peu trop répétés : sur la chanson titre ou Addicted to chaos,
c'est dommage, il y avait moyen de faire encore mieux avec les mêmes
bases), et des refrains mélodiques qui restent en tête (celui de
Family tree notamment). Au rang des pistes évitables, on mettra
Elysian fields et la ballade (mais oui, Megadeth se met à faire
des ballades) À tout le monde, qui tient fort bien la route mais
dont le refrain en français est simplement risible pour un francophone
(d'ailleurs, pour réellement rigoler, il faut écouter la démo de cette
piste proposée dans certaines éditions, le Dave il avait clairement pas
pris français LV1 au collège). Pour le reste, ça s'écoute vraiment tout
seul. Un peu trop même, il est vrai que l'ambition n'est plus la même
que sur un Rust in peace.
- Megadeth - Cryptic writings (1997) ★ ½
Après deux albums qui jouaient clairement la carte de l'accessibilité et
du "surtout pas trop agressif", Megadeth nous fait le coup de l'album
qui fait le choix de ne pas choisir. On reste globalement assez loin du
thrash des débuts du groupe (les solos sont carrément gentillets), mais
on retrouve quelques titres beaucoup plus rapides qui semblent un peu
s'être perdus là (The Disintegrators, She-wolf). En soi,
ce serait plutôt une bonne nouvelle... s'ils n'étaient pas si médiocres
(je trouve le refrain de She-wolf assez pénible). Pour le reste, donc,
du rock à peine heavy qui oscille entre le très correct (la chanson
d'ouverture Trust, ou Vortex malgré l'étrange tentative de
traficotage de la voix de Mustaine), le sympa mais déjà entendu (A
secret place) et le franchement paresseux (Use the man,
Sin, ou FFF et sa batterie insipide). Au final, il faut
quand même bien avouer qu'il ne reste plus assez de bonnes choses à se
mettre sous la dent pour vraiment défendre l'album, contrairement aux
précédents qui avaient encore une majorité de temps forts.
- Megadeth - Risk (1999) ★
Si j'ai avoué plus haut avoir écouté plusieurs albums de Megadeth en
version remasterisée, pour celui-ci je tenais à faire une exception en
allant chercher l'original. Pourquoi ? Tout simplement car il est assez
unanimement conspué par les fans du groupe, entre autres pour les
bidouillages électro présents ici et là, et que Dave Mustaine tentera de
gommer au maximum en effectuant le nettoyage du disque. Bon alors ok, il
y a des chichis assez ridicules (plus sur les traficotages de la voix de
Mustaine, notamment sur Ecstasy, que sur les quelques intros où
on a de l'électronique qui apparaît, d'ailleurs), mais musicalement,
est-ce vraiment si mauvais ? À première vue, pas tant que ça,
Insomnia est certes un titre qui n'a plus grand chose à voir avec
le metal (les violons...) mais qui a un côté funky plutôt sympathique. À
deuxième vue, quand même, y a pas grand chose à sauver, puisqu'il faut
attendre le Time : The End final pour retrouver un groupe qui
envoie un peu (pas longtemps d'ailleurs tant l'album se finit
abruptement). Le reste, c'est vraiment tout et n'importe quoi, de
l'ambiance Superbowl du franchement pas très inspiré Crush'em au
rock vintage de Seven (plus écoutable), en passant par plusieurs
pistes lentes et plus ou moins dépressives qui manquent d'impact
(Wanderlust). Et puis bon, il y a aussi les vrais ratages qui
n'ont vraiment rien à foutre sur un album de Megadeth : Breadline
et I'll be there poussent vraiment trop loin le concept de
"Essayons de faire un album plus accessible pour attirer un nouveau
public". En résumé, finalement, cet album est pas loin d'être une belle
bouse, en effet.
- Megadeth - The World needs a hero (2001) ☆
Beaucoup de fans du groupe considèrent Risk comme son album à
oublier. Certes ce n'était pas bien folichon, mais je ne suis pas
d'accord : le suivant est pire. Pourtant, avec un changement de line-up
conséquent, l'occasion était belle de repartir sur de meilleures bases
et de se décider à revenir au metal agressif que le groupe pratiquait à
ses débuts. C'est d'ailleurs l'ambition avouée de Mustaine sur ce
disque, mais c'est fait avec un tel manque d'envie et d'inspiration que
le soufflé retombe complètement. En fait, c'est assez terrible, on a
l'impression d'entendre un groupe de troisième zone qui essaie de se
faire sa place dans le monde du metal sans en avoir vraiment les moyens
tant les erreurs de débutants sont alignées : riffs moyens et sans
consistance répétés sans variations, solos de guitare carrément à chier
(franchement, celui de Disconnect, c'est une blague ?), refrains
tous plus pitoyables les uns que les autres (les voix traficotées de
Moto psycho ont au moins le mérite de faire rire), et un Dave qui
est tellement peu motivé qu'il chante encore plus mal que d'habitude (la
ballade Promises avec moult cordes pour accompagner est un grand
moment de nanaritude vocale). Et je passe la trompette incongrue de
Silent scorn et la piste finale incompréhensible, avec la
citation de Metallica et l'espèce d'adaptation d'une chanson de
Diamond head qui ne va nulle part. Ah si, un dernier point
pénible, les beaucoup trop nombreux passages parlés qui n'ont pas
d'intérêt (faut croire que Mustaine avait trop la flemme pour vraiment
tenter de chanter). La seule bonne piste perdue dans ce marasme, c'est
Dread and the fugitive mind avec le seul riff vraiment accrocheur
du disque. Pour le reste, on se demande vraiment où sont passées la
hargne et la technique du groupe de Mustaine...
- Megadeth - The system has failed (2004) ★ ★
Après le désastreux The World needs a hero, Dave Mustaine a
dissous l'assemblée, pardon son groupe. Quoi, il a réussi à se rendre
compte qu'ils ne faisaient plus que de la bouse ? Non, je vous rassure,
pas du tout, il s'est juste suffisamment flingué le bras pour ne plus
pouvoir jouer de guitare (et bien sûr, impensable que le groupe puisse
exister sans lui). Trois ans plus tard, il est de retour, il a
reconstruit tout le line-up, et il semble décidé à donner un successeur
à Rust in peace (cf ses déclarations de l'époque et la pochette).
Bon, soyons clairs, il vaut mieux oublier cette référence écrasante si
on veut apprécier un tant soit peu le disque, mais il y a, au moins le
temps des trois premières chansons, une vraie volonté de revenir
(enfin...) à une musique plus rapide et agressive. On peut même dire que
l'intro mammouthesque de Kick the chair y parvient plutôt bien.
Du coup, on se prend à rêver de retrouver un très bon album, mais la
suite nous fait en partie déchanter. Déjà, on revient globalement à des
choses plus sages, du style des albums intermédiaires Countdown to
extinction ou Youthanasia (qui restaient ceci tous les deux
plus que corrects), et surtout il y a des expérimentations dont la
réussite est très variable : l'assez indescriptible The Scorpion
fonctionne bien, le hard-rock FM de Tears in a vial un peu moins,
le rock vintage de Back in the day vraiment pas, et on touche
carrément le fond avec un My Kingdom conclusif complètement raté
(on se demande bien ce qu'ils ont cherché à faire dessus tellement ça ne
ressemble à rien). Au final, on ne peut pas dire que le bilan soit
franchement positif, mais bon, on a quand même un (demi)-album correct,
qui laisse encore espérer que Megadeth n'est pas tout à fait mort.
- Megadeth - United abominations (2007) ★ ★ ½
Après un mieux permettant d'atteindre l'écoutable dans The system has
failed, on continue de remonter doucement la pente avec ce nouveau
disque qui commence même de façon franchement convaincante :
Sleepwalker réussit à allier un refrain réussi à une efficacité
dans les riffs qu'on n'avait pas entendu depuis un certain temps, c'est
vraiment une bonne entrée en matière. Bon, on n'échappe quand même pas à
un solo pas ultra inspiré et des choeurs dispensables sur la fin, mais
ce renouveau sera confirmé par un Washington is next ! presque
maidenien et un Never walk alone bien pêchu, jusque là on tient
même un très bon album ! Bon, hélas, le groupe a une fois de plus du mal
à tenir sur la durée, et le reste tient au mieux du remplissage correct
(Blessed be the dead), au pire du ratage assez peu compréhensible
(Amerikhastan où Dave se contente de parler), sans compter la
reprise sans intérêt de À tout le monde avec une invitée qu'on
entend à peine. Bref, encore une fois, il faudra se contenter d'un
demi-album, mais si on le recollait avec la première moitié du
précédent, on aurait vraiment un disque sympa !
- Megadeth - Endgame (2009) ★ ★ ★
Le groupe de Mustaine continue décidément à remonter la pente tout
doucement mais sûrement, proposant enfin après plusieurs albums
intéressants mais inégaux un disque qui tient la route sur toute la
durée, tout en lorgnant une fois de plus très clairement vers les
glorieuses heures thrash du groupe. Le nouveau guitariste recruté pour
l'occasion (le lineup change en permanence depuis quelques disques) se
voit même confier une quantité de solos plus ou moins techniques, mais
bon, faut pas trop en demander non plus, ça tient plus souvent du
remplissage sans âme qu'autre chose (pour ce qui est du côté
démonstratif, l'intro instrumentale Dialectic chaos fonctionne
toutefois très correctement). Non, c'est plutôt du côté des riffs et du
tempo allant de la plupart des titres (ça s'énerve même franchement sur
un Head crusher qu'on espérait plus vraiment retrouver sur un
disque relativement récent de Megadeth) qu'il faut trouver son bonheur,
qui dure vraiment jusqu'au bout de la galette (on a un gros doute quand
la ballade The hardest part of letting go démarre sur fond de
synthés sirupeux, mais la grosse accélération en milieu de chanson
fonctionne en fait très bien). Alors bien sûr, ça ne reste "que" bon, il
manque un ou deux titres qui donnent vraiment envie d'être écoutés en
boucle (This day we fight ou Endgame sont très efficaces,
y a rien à redire, mais ça reste un peu trop bien calibré) pour que le
disque soit vraiment incontournable, mais ça reste de la bonne musique.
- Megadeth - Th1rt3en (2011) ★ ★ ★
Le temps passe et, incroyable mais vrai, Megadeth est toujours vivant et
continue d'aligner des disques au début d'une nouvelle décénnie. Mais le
père Mustaine a trouvé un nouveau jeu (pour doper les ventes ?), celui
de faire croire à chaque nouvel album qu'il va s'agir du dernier.
Peut-être aussi une façon pour lui ici de faire passer la pilule puisque
le disque est en bonne partie constituée de divers morceaux composées
quelques années (voire plus) plus tôt, et recollés là pour atteindre
péniblement le nombre de 13 chansons, concept assez indigent il faut
bien le dire (le titre de l'album...). Bref, l'a priori était
franchement négatif. Et pourtant, eh bien, malgré quelques ratés (le
Sudden death initial avec ses guitares inutilement techniques, un
Black swan qui sent vraiment le remplissage ou un Millenium of
the blind vraiment mal chanté (le père Dave est globalement en
régression de ce point de vue)), l'album s'écoute tout seul, c'est
rarement brutal mais quasiment toujours très bien fichu, avec même de
très bons titres (Public enemy n°1, Never dead ou encore
la rigolote Deadly nightshade). Même le 13 conclusif avec
son tempo assez lent et son atmosphère lourde est bien gérée. Encore un
album qui est assez loin des sommets du groupe, mais qui reste
franchement correct !
- Megadeth - Super Collider (2013) ★ ½
Ca fait un bon moment que Dave Mustaine ne semble plus vraiment savoir
ce qu'il veut faire de son groupe, tiraillé entre la volonté de refaire
du vrai metal agressif "comme au bon vieux temps" et celle de faire de
la soupe commerciale pour élargir sa base de fans. Selon les albums, on
est plus ou moins clairement d'un côté ou de l'autre. Là, après
plusieurs tentatives plus intéressantes, et malgré un Kingmaker
initial très sympa (bon, la voix trafiquée, on aurait pu s'en passer,
mais c'est pire sur d'autres pistes), on retombe très clairement dans le
rock FM gentiment mollasson (une espèce d'AC/DC aseptisé) et
interprété avec certes une compétence technique indéniable mais une
envie qui laisse à désirer (le développement instrumental de
Beginning of sorrow, à peu près le seul de l'album, ne fait
vraiment pas rêver). Ca reste la plupart du temps plus qu'écoutable
(Built of war avec ses choeurs "western" amusants, Don't turn
your back), ça part parfois dans des directions surprenantes (le
banjo country de The blackest crow, ou même le "chant" de Dave
sur fond dépressif de Dance in the rain), mais surtout, il faut
bien l'avouer, c'est oublié aussi vite qu'on ne l'a écouté et ça ne
ressemble que bien peu à ce qu'on peut raisonnablement attendre d'un
groupe dont le nom est Megadeth.
- Megadeth - Dystopia (2016) ★ ★ ★ ½
Il n'y a pas que le coup du "c'est notre dernier album" que Mustaine
dégaine de temps à autre pour doper ses ventes, il y a aussi le
changement de line-up en profondeur pour relancer la machine. Pour ce
dernier album en date du groupe, grosse arrivée avec celle de Kiko
Loureiro (ex-Angra) en deuxième guitariste. De loin, ça sent la
très mauvaise idée, je partais encore une fois avec un a priori pas
folichon. Et une fois de plus j'avais tort ! Loureiro a conservé un son
très rond et un jeu assez exubérant qui se marient en fait étonnamment
bien avec la voix monolithique adoptée par Mustaine pour ce disque (dans
le grave en permanence, les piaillements de canard sont loin). Ajoutez à
ça une ambiance assez post-apocalyptique (y a qu'à voir la pochette) et
on a un vrai renouvellement du son du groupe. Surtout, c'est accompagné
d'un net regain de forme niveau compositions (même si, soyons honnêtes,
Mustaine a toujours eu un certain talent pour ça), un petit côté
orientalisant raffraîchissant sur certains titres (notamment
Poisonous shadows), et une succession de bons morceaux sans réel
temps faible. L'enchaînement initial The Threat is
real/Dystopia est même très bon (ça va vite et il y a, comme
dans tout l'album, des solos qui passent plutôt bien). Tout ne sera pas
de ce niveau là (la fin, avec l'instrumental Conquer or die assez
anecdotique et une reprise pour terminer qui n'a pas grand intérêt, est
un peu poussive), mais la plupart des pistes sont vraiment réussies.
Manque un ou deux vrais tubes pour retrouver un album digne de la grande
époque, mais ça reste une très belle surprise.
- Megadeth - The sick, the dying... and the dead (2022) ★ ★ ★
Aux adjectifs qui ornent le titre de leur dernier album (titre qui voit
d'ailleurs le retour des points de suspension chers à Mustaine aux
débuts du groupe, une façon de signaler un retour aux sources ?), les
membres de Megadeth auraient peut-être pu ajouter "immortal". En effet,
depuis 2016 et le précédent disque du groupe (qui avait déjà été
annoncé, comme deux ou trois des précédents, comme le dernier), non
seulement le COVID est passé par là, mais Dave Mustaine est passé par la
case cancer de la gorge (insérer ici la blague douteuse de votre choix
sur le fait qu'au moins, concernant Dave, ça ne risquait pas d'avoir une
influence négative sur ses talents musicaux). Mais Dave est toujours là,
et c'est une bonne nouvelle, car à 61 ans (ce qui n'est pas si vieux
dans l'absolu), il a sûrement encore des choses à raconter, comme
semblait en tout cas le prouver un Dystopia réussi il y a six
ans. Bien sûr, on n'attend plus du groupe une révélation fondamentale,
mais un bon album solidement interprété, ça nous irait très bien. Et ça
tombe bien, puisque c'est à nouveau exactement ça qu'on retrouve ici. Il
y a forcément eu du changement du côté des camarades qui accompagnent
Dave puisque le comparse de toujours Dave Ellefson n'est plus le
bienvenu, mais les nouveaux venus assurent très professionnellement, la
voix de Mustaine n'a pas vraiment changé (c'est devenu assez monocorde
mais franchement ça passe fort bien), et surtout les compositions peu
originales mais presque toutes réussies s'enchaînent, et on passe tout
simplement un moment agréable à les écouter. Bon, je me serais
personnellement passé du featuring ridicule d'Ice-T sur Night
stalkers et d'un ou deux titres qui essayent de varier le propos
sans qu'on comprenne bien où ça veut en venir (Mission to Mars
notamment), mais la chanson-titre ou Sacrifice, tout en restant
très classique, c'est indéniablement efficace. Et les reprises en fin de
disque forment une sorte de bonus sympathique. Globalement un poil
en-dessous de Dystopia à mon sens (dont les premiers titres frappaient
plus fort) mais ça reste très correct.
- Mercyful Fate - Melissa (1983) ☆
Nouvel essai de ma part pour écouter plus en profondeur le premier
disque d'un groupe culte, qui n'a publié que deux disques au début des
années 80 (avant de se reformer une décennie plus tard) mais a marqué
notamment les précurseurs du black metal (et aussi un certain
Metallica), probablement en partie à cause de son imagerie
satanique prononcée (même si, soyons honnêtes, ça reste plus
grand-guignol qu'autre chose à l'écoute). Musicalement, difficile tout
de même de trouver ce qui est proposé dans ce Melissa révolutionnaire
quarante ans après sa sortie, et c'est même assez peu passionnant (son
moyen, riffs assez efficaces sans être spécialement mémorables, le
deuxième album du groupe, Don't break the oath, est nettement
plus réussi de ce point de vue, avec notamment un Come to the
sabbath excellent). Mais de toute façon, ça n'a qu'une importance
mineure pour moi puisque ce disque est définitivement inécoutable de mon
point de vue. La faute au "chant" de son leader King Diamond, impossible
mélange de voix normale déjà pénible et de suraigus absolument atroces
entres lesquels Diamond oscille en permanence, une véritable torture
pour les oreilles, j'ai vraiment du faire un effort assez surhumain pour
réécouter deux fois le disque intégralement (je dis pourtant
régulièrement que j'accorde assez peu d'importance au chant quand
j'écoute du metal, mais là je ne peux vraiment pas, la seule fois
précédemment où j'avais eu une réaction de rejet aussi totale était pour
Dani Filfth, un chanteur qui s'est pas mal inspiré... de King Diamond, y
a pas de mystère). Assez curieusement, le même King Diamond me semble
beaucoup plus supportable sur les disques de son projet solo (la voix
est nettement plus adaptée au style gothique qui y est pratiqué, et il
saute quand même nettement moins de façon abrupte entre voix grave et
aiguë), c'est donc plutôt de ce côté-là que je vais continuer mon
exploration de son univers.
- Meshuggah - Contradictions collapse (1991) ★
Si Meshuggah est aujourd'hui un groupe reconnu comme à la pointe de
l'innovation en termes de metal technique, on se rend compte en
remontant jusqu'à leur assez confidentiel premier album que leurs débuts
se sont fait sous grosse influence. On est au début des années 90, le
thrash est au bout de ses heures de gloire, et Metallica trône au
sommet de la planète metal. Et c'est bien à du Metallica déviant que
nous convie le groupe pour ce premier album. Au niveau vocal, la
similitude est même plus que frappante, mais c'est plutôt côté
instrumental qu'il faut aller chercher l'intérêt de l'album. Là, pour le
coup, si on a bien un fond thrash classique (avec un son assez brut pas
hyper plaisant), on a vraiment l'impression que le but de Meshuggah
était de ne garder que le côté technique un peu rebutant du style (c'est
très dense, mélodiquement à peu près nul et pas accrocheur pour deux
ronds) et de pousser le curseur encore nettement plus loin, en lui
adjoignant des jeux de rythmes syncopés permanents sur la section
rythmique, et des bribes de solos souvent surprenants (c'est parfois
limité à quelques notes qui partent dans le décor). C'est extrêmement
maîtrisé, ça a même un côté fascinant, mais il faut bien avouer qu'on
commence à s'emmerder avant la fin de la deuxième piste, et que ça
n'évolue jamais (c'est vraiment ultra uniforme, et les pistes durent
toutes de l'ordre de six minutes). Les quelques titres un peu plus aérés
(Choirs of devastation notamment) ne sont pas inintéressants,
mais je n'ai quand même que bien peu accroché sur la durée.
- Meshuggah - Destroy Erase Improve (1995) ★
Deuxième album du groupe, on s'éloigne de la copie de Metallica
niveau vocal (on tend vers une sorte de beuglement presque guttural
assez uniforme, heureusement coupé régulièrement par des interventions
chorales) mais pour le reste Meshuggah reste fidèle au style mis en
place dans son premier opus... Le riffing est toujours très technique,
basé essentiellement sur des bribes de rythmes syncopés, et surtout sans
l'ombre d'un début d'élément mélodique intéressant. Il y a certes
quelques tentatives de breaks donnant un peu plus de variété aux
structures, et même un instrumental presque atmosphérique en plein
milieu du disque, mais ça suffit à peine à le rendre audible d'une seule
traite. Qu'est-ce qu'on se fait chier quand même ! S'il n'y a pas
d'évolution rapide dans les albums suivants, je ne vais pas tarder à
laisser tomber...
- Meshuggah - Chaosphere (1998) ☆
Troisième album du groupe, on continue à évoluer niveau vocal (on a en
gros droit désormais à une espèce de hurlement très uniforme sans aucun
intérêt, sauf sur The Exquisite machinery of torture... où c'est
carrément pire avec une sorte de chant parlé vraiment moche), mais pas
vraiment du point de vue instrumental, hélas. En même temps, la pochette
et le titre du disque sont assez bien vus : c'est en effet assez
chaotique (le début de la première piste Concatenation...), et ça
prend sévèrement la tête. Toujours des riffs très syncopés pas beaux et
qui se ressemblent tous répétés en presque continu sur chacune des
pistes, et histoire de faire semblant de donner de l'intérêt à la chose,
quelques solos qui ne ressemblent à rien en guise de breaks (ça sonne
curieusement un peu jazz par moments sur ces solos). Seule
Neurotica apporte un peu plus de variété à l'album, mais c'est
largement compensé en sens inverse par le véritable foutage de gueule
que constitue la dernière piste Elastic : quelques minutes
classiques pour le groupe, puis ça tourne à l'expérimentation débile
(des notes graves saturées tenues une minute, passionnant), et enfin au
n'importe quoi sur les dernières minutes. Apparemment, renseignements
pris, cette fin est constituée des premières pistes du disque mélangées
et passées à l'envers. Ah ah, quelle bonne blague ! C'était pour voir si
ce serait encore plus moche qu'à l'endroit ? Eh bien, à la surprise
générale, oui. Ce naufrage aurait probablement du me convaincre
définitivement que Meshuggah n'est pas fait pour moi, mais en fait, même
si je vais ignorer quelques-uns des disques suivants, il y en a au moins
un qui m'a vraiment plu à la première écoute, dont je vais donc sûrement
dire quelques mots.
- Meshuggah - Catch Thirty Three (2005) ★ ★ ★ ½
Casé à peu près au milieu d'une discographie déjà globalement difficile
d'accès, ce disque est considéré comme une sorte de sommet de nébulosité
même par les amateurs du groupe. Il est vrai qu'ils ont fait assez fort
ici, mais c'est justement ça qui le rend à mon sens nettement plus
intéressant que tout ce qu'ils ont produit d'autre : près de 50 minutes
de musique enchaînées sans pause (mais pas sans temps mort), évidemment
toujours aussi pointue techniquement parlant (au point d'avoir nécessité
l'utilisation de sons de batterie pré-enregistrés), ça peut faire peur.
Mais si les premières pistes (l'album est quand même découpé en treize
tronçons de longueur très variable) ressemblent fort à ce que le groupe
avait l'habitude de produire dans ses premiers albums (et dans les
suivants aussi, en fait), une rupture se fait sentir à partir de
Mind's mirrors. Une fois qu'on a réussi à digérer le risible
passage avec voix robotisée, Meshuggah nous convie à une sorte de voyage
halluciné avec de longs passages instrumentaux souvent très clairsemés,
c'est étrange (franchement, on est ici dans de la musique expérimentale
à laquelle le son métallisé ne fournit qu'un support qui en vaut bien un
autre), on termine aux frontières du néant, mais, enfin, le groupe ne se
contente pas d'étaler vainement sa technique, il nous raconte des
choses, et c'est même assez palpitant une fois qu'on est entré dans leur
délire. Certainement pas un disque facile à appréhender, mais qui laisse
une trace indélébile sur l'auditeur et, même quand on n'est pas sûr de
l'avoir vraiment aimé, donne envie de revenir tenter l'aventure.
- Metallica - Kill'em all (1983) ★ ★ ★ ★
Entre deux disques de black metal, intéressons-nous donc à un autre
groupe particulièrement undergound... Bon, pas la peine de faire
semblant, il est impossible, près de quarante ans après sa sortie, de
juger ce premier album de Metallica sans tenir compte du phénomène
planétaire que deviendra le groupe peu de temps après. Pourtant, sur ce
premier effort, Metallica n'est pas encore vraiment Metallica : son
assez brut, chant particulièrement hargneux (et pas toujours
convaincant) de Hetfield, et quelques morceaux dans le lot qui ne
semblent pas vraiment tenir de l'esprit thrash metal (même si le terme
n'existe pas encore à l'époque). Jump in the fire et
Whiplash notamment sonnent encore 70's, même si je suis très loin
de connaître suffisamment le paysage musical de l'époque pour déceler
les influences précises. En même temps, même si le disque peut paraître
imparfait en comparaison avec les monuments qui vont suivre, il serait
plus pertinent de le comparer aux premiers disques sortis à la même
époque par Megadeth ou Slayer, qui pour le coup tiennent
du bordel total. Pas du tout de ça sur Kill'em all, c'est déjà très
construit, maîtrisé, avec des titres souvent assez développés (No
remorse, l'excellent Seek and destroy), des riffs qui
s'enchaînent parfaitement, des solos rapides mais qui ne tombent pas
dans la démonstration, tout est à sa place et les dix titres qui
constituent l'album forment déjà une suite presque ininterrompue de
classiques instantanés (quand on démarre avec Hit the lights
suivi de The Four horsemen, ça pose quand même les choses). Même
le curieux solo de basse saturée Pulling teeth trouve une place
cohérente en offrant une respiration bienvenue entre deux titres speed
et énervés. Bref, tout ça est déjà (très) bon. C'est un peu facile
aujourd'hui d'affirmer que Metallica avait déjà conscience qu'ils
allaient grimper très vite au sommet, mais en tout cas, ils avaient déjà
le talent, et surtout la ferme volonté de l'assumer.
- Metallica - Ride the lightning (1984) ★ ★ ★ ★ ★
Sorti un an après un premier album qui sentait encore bon l'enthousiasme
juvénile, le deuxième disque de Metallica démontre une évolution
stupéfiante de rapidité chez le groupe. Là où Kill'em all était
relativement facilement identifiable comme un premier jet (déjà très
maîtrisé certes), on a ici l'impression d'avoir sauté directement bon
nombre d'étapes pour retrouver un groupe au sommet de sa créativité,
maîtrisant à la perfection tous les paramètres d'un genre qu'il est
pourtant en train de contribuer à créer. Le son est beaucoup plus
brillant (et en même temps assez froid), les riffs tous plus mythiques
les uns que les autres s'enchaînent avec un naturel confondant, les
quelques mesures d'intro parfois ajoutées en début de titre sont
systématiquement géniales (les quelques notes acoustiques sur Fight
fire with fire, les cloches inoubliables de For whom the bell
tolls). Quasiment aucun titre faible sur les huit qui composent
l'album (je sais que Trapped under ice et Escape ont moins
bonne presse que les autres mais, même s'ils ne se hissent pas à la
hauteur des autres monuments, je les aime beaucoup quand même), une
première tentative de ballade de la part du groupe qui transcende
complètement le genre pour aboutir sur un chef-d'oeuvre absolu (Fade
to black, probablement mon titre préféré de l'album), et, cerise sur
le gâteau, un instrumental fabuleux pour terminer le disque en apothéose
(même si je préfère encore l'Orion de Master of puppets à
ce Call of Ktulu). Que dire de plus ? C'est l'album qui m'a grand
ouvert les portes du metal il y a quelque temps maintenant, et ça
restera probablement à jamais un de mes préférés du genre.
- Metallica - Master of Puppets (1986) ★ ★ ★ ★ ★
Deux ans après un Ride the lightning phénoménal, Metallica prend
le risque de nous proposer un frère jumeau de ce dernier, puisque leur
troisième album a une structure quasi-identique au second : huit pistes
assez développées, une première plage bien rentre-dedans précédée d'une
intro acoustique (l'énorme Battery), la chanson-titre qui arrive
juste après, une sorte de ballade en milieu d'album (même si Welcome
home a droit à une belle accélération de tempo sur la fin), et un
instrumental à la fin. Ah non, gros changement, cette fois-ci l'album se
conclura sur un titre rapide qui vient donc juste après l'instrumental
de rigueur. Ce qui est impressionnant, c'est que le risque pris de
décevoir en ne proposant qu'un clone d'un album difficilement dépassable
est payant, Master of Puppets réussissant même l'exploit de faire encore
mieux que son prédécesseur sur certains points (titres rapides plus
percutants, Orion encore plus sublime que Call of Ktulu)
en n'ayant pratiquement aucun moment faible (à l'époque où j'ai
découvert ce disque, il y a bien longtemps maintenant, j'avais
curieusement eu un peu de mal à rentrer dans la chanson titre, dont je
trouvais le riff pas assez direct, mais elle a depuis rejoint pour moi
comme pour beaucoup le catalogue des classiques incontournables).
J'adore particulièrement Disposable heroes et son refrain. Même
si je garde une très légère préférence personnelle pour Ride the
Lightning, voici encore un album monstrueux de la part des californiens.
- Metallica - ...And Justice For All (1988) ★ ★ ½
Depuis que j'ai découvert les premiers classiques de Metallica, ce
quatrième album a toujours été celui qui m'a posé problème, et je crains
que les choses ne soient pas près de changer. Mon souci principal, et je
suis loin d'être le seul à l'avoir, concerne le son très particulier de
cet opus. Après deux disques à la production assez éclatante, Metallica
a choisi de revenir pour celui-ci à quelque chose de nettement plus
brut. Mais pas brut dans le genre un peu crado de Kill'em all,
non, un son volontairement asséché, avec cette batterie très présente,
comme s'ils avaient voulu mettre mal à l'aise l'auditeur (ce qui est de
fait probablement le cas, le groupe étant en train de se remettre plus
ou moins difficilement de la mort de Cliff Burton). On pourra argumenter
qu'il y a une certaine cohérence avec le contenu assez énervé de
l'album, mais y a rien à faire, pour moi ça diminue fortement le plaisir
de l'écoute. Et pourtant le disque contient bel et bien quelques
morceaux de bravoure qui ont toute leur place parmi les classiques du
groupe : Blackened impeccablement construit en ouverture, la
chanson-titre et ses nombreuses bifurcations (même si elle ne justifie
peut-être pas totalement ses quasiment 10 minutes au compteur), un
Harvester of sorrow plus basique mais diablement efficace, ou
encore la conclusion Dyers Eve, d'une rapidité et d'une brutalité
rarement entendues chez Metallica (mais c'est bon !). Le reste, et
notamment les titres plus calmes qui souffrent vraiment trop du problème
de production, passe moins bien (To live is to die n'est vraiment
pas à la hauteur des instrumentaux précédents malgré une très belle
introduction, hommage à Burton ou pas, et même One, souvent cité
comme un des sommets du disque, ne me convainc pas vraiment avec son
opposition trop facile entre la douceur du début et la violence de la
fin). Un bilan mitigé donc, mais surtout un auditeur frustré, car on ne
pourra probablement jamais savoir quel effet aurait fait le disque
enregistré autrement. Oui, je sais, il y a des Live (mais c'est encore
autre chose), et même des bizarreries trouvables en farfouillant sur le
web (une version évidemment non officielle avec basse ré-enregistrée
par-dessus par un fan), mais le "vrai" disque, lui, restera en partie
mal-aimé pour moi.
- Metallica - Metallica (1991) ★ ★ ★ ★ ★
Plus connu sous le nom de Black Album, le cinquième disque de Metallica
va constituer un point de basculement non seulement pour le groupe, mais
pour l'ensemble de la galaxie metal en devenant l'un des disques les
plus vendus de l'histoire, tous genres musicaux confondus. Pour une
partie des fans, il marquera le début de la fin de Metallica, pour
d'autres ce sera plutôt la fin du début (je fais donc partie de ceux qui
considèrent que c'est leur dernier grand album). Il faut bien dire
qu'ils ont fait à l'époque tout ce qu'il fallait pour renforcer un
sentiment de trahison légitime des racines thash du groupe : publicité
sur tous les fronts, changement de producteur (et même de look, exit les
cheveux longs !) pour embaucher une star qui les affublera d'un son
particulièrement clinquant, et bien sûr une évolution musicale qui peut
choquer quand la dernière proposition du groupe était le Dyers
Eve concluant ...And Justice For All. C'est sûr, ce n'est
plus la même chose ici : tempi modérés (avec les deux célèbres ballades
insérées au coeur de l'album), structures simplifiées, technique
nettement revue à la baisse, et le curseur mis au maximum sur le côté
mélodique qui ceci dit a toujours fait partie des préoccupations de
Metallica, la volonté de créer une musique qui puisse plaire à un public
nettement plus large que les seuls fans de thrash acéré est évidente. Et
pour autant, je suis incapable de ne pas dire le plus grand bien de ce
disque, car il reste à mon sens, dans un genre différent, aussi
incontournable qu'un Ride the Lightning ou un Master of
Puppets. Les tubes s'enchaînent sans baisse de rythme (contrairement
à beaucoup, je ne trouve pas que l'album s'essouffle sur la fin, j'aime
énormément My friend of misery par exemple), Enter sandman
et Sad but true forment un duo d'ouverture exceptionnel, et les
ballades sont superbes (oui, j'aime Nothing else matters et je le
clame haut et fort, mais je préfère encore The Unforgiven). Un
album outrageusement commercial, ce Black Album ? Oui, totalement. Et
c'est assumé. Et c'est excellent.
- Metallica - Load (1996) ★ ★ ½
Il aura fallu cinq ans à Metallica pour se décider à sortir un
successeur au Black Album. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que ceux
qui avaient été déçus par le virage pris sur ce dernier ne risquent pas
de se réconcilier avec le groupe. À défaut d'être un album de thrash,
l'éponyme était encore un album de metal. Pour celui-ci c'est beaucoup
plus douteux, Metallica proposant un drôle de disque très rock et
surtout très roots allant puiser dans le terroir américain des riffs qui
swinguent de façon inhabituelle pour eux (sur 2*4 ou Poor
twisted me par exemple) et même par moments une ambiance plus folk
qu'énervée (la ballade Mama said). De toute façon, pour qui
cherche les pistes rapides ou brutales, c'est vite vu, il n'y en a plus
du tout. Pour un groupe qui continue à s'appeler Metallica, on peut
légitimement considérer qu'il y a tromperie sur la marchandise. Mais si
c'est bien fait et musicalement réussi, en ce qui me concerne, je n'y
vois pas spécialement d'inconvénient. Sauf que l'album est trop bancal :
déjà les lignes vocales d'Hetfield encore trop proches de ce qu'il
proposait sur les albums précédents se marient mal à ce nouveau style,
créant une sorte de déséquilibre permanent. Mais surtout le disque est
mal construit, beaucoup trop long (14 chansons pour quasiment 80
minutes) et inégal, naviguant sans grande cohérence entre de vrais
ratages (The House that Jack built et ses effets foireux, le
ridicule Hero of the day qui lorgne outrageusement vers la pop,
ou encore le pénible Ronnie) et tout de même une majorité de
titres qui tiennent la route (car, quoi qu'on en dise, Metallica sait
faire de la bonne musique), et même deux longues pistes (Bleeding
me et The Outlaw torn) à l'ambiance vraiment prenante qui
tirent l'album vers le haut. Album qui n'est donc pas du tout le ratage
infâme souvent décrit, mais une sympathique et inégale tentative de
faire vraiment autre chose, qu'on aurait envie (même s'il s'agit ici de
compositions originales) de ranger à côté du disque de reprises
Garage Inc que Metallica enregistrera un peu plus tard.
- Metallica - Reload (1997) ★
Load, s'il ne manquait pas de qualités, était indiscutablement
trop long. Et pourtant, il faut croire que ça ne suffisait pas à
Metallica, qui remet le couvert l'année suivante avec une sorte de
jumeau de l'album précédent constitué de titres qui n'avaient pas passé
le premier tour. De quoi craindre le pire ? Fuel, qui ouvre
énergiquement l'album, laisse pourtant la porte ouverte à une bonne
surprise (c'est direct et efficace, ça ne se prend pas la tête, bref ça
fonctionne). Ce ne sera en fait qu'un feu de paille, tant la suite du
disque va rapidement s'enliser, entre titres intéressants mais gâchés
par une mauvaise réalisation (sur The Memory remains, quelle idée
d'avoir invité Marianne Faithfull à coasser ridiculement...), notamment
par un Hetfield qui commence à sérieusement agacer en en faisant des
tonnes niveau chant (faut dire qu'une bonne partie des titres sont
carrément insipides), tentative minable de surfer sur les anciens succès
(The Unforgiven II n'aurait jamais du voir le jour), ballade aux
accents celtiques incongrue (Low man's lyric), ou tout simplement
chansons fatiguées et fatigantes qu'on n'a pas envie de réécouter
(l'interminable Fixxxer en conclusion). Dans le lot, je sauverais
bien Better than you et son énergie positive, peut-être
Attitude malgré un chant encore assez médiocre, mais le groupe
n'avait clairement pas le matériel pour faire un bon album...
- Metallica - St Anger (2003) ★ ★ ½
Après avoir surpris tout le monde avec Load en 1996, Lars Ulrich
l'avait promis, Metallica sortirait désormais des disques beaucoup plus
régulièrement pour que les fans "puissent suivre l'évolution artistique
du groupe". Résultat des courses, on a eu le droit à de la bouse
(Reload) puis à un disque de reprises et un show symphonique plus
que dispensable. En fait d'évolution artistique, le groupe semblait
surtout enclin à se remplir les poches sans trop se fatiguer. Et c'est
finalement après quelques nouvelles années de silence que sortira ce St
Anger par ailleurs motivé par une grosse crise au sein du groupe. Ils
ont perdu leur bassiste (mais cette fois-ci au moins il a pas fini sous
les roues du camion), et comme à chaque fois, ça produit un disque
énervé avec options radicales. De ce point de vue d'ailleurs, Metallica
a fait fort dans le genre "on va tout faire pour se faire démolir" (ce
qui n'a pas manqué, bien entendu) : titre risible, pochette à l'avenant
et surtout des options artistiques plus que douteuses, avec une
influence "nu metal" bien trop évidente (les guitares sous-accordées,
les refrains de la chanson titre ou de Shoot me again), des
lignes vocales plus que paresseuses (sur Invisible kid, j'ai
l'impression d'entendre Offspring que j'écoutais quand j'étais
ado), et, au-dessus de tout ça, Ulrich qui a troqué ses fûts contre la
batterie de cuisine de sa tata Georgette. Sans compter bien sûr que les
titres s'éternisent tous sans raison (Some kind of monster est
vraiment pas mal, mais 8 minutes 30 ça fait beaucoup) pour que le disque
atteigne les 75 minutes qui semblent être devenus la norme pour le
groupe depuis quelques années. Bref, cet album est complètement
indéfendable. Et pourtant je lui voue une sympathie assez irrationnelle,
au moins pour la première moitié du disque (ensuite, ça finit quand même
par vraiment lasser). J'aime beaucoup Frantic malgré la batterie,
j'aime encore plus le motif purement rythmique qui ouvre Dirty
window (pour le coup, on aurait presque un côté tribal renforcé par
le son si particulier), j'aime bien également les titres plus classiques
comme My World ou Sweet amber, bref je passe encore des
moments agréables avec ce disque foireux, comme si le groupe n'avait pas
réussi à totalement planquer sa capacité naturelle à composer des tubes
derrière son sabordage volontaire.
- Metallica - Death Magnetic (2008) ★ ★ ★
Cette fois, c'est promis, Metallica arrête les conneries et revient au
thrash de ses origines. D'ailleurs le groupe fait plus que multiplier
les signaux en direction de son noyau dur de fans de la première heure,
en mode "regardez, cet album on l'a fait rien que pour vous" :
changement de producteur pour revenir à un son plus agressif (peut-être
même trop d'ailleurs, ce n'est pas totalement réussi), et surtout une
structure repompée sur celle des albums mythiques du groupe, avec 10
titres dont deux ballades stratégiquement placées, un instrumental en
avant-dernière position, une dernière piste brutale, bref retour aux
classiques rassurants. On ne peut objectivement pas en vouloir aux
musiciens pour ce retour en arrière après avoir râlé à chaque fois
qu'ils proposaient autre chose mais c'est un peu voyant, et outre
l'aspect probablement commercial de la chose, une question délicate
reste en suspens : sont-ils encore capable de faire un bon album de
thrash 20 ans après ...And Justice For All ? Eh bien oui, mais
pas plus. Le disque est probablement ce qu'on pouvait en espérer de
mieux et déçoit malgré tout. C'est un copier-coller des albums des
années 80, en moins inspiré, et comme Metallica a tout fait pour, on ne
peut pas s'empêcher de jouer au jeu des comparaisons : The Day that
never comes est correcte mais n'arrive pas à la cheville d'un
Fade to black (ou même de Nothing else matters auquel elle
ressemble plus), Suicide & Redemption est un instrumental très
sympathique mais à des années-lumière d'Orion, on prend vraiment
plaisir à entendre Kirk Hammett refaire des solos mais c'est un peu
bordélique, Lars Ulrich n'a plus grand chose à raconter à la batterie,
bref à tous points de vue "c'était mieux aaaaavant". Et pourtant on ne
peut pas dire que le disque soit raté, il comporte même son lot habituel
de très bonnes chansons (The End of the line et All nightmare
long notamment), et pas vraiment de bouses, beaucoup de passages
instrumentaux réussis (avec une influence classique bienvenue par
moments), et aussi, hélas, des longueurs évitables (comme c'est
maintenant devenu la norme pour Metallica, on atteint les 75 minutes
pour seulement 10 pistes). Mais, tout "correct plus" qu'il soit (je ne
pouvais décemment pas lui mettre une note pire qu'à St Anger,
hein ?), le disque aura probablement remué le couteau dans la plaie des
fans plus qu'il ne les aura vraiment réconciliés avec leur groupe
fétiche.
- Lou Reed et Metallica - Lulu (2011) ☆
J'ai hésité avant d'inclure cet album dans mon parcours de la
discographie de Metallica : ce n'est pas vraiment du metal (enfin, assez
rarement du moins), et surtout ce n'est pas vraiment du Metallica
puisque Lou Reed prend une part importante dans cette collaboration.
Mais comme il s'agit d'une oeuvre originale enregistrée en studio, ça me
paraissait cohérent de le laisser quand même. Sur le papier, le projet a
de quoi emballer ou effrayer selon son attirance pour les associations
improbables : un sujet pour le moins ambitieux (peu d'auditeurs devaient
avoir en tête la version de Berg en écoutant le disque, mais quand
même), un rapprochement peu évident entre une icône rock vieillissante
et un mastodonte du metal presque aussi vieillissant, et au final un
machin qui n'aura convaincu ni les fans de l'un ni ceux des autres.
Peut-être fallait-il être à la fois fan de Lou Reed et de Metallica pour
vraiment apprécier, mais je ne suis pas sûr qu'il y ait beaucoup de
mélomanes dans cette catégorie.
À ce sujet d'ailleurs, quelques précisions me concernant : avant de me
lancer dans cette écoute, je ne connaissais Reed que de nom, n'ayant
jamais écouté une seconde de sa musique (oui, je sais, ma culture
musicale a de gros trous) mais ayant notamment entendu dire beaucoup de
bien de son album Berlin, pour me faire une idée, j'ai écouté ce
fameux Berlin et... j'ai détesté. Voix insupportable (le gars ne chante
d'ailleurs pas vraiment, c'est souvent à moitié parlé) qui ne peut pas
être sauvée par des arrangements très minimalistes, c'est vraiment un
style que je ne comprends pas du tout (le seul truc qui s'en approche
dans ce que je connaissais déjà, ce sont quelques Gainsbourg qu'on m'a
fait écouter il y a un certain temps et que j'apprécie tout autant). Du
coup, forcément, la composante "Lou Reed" de ce Lulu risquait de mal
passer, et de fait ça n'a pas raté. Il "chante" encore plus mal qu'il y
a quelques décennies (les rares fois où il essaye vraiment de chanter,
c'est moche et faux), et rend à lui tout seul le disque à peu près
inécoutable, d'autant plus que c'est vraiment lui le coeur du projet
(c'est plus un "Lou Reed accompagné par Metallica" qu'autre chose).
L'accompagnement par les métalleux est soit trop minimaliste pour
mériter une mention (sur l'extrêmement chiant Little dog par
exemple), soit trop répétitif pour ne pas lasser très vite (d'autant
plus que ça dure quand même une heure et demie, avec des plages
dépassant allègrement les dix minutes). Quelques bons riffs quand même
(celui bien mammouth de Frustration), mais bien trop rares et mal
exploités pour qu'il y ait vraiment quelque chose à sauver de ce ratage.
Bon, si on veut rigoler, on peut quand même aller lire les textes, ça
vaut son pesant de cacahouètes. I'm the taaaable !! Comme si le côté
poseur de l'ensemble n'était pas suffisamment prononcé...
- Metallica - Harwired... to self-destruct (2016) ★ ★ ★ ★
Les sorties de Metallica se raréfiant de façon de plus en plus
inquiétante (cinq disques lors de leur première décennie d'activité,
trois sur la suivante, et, si on oublie Lulu, seulement deux
disques de nouveautés depuis 2003), ce dernier album en date avait de
quoi provoquer l'évènement à sa sortie, surtout après un Death
Magnetic qui amorçait un retour aux sources sympathique. En fait de
retour aux sources, la chanson-titre qui ouvre l'album fait encore
mieux, c'est du Metallica speed et rentre-dedans comme on ne l'avait pas
entendu depuis quelques décennies (le titre fait à peine plus de 3
minutes !), et c'est excellent ! Mais c'est en fait un leurre, puisqu'on
ne retrouvera pas de piste très rapide avant la toute dernière,
l'excellent Spit out the bone, le reste étant plutôt axé sur du
heavy pépère (au niveau du tempo en tout cas) façon Black Album,
les ballades en moins et quelques minutes sur chaque chanson en plus.
C'est d'ailleurs à nouveau le gros défaut de cette sortie, ça traîne
encore trop souvent en longueur et le double-album proposé ne se
justifie aucunement (on reste à en gros 75 minutes de musique comme sur
les précédents albums du groupe). Et c'est dommage, car niveau musical,
c'est vraiment très bon ! Le premier CD est même à un niveau inespéré,
avec une majorité d'excellents titres (Atlas, rise ! et surtout
l'excellent Moth into flame). Franchement, même s'il n'y a
peut-être pas de tube mythique prêt à rivaliser avec les plus grandes
chansons du groupe, ça tient largement la comparaison avec l'album de
1991. Le deuxième disque, soyons honnête, est un peu plus poussif et
inégal, avec de bons titres (Here comes revenge) mais aussi
quelques idées discutables (l'intro "martienne" de Confusion) et
du remplissage moyen (ManUNkind notamment). Mais le défouloir
Spit out the bone en conclusion suffit à nous réconcilier une
fois de plus avec un groupe qui prouve qu'il est encore loin d'avoir
perdu la main, finalement.
- Metallica - 72 seasons (2023) ★ ★
La sortie d'un nouveau disque de Metallica en 2023 (soit 40 ans tout
juste après leur premier album) peut-elle encore être considérée comme
un évènement ? Médiatiquement oui, la notoriété du groupe et la rareté
de ses (nouveaux) enregistrements depuis 20 ans suffisant largement à
créer le buzz (et à provoquer des réactions délirantes dans les deux
sens de gens qui n'ont même pas pris la peine d'écouter ce qu'ils
avaient à proposer). Musicalement, c'est nettement plus discutable, mais
faisant partie de ceux qui avaient beaucoup apprécié Hardwired... to
self-destruct, j'attendais quand même de bonnes choses de ce nouveau
disque. Attentes essentiellement décues, je dois bien l'avouer. Certes
le groupe se conforme, comme dans ses deux dernières sorties, à un
thrash classique (bon, niveau tempo c'est quand même globalement très
tranquille) qui fait plus que lorgner vers les mythiques premiers
disques du groupe (les lignes vocales notamment ont régulièrement un
gros air de déjà entendu), mais en beaucoup plus délayé et moins
inspiré. Encore une fois, 77 minutes de musique (exactement autant que
leur double album précédent) pour douze titres, un peu d'élagage
n'aurait pas fait de mal (Chasing light par exemple, pas mal mais
tellement répétitive). On culmine d'ailleurs à 11 minutes, un record
pour Metallica, pour le titre final Inamorata (pas le pire mais
rien de transcendant non plus). C'est d'autant plus rageant que le seul
titre court de l'album (Lux Aeterna et ses trois minutes) est un
des meilleurs. Encore plus gênant, les compositions ne sont jamais
ratées, mais jamais emballantes non plus, on atteint le très correct sur
la chanson titre ou sur l'étonnante Crown of barbed wire, à
l'ambiance particulièrement recherchée, mais on reste la plupart du
temps dans du mid-tempo appliqué qui s'écoute bien sans être le moins du
monde mémorable. Et pour un groupe de cette trempe, on ne peut
évidemment pas s'en contenter.
- Morbid Angel - Altars of madness (1989) ★ ★ ★
Fin des années 80, le thrash pourtant pas si vieux est déjà en train de
muter sévèrement, et plusieurs groupes posent les fondations de ce qui
va rapidement devenir le death puis le black metal. Morbid Angel en fait
partie, et ce premier album (précédé d'une sorte de démo qui a été
republiée par leur label par la suite) est un classique des débuts du
death technique. Ce qui frappe à l'écoute du disque, c'est justement
qu'on n'a pas du tout l'impression d'entendre un groupe en train de
tâtonner pour créer un nouveau style, mais on est au contraire en
présence de musiciens qui semblent maîtriser totalement ce qu'ils font,
tant au niveau de la technique (les solos enchaînent les notes dans
l'aigu de façon impressionnante) que du son produit (très propre
d'ailleurs pour du death de plus de 30 ans d'âge, même le growl du
chanteur David Vincent (sérieusement on a vraiment le droit de s'appeler
comme ça et de devenir chanteur de metal extrême ?) est très posé et
compréhensible). C'est carré, d'une solidité remarquable, avec bien peu
de points faibles (Bleed for the devil et ses blasts fatiguants
forment le point noir de l'album mais c'est la piste la plus courte).
Pourquoi seulement trois étoiles alors ? Bah simplement parce que c'est
un genre qui continue de m'attirer modérément (cf mon avis mesuré sur la
discographie de Death notamment), ça manque trop d'accroche
mélodique et de fantaisie pour que je fasse plus qu'apprécier la
démonstration sans sauter au plafond.
- Morbid Angel - Blessed are the sick (1991) ★ ★
Une bonne chose avec la discographie de Morbid Angel c'est qu'il est
facile de s'y repérer puisque l'initiale des titres suit l'ordre
alphabétique (un délire qui en vaut bien un autre, ici on est donc à
l'album B, le deuxième). Je reprochais au premier album de manquer de
fantaisie, on ne peut pas nier que quelques éléments inattendus ont été
introduits cette fois-ci, notamment via la présence de pistes "non
métalliques" qui fonctionnent plutôt bien (notamment l'inclassable
Doomsday celebration et son atmosphère de film d'horreur cheap,
mais la guitare acoustique de Desolate ways est sympa aussi, par
contre l'intro bruitiste est à jeter à la poubelle). Au niveau des vrais
titres par contre, pas d'évolution, c'est toujours bien construit et
exécuté mais je les trouve peu passionnantes, et même globalement plus
chiants que ceux d'Altars of madness (une fois l'effet nouveauté
passé, les solos qui se ressemblent tous et le manque d'intérêt des
riffs est vite lassant). En exagérant un peu, je ne me réveille qu'avec
The Ancient ones qui pour le coup propose des motifs
intéressants, mais c'est la dernière piste de l'album (ah non, y a une
drôle de conclusion au piano derrière). L'album lui-même est d'ailleurs
assez condensé (à peine 40 minutes), ce qui est préférable puisque,
combiné aux interludes divertissants, ça évite de tomber réellement dans
l'ennui. Mais je ne prends toujours qu'un plaisir modéré à l'écoute de
l'ensemble.
- Morbid Angel - Covenant (1993) ★ ★ ½
En fait, ça doit être assez facile d'être un groupe de death metal :
tous les deux ans, on sort de sa poche une dizaine de riffs aléatoires
qu'on développe toujours de la même façon (des guitares bien bien graves
et un chanteur pareil, surtout, c'est quand même ça la base), on ajoute
des soli techniques un peu n'importe où, on en fait un CD et hop le tour
est joué. Je suis évidemment un peu taquin, mais on a vraiment
l'impression à écouter ce troisième disque de Morbid Angel d'entendre
toujours exactement le même type de morceau (les interludes de l'album
précédent ont disparu, un seul instrumental très bizarre à noter), à
l'exception d'Angel of disease apparemment adapté d'une chanson
plus ancienne. Ce dernier est d'ailleurs l'un des titres les plus
réussis du disque, avec Rapture et Lion's den qui
proposent des motifs à mon oreille nettement plus inspirés que la
moyenne. Le tout s'écoute sans déplaisir, mais bon, on est quand même
vraiment loin d'un album mémorable, et si ça continue à être aussi
répétitif, je vais pas tarder à lâcher le groupe en cours de
discographie.
- Morbid Angel : Domination (1995) ★ ★ ★
Je continue bon an mal an mon aventure avec Morbid Angel pour l'instant.
Ce quatrième album marque une évolution dans la musique du groupe (ouf),
qui est plus variée que dans leurs trois propositions précédentes. Les
fans de la première heure crient donc logiquement à un début de
trahison, mais ils seront contents de voir que la base de la plupart des
chansons reste quand même fidèle au style du groupe (le fond de blast de
batterie permanent, qu'est-ce que c'est laid). Les innovations, elles,
vont du franchement grotesque (les traficotages de voix sur Where the
slime live ou Eyes to see, ears to hear) à l'intriguant (le
prélude cristallin de Caesar's palace, l'interlude aux claviers
Dreaming). On note aussi sur Inquisition un motif qui sent
bon son Gojira (rien de surprenant là-dedans puisque le groupe
français a souvent cité Morbid Angel dans ses inspirations), mais tout
cela ne pèserait pas bien lourd dans la balance s'il n'y avait la
dernière piste Hatework, sorte de marche funèbre pour cérémonie
occulte avec carillons qui fait d'un coup basculer un album médiocre
dans le génie absolu. Rien que pour ça, ce disque vaut nettement mieux
pour moi que les trois qui le précèdent.
- Morbid Angel - Formulas fatal to the flesh (1998) ★ ★
Depuis l'album précédent, Morbid Angel a publié un live (d'où le saut de
la lettre E en ce qui me concerne) et surtout changé de chanteur. Le
nouveau venu nous gratifie d'un chant guttural bien bourrin, efficace
mais avec un charisme nettement moindre que son prédécesseur. Mais bon,
c'est assez accessoire. Pour le reste, le groupe ne semble pas
totalement savoir sur quel pied danser, proposant sur la plupart des
pistes un death toujours aussi standard (même si on retrouve de plus en
plus de glissandos qui me font immanquablement penser une fois de plus à
Gojira) mais nettement plus direct que sur ses disques précédents
(Chambers of dis, par exemple, c'est extrêmement primaire), pas
désagréable mais rien de très mémorable, et une bonne dose d'interludes
avec claviers plus ou moins bizarres et plus ou moins inspirés (j'aime
bien Disturbance in the great slumber). L'album se termine quand
même avec pas moins de trois pistes qui n'a pas grand rapport avec la
choucroute (Hymnos rituales de guerra et ses percus tribales...).
Le seul titre qui fasse preuve d'une réelle ambition avec presque dix
minutes au compter, c'est Invocation of the continual one, et
c'est vraiment pas mal. Mais ça ne suffit pas vraiment à faire un album.
- Morbid Angel - Gateways to annihilation (2000) ★ ★ ½
Les albums de Morbid Angel se suivent et mes appréciations se
ressemblent. Pourtant, on ne peut pas nier une évolution depuis leurs
débuts, manifeste notamment au niveau du tempo moyen des compositions.
Il est ici devenu presque lent sur une bonne partie des chansons, qui
cultivent avec soin des ambiances lourdes et mortifères, jusqu'à la
caricature (He who sleeps). Ambiances amplifiés par les sons
insectoïdes (on a d'ailleurs droit à une intro assez spéciale dans le
genre), mais aussi sur la fin de l'album par une utilisation fréquente
d'une sorte de vibrato pour créer des sons ondoyants assez glauques.
Bon, pourquoi pas, mais comme d'habitude, si je trouve l'ensemble tout à
fait écoutable (et même un peu mieux pour Ageless, still I am ou
Opening of the gates), ça ne pas plus loin. En fait, depuis
Domination, j'attends une nouvelle perle à la hauteur de
Hatework, mais rien de comparable pour l'instant.
- Morbid Angel - Heretic (2003) ★
À l'écoute de cet album, on peut légitimement se poser la question
suivante, a priori assez incongrue : Morbid Angel en aurait-il marre de
sa propre musique ? En effet, après une première partie d'album qui
aligne les titres peu inspirés, manquant cruellement d'allant (le plus
convaincant est probablement God of our divinity, mais pas de
pot, il utilise des éléments mélodiques tellement proches du Opening
of the gates de leur album précédent que ça ressemble
douloureusement à un auto-plagiat), le groupe se saborde assez
joyeusement en alignant une interminable série de pistes complètement à
côté de la plaque (apparemment, une partie d'entre elles étaient des
sortes de bonus sur le disque d'origine, mais même avec le contenu
"officiel" il y en a déjà bien trop) : mélodie mélancolique de
violoncelle synthétique (Memories of the past), démonstration de
virtuosité du batteur, interludes au clavier ultra cheap et bien trop
longs (Place of many deaths), difficile de comprendre exactement
ce qu'a voulu faire le groupe en parasitant autant son propos. Déjà que
ledit propos était bien maigrelet, ça ne laisse pas grand chose à sauver
sur ce disque.
- Morbid Angel - Illud Divinum Insanus (2011) ★ ★
Huit ans après un Heretic raté, Morbid Angel revient avec un
album... risible ! Oui, au sens premier du terme, on se marre de bon
coeur en écoutant certaines pistes de cette nouvelle proposition.
Pourtant, à l'issue donc d'une longue période d'incertitudes ponctuée
d'un remaniement sévère du line-up, le groupe avait retrouvé son
chanteur historique David Vincent et aurait logiquement pu jouer la
carte du retour aux sources histoire de rassurer les fans. Pas du tout,
à la place, ils ont dégainé le "virage inattendu" généralement nettement
plus propice à faire fuir lesdits fans (peut-être qu'ils étaient
collants, après tout). Et on a donc droit à une bonne moitié de pistes
où le death old school n'est qu'un lointain arrière fond, noyé dans les
boîtes à rythmes techno (mais oui) ou un esprit nettement plus neo-metal
qu'à l'accoutumée. Il y a là-dedans de la bouse vraiment sévère,
notamment le délire impensable de la dernière piste ou le sous-Rammstein
de douzième zone de Destructos vs. the Earth/Attack (certes, le
titre ne laissait guère envisager un chef-d'oeuvre). J'avoue par contre
aimer assez le style bête et frontal d'un I Am morbid ou d'un
Radikult, même si ça ne conserve presque rien de l'identité
habituelle du groupe De toute façon, même sur les titres death (il en
reste quand même quelques-uns), il y a une évolution nette vers quelque
chose de plus direct et mélodique (avec même quelques choeurs qui font
du "Wohoho" par moments), qui là aussi n'est pas pour me déplaire
(Blades for Baal, c'est pas mal). Du coup, je préfère le risible
au raté, mais malgré une certaine sympathie pour ce canard boiteux, je
ne peux pas non plus aller jusqu'à attribuer une vraie bonne note à un
disque qui contient des pistes pour lesquels l'adjectif minable
constituerait un jugement extrêmement bienveillant.
- Morbid Angel - Kingdoms disdained (2017) ★ ½
Après avoir été la risée du death metal avec son précédent disque
studio, Morbid Angel a décidé de la jouer profil bas, choisissant un
live pour la lettre J et attendant six nouvelles années pour proposer du
contenu réellement neuf. Et c'est peu dire qu'ils ont embrayé la marche
arrière : nouveau changement de chanteur (pour reprendre le précédent
!), mais surtout un disque ultra aseptisé, sans le moindre interlude
bizarroïde ou la moindre expérimentation inattendue. On a droit à un
alignement bien proprounet de onze pistes très semblables, avec
rythmique marteau-pilon, son bien gras, à peine quelques solos
bordéliques pour faire remplissage, et surtout pas un riff un tant soit
peu imaginatif. Bref, du Morbid tout craché mais sans une once de
fantaisie, personnellement j'écoute ça d'une oreille distraite en
m'ennuyant vaguement, puis je passe à autre chose. Il faudra vraiment
qu'ils trouvent une nouvelle accroche s'ils veulent que je me penche sur
leurs éventuels futurs méfaits.
- Ne Obliviscaris - Portal of I (2011) ★ ★
Nouvelle tentative de ma part dans le metal "différent" avec ce groupe
australien qui a sorti trois albums dans les années 2010, très remarqués
dans la petite sphère du metal prog extrême. Et les deux qualificatifs
progressif et extrême sont encore très réducteurs pour qualifier la
musique du groupe, qui est vraiment un cocktail assez invraisemblable de
styles et d'influences diverses. Il en est pourtant une qui dépasse d'un
tête à l'écoute du début de l'album, celle d'Opeth (les premiers
albums du groupe, avec chant guttural), d'ailleurs totalement
revendiquée puisqu'on a droit à une citation à la batterie de la
monstrueuse coda de Deliverance dans le développement de And
Plague flowers the kaleidoscope (oui, les titres des chansons sont
carrément abscons), et auquel on pense forcément sur les premières
mesures du Tapestry of the starless abstract qui ouvre le disque.
Une sorte de black sophistiqué à forte tendance progressive donc
(seulement sept pistes pour 71 minutes de musique, des développements
instrumentaux et ruptures de tons dans tous les sens, la construction
est toujours lisible mais rarement linéaire), mais qui aurait eu la
curieuse idée d'ajouter à son instrumentarium un violon et une guitare.
La guitare, vous allez me dire que c'est plutôt normal, mais en fait
non, puisqu'on a droit très régulièrement à des intermèdes acoustiques
influencés par le flamenco si j'en crois mes sources (je n'y connais
rien en flamenco, mais de fait on navigue bien loin du metal
traditionnel). Bon, comme je le dis souvent dans ce genre de cas,
pourquoi pas, mais j'avoue avoir du mal à saisir le but et la cohérence
de tout ça, et notamment des nombreuses parties calmes avec duo
violon/guitare acoustique qui s'éternisent souvent. Même chose pour le
mélange de voix extrême et claire, qui ne me semble pas apporter
énormément. Curieusement, les passages qui me plaisent le plus sont les
plus extrêmes, malgré la batterie très dense. L'ensemble est clairement
très travaillé et toujours intéressant, mais je ne peux pas dire que
j'accroche énormément (au premier abord, je trouvais même ça vraiment
pas bon, mais je m'y suis fait), je l'écoute plus avec curiosité que
réel enthousiasme.
- Ne Obliviscaris - Citadel (2014) ★
Quoique plus ramassé que le premier (moins de 50 minutes, et seulement
trois titres, dont deux découpés en morceaux, en fait un gros bloc
central avec une intro et/ou une conclusion indépendantes), ce deuxième
album du groupe australien est dans la droite lignée de Portal of
I. Dans la mesure où j'étais plutôt resté à côté du premier opus,
pas de grosse surprise dans le fait que je sois encore très mitigé sur
celui-ci. Il faut dire que la volonté de proposer autre chose via des
mélanges surprenants n'est pas loin ici de tourner à la démonstration
rhétorique un peu agaçante : le triptyque Painters of the tempest
est ainsi constitué d'une introduction qui démarre très joliment avec un
beau motif obsédant aux pianos et d'étranges frottements orchestraux,
mais qui est vite gâché par l'intrusion d'un violon hyper strident (on
se croirait plus dans une oeuvre de musique contemporaine que dans un
disque estampillé metal), d'un énorme bloc central de plus de 16 minutes
qui part dans tous les sens avec une majorité d'épisodes aux ambiances
feutrées, mais surtout bien peu de moments marquants, et une conclusion
"guitare sèche + violon en mode flamenco" qui sent le déjà vu. En plus
de ne pas être passionnant, tout ça pose définitivement la question de
savoir où le groupe veut nous mener. Mais, comme pour nous rappeler sa
base metal extrême, il enchaîne avec un Pyrrhic beaucoup plus
démonstratif, même si au final assez anecdotique (et on n'échappe pas
ici non plus à un passage très expérimental en cours de chanson, assez
foiré). Le meilleur du disque, et de loin, provient pour moi du
Devour me, Colossus qui le conclut, avec de vrais bons riffs, une
basse très audible et fort sympathique et... ah merde, une outro en mode
violon grinçant qui gâche tout une nouvelle fois. Bon ben globalement,
je n'ai vraiment pas grand chose de positif à dire, et pourtant la
sincérité des musiciens ne fait aucun doute, ils sont manifestement très
investis dans ce qu'ils proposent (et très compétents par ailleurs).
Simplement, ça ne me touche vraiment pas suffisamment.
- Ne Obliviscaris - Urn (2017) ★
Je n'aurai pas grand chose de nouveau à dire sur ce troisième (et
dernier) album du groupe australien, puisqu'on reste dans les mêmes
sphères que les deux précédents, et que ça me parle toujours aussi peu
bien qu'il s'agisse manifestement d'une musique très réfléchie (ça me
fait un peu le même effet qu'à peu près tous les albums de Dream
Theater, tiens, bien fichu mais je n'accroche pas). On commence
quand même à sentir venir d'assez loin les procédés qui sont toujours un
peu les mêmes (notamment les passages avec guitare et violon), mais ce
troisième essai a au moins le mérite de proposer un violon moins
grinçant que le précédent, et même de réussir quelques moments que je
peux raisonnablement qualifier de beaux (l'interlude Ascent of
burning moths, le début de la dernière piste As Embers dance in
our eyes). Mais comme le reste du temps je m'emmerde franchement, ma
note restera au même niveau que pour Citadel. Notons quand même
un effort particulier au niveau des titres, And within the void we
are breathless, ça se la pète pas qu'un peu quand même non
(personnellement, ça m'agace plus qu'autre chose...) ? Allez, au moins,
le parcours de cette courte discographie aura été rapide.
- Nightwish - Angels fall first (1997) ★ ★
Autant prévenir tout de suite, concernant Nightwish, je risque de ne pas
être très objectif, car le groupe a été ma principale porte d'entrée
dans le monde du metal dans la mesure où ses premiers albums faisaient
partie des musiques les plus diffusées dans la mythique K-Fêt de l'ENS
quand j'y était étudiant (ça devait passer presque aussi souvent que
Renaud ou les Fatals Picards, c'est dire !). Qui plus est, j'étais une
cible idéale pour ce groupe qui fût l'un des premiers à introduire dans
le metal un élément très mélodique "classicisant" et surtout une
chanteuse "lyrique" (pas besoin ici de détailler pourquoi j'ai mis des
guillemets, laissons le metalleux de base continuer à croire qu'à
l'opéra tout le monde chante comme Tarja Turunen) qui lancera la mode du
metal à chanteuse. Près de 20 ans ont passé, et j'aime toujours autant
Nightwish, mais je n'avais jamais écouté leur tout premier album, qui
n'en est d'ailleurs pas vraiment un puisqu'il s'agit en fait d'une démo
commercialisée à l'arrache. Autant le dire tout de suite, ça s'entend :
compositions pas toujours bien construites, grande hétérogénéité, et les
moments qui annoncent déjà les succès futurs sont difficiles à juger
pour leurs qualités propres dans la mesure où certaines lignes
mélodiques semblent avoir carrément été réutilisées plus tard (le
refrain de Tutankhamen par exemple). Pourtant, il y a déjà
indiscutablement de belles réussites, notamment le Elvenpath
introductif (qu'on croirait vraiment déplacé d'un album ultérieur !) ou
la chanson-titre, sorte de ballade où la flûte joue un rôle sympathique.
Quasiment que des titres lents par contre, et ça se termine sur une
espèce de suite en quatre parties aux influences folklorisantes qui a de
quoi laisser franchement circonspect (dans la deuxième partie, les
claviers kitschouilles font horriblement penser à du Jean-Michel
Jarre...). Mais surtout, il y a quand même un énorme défaut à ce premier
essai qui suffit à le plomber irrémédiablement : le compositeur Tuomas
Holopainen chante sur quelques pistes, et c'est atroce (mou, moche et
faux, la totale). Heureusement, ce sera la dernière fois qu'il le fera
sur les disques de son groupe...
- Nightwish - Oceanborn (1998) ★ ★ ★ ★ ★
J'avais prévenu, concernant Nightwish, je ne serai pas très objectif. Ce
deuxième album est une sorte d'album doudou pour moi, la note maximale
est quasi obligatoire malgré les défauts plus qu'évidents à la réécoute.
Mais commençons par les bons points : après un premier disque hésitant,
le groupe a effectué des progrès fulgurants en un an, et la recette est
désormais parfaitement au point et brillamment exécutée. Synthés
virevoltants, tempi allants, mélodies accrocheuses à défaut d'être
subtiles, et bien sûr la voix inimitable de Tarja pour emmener le tout,
si on aime le genre, c'est irrésistible, et on le sait dès les premiers
accords du tubesque Stargazers (rien que pour cette piste, je
peux mettre l'album en boucle). Alors bien sûr, on est parfois (même
pour moi !) franchement loin dans le mauvais goût, que ce soit dans les
influences orientalisantes dispensables, les pistes plus calmes qui
tombent dans un mielleux vraiment écoeurant (Swanheart), ou les
"hey" franchement ridicules qui ponctuent le sautillant instrumental
Moondance, mais c'est pas grave, ça fait partie du show et on en
redemande quand même. Même le fait que l'"orchestre" (car il y en a des
instruments convoqués, de la harpe au clavecin en passant par les
flûtes, au point que les guitares paraissent parfois presque
décoratives) soit matérialisé par des claviers qui sonnent franchement
kitsch parait naturel et bienvenu dans un album de Nightwish. Un
incontournable du genre !
- Nightwish - Wishmaster (2000) ★ ★ ★ ★ ★
Après l'explosion médiatique du groupe à la sortie d'Oceanborn,
l'attente était forcément très forte concernant leur disque suivant.
Allaient-ils réussir à se renouveler, ou faire un petit frère forcément
moins inspiré à leur album référence ? Eh bien, en fait, ni l'un ni
l'autre. Le renouvellement, il est extrêmement minime, Holopainen
continuant à composer dans le même style ultra mélodique et alternant
épique et mielleux, allant même jusqu'à renforcer encore les points
forts de l'album précédent : les quelques pistes où une voix masculine
intervenait sur Oceanborn ont ici disparu (on entend juste un gars
parler sur The Kinslayer et c'est tout), et les tempi sont
quasiment tout le temps trépidants. D'ailleurs, le titre d'ouverture
She is my sin est structurellement un copier-coller du
Stargazers qui ouvrait le disque précédent. Mais là où c'est très
fort, c'est que l'album n'a absolument pas à rougir face à son
prédécesseur, réussissant même l'exploit d'être probablement encore plus
réussi, enchaînant les tubes irrésistibles quasiment sans interruption
(si je devais en sacrifier un, ce serait probablement Dead boy's
poem et ses passages parlés), avec des sommets qui en ce qui me
concerne fonctionnent toujours aussi bien à la centième écoute (She
is my sin, la mélodie inoubliable de Come cover me,
l'incontournable chanson titre, les sonorités aquatiques de Deep
silent complete ou le clavecin trépidant de Fantasmic). Bien
sûr, les claviers sont toujours kitsch (même s'ils laissent plus de
place aux guitares que sur l'opus précédent) et la musique proposée peut
être qualifiée de simpliste, mais quelle importance quand ça emporte
tout sur son passage ?
- Nightwish - Century child (2002) ★ ½
Après deux monumentales tueries, c'est le début des changements pour
Nightwish. Pour l'instant, il ne s'agit "que" du bassiste, mais l'album
apporte quand même son lot de nouveautés nettement audibles : un son
beaucoup plus agressif et métallique (les guitares sont accordées plus
bas, et ça s'entend vraiment, comme si le groupe voulait se défaire du
côté très brillant un peu kitsch qui le caractérisait jusque-là), un
chant plus posé chez Tarja (les envolées lyriques se font rares), et
surtout le retour de la voix masculine, puisque le nouveau bassiste
donne de la voix sur plusieurs titres, mais pas très bien hélas (sur le
violent Slaying the dreamer, c'est même franchement moche), sauf
sur la reprise de The Phantom of the opera où le duo fonctionne
vraiment bien. Ce serait déjà une raison suffisante pour moi pour mettre
le disque un bon cran en-dessous de ses prédécesseurs, mais ce n'est pas
tout : l'inspiration au niveau des compositions en recul, on cherche en
vain les tubes irrésistibles de Wishmaster, et même simplement
les chansons qui déménagent (le tempo a globalement nettement ralenti).
De bons moments quand même avec un début d'album réussi (Bless the
child fonctionne bien, End of all hope est le seul titre qui
rappelle vraiment le style nightwishien classique), mais aussi de vrais
ratages (la ballade Forever yours qui a d'horribles relents de
My heart will go on...) et une longue Beauty of the beast
conclusive qui s'étale sans que la sauce ne prenne réellement. C'est
vraiment trop peu, l'album est souvent considéré comme le vilain petit
canard de l'époque Tarja, et il faut bien l'avouer, c'est mérité.
- Nightwish - Once (2003) ★ ★ ★ ★ ½
Après un album de transition peu convaincant, Nightwish est de retour en
pleine possession de ses moyens, et même peut-être un peu plus ! En
effet, si on retrouve le son plus métallique des guitares et le chant du
bassiste déjà présents sur Century Child (ceci dit, le chant
masculin est nettement mieux intégré ici !), on a surtout droit cette
fois à un orchestre symphonique tonitruant (il y avait déjà un orchestre
sur l'album précédent, mais beaucoup moins présent) pour un feu
d'artifice qui sent bon le carton-pâte hollywoodien. Ceux qui sont
allergiques à la guimauve s'enfuiront après les premières notes d'un
Dark chest of wonders qui met choeurs et orchestre très en avant,
tout en retrouvant le tempo rapide et les mélodies irrésistibles qui
rendent Nightwish incontournable pour les amateurs. Clairement, j'en
suis ! Même l'inattendue piste suivante, Wish I had an angel,
avec sa rythmique à la Rammstein et son mélange réussi entre voix
masculine et féminine, est une vraie tuerie. Ensuite, le côté musique de
film devient franchement assumé, Tuomas Holopainen n'a jamais caché son
admiration pour Hans Zimmer et compagnie (heureusement, il compose un
peu mieux) mais c'est le premier album où ça s'entend aussi clairement,
notamment dans un Ghost love score qui ne dépareillerait pas en
BO d'un Pirates des caraïbes. On a aussi droit à un titre "indianisant"
sur Creek Mary's blood, à mon goût un peu moins convaincante, et
à des mélismes orientalisants ultra clichés sur The Siren
(j'avoue que ça j'aime plutôt). Toujours à la frontière extrême du
mauvais goût, le groupe réussit à remonter brillamment la pente avec cet
album enthousiasmant, même s'il est un peu trop décousu et a un peu trop
de moments plus faibles (curieusement, les chansons plus metal comme
Dead gardens ou Romanticide sont un peu plates, par contre
Planet hell et ses choeurs est absolument monstrueux) pour être
tout à fait au niveau des premiers chefs-d'oeuvre du groupe.
- Nightwish - Dark Passion Play (2007) ★ ★ ★
Après le déchaînement pyrotechnique de Once, gros psychodrame
chez Nightwish qui s'est séparé avec fracas de son emblématique
chanteuse Tarja Turunen. Faut-il craindre le pire du premier album après
cette rupture ? Très honnêtement, au premier abord, la nouvelle
chanteuse choisie, Anette Olzon, ne convainc pas franchement : jolie
voix certes, mais qui est à mille lieux de la profondeur que Tarja
pouvait apporter aux compos du groupe (on l'imagine très mal tenir la
route sur un album comme Wishmaster), et qui pousse un peu plus
le groupe sur la pente très glissante menant à une sorte de pop-metal à
minette qui a essaimé ... suite au succès des premiers albums de
Nightwish justement ! Et de fait, on ne peut pas nier que ce disque
tombe un peu trop souvent dans la facilité, les singles Amaranth
et Eva ou le peu inspiré For the heart I once had sonnent
vraiment cheap avec cette chanteuse (pas sûr que c'eût été beaucoup
mieux avec une autre ceci dit). Mais rien de catastrophique malgré tout,
la grande partie de l'album (bien long, on est à 75 minutes de musique)
reprenant avec une certaine efficacité les mêmes recettes que le
précédent : orchestre ultra présent, jusqu'à ce qu'on se demande par
moments où sont passées les guitares, grande fresque cinématographique
(The Poet and the pendulum, en ouverture de l'album, qui frise le
mauvais goût sur les passages choeurs+violoncelles bien mielleux, mais
est quand même bien entraînant), quelques tentatives pour renouveler le
style du groupe (Master passion greed très orientée metal
agressif, The Islander ballade acoustique aux accents
folkloriques), et une inspiration mélodique qui suffit à faire passer le
temps très agréablement (7 days to the wolves fonctionne très
bien par exemple). Attention tout de même à ne pas trop abuser des idées
douteuses (la fin du Meadows of heaven qui clôt le disque est,
euh, spéciale) et à retrouver une qualité plus constante si le groupe ne
veut pas tomber dans l'auto-caricature la prochaine fois.
- Nightwish - Imaginaerum (2011) ★ ★ ★ ½
Quelque part, il fallait s'y attendre : à force de composer une musique
qui se rapprochait de plus en plus d'une bando originale de film
imaginaire, les finlandais de Nightwish ont franchi le pas et créé en
parallèle un album et un film. Si j'ai bien compris, l'album n'est pas
exactement la BO du film (dont je n'ai fait que regarder quelques
extraits par curiosité, ça n'a pas l'air extraordinaire), mais ça s'en
rapproche quand même, on a même droit à un deuxième CD reprenant toutes
les pistes en mode instrumental, parfait pour une musique de fond
agréable. Au niveau du style, on pouvait s'attendre à retrouver du "Hans
Zimmer bis", mais c'est un poil plus compliqué que ça, puisque Tuomas
Holopainen, qui est un copieur manifestement très doué, nous pond
également du Elfman (l'introduction Taikatalvi et une bonne
partie de Scaretale) et du Morricone (sur Turn loose),
avec à chaque fois un talent assez bluffant (j'ai vraiment vérifié s'ils
n'avaient pas invité Danny Elfman à leur écrire le titre d'ouverture !).
On a aussi droit à quelques titres beaucoup plus classiquement
nightwishiens avec des refrains un peu faciles mais rudement efficaces
(Story time, Ghost river, le très épique Last ride of
the day), mais (hélas) également à du moins inspiré qui ne survit
que grâce à ses effets orchestraux et se rapproche dangereusement de la
mauvaise chanson Disney (The Crow, the owl and the dove), et à
des tentatives de renouvellement pas forcément de mon goût (la très
jazzy Slow, love, slow). Ah, et puis la récitation de poèmes
interminable de Song of myself plombe complètement le titre,
heureusement suivi d'une piste-titre qui récapitule le tout à
l'orchestre (ça reprend juste les principaux, en soi ça n'a rien de
transcendant). Au final, un disque qui s'écoute tout seul, même si on
oublierait facilement qu'on est censés être en train d'écouter un album
composé pour un groupe de metal, les guitares jouant à peine plus que le
rôle d'un instrument de l'orchestre comme un autre. Un bon point quand
même, la chanteuse s'intègre très bien dans ce type de musique...
- Nightwish - Endless forms most beautiful (2016) ★ ★ ½
Quelques années ont passé depuis l'album précédent, et Nightwish a de
nouveau bien évolué, avec notamment un nouveau changement de chanteuse
(la deuxième n'aura donc duré que deux albums), mais aussi le
recrutement en tant que membre permanent d'un joueur de flûtes, ce qui
pousse le groupe à se diriger un peu plus vers des titres d'inspiration
folklorique qui ne sont pas vraiment parmi les plus inspirés du disque
(My Walden, Edema ruh). D'autant plus dommage que la
nouvelle venue a un chant nettement puis puissant que la précédente et
aurait bien mérité un ou deux titres qui lui permettent d'envoyer un peu
plus, là elle est vraiment sous-exploitée dans la mesure où les autres
pistes continuent à miser énormément sur les effets orchestraux et les
mélodies un peu faciles. Pourtant, le Shudder before the
beautiful initial, bien épique, laissait présager autre chose que le
recyclage assez paresseux auquel on a droit la majorité du temps. Rien
de très mauvais non plus, mais on a vraiment l'impression que Nightwish
peine à se renouveler, et que la qualité est quand même sur la pente
descendante. Il n'y avait en tout pas vraiment de quoi remplir le CD
jusqu'à 78 minutes, en infligeant une piste finale de 24 minutes qui
cumule les maladresses : longue intro au piano très répétitive, passages
dans une espèce de parlé chanté très spécial, même une citation de Bach
complètement incongrue, et surtout les dernières minutes qui achèvent le
disque sur un discours édifiant pseudo-écolo franchement lourdingue.
Bref, ça reste correct, mais on s'éloigne de plus en plus des bons
albums du groupe.
- Nightwish : Human :||: Nature (2020) ★
Holopainen nous avait fait le coup de la BO de film avec
Imaginaerum avant de revenir à un album plus classique, il n'est
pas très surprenant qu'il se livre à nouveau à des expériences bizarres
et s'éloignant beaucoup du metal sur cette dernière livraison. Ici, on a
carrément un double album (ça y est, on a dépassé les 80 minutes de
musique) dont la seconde moitié n'est rien d'autre qu'une espèce de
longue ode à la nature (oui, l'écologie bon teint prend de plus en plus
de place dans les thématiques du groupe) purement symphonique. Eh oui,
carrément, plus l'ombre d'une guitare, et à peine quelques "oh oh oh" de
la chanteuse, au point qu'on se demande franchement ce que ça fout
publié sous l'étiquette Nightwish. Sans surprise pas ailleurs, ce n'est
pas une idée géniale : alternance de longs passages contemplatifs sans
intérêt et de quelques moments plus animés largement pompés sur Hans
Zimmer (pomper un spécialiste du plagiat, c'est un peu douloureux quand
même) en moins bien (on n'a pas l'accroche qu'il y avait quand le groupe
dans son ensemble faisait du Zimmer avec guitares et chant), ça s'écoute
d'une oreille distraite mais n'importe quelle BO de film hollywoodien
récent pas trop bâclée est aussi intéressante.
Reste donc à voir ce que donnent les 40 premières minutes plus
"normales" de l'album. Eh ben malheureusement c'est pas folichon, on
sens un groupe très fatigué (la seule chanson où le bassiste Marco
Hietala chante, Endlessness, on a l'impression qu'on l'a forcé
tellement c'est poussif, on comprend qu'il se soit depuis mis en
retrait), qui au mieux tourne en rond (Pan est sauvable par
exemple, et le passage lyrique à la fin de Shoemaker inattendu et
bienvenu), au pire pique des idées ailleurs (franchement, le thème de
Noise repris de Game of Thrones, et réutilisé en plus à la
fin de Harvest, si on veut faire une référence on l'assume au
lieu de prétendre que c'est "pas fait exprès"), ou évolue toujours plus
vers un côté folk franchement pénible (le joueur de flûte chante aussi,
et sur Harvest notamment, on a très fort envie de lui filer des
baffes pour qu'il arrête). Bref, ça bouge un peu, mais pas dans le bon
sens, et en comparaison avec le reste de la discographie du groupe, je
suis obligé d'être bien sévère avec cet album de trop.
- On Thorns I Lay - Crystal tears (1999) ★ ★ ½
Aujourd'hui, histoire de s'amuser un peu, plongeons un peu dans la
discographie d'un groupe obscur appartenant à la troisième division du
metal (bon, j'exagère un peu, si je l'avais mis dans ma liste, c'est
quand même que j'en ai lu quelques chaudes recommandations). Je ne
produirai qu'une seule critique centrée sur l'album le plus connu du
groupe, en partie parce que certains des autres albums sont tout
simplement introuvables en écoute en ligne, mais aussi parce qu'une
bonne partie de la discographie mérite effectivement assez clairement de
tomber dans l'oubli. Il faut dire que ce groupe grec, qui n'a pourtant
sorti que neuf albums (et est encore en activité après une grosse
période sans disques), a su varier les genres : death mélodique, metal
atmosphérique plus ou moins gothique, puis carrément une période
résolument pop (là pour le coup ça n'a pas l'ombre d'un intérêt), avant
de revenir au point de départ dans les deux derniers albums récents (qui
s'écoutent d'ailleurs plutôt bien). Ce Crystal tears est le troisième
album du combo, sorti après un Orama rigolo (un album aux
sonorités aquatico-planantes sur fond de concept atlante, avec mélange
de chant guttural foireux et de chant féminin "sirénien") mais trop
limité techniquement. Si vous aimez le metal, le vrai, n'essayez en tout
cas même pas de poser une oreille sur cet album-ci, qui est une sorte de
caricature absolue de "metal pour midinettes", avec violons et piano,
chant féminin angélique (y a aussi un gars qui chante, mais fort
rarement, la plupart du temps il se contente de susurrer du texte qu'on
imagine très inspiré), les guitares sont là pour ajouter un tout petit
poil de piquant aux atmosphères globalement très mielleuses, et il n'y a
pas un seul riff charnu de tout l'album. Mais une fois qu'on a accepté
le concept (et à condition quand même d'écouter ça au second degré...),
ça a un petit charme désuet qui opère par moments, et les éléments
mélodiques suffisent à faire passer quelques titres pour de belles
chansons (l'éponyme qui ouvre l'album, et l'inénarrable All is
silent, avec les "nanana" ridicules de la chanteuse, j'ai beau me
dire tout le long qu'on n'a pas le droit de pondre un titre pareil,
j'accroche quand même). À déconseiller aux âmes (trop peu) sensibles,
mais dans un genre discutable, c'est plutôt une réussite.
- Opeth - Orchid (1995) ★ ★ ★
On ne peut pas dire qu'Opeth donne dans l'easy listennig avec ce premier
album qui marque fortement un territoire qui n'est pas forcément le plus
accueillant a priori : des chansons qui s'étirent presque
systématiquement au-delà des 10 minutes, avec énormément de
développements instrumentaux complexes, on est très très loin du
couplet-refrain bateau. Au premier abord, j'avoue avoir été assez peu
séduit, le chant guttural (certes pas hyper présent puisque ça doit
chanter à peine la moitié du temps sur toute la durée de l'album) me
semblait peu en accord avec les atmosphères créées, les nombreuses
ruptures au sein de chaque piste ne sont pas forcément très bien gérées
(parfois, on se demande vraiment pourquoi ne pas avoir fait trois titres
de quatre minutes plutôt qu'un seul de douze) et certaines influences
presque jazz (quelques passages dans Under the weeping moon, la
batterie à la fin de The twilight is my robe) m'ont sans surprise
déplu. Mais j'ai quand même insisté car la singularité des ambiances
mérite qu'on s'attarde un peu plus sur ce disque. Pas mal de guitares
acoustiques, des mélodies souvent répétées ad nauseam, il y a un côté
hypnotique qui fonctionne finalement assez bien, par exemple dans le
premier titre In the mist she was standing qui à la réécoute me
semble le plus réussi de l'album. Et puis il y a vraiment quelques très
belles idées, la toute fin suspendue de The Apostle in triumph ou
même l'étonnant intermède au piano Silhouette avec ses grosses
influences classiques. Pour celui qui entrera vraiment dans cette
musique, il y a probablement de quoi vraiment être emballé. Ce n'est pas
totalement mon cas, probablement faute de séduction mélodique un peu
plus immédiate, mais il y quand même de la belle musique dans ce premier
essai.
- Opeth - Morningrise (1996) ★ ★ ★ ★
Après un premier album ambitieux et exigent, Opeth persiste et signe :
seulement cinq pistes pour plus d'une heure de musique (les versions
plus récentes de l'album proposent, comme pour leur premier opus
d'ailleurs, une dernière piste qui est un enregistrement live immonde
dont l'intérêt est plus que discutable), on est repartis pour de longues
épopées mélancoliques, où les passages instrumentaux et les guitares
acoustiques continuent à dominer le paysage, sur un fond de batterie
teintée d'influences jazz. Pas de révolution donc, mais une évolution
tout de même, avec des transitions mieux maîtrisées et un peu plus de
chant clair (je ne m'en plains pas, je continue à penser que le chant
guttural se mélange assez mal à la musique du groupe). On n'échappe pas
totalement à l'enlisement dans certains développements instrumentaux
(dans The Night and silent water notamment), mais il faut bien
admettre que c'est la plupart du temps de la très belle musique,
notamment dans Advent et Black Rose immortal (cette
dernière arrive à gérer sa durée fleuve de 20 minutes sans mollir, un
beau tour de force). Ca demande encore un certain investissement pour
rentrer dans le truc (les cellules mélodiques sont encore régulièrement
répétées une dizaine de fois sans variations, ça peut lasser), mais si
le groupe continue dans cette voie, le prochain album pourrait bien être
un chef-d'oeuvre !
- Opeth - My Arms, your hearse (1998) ★ ★ ★ ½
Pour être honnête, à la première écoute, j'ai été franchement déçu par
cette nouvelle proposition, qui me semblait perdre une bonne partie du
charme des deux premiers albums (ce côté lancinant et presque hypnotique
des longs développements instrumentaux, beaucoup moins présents ici)
pour se diriger vers quelque chose de plus direct et frontal assez
impersonnel. Ce n'est en fait pas vraiment le cas, mais il y a tout de
même des éléments factuels qui prouvent une certaine volonté de faire
moins alambiqué : titres (un peu) plus courts, beaucoup moins de
guitares acoustiques (sauf sur les titres où il n'y a que ça) et des
breaks (de choeurs en voix claire typiquement) plus courts. Malgré cela,
les chansons sont encore très construites et proposent des ambiances
variées, dans lesquelles j'ai fini par rentrer, au moins pour certaines
d'entre elles : April Ethereal est une excellente ouverture, et
les très métalliques The Amen corner et Demon of the fall,
au coeur de l'album, sont excellentes. Mais il y a aussi des coups de
moins bien, dans la conclusion en voix claire de When que je
trouve assez ratée, et dans une fin d'album sur laquelle je décroche un
peu (Credence s'éloigne complètement de l'univers metal et ne
m'intéresse pas vraiment, Karma est au contraire assez brutale
mais part dans trop de directions, et l'Epilogue instrumental
avec ses claviers, sans être indigne, ne me transporte pas non plus). Le
tout reste très agréable à écouter, mais je garde une préférence pour le
plus homogène album précédent.
- Opeth - Still Life (2000) ★ ★ ★ ★ ½
À l'écoute de ce quatrième disque du groupe, il est assez clair que les
tentatives qui ne m'avaient pas totalement convaincu sur le précédent
relevaient encore de la recherche de la part des suédois du bon
équilibre entre la complexité des compositions et le côté très direct du
chant guttural, et de l'intégration parfaite du chant clair et des
nombreux passages acoustiques. Eh bien, là, l'équilibre, on l'a, et il
est vraiment parfait, au moins sur quelques titres. En fait, dès l'intro
intrigante de The Moor qui débouche presque par susprise sur un
riff de mammouth, on sent qu'on va se prendre une grosse baffe dans la
tronche, et on a raison : cette première piste est exceptionnelle ! Tous
les éléments caractéristiques de la musique du groupe se mélangent à la
perfection, c'est d'une richesse incroyable et ça prend le temps de tout
développer, vraiment rien à redire. Le reste de l'album sera presque à
l'avenant, n'hésitant pas les sorties de route inattendues sur un disque
de metal (Benighted, superbe respiration chorale en chant clair
sur fond purement acoustique, ou Face of Melinda qui ne fait
intervenir du gros son qu'aux deux tiers de la chanson) mais proposant
aussi quelques titres directs au tempo rapide (un peu dans l'esprit de
My Arms, your hearse) bien fichus (God's lament). Mes
seuls petits reproches (qui suffiront à réserver la note maximale pour
une prochaine fois) : les influences trop swinguantes de Moonlapse
vertigo (je ne peux pas dire que ce n'est pas bon, loin de là, mais
ce côté presque jazzy n'est pas trop pour moi, tout simplement), et une
fin de disque à mon sens un peu plus décousue (notamment la piste finale
White cluster). Mais franchement, on tient déjà là un album
excellent.
- Opeth - Blackwater Park (2001) ★ ★ ★ ½
Ce cinquième album du groupe est considéré par beaucoup comme le sommet
de sa discographie. Je vais encore une fois me démarquer puisque j'ai
été, non pas déçu par cet album qui reste globalement très bon, mais
tout simplement moins enthousiasmé que par son prédécesseur Still
Life, alors que les deux boxent de toute évidence dans la même
catégorie. On retrouve les atmosphères dépressives, l'alternance de
chant clair et guttural et l'utilisation fréquente de guitares
acoustiques chers au groupe. Seul petit ajout, quelques lignes de piano
par-ci par-là qui ne m'ont d'ailleurs pas franchement convaincu (sur le
court instrumental Patterns in the ivy, je trouve même qu'il est
assez mal utilisé). Pour le reste, on retrouve une piste inaugurale
vraiment réussie (The Leper affinity) mais moins marquante que
The Moor sur le disque précédent, une ballade acoustique
(Harvest) réussie mais moins emballante que Benighted, un
ou deux titres plus directs (The Funeral portrait), et d'autres
vraiment très travaillés (mon préféré est peut-être The Drapery
falls, dont le chant clair sur la première partie m'a fait penser à
ce qu'on trouve régulièrement sur les disques d'Haken). Bref,
c'est très bien tout ça, mais y a rien à faire, ça m'accroche moins, je
n'ai pas plus que ça envie de me remettre l'intégralité du disque dans
les oreilles après en avoir terminé, et on ne peut pas lutter contre ça
!
- Opeth - Deliverance (2002) ★ ★ ★ ★ ★
Pour cet album et le suivant (Damnation, sorti quelques mois plus
tard), Opeth a décidé d'innover un peu en créant un dyptique aux
ambiances opposées, le côté violent/énervé pour Deliverance, le côté
calme/contemplatif pour Damnation. Honnêtement, à première vue, ça me
semblait une très mauvaise idée, dans la mesure où une part non
négligeable de l'intérêt de la musique du groupe provient justement de
l'apparition au sein d'une musique extrême de plages très contrastantes
fournies par le chant clair et les guitares acoustiques. Mais en fait,
les suédois sont beaucoup trop malins pour avoir proposé un album
uniformément brutal, même s'il est vrai que les premières minutes de
Wreath ou Master's apprentices ne font pas vraiment dans
la dentelle (on avait toutefois déjà eu ce type d'approche frontale de
leur part dans l'album My Arms, your hearse). En fait, on a ici
un peu moins de guitares acoustiques et de chant clair que dans les
albums précédents (sauf bien sûr sur la sublime parenthèse A Fair
judgement) mais on retrouve en contrepartie les longs développements
instrumentaux des tout premiers disques du groupe (à part le court
interlude instrumental For absent friends, toutes les pistes
dépassent les 10 minutes). Et tant mieux, car ça enrichit encore une
musique déjà sacrément inspirée ! Il faut vraiment écouter les dernières
minutes de la piste-titre, avec son martèlement dans le grave au-dessus
duquel s'échappent des bribes mélodiques presque planantes, et son
enchaînement avec A Fair judgement, on a vraiment là un quart
d'heure de musique de très très haut vol. Le reste du disque est un poil
moins impressionnant mais reste excellent quasiment de bout en bout
(mélodiquement, c'est vraiment bon), la seule piste m'ayant posé
quelques problèmes lors des premières écoutes étant la dernière, By
the pain I see in others, qui prend une tournure plus expérimentale
parfois surprenant (l'espèce de growl trafiqué assez moche à un moment,
des sonorités qui font penser à de l'orgue de barbarie à un autre, et
surtout une conclusion bruitiste espacée de silences que je ne comprends
pas). Un peu dommage de terminer un si grand album sur une légère fausse
note, mais le (premier) chef-d'oeuvre du groupe, pour moi, c'est bien
celui-ci.
- Opeth - Damnation (2003) ★ ★ ★ ★
Deuxième volet du dyptique dur/doux d'Opeth. Autant le premier volet
restait largement contrasté et ressemblait finalement pas mal aux autres
productions du groupe, autant celui-ci s'en éloigne vraiment
radicalement. Plus l'ombre d'un chant guttural ni même d'une guitare
électrisée, en fait ce n'est plus du tout un album de metal, mais une
suite de pistes douce-amères comme Opeth avait déjà su nous en insérer
de brillantes dans d'autres disques. Et encore une fois, ça marche
franchement bien, on démarre très joliment avec un Windowpane
très mélancolique (bon, de toute façon, ça respire pas franchement la
joie de vivre tout au long de l'album) et prenant, les synthés sonnent
tout de même parfois un peu pauvres à mon goût sur cette piste et la
suivante. Je préfère nettement le piano très présent dans la superbe
To rid the disease, ou même ces mêmes claviers en mode "sonorités
aquatiques" dans la conclusion de l'album, Weakness, que je
trouve extrêmement réussie. Entre temps, une ou deux pistes qui tentent
de varier un peu les atmosphères (la curieuse berceuse Death wispered
a lullaby, peut-être la piste la plus relativement enjouée du
disque, et Closure qui explore des territoires un peu plus
surprenants avec sa drôle de ritournelle finalement pas désagréable),
mais le principal défaut du disque reste quand même, forcément, sa
relative unité de ton. Mais bon, dans un genre différent, ça reste
globalement de la très très bonne musique.
- Opeth - Ghost reveries (2005) ★ ★ ★
Après la parenthèse Damnation, retour à un album classique pour
Opeth. Enfin, classique, pas tant que ça, car il y a quelques nouveautés
loin d'être négligeables dans ce nouveau disque. Déjà, le plus frappant,
ce sont les claviers, pas forcément mis très en avant mais quand même
bien audibles dans le paysage sonore sur toutes les pistes. Ca donne
parfois un arrière-plan onirique bien vu, mais la plupart du temps, je
trouve que ça sonne plutôt cheap et que ça s'intègre assez mal au son du
groupe (typiquement sur Hours of wealth, c'est assez mièvre et
franchement pas bon). Autre curiosité, l'influence orientalo-arabisante
manifeste notamment dans le duo central Beneath the mire (très
curieux titre qui ne ressemble pas à grand chose)-Atonement (là,
avec la voix trafiquée et le break au piano sans intérêt, c'est pour moi
une faute de goût assez nette). Tout ça est pour moi assez clairement
raté, et finirait presque par nous détourner d'une majorité de pistes où
Opeth fait quand même du bon boulot : Ghost of perdition très
maîtrisée, le début de Baying of the hounds excellent (même si ça
se cherche un peu ensuite) et Reverie/Harlequin forest qui
pourrait presque prétendre à rejoindre le petit cercle des grandes
claques assénées par le groupe si la fin n'était trop manifestement
proche de la fameuse coda de Deliverance (en moins bien,
forcément...). Album trop inégal donc qui marque quand même nettement le
pas par rapport au magistral Deliverance.
- Opeth - Watershed (2008) ★ ★ ½
Après un Ghost Reveries qui m'avait inégalement convaincu, force
est de constater qu'Opeth persiste et signe, en introduisant de plus en
plus de claviers dans leur son, le rendant à mon sens nettement moins
intéressant qu'avant. Mais aussi, pourquoi avoir mis des instruments
aussi typés années 70 qui sonnent aussi datés (sur Burden par
exemple, c'est assez terrible) ? Quand le groupe se contente d'ajouter
quelques flûtes (sur Heir apparent) ou même des tapis de cordes
(sur Hessian Peel), c'est déjà nettement moins gênant. Mais mes
problèmes avec l'album ne s'arrêtent pas là, puisqu'il comporte aussi
son lot d'idées "compositionnelles" franchement foireuses (en fait, la
fin de tous les morceaux du début de disque est ratée, que ce soit la
stridence désagréable sur Heir apparent, les voix ridicules de
The Lotus eater ou, la pire de toutes, cette guitare qui se
désaccorde avant de conclure sur un ricanement sur Burden).
Honnêtement, à mi-parcours, je m'attendais à devoir vraiment descendre
l'album, et puis, ouf, on retrouve ensuite une part du génie du groupe
avec notamment un superbe Porcelain heart qui à lui seul fait que
l'album mérite au moins une tentative d'écoute. Plutôt convaincu aussi
par l'espèce de péroraison quasi triomphaliste de Hex Omega,
plutôt inattendue de la part d'un groupe qui cultive aussi régulièrement
les atmosphères dépressives. Tout n'est pas à jeter donc, mais de mon
point de vue le groupe est clairement sur la pente descendante.
- Opeth - Heritage (2011) ☆
Bon ben voilà, ça y est, j'ai passé le cap où Opeth a vraiment laissé
tomber le metal pour faire complètement autre chose : plus du tout de
chant guttural, dix fois plus de claviers old school que de guitares
électriques (y a encore des passages où les guitares ne sont pas en
acoustique en fait ?), et tout le côté violent de la musique du groupe
jeté à la poubelle. Ma foi, c'est bien sûr leur droit le plus strict (et
on pouvait s'y attendre au vu du virage déjà pris dans les deux albums
précédents), mais d'un point de vue strictement personnel, et sans
surprise, je ne peux qu'avouer une grosse déception. Je n'avais
initialement pas mis de note car je ne m'estimais pas bien placé pour
juger ce genre de musique que je pratique fort peu (pour faire un bel
euphémisme), mais l'écoute de ce disque ne m'a en tout cas pas donné
envie de m'y mettre. Pour résumer, les (nombreuses) plages lentes
m'ennuient au plus haut point (je trouva ça d'une pauvreté terrifiante)
et quand ça s'anime un peu, ça tourne au délire jazzy horripilant. Une
piste comme Nepenthe, par exemple, me donnerait facilement envie
d'aller corriger deux ou trois copies en mode sadique pour me défouler.
Les seuls moments que je sauverais quand même sont l'introduction
éponyme (du piano classicisant, pourquoi pas), et l'instrumental
Marrow of the earth final, apaisé et assez beau. C'est bien
maigre... Je me dispenserai d'ailleurs de publier une critique sur les
albums suivants du groupe, qui ont confirmé sa nouvelle orientation et
donc mon désinrérêt assez clair. Toutefois, Pale Communion contient
au moins deux pistes que je trouve sympathiques : l'hommage Goblin qui
m'a renvoyé à de vieux visionnages de films de Dario Argento, et Voice of
treason avec son motif rythmique complètement hollywoodien, au moins
c'est fun.
- Overkill - Feel the fire (1985) ★ ★ ★
Dans la catégorie des groupes à la discographie à rallonge, Overkill se
pose là : pas moins de 21 albums studio (dont un de reprises) en une
quarantaine d'années d'existence, et apparemment sans dévier beaucoup du
style thrash de leurs débuts. Pourtant, si le groupe est souvent cité
par les amateurs du genre, c'est souvent en tant qu'outsider, venant un
peu après les grands noms (notamment ceux du fameux Big Four), peut-être
parce que le groupe est considéré comme une bande de suiveurs très
efficaces mais qui n'ont jamais révolutionné le genre (en metal comme en
classique, la palme est souvent donnée aux pionniers). Sur ce premier
effort, on a en tout cas droit à un thrash effectivement assez standard
mais quand même sacrément énergique et galopant, bien servi par un
chanteur très "dickinsonien" et une patate à toute épreuve. Certes ça
manque d'imagination au niveau des riffs (qui sont souvent un peu trop
répétés également), mais ça avance et c'est globalement bien efficace
(la chanson titre notamment). Le plus gros point noir en fait, c'est la
production datée (ça sent bien son époque et le manque de moyens), mais
au niveau du contenu, on est par exemple largement au-dessus de ce que
proposait le premier album de Megadeth la même année.
Encourageant pour la suite.
- Overkill - Taking over (1987) ★ ★ ★
Deuxième album pour Overkill, et comme son titre l'indique, on prend
tranquillement la suite du premier sans en changer la recette. Le groupe
n'a clairement pas embauché un graphiste compétent depuis la dernière
fois (cette pochette !), ni d'ailleurs un ingénieur du son valable (la
production reste brute et brouillonne, même si assez bizarrement j'ai la
sensation que ça s'améliore au fil de l'album), mais les titres restent
énergiques et efficaces, entre speed en mode rouleau compresseur
(Wrecking crew, pas mal mais un peu gâchée par des tentatives de
cris très laides de la part du chanteur, également présentes sur
quelques autres pistes), thrash des familles (Powersurge,
peut-être mon préféré de l'album) et influence Maiden plus que
présente (sur Fear his name, d'ailleurs loin d'être
déshonorante). Le tout donne une nouvelle fois un disque très correct,
mais avec encore quelques défauts (le son et le chant inégal déjà cités,
mais aussi des solos techniques qui sont plus bordéliques qu'autre
chose) qui empêchent encore une fois d'être totalement enthousiaste.
- Overkill - Under the influence (1988) ★ ★
Un Overkill "sous influence" ça ressemble un peu à un pléonasme ! Mais
si influence il y a ici, c'est vraiment celle des albums les plus durs
du thrash de l'époque, avec un son de guitare rugueux qui fait beaucoup
penser à Metallica, des riffs qui ne cherchent pas la séduction
mélodique, mais aussi un chant qui s'aventure dans des directions pas
forcément très pertinentes (quand Bobby chante normalement, ça ne colle
pas au style mais quand il fait des trucs plus expérimentaux c'est
souvent moche !). Ce n'est pas inintéressant, mais on a la curieuse
impression d'un groupe qui se cherche ici beaucoup plus que sur ses deux
premiers albums, sans vraiment réussir à se trouver. On a pourtant droit
à de bonnes choses (le beaucoup plus maidenien Hello from the
gutter, des titres plus développés dans la seconde moitié de l'album
qui arrivent à proposer des choses malgré les maladresses, notamment au
niveau de choeurs sans intérêt), et on note une grosse progression dans
la qualité de la production, désormais satisfaisante (et qui fait bien
entendre la basse, c'est agréable). Un album de transition avant deux
classiques qui, si j'en crois la sagesse populaire, devraient être plus
aboutis.
- Overkill - The Years of decay (1989) ★ ★ ★ ½
Après un troisième album moins inspiré, Overkill reprend ici
indéniablement du poil de la bête. Les titres qui donnent dans le thrash
pur et dur vont même du bon (Birth of tension) au franchement
excellent (E.vil N.ever D.ies qui conclut l'album, et surtout
Elimination, speed et ravageur comme on l'aime), le groupe a
clairement retrouvé l'énergie dévastatrice dont ils avaient déjà su
faire preuve sur leurs deux premiers disques. Et pourtant, je ne suis
pas encore totalement emballé par celui-ci, qui présente à mon sens
quelques défauts qui le rendent inégal : déjà, il y a sur quelques
pistes une influence nettement plus doom (on pense clairement à Black
Sabbath par moments) qui accouche de passages beaucoup moins
convaincants (la majeure partie des 10 longues minutes de Playing
with spiders, et rebelote sur Who tends the fire, qui là
encore est bien longuet). Et puis, tout bêtement, certains riffs sont
vraiment pas terribles (Nothing to die for). Ah, je n'ai pas
encore cité l'espèce de ballade qui sert de chanson titre, et qui
prodigue pour le coup une ambiance assez exceptionnelle, c'est de loin
le meilleur des trois titres dépassant les huit minutes. Finalement,
plus de bon que de raté, et ce qui est bon mérite vraiment très
largement l'écoute, mais encore un peu l'impression que le groupe n'a
pas totalement trouvé sa voie.
- Overkill - Horrorscope (1991) ★ ★ ★ ★
En 1991, alors que Metallica change de direction musicale avec
son album noir, Overkill reste droit dans ses bottes (le noir viendra
après pour eux) et propose un cinquième album résolument thrash, avec
encore quelques teintes doom, mais moins présentes que sur leur disque
précédent (seule la chanson titre joue vraiment cette carte, et au vu de
ma précédente critique, vous ne serez pas surpris d'apprendre que je ne
m'en plains pas). Mais il y a tout de même une évolution notable dans la
façon que le groupe a d'aborder sa musique : là où leurs premiers albums
débordaient d'une énergie pas toujours totalement contrôlée, celui-ci au
contraire est carré et maîtrisé de bout en bout, alignant sans
sourciller les titres redoutables d'efficacité, avec introductions bien
calibrées pour nous mettre en transe (sur l'excellent Coma qui
ouvre l'album, et sur Soulitude qui le referme), breaks soignés
(le mini solo de basse de Thanx for nothing), la première moitié
du disque est vraiment très réussie. On sent une petite baisse de régime
ensuite, mais rien de dramatique non plus, le seul vrai reproche qu'on
pourrait faire à l'album est en fait justement le manque d'un léger
grain de folie qui aurait peut-être permis de produire plus de titres
qui déchirent tout (ici, seul Coma peut rivaliser dans cette
catégorie avec le Elimination de The Years of decay). Mais
ça reste un album d'une grande solidité.
- Overkill - I Hear black (1992) ★ ★ ½
Après avoir atteint une sorte de plénitude dans son thrash, et alors
même que le genre est en perte de vitesse, Overkill change de maison de
disques et sort un nouveau disque... qu'on croirait interprété par un
autre groupe ! Le son est différent, mais surtout le style a beaucoup
évolué : plus de thrash et de speed, on nage dans du mid tempo qui sonne
très rock, très mélodique, avec beaucoup de groove et de rythmes
syncopés, et quelques titres au sous-accordage exagéré où le groupe
semble clairement vouloir imiter Black Sabbath, même au niveau du
chant (bon, ça, ce n'est pas totalement une nouveauté). Le seul titre
qui va vraiment vite sur cet album, c'est Weight of the world,
tout le reste est au mieux à un tempo modéré. Bon, après tout, pourquoi
pas, mais si le disque est loin d'être raté (entre autres, j'aime bien
World of hurt), il ne comporte aucun titre réellement marquant,
et on a quand même l'étonnante impression qu'Overkill a complètement mis
sa personnalité de côté pour produire cet album. Sympathique mais
extrêmement dispensable.
- Overkill - W.F.O. (1994) ★ ½
Avec son disque précédent, Overkill avait ouvert une brèche qui
l'éloignait sensiblement du thrash qu'il pratiquait jusque-là, et
manifestement ça n'a pas du plaire à tout le monde. En effet, cette
nouvelle offrande prend le contre-pied total de la précédente en
proposant une musique d'une frontalité assez radicale pour l'époque où
elle a été écrite. En fait, ce n'est pas Wide Fucking Open que le disque
aurait du s'intituler, mais bien Wide Fucking Bourrin : production très
dense et assez moche, alignement de titres lourds très linéaires et bien
trop basiques, s'il n'y avait pas quelques indicateurs facilement
reconnaissables (en premier lieu la basse hyper mise en avant, comme
d'habitude), on pourrait même se demander si le groupe n'a pas été
remplacé par une bande de petits jeunes en recherche de style. C'est en
tout cas pas très bon (un truc comme What's your problem, on
n'est pas loin d'en rire) et très vite lassant, même si la fin de
l'album, après l'invraisemblable intermède acoustique R.I.P.,
reprend un peu du poil de la bête, avec notamment le titre final
Gasoline dream qui est le seul à exploiter correctement la rage
constamment à l'oeuvre sur l'album et à proposer une construction un peu
plus subtile. Pas vraiment suffisant pour sauver cet album qui laisse
franchement perplexe sur les intentions du groupe.
- Overkill - The Killing kind (1996) ★ ★ ★ ½
Après deux albums où Overkill semblait peiner à trouver sa voie, un
petit miracle se produit sous forme d'un rebond inattendu. Au lieu
d'essayer de se forcer à produire un style de musique qui ne leur
convient pas, ils reviennent à leurs fondamentaux thrash, mais avec
leurs touches personnelles issues des deux essais précédents : un côté
groovy et mélodique vraiment sympa, et une production et quelques
éléments modernes (les "yeah" limite narquois du Battle initial)
qui en font un album bien de son temps sans tomber dans la merdasse new
metal (quand on pense à ce que font quelques poids lourds du thrash dans
la deuxième moitié des années 90, on se dit qu'Overkill a nettement
mieux géré le virage). Et ça fonctionne fort bien, avec même quelques
titres développés aux très belles atmosphères (Burn tou down - To
Ashes et The Cleansing), même si le groupe s'égare parfois un
peu (l'instrumental Feeding frenzy avec sa basse virevoltante et
surtout l'improbable ballade The Morning after avec piano et
touches orchestrales qui semble avoir été rapatriée d'un des premiers
albums de Black Sabbath sont légèrement à côté de la plaque). Le
seul vrai point noir du disque en fait, c'est le chant de Bobby Blitz,
qui semble tout simplement ne pas savoir comment accompagner ses
camarades. On pense parfois à Dave Mustaine niveau vocal, ce qui n'est
jamais bon signe. Dommage, sans ça, on tiendrait peut-être tout
simplement le meilleur album du groupe parmi ceux que j'ai écoutés
jusqu'ici...
- Overkill - From the underground and below (1997) ★ ★ ★ ½
Si l'album précédent d'Overkill ne semblait suivre aucune mode, celui-ci
est à première vue bien influencé par la seconde vague du thrash US des
Pantera et consorts : le son est vraiment hyper puissant, et ça
tape très fort mais pas forcément très vite. Pour autant, on ne tombe
pas dans le bourrinisme primaire et fatiguant d'un W.F.O. car il
y a en permanence des petites sorties de route qui font dresser
l'oreille et donnent tout son intérêt au disque : une outro acoustique
complètement déconnectée du reste sur I'm alright, quelques
samples électroniques surprenants (celui qui ouvre Save me), un
solo de basse sorti de nulle part (Half past dead), mais surtout
un groove toujours présent qui donne aux riffs les plus éculés une
fraîcheur inattendue (comme sur l'excellent Long time dyin', qui
nous gratifie aussi de quelques glissandi aigus "gojiresques" du plus
bel effet). Bon, dans le rang des surprises, il y en a aussi une
mauvaise, c'est le retour de la vengeance de la ballade risible en fin
de disque avec Promises (ils avaient perdu un pari qui les
obligeait à insérer une ballade sur chacun de leurs albums les gusses
d'Overkill ?). Et puis le chant n'est encore une fois pas toujours à la
hauteur. Qu'à celà ne tienne, si l'album n'est pas un chef-d'oeuvre
incontournable, il propose suffisamment de choses intéressantes, à
l'instar de son prédécesseur, pour mériter largement l'écoute.
- Overkill - Necroshine (1999) ★ ★ ½
Après un petit détour par un album de reprises (que je n'évoquerai pas
ici, comme d'habitude pour ce genre de disques), Overkill continue son
petit bonhomme de chemin avec ce qui est du coup son dixième album
studio si on ne compte pas le précédent. Bon, très honnêtement, pas
grand chose de très passionnant à dire sur celui-ci, on a droit à un son
moderne assez puissant comme c'est devenu l'habitude du groupe, mais sur
ce coup, Overkill a définitivement mis l'énergie et la vitesse de côté
pour proposer une musique très lourde (le tempo décolle rarement),
maîtrisée mais qui ne décolle jamais vraiment au-dessus du sympathique
(la chanson titre qui ouvre l'album, Revelation), avec quelques
maladresses (les choeurs à la limite du ridicule par moments). Un peu
l'impression que le métier des musiciens sauve un album qui reste malgré
tout très mineur dans la discographie du groupe.
- Overkill - Bloodletting (1999) ★ ★ ★
Pour son premier album des années 2000, donc une époque où le thrash
n'est plus forcément très à la mode, Overkill nous sort un album de pur
thrash bien frontal. Autant ils ont pu par moments ralentir le tempo et
tenter d'autres choses, autant là c'est vraiment rentre-dedans, jusqu'à
atteindre parfois un sentiment de confusion assez marqué (des solos
bordéliques, mais parfois c'est carrément une piste entière, comme What
I'm missin', où on ne comprend pas tout à ce qui se passe). Mais quelque
part, on sent que les musiciens se font plaisir, et c'est assez
communicatif, avec quelques titres bien efficaces (Bleed me, vraiment
symptomatique de ce thrash qui tâche un peu sur les bords, Let it burn
malgré ses répétitions, ou le Can't kill a dead man qui conclut le
disque). Et puis au beau milieu de cette liste de titres qui semble
donner raison à ceux qui ne voient en Overkill qu'un gentil groupe de
seconde zone (c'est de fait sympa mais assez limité), se cache quand
même une perle qui justifie de remonter la note au-dessus de la moyenne
: il s'agit de l'étrange Blown away, qui navigue d'une intro acoustique
à l'ambiance étonnante vers une conclusion aux mélismes orientaux
inattendus, en multipliant les ruptures de ton, histoire de confirmer
quand même que le groupe est capable de proposer des choses autrement
plus ambitieuses que ce qu'ils se contentent de faire le reste du temps.
Du coup, une petite déception sur le fait que ce titre soit si isolé,
mais quand même une certaine sympathie pour cet album qui vaut mieux
qu'il n'en a l'air au premier abord.
- Overkill - Killboxiii (2003) ★ ★
L'avis majoritaire des amateurs d'Overkill est que les années 2000 ne
sont pas la meilleure période de l'histoire du groupe. Et il faut bien
l'admettre, c'est assez justifié, les disques de cette décennie
s'installant dans une sorte de routine thrash pas totalement désagréable
mais sans grande inspiration, qui semble indiquer que le groupe, à
l'approche des 30 ans de carrière, n'a plus grand chose de neuf à dire.
Ici donc, une dizaine de titres desservis par une production moderne
mais pas vraiment séduisante (un son trop sec et saturé), qui accentue
le côté brouillon de certains titres (notamment le Devil by the
tail qui ouvre l'album), et passe-partout (pour ne pas dire
remplissage) de la majorité des autres. On a quand même droit par
moments à un sursaut de dynamisme qui, combiné au métier des musiciens,
suffit à accoucher de quelques chansons tout à fait correctes (The
Sound of dying, Unholy) mais l'ensemble est trop quelconque
pour prétendre à une place de choix dans la discographie du groupe.
- Overkill - Relixiv (2005) ★ ★
En plus d'arborer des titres de plus en plus grotesques, les albums
d'Overkill sentent de plus en plus fort la routine pas très inspirée.
Peut-être eût-il été préférable pour le groupe de ralentir un peu la
cadence pendant les années 2000 pour proposer des disques un peu plus
frais ? En tout cas, on retrouve ici une suite de 10 titres attendus aux
riffs sans imagination, sauvés par un certain métier mais desservis par
une production médiocre. Je suis un peu gratuitement méchant, il y a
tout de même un certain effort de diversité (le chant scandé de Bats
in the belfry), quelques titres efficaces (Within your eyes,
Play the Ace), bref un contenu suffisant pour que l'album soit
tout juste acceptable. Mais tout de même, terminer sur l'espèce de
chanson à boire punkoïde Old school ne laisse pas présager grand
chose de bon pour la suite de l'aventure !
- Overkill - Immortalis (2007) ★ ★ ½
Après un précédent effort franchement poussif, je m'inquiétais fortement
de ce qu'allait bien pouvoir proposer Overkill ensuite. Eh bien, pas le
moindre ralentissement de cadence en vue, mais ce disque-ci est plutôt
meilleur que Relixiv (et nettement moins bon que celui qui
suivra, mais ça c'est une autre histoire, chaque chose en son temps).
Pourtant, on est à nouveau assez clairement en face d'une espèce de fond
de tiroir de seconde zone, avec ses riffs répétés en boucle parce qu'on
ne sait pas quoi en faire d'autre, ces choeurs aux frontières du risible
(les 666 sur Shadow of a doubt par exemple), ces solos qui
semblent improvisés au moment de l'enregistrement, et ce recyclage
permanent dont le titre de la chanson finale (Overkill V, qui
fait de fait suite à quatre autres datant maintenant de quelques années)
est le symptôme le plus évident (la chanson elle-même propose une intro
plutôt cool avant d'être quelque peu plombée par un chant peu maîtrisé).
Et pourtant, ces nombreuses maladresses font partie du charme étrange de
ce disque qu'on a quand même envie d'aimer un peu pour ses titres thrash
classiques qui ne se prennent pas la tête (Devils in the mist,
Head on) mais qui finissent par convaincre. Pas le chef d'oeuvre
de l'année, bien sûr, mais encore un album d'Overkill qui arrive à
éviter d'être vraiment raté.
- Overkill - Ironbound (2010) ★ ★ ★ ★ ½
En 2010, histoire de fêter dignement ses trente ans d'existence (et les
25 ans de leur premier album), Overkill met les petits plats dans les
grands : signature chez un gros label allemand populaire, embauche d'un
producteur à la mode histoire d'avoir un bon gros son bien puissant, et
une volonté certaine de retrouver un tempo allant et de complexifier les
titres proposés (8'11 pour The Green and the black qui ouvre
l'album). Bon, très bien, mais ça ne va pas transformer magiquement un
groupe qui fait tranquillement traîner sa fin de carrière depuis 10 ans
en mastodonte capable de sortir un disque majeur du genre, hein,
personne n'y croit. À tort puisque l'improbable miracle se produit et
qu'Overkill signe là ce qui est pour moi son tout meilleur disque,
au-dessus même de ses classiques de la fin des années 80. Tout y est
infiniment meilleur que sur les trois albums précédents du groupe, et
même au niveau des plus grands albums des mammouths du genre comme
Megadeth : ça va vite sans que ça sonne le moins du monde
brouillon, les solos mélodiques sont bons, les intros chiadées, la
production vraiment énorme, et le trio inaugural (avec la chanson titre
en apothéose ébouriffante, le break calme puis le solo qui s'achève sur
fond de matraquage martial sont vraiment des moments géniaux) emporte
vraiment tout sur son passage. La suite du disque est un peu moins
marquante car ça manque un poil de variété sur la durée (on n'est pas
obligé de mettre une ballade ou un instrumental pour faire un bon disque
de thrash, mais à part pendant les intros, c'est quand même un trop
uniformément bourrin) mais reste extrêmement efficace jusqu'à
l'excellent The SRC final. Un vrai classique immédiat de thrash
moderne !
- Overkill - The Electric Age (2012) ★ ★ ★
Après un Ironbound monumental, on pouvait se douter qu'Overkill,
en général pas vraiment connu pour ses changements de direction musicale
fréquents, allait rejouer les mêmes cartes sur leur album suivant. De
fait, c'est exactement le cas, on retrouve la même production hyper
puissante, la même structure en dix titres assez développés, la même
volonté de taper vite et fort. Mais, sans surprise également, le même
miracle ne se reproduit pas deux fois de suite. Les solos sont moins
inspirés, ça fonce parfois sans trop savoir où (Save yourself qui
sent bon son Motörhead), et les premiers titres de l'album ne
peuvent tout simplement pas rivaliser avec ceux du disque précédent.
C'est d'ailleurs un peu plus loin dans le disque qu'il faut aller
chercher les meilleurs moments, Wish you were dead, le très
primaire mais bien efficace Drop the hammer down. Le reste ne
démérite d'ailleurs pas, et l'album dans son ensemble est bon ! Mais il
souffre nécessairement de la comparaison avec son grand frère en
rentrant dans le rang des albums de thrash moderne directs et efficaces,
mais qui ne donnent pas irrésistiblement envie de les réécouter dix fois
de suite.
- Overkill - White Devil Armoury (2014) ★ ★ ★ ½
Overkill est la preuve vivante de la richesse infinie du langage
musical. Non pas justement qu'il aille en explorer les moindres recoins,
mais au contraire, avec une grammaire assez limitée et qui évolue fort
peu au fil du temps, ils arrivent toujours à sortir tous les deux ans
une nouvelle dizaine de titres redoutablement efficaces. Pas de surprise
avec cet album de 2014, il est exactement similaire aux deux précédents,
sans atteindre les sommets d'Ironbound mais avec une qualité
d'ensemble fort respectable qui fait que je le classe un peu au-dessus
de The Electric Age. On craint pourtant un nouveau recul sur les
premiers titres, où le groupe force un peu le trait (Armorist
n'est pas un opener à la hauteur de ce que le groupe propose d'habitude,
Pig dépense beaucoup d'énergie pour un résultat pas
extraordinaire), mais c'est encore une fois dans la deuxième partie de
l'album (à l'exception du varié et excellent Bitter Pill) que se
trouvent les meilleurs titres : Freedom rings et son ambiance
prenante, It's all yours sans fioritures mais qui retrouve une
évidence appréciable, et le titre conclusif, In The Name, qui
exploite une nouvelle fois efficacement des rythmiques très martiales
(bon, par contre, ça ressemble quand même beaucoup à ce que le groupe a
déjà fait quelques fois depuis Ironbound). Vraiment rien de
révolutionnaire, mais ça n'en reste pas moins bon pour autant !
- Overkill - The Grinding wheel (2017) ★ ★ ½
Après un regain de forme impressionnant pour un groupe qui semblait
auparavant sur le déclin, Overkill montre à nouveau quelques signes de
fatigue sur ce 19ème (!) album studio. On garde pourtant ce son moderne
et puissant qui est devenu sa nouvelle marque de fabrique, et même la
volonté de proposer des titres bien rapides (le bon The Wheel).
Mais bon voilà, pour deux ou trois titres qui sortent vraiment du lot
(Shine on) et un Come heavy au sympatiques relents old
school, on a droit à quelques autres plus quelconques voire poussifs
(Goddamn trouble par exemple), et le renouvellement est trop
léger par rapport aux albums qui précèdent celui-ci (le titre
d'ouverture Mean, green, killing machine est loin d'être mauvais
mais tout dans la structure transpire de la volonté de refaire un
Ironbound (la chanson, pas l'album), et la comparaison ne peut
pas être à l'avantage du nouveau venu). Tout ça concourt à faire de ce
disque un non-évènement dans la riche discographie du groupe,
sympathique mais vite oublié.
- Overkill - The Wings of war (2019) ★ ★ ★
Bon alors, pour le vingtième, les vieux briscards d'Overkill, ils nous
fait un truc un peu spécial ? Bah non, pas du tout, un album bien sympa
mais sans grande surprise, c'est tout, dans la lignée des quatre
précédents. Pas aussi tonitruant qu'Ironbound mais quand même
bien brutal dans l'ensemble (la son est d'ailleurs limite trop dense par
moments), pas aussi fatigué que The Grinding wheel mais avec
quand même quelques moments à la limite du craquage (les choeurs limite
elfmaniens qui débarquent sans crier gare sur le très aventureux
Batshitcrazy, l'introduction aux arpèges très "clair de lune" de
Distortion). Ces détails s'oublient rapidement, on remet un bon
coup de riff thrash "prends ça dans ta face", on braille dessus sans
aucune retenue (à la limite du trop plein par moments de ce point de vue
aussi), et tout le monde est content à la fin même si le disque ne
restera pas dans les annales. Les meilleurs titres du lot : A
Mother's prayer, classique et efficace, et le titre final Hole in
the soul. Fin du disque mais sûrement pas du groupe tant les papys
semblent encore péter la forme.
- Overkill - Scorched (2023) ★ ★ ★ ½
Le 21ème album studio d'Overkill est sorti le même jour que le dernier
Metallica. Pied-de-nez ou simple coïncidence ? En tout cas, il
n'y a pas vraiment photo entre les deux au niveau de la qualité de la
musique proposée. Si Overkill s'enlise en de rares occasions en voulant
renouveler un peu son propos (le côté guilleret de Won't be coming
back ne fonctionne pas, par contre l'étrange Bag o'bones qui
conclut le disque intrigue plutôt positivement), le groupe est toujours
aussi efficace quand il s'agit d'aligner les titres thrash en profitant
de la production énorme qui est la leur depuis Ironbound : la
chanson-titre démarre l'album sur les chapeaux de roue (avec un côté
grandiloquent qu'on retrouve sur plusieurs autres pistes), et le duo
Twist of the wick/Wicked place au coeur du disque devrait
suffire à convaincre tout le monde qu'Overkill, après quarante ans de
carrière, reste sans problème dans le peloton de tête des meilleurs
groupes du genre.
- Pain of salvation - Entropia (1997) ★ ★ ★ ★ ½
Le début de la première piste ! (Foreword) pourrait laisser
penser qu'il s'agit ici de metal assez "standard" mais la rapide
interruption avec envolée de claviers lance brusquement le titre dans
une tout autre direction (et dans une ambiance qui préfigure à mes
oreilles Haken, auquel j'ai pensé à d'autres moments, mais il
faut dire que mes références en metal progressif sont fortement
limitées). Le chanteur, lui, a une présence qui ferait presque penser à
celle de Mike Patton, le chanteur de Faith no more. En tout cas,
beaucoup d'inspirations diverses et surtout (et c'est bien l'essentiel)
des titres très construits et souvent très réussis. On navigue entre
chansons bien musclées (Revival), sonorités presque electro (sur
People passing by) et déplorations mélancoliques qui constituent
à mon sens les plus belles réussites (Oblivion ocean et surtout
la paire Nightmist et Plains of down en fin de disque).
Quelques pistes totalement inclassables aussi, comme ce Stress
qui part vraiment dans tous les sens et qui touche au génie, ou To
the end qui convoque un court intermède jazz de façon complètement
impromptue (là, sans surprise, ça me semble complètement raté). À
quelques maladresses près, tout cela est franchement impressionnant pour
un premier disque enregistré par une bande de gamins !
- Pain of salvation - One hour by the concrete lake (1998) ★ ★ ★
Deuxième livraison du groupe suédois, et par rapport à leur premier opus
constitué de morceaux de jeunesse un peu disparates (mais excellents !),
on sent qu'il y a eu une grosse progression en termes de maturité :
c'est très réfléchi, parfaitement construit, pas grand chose à redire.
Et pourtant, j'ai la curieuse impression d'avoir perdu la spontanéité du
premier album. Après une première chanson Inside (je passe
l'intro au clavier pour mettre dans l'ambiance) pourtant très réussie,
j'ai l'impression que ça s'enlise un peu dans des formats un peu trop
calibrés pour surprendre (le violoncelle pour accompagner la petite
ballade Pilgrim par exemple, c'est beau bien sûr, mais un poil
téléphoné). Ca reste bon (et même très bon) mais il manque la petite
étincelle qui donne vraiment envie d'y revenir. Un bon album malgré
tout, mais j'espérais encore mieux après un premier opus aussi
prometteur.
- Pain of Salvation - The Perfect Element, Part I (2000) ★ ★
Voilà un disque qui m'embête. Commençons par le positif : il y a
vraiment de la musique là-dedans, plus de 70 minutes variées,
travaillées, avec énormément d'influences différentes mêlées dans des
atmosphères souvent prenantes. Mais justement, ce côté très fourre-tout
m'embête un peu (on est vraiment loin du metal ici, pour être honnête).
Pourquoi pas un Used très urbain aux couplets rappés (une bonne
entrée en matière d'ailleurs), mais sur le même album qu'un
Idioglossa aux sonorités franchement plus electro-pop, est-ce que
ça a un sens ? Pire, on sent le groupe très conscient de faire de la
musique "intelligente" et ça tourne trop souvent au chichiteux énervant
(l'utilisation des choeurs, du piano ou des violons finit par devenir
assez exaspérante), une chanson comme King of loss est assez
symptomatique de ces dérives. Vraiment dommage, car il y a toujours un
potentiel gigantesque chez ces musiciens, mais à mon sens pas toujours
bien exploité (le trop est souvent l'ennemi du bien...).
- Pain of Salvation - Remedy Lane (2002) ★ ★ ★
Je crois que je commence à comprendre pourquoi Pain of Salvation est un
groupe qui me frustre : j'ai mis la barre tellement haut en démarrant
dans le metal progressif avec Haken que tout le reste va
forcément me sembler médiocre... Plus sérieusement, la comparaison a
vraiment du sens sur une piste comme Fandango, où les suédois se
sont sûrement abreuvés aux mêmes sources que les britanniques dans
Cockroach king (en tout cas les lignes mélodiques et textures
vocales y font vraiment penser), mais en beaucoup moins réussi. Pour
d'autres pistes, pas besoin de comparer à quoi que ce soit pour se
rendre compte que c'est franchement mauvais, comme sur Second
love qui se vautre dans le sirop le plus insupportable, ou même sur
un Ending theme où les passages parlés sonnent terriblement
creux. Et pourtant, il y a aussi de bons moments, qui me réconcilient en
partie avec le groupe : A trace of blood et son piano
virevoltant, Rope ends qui part un peu dans tous les sens mais
qui est très intéressant, Chain sling avec son espèce de mélodie
populaire rigolote, ou même la dernière piste Beyond the pale qui
arrive à transcender l'espèce de gratouillis de guitare qui l'introduit
pour proposer des développements qui fonctionnent bien. Sans être
totalement convaincu, il y a vraiment du progrès.
- Pain of Salvation - BE (2004) gozu !
Une chose est sûre après l'écoute de cet album, nos amis suédois ont de
très bons fournisseurs... Il s'agit ici de rien de moins qu'un concept
album évoquant Dieu, l'humanité et tout le reste, avec titres de pistes
en latin. Bon, déjà, ça sent bien le délire prétentieux qui risque de
tomber à plat, surtout vu les antécédents du groupe. Mais attendons de
voir : quelle illustration musicale pour tout ça ? Eh bien, tout et
n'importe quoi. Littéralement. Il n'est absolument pas question ici de
faire un album metal traditionnel ou même metal tout court, on a droit à
un orchestre de chambre pour accompagner le groupe (le piano est très
présent, mais les flûtes aussi), et une majorité des pistes ne sont pas
des chansons à proprement parler. On a droit en vrac à du blabla
pontifiant sur fond de bruitages (Animae partus, introduction
complètement insupportable), à des conversations sur Dieu sur fond de
musique d'ascenseur (Vocari dei), à du gospel (Nauticus,
qui se termine sur des dialogues qui auraient plus leur place sur une BO
de film de Tarantino...), un espèce de truc folk médiévalisant (avec
flutiaux et tambourin de rigueur, Imago), ou même à un Pluvius
Aestivus qui est en gros un solo de piano sur fond de pizz de
cordes, Omni qui convoque un orgue, et Dea pecunia qui est
tout bonnement indescriptible tellement ça part dans tous les sens en ne
ressemblant absolument à rien. Bizarrement, le tout n'est pas aussi
risible que ça devrait l'être car ça semble fait avec une sincérité
assez désarmante. M'enfin bon, si j'avais sérieusement essayé de mettre
une note à ce gloubiboulga, elle ne serait vraiment pas élevée (en fait,
il y a bien peu de musique à proprement parler, même si Imago ou
Martius/Nauticus II dans sa première partie sont plutôt sympa)...
- Pain of Salvation - Scarsick (2007) ★ ★ ★ ★
La frontière qui sépare les albums qui nous déplaisent de ceux qui nous
emballent est parfois bien difficile à tracer. Après plusieurs
désillusions avec ce groupe, voilà enfin (c'est le deuxième après leur
effort initial Entropia) un disque qui me plaît beaucoup.
Pourtant, si on considère le très spécial BE comme une sorte de
parenthèse, on ne peut pas dire que les ingrédients aient vraiment
changé depuis The Perfect Element (dont ce Scarsick est
d'ailleurs censé être la deuxième partie). Toujours des influences très
diverses et des chansons qui n'hésitent pas à s'aventurer sur des
terrains assez éloignés de ce qu'on peut attendre d'un groupe de metal,
mais cette fois-ci j'accroche sans retenue, du moins à la première
partie de l'album. Peut-être parce que la musique en est vraiment
frontale, sans les chichis trop souvent présent sur les albums
précédents, à l'image de cette chanson titre qui verse dans la fusion
énervée (le chant est très rappé sur les couplets, opposés à un refrain
très mélodique) qui réussit parfaitement son coup. On est carrément dans
la sphère hip-hop avec le Spitfall qui suit, je devrais détester
mais c'est tellement bien fichu que j'adhère quand même. Une parenthèse
plus apaisée quoique mélancolique (la très belle Cribcaged) et on
enchaîne sur deux ovnis, notamment l'inénarrable Disco queen qui,
comme son titre le laisse deviner, inclut de forts éléments de musique
disco. Là encore, ça pourrait (devrait ?) être ridicule, mais ça marche
parfaitement. Hélas, la deuxième moitié du disque nettement moins
emballante refroidit un peu mon ardeur (rien de franchement mauvais non
plus, mais c'est à la fois moins osé et tout bêtement moins inspiré,
notamment la doublette Mrs. Modern Mother Mary - Idiocracy
qui ne semble pas trop savoir quoi dire et faire dans le bizarre pour le
principe), ce qui empêche l'album de décoller encore plus haut niveau
note (pour la première moitié, j'aurais mis cinq étoiles sans hésiter).
Mais ça fait tout de même bien plaisir de se trouver face à un album
enthousiasmant et sur lequel aucune piste ne m'a énervé !
- Pain of Salvation - Road Salt One : Ivory (2010) ★ ★ ★ ★ - Road Salt Two : Ebony (2011) ★ ★ ½
Il y a quand même une chose qu'on ne peut pas dénier à Pain of Salvation
: ce sont des champions du renouvellement. À chaque nouvel album, même
si on ne sait absolument pas à quoi s'attendre, on est toujours surpris.
Ici, ce n'est d'ailleurs pas un album, mais deux, et on comprend très
vite que ce compte-rendu n'a essentiellement rien à faire sur une page
consacrée au metal. Un son bien brut et des guitares très saturées
ouvrent le très bon No way, mais surtout on plonge directement
dans une ambiance très blues et très roots qui évoque les années 70 (vu
mon inculture totale, je ne tenterai pas de référence plus précise) et
qui sera présente tout au long des deux albums, à quelques rares sorties
de route près (la valse déjantée de Sleeping under the stars dans
le premier album, les derniers couplets en français de The Physics of
Grilock dans le second). Du coup, je me sens assez peu apte à juger
dans le détail, mais le premier album est vraiment très bon,
l'atmosphère poisseuse et dépressive vous colle aux basques et il y a
des sommets assez impressionnants (la très triste Sisters
accompagnée presque uniquement au piano au départ pour finir avec des
touches chorales et orchestrales, vraiment une réussite exceptionnelle
pour moi). Le deuxième album me convainc nettement moins, puisqu'il se
contente de reprendre le même concept, mais évidemment sans l'effet de
surprise, et surtout sans chanson qui sorte vraiment du lot (si je
devais en citer une, peut-être To the shoreline et son ambiance
qui fait penser à une BO de western désabusée), et avec quelques
passages qui penchent du côté du chichiteux (la plage conclusive...).
Mais globalement, une belle unité de ton pour ces deux albums, et
beaucoup de belle musique, tout simplement.
- Pain of Salvation - In The passing light of day (2017) ★ ★ ★
Cet album a été écrit alors que le leader du groupe était hospitalisé
dans un état grave, on peut donc se douter que ça ne va pas être une
musique débordante d'enthousiasme à laquelle on va avoir droit ici. En
soi, ça tombe assez bien, puisque le groupe réussit souvent de belles
choses quand il joue la carte de l'émotion. Mais le ton dépressif est en
fait loin d'être uniforme, il s'agit de l'album le plus metal du groupe
depuis bien longtemps (sûrement depuis le tout premier album, en fait).
D'ailleurs, l'ouverture de On a tuesday donne le ton, même si les
passages violents alternent ensuite avec d'autres beaucoup plus
mélancoliques. Belle chanson en tout cas, qui ouvre parfaitement un
disque contenant une majorité de pistes réussies (Tongue of god,
The taming of a beast et son riff initial entêtant), mais aussi,
hélas, des moments poseurs dont on se serait bien passé (Reasons
dont je ne comprends pas l'intérêt, ou la fin de Full Throttle
tribe qui était pourtant une belle chanson). Le tout culminant avec
une dernière piste de 15 minutes dont la première moitié est d'un
statisme absolu, j'ai du mal à accrocher. Un disque inégal donc, mais
qui reste quand même plutôt dans les bons crus du groupe selon moi.
- Pain of Salvation - Panther (2020) ★ ★ ★ ½
Dernier album en date pour le groupe suédois, et c'est du très récent.
La surprise est comme d'habitude de mise, avec un Accelerator
initial qui démarre... avec des sons qui évoquent la musique techno de
mon adolescence (que, je vous rassure, je n'ai d'ailleurs jamais écoutée
attentivement). Intéressant à défaut d'être totalement réussi (ça ne
vaut pas le Disco queen de l'album Scarsick, mais pas sûr
qu'on puisse vraiment faire beaucoup mieux sur ce genre de base), et les
sons très électroniques accompagneront d'autres pistes de l'album. Mais
on a droit ensuite à une espèce de passage en revue de tout ce que Pain
of Salvation est capable de produire, du mélodique hyper sentimentaliste
sur fond de claviers avec Restless boy (qui donne quand même un
peu trop dans le lacrymal au niveau du chant), du son de guitare vintage
pour l'intro de Unfuture (oar ailleurs assez indescriptible avec
ses drôles d'influences orientales, mais vraiment réussie), et
l'inévitable chanson finale de plus de 10 minutes qui reste globalement
dans un ton très mélancolique qui, ma foi, sied bien au groupe. Mais la
plus belle réussite de l'album est pour moi la chanson-titre, courte et
efficace avec son refrain presque pop qui reste vraiment en tête. On
regrettera à côté de ça quelques passages où le groupe s'écoute un peu
trop jouer, comme d'habitude (Species par exemple est assez
énervante), mais cet album très éclectique est un bon résumé de ce dont
le groupe est capable.
- Pantera - Cowboys from hell (1990) ★ ★ ★ ★ ★
Sur les bons conseils d'un ami, je me lance dans la discographie de
Pantera. Je commence avec le premier "vrai" album du groupe, mais ayant
jeté une oreille curieuse sur ce qu'ils avaient produit avant, je trouve
que Power metal était déjà un album très intéressant qui ne
méritait pas forcément cette mise au rebut (Proud to be loud, par
exemple, c'est très bon !). Les tout premiers albums, bon, ça n'a de
fait pas grand chose à voir avec ce qu'ils proposent dans celui dont je
suis censé parler aujourd'hui.
Revenons donc à ces cowboys. Dès le début on est cueillis par le son
très métallique, pas forcément très avenant au premier abord, mais qui
colle en fait parfaitement au propos du disque : taper lourd et fort en
permanence. Et de ce point de vue c'est indiscutablement très réussi,
l'entrée en matière avec la chanson titre est absolument énorme, et il y
a bien peu de moments où la tension redescend. Solos de guitare
efficaces, riffs inspirés, et même un ou deux titres qui renouvellent
l'atmosphère (Cemetary gates, peut-être le sommet de l'album avec
la première piste, ou même Medicine man) c'est du très très bon.
Si on voulait pinailler, on pourrait signaler une ou deux marches
harmoniques peu subtiles dans les solos, ou un titre qui est à mon sens
de trop (Primate concrete sledge, trop rapide et bourrin), mais
l'ensemble est tellement maîtrisé que ça mérite la note maximale !
- Pantera - Vulgar display of power (1991) ★ ★ ★
Je dois bien avouer être assez embêté au moment de parler de cet album,
considéré de façon quasi unanime comme le sommet de la production du
groupe. Après avoir trouvé Cowboys from hell excellent, je
m'attendais donc à une nouvelle baffe magistrale et ... ça n'a pas
vraiment été le cas, je trouve ce disque nettement moins bon que le
précédent. Entendons-nous bien, on est clairement dans la lignée du
précédent, à savoir un bon tabassage en règle (la pochette donne le ton,
même si je la trouve assez grotesque), et il y a à nouveau des pistes
énormes (la première, Mouth of war, ou encore le très bon This
love), mais aussi, à mon avis, des moments beaucoup plus quelconques
(Fucking hostile caricaturalement bourrin, le riff de Rise
pas emballant, ou même Hollow musicalement assez pauvre et même
pas très bien chanté), voire même de vrais ratages (Live in a
hole, je trouve ça vraiment pas beau, et la fin de By demons be
driven me laisse extrêmement perplexe). Pas suffisant pour gâcher
complètement l'album non plus, mais la vague impression de ne pas avoir
entendu la même chose que tout le monde.
- Pantera - Far beyond driven (1994) ★ ★ ★ ★ ½
Pas de changement de cap pour le groupe, et même un recentrage autour de
ce qu'ils font de mieux, du lourd, du bourrin, mais maîtrisé à la
perfection. Les premiers titres de l'album sont excellents, les derniers
aussi (Uses my third arm, Throes of rejection, ça envoie
du lourd, on a presque l'impression que la reprise de Black
Sabbath en fin de disque n'est là que pour montrer qu'ils peuvent
aussi faire moins brutal). Entre les deux, un très léger fléchissement
(et un poil d'expérimentation sur Good friends and a bottle of
pills, j'avoue ne pas vraiment aimer cette piste), mais l'ensemble
est à mes oreilles beaucoup plus constant dans la très bonne qualité que
Vulgar display of power. Un peu moins puissant tout de même que
Cowboys from hell (et puis bon, au bout d'un moment, l'effet de
surprise ne peut plus jouer), mais tout de même un excellent opus.
- Pantera - The Great southern trendkill (1996) ★ ★
Autant le dire tout de suite : cet album m'a beaucoup énervé, car j'ai
vraiment l'impression que ce qui aurait du être un nouveau très bon
disque a été en grande partie gâché par une exagération hors de propos
dans la volonté de faire agressif et brutal, notamment au niveau du
chant. C'est bien simple, Phil Anselmo beugle quasiment en continu sur
tout l'album, c'est par moments franchement moche, et surtout ça n'a
aucun intérêt (y a le grindcore si on veut vraiment entendre des trucs
où la musique est secondaire). D'ailleurs, le début du disque donne le
ton, avec cette première chanson qui débute en mode agression
caractérisée, ça aurait été rigolo (et même excellent) si ça s'était
limité à cette première minute, mais beaucoup de titres pâtissent
vraiment énormément de ce "chant" envahissant. Et c'est très dommage,
car il y aurait pourtant plein de bonnes choses à dire musicalement
parlant, d'ailleurs les quelques plages qui tentent une rupture de ton
vers quelque chose de plus dépressif (10's, le début de
Floods, la première partie de Suicide note) sont très
bien...
- Pantera - Reinventing the steel (2000) ★ ★ ★ ½
Légèrement échaudé après l'album précédent, c'est avec une certaine
appréhension que j'ai testé ce dernier opus de Pantera. Ouf, on est
revenus à quelque chose de beaucoup plus supportable niveau chant (ça
crie "normalement" pour du metal de ce genre quoi), tout comme au niveau
des compositions, avec un bon nombre de titres très classiques dans leur
construction, qui semblent clairement indiquer une volonté de recul de
la part du groupe. C'est parfois très bien (Goddamn electric ou
Revolution is my name), parfois plus quelconque, notamment dans
la deuxième moitié du disque où ça tourne un peu à vide (on en viendrait
presque à demander un peu plus d'intensité, un comble pour ce groupe !).
Quelques tentatives bienvenues pour varier les sonorité (l'inaugural
Hellbond ou l'intro de It makes them disappear mais
l'ensemble, s'il s'écoute très bien, est un ton en-dessous des meilleurs
albums du groupe. Ah, et puis quand même, une pochette aussi moche,
c'est vraiment pas possible...
- Queensrÿche - The Warning (1984) ★ ★ ★ ★
La liste des groupes de métal dont j'ai écumé la discographie manquait
jusqu'ici de Q (oui, l'initiale, à quoi pensiez-vous ?), il est donc
temps d'y remédier avec ce groupe américain souvent cité comme un des
initiateurs du prog metal (les lettres W, X et Z attendront encore un
peu par contre). Dans ce premier album, on sent à vrai dire surtout
l'influence du heavy classique (et classe) d'un Iron Maiden et la
présence parfois envahissante de son chanteur hors normes Geoff Tate
(faut aimer les aigus, mais quand même, ce garçon a quelque chose). On a
par ailleurs la curieuse impression d'un album hors du temps, avec ce
son qui manque cruellement de puissance (pour une fois, j'avoue que la
version remasterisée fait du bien pour donner un peu de poids à tout ça)
pour un disque enregistré la même année qu'un Ride the lightning,
mais en même temps cette volonté permanente de proposer quelque chose de
recherché, de travailler énormément les atmosphères à coups de petits
effets qui place la musique de Queensrÿche bien loin des préoccupations
de beaucoup de groupes de l'époque. Et franchement, même s'ils semblent
encore chercher un peu leur voie sur ce disque (le côté déstructuré de
NM 156, la fin très étonnante de En Force), les
expérimentations proposées par le groupe ne sont jamais complètement
vaines, et leur sens de la mélodie accouche de plusieurs titres vraiment
excellents (Warning, Deliverance, les 10 minutes de
Roads to madness avec ses touches orchestrales et son chant "too
much" qui finissent par convaincre). Plus qu'un essai prometteur, c'est
tout bonnement déjà un excellent album !
- Queensrÿche - Rage for order (1986) ★ ★ ★
Pour ce deuxième album, Queensrÿche se détache de l'influence Maiden et
expérimente pas mal, semblant encore chercher un peu sa voie mais
proposant une nouvelle fois beaucoup de choses intéressantes et
originales dans le monde du metal de l'époque. Un peu plus de synthés
que dans leur premier disque, beaucoup de choeurs, toujours la présence
de petits effets pour donner de la profondeur aux compositions, des
tempos variés, il y a toujours quelque chose à se mettre sous la dent,
et en même temps on regrette un peu que le groupe ne développe pas plus
certaines compositions qui l'auraient mérité (aucun titre de plus de 5
minutes ici, le côté prog n'est pas encore complètement assumé).
Typiquement, The Killing words aurait pu être une tuerie mais
s'arrête curieusement en donnant l'impression de ne pas avoir tout dit.
C'est quand même l'un des meilleurs titres de l'album, avec Walk in
the shadows. Il y a aussi malheureusement un peu de déchet,
Surgical strike ou London n'ont pas grand chose de
passionnant à raconter. Ensemble inégal, mais le bilan annuel reste
suffisant pour un passage en deuxième année. Euh pardon, je ne devrais
pas taper mes chroniques entre deux bulletins. Album très correct donc,
mais trop souvent constitué de promesses pas totalement réalisées.
- Queensrÿche - Operation : Mindcrime (1988) ★ ★ ★ ★ ★
Pour son troisième album, Queensrÿche décide de tenter le coup de
l'album concept, un choix plutôt judicieux vu leurs tendances à
l'expérimentation et à l'insertion d'effets et autres bruitages qui
trouveront ici naturellement leur place. En fait, c'est même beaucoup
mieux que ça : avec ce disque, ils ont trouvé le format idéal pour
laisser vraiment exploser leur créativité et nous pondent tout
simplement un classique de très haute volée. Pourtant, l'histoire
racontée n'a rien d'extraordinaire, surfant sur des clichés issus des
films "inquiets" des décennies précédentes (une histoire de junkie
recruté par une mystérieuse société révolutionnaire pour assassiner à
tour de bras, qui s'amourache d'une ancienne prostituée, le tout
finissant évidemment fort mal). Mais ça n'a pas grande importance car la
musique, elle, est vraiment excellente de bout en bout, très mélodique,
souvent dépressive (pas surprenant), parfois colorée de teintes
progressives (la longue Suite sister Mary) et de touches
orchestrales, et surtout vraiment inspirée. Pas vraiment de tube absolu
se détachant du reste (quoique The Mission soit quand même
vraiment fabuleuse), mais une suite homogène de titres tous réussis (le
seul raté à mon sens est My empty room), portés par le chant
habité de Tate et des ambiances travaillées, qu'on écoute d'un bloc sans
jamais décrocher (vraiment pas le genre d'album à écouter en tranches).
Un chef-d'oeuvre ? Pour moi oui.
- Queensrÿche - Empire (1990) ☆
Me voilà devant le cas de figure assez rare d'un album qui m'énerve
tellement que je suis incapable de le noter objectivement. Alors tant
pis, je le descends en flamme même s'il ne le mérite probablement pas.
Mais tout de même, quelle douche froide : après un Operation :
Mindcrime ambitieux et génial, il faut croire que l'un des membres
du groupe a eu l'idée saugrenue de proposer aux autres "ben tiens,
maintenant, si on enchaînait avec une bouse bien commerciale ?" et
surtout que les autres ont suivi. S'il y avait déjà en fond quelques
relents de rock FM dans le disque précédent, là ce ne sont pas des
relents, c'est permanent : claviers ridicules (les pouet pouet à la fin
de The Thin line), choeurs d'une insupportable niaiserie (sur le
refrain de Resistance par exemple), passages parlés à côté de la
plaque, et tempos retenus et ambiance cool en permanence (le minable
Della Brown en est un "bon" exemple), on a l'impression d'écouter
une bande-son de jeu video du type GTA et pas un véritable album. Même
si tout n'est pas aussi mauvais que je ne le laisse entendre, on a
vraiment complètement quitté la sphère metal pour quelque chose qui ne
m'intéresse tout bonnement pas du tout. Il ne reste plus qu'à espérer
que la suite de la discographie repartira sur quelque chose de moins
paresseux.
- Queensrÿche : Promised Land (1994) non noté
Quatre ans ont passé depuis la sortie d'Empire, une durée
relativement longue qui indique peut-être une remise en question de la
part du groupe par rapport à ce qu'ils ont proposé dans leur album
précédent ? En fait, pas vraiment (et c'est assez normal dans la mesure
où ledit album avait été loin d'être un échec commercial), Queensrÿche
confirme ici qu'il est parti dans des directions vraiment différentes de
ce qu'il faisait initialement, et surtout des directions qui vont me
faire arrêter les chroniques régulières le concernant (d'où le fait que
je ne donne déjà pas de note pour ce disque-ci). Notons quand même une
ambition retrouvée et pas mal d'expérimentations dans cet album, qui
tournent parfois au bizarre franchement foireux (Disconnected,
par exemple, ça ne ressemble vraiment pas à grand chose), mais
débouchent parfois sur des choses au style très éclectique pas
désagréables (I am I). Et puis le disque comporte aussi une
ballade avec piano et un peu de fond de violoncelle (Lady Jane)
que je trouve même vraiment réussie. Un album qui peut probablement
convaincre les auditeurs amateurs de rock au sens large qui ne sont pas
allergiques aux mélanges pas totalement naturels (la présence du saxo
sur la chanson titre par exemple...).
- Queensrÿche - Operation : Mindcrime II (2006) ★
Alors que le groupe est englué dans une série d'albums médiocres et pas
loin de se déliter complètement, il prend en 2006, soit 18 ans après le
premier opus, la décision courageuse de proposer une suite à son
chef-d'oeuvre de 1988. Courageuse ou suicidaire ? En tout cas,
Queensrÿche semble y mettre toute la bonne volonté dont il est capable :
le scenario est dans la continuité directe du premier volet (et se
déroule d'ailleurs 18 ans après !), les ambiances sont assez proches et
on a même droit de temps à autre à des allusions musicales assez
directes (les choeurs à la fin de If I could change it all qui
font écho à ceux de Suite sister Mary). On a même embauché Dio
pour donner un peu de classe à l'ensemble (bon, il n'a pas grand chose à
faire, mais le duo de The Chase est l'un des bons moments du
disque). Et alors, du coup, ça fonctionne ? Eh bien non, pas du tout,
les similitudes ne font que forcer à la comparaison, et ce deuxième
Operation : Mindcrime est tout simplement à des années-lumière de
son prédécesseur en termes d'inspiration. Quelques chansons correctes
(surtout vers la fin, A Junkie's blues par exemple) sans être
exceptionnelles, et un long enchaînement de titres très moyens, qui
noient sous les effets orchestraux leur manque de panache. Bien sûr,
l'album paye un peu le fait d'être la suite d'un chef-d'oeuvre, mais si
on a le malheur d'écouter les deux volets à la suite, la médiocrité de
celui-ci fait vraiment mal aux oreilles.
- Queensrÿche - Queensrÿche (2013) ★ ★ ½
Après de bien trop longues années passées à aligner les disques
décevants, Queensrÿche s'est enfin décidé à se séparer de son chanteur
certes charismatique mais devenu bien trop envahissant, et propose pour
fêter cela un album éponyme qui joue manifestement la carte de la
sobriété (pochette, durée limitée à moins de 40 minutes). Ok, mais
va-t-on simplement avoir droit à la même soupe avec un chanteur
différent ? À l'écoute, on a plutôt l'impression curieuse d'entendre une
musique différente avec le même chanteur ! En effet, le nouveau venu
imite de façon assez saisissante le style de Tate (ce qui n'est quand
même pas donné à tout le monde), alors que les musiciens, manifestement
libérés par ce changement de cap, osent beaucoup plus que dans les
albums précédents. On a même l'impression, le temps de deux titres
prometteurs (Where dreams go die et Spore, qui ouvrent
l'album après une intro pas vraiment marquante), de retrouver le groupe
ambitieux, capable de produire une musique mélodique et sophistiquée,
qu'on avait quitté il y a 25 ans (seul bémol, le son de batterie
vraiment moche). Ces promesses ne sont hélas pas totalement tenues, le
recours à des orchestrations inutiles (sur A World without
notamment) et quelques titres vraiment trop légers ou lorgnant encore
vers la pop (les voix traquées de Redemption) noircissant le
tableau. Mais on va quand même redonner une chance au groupe pour les
bonnes intentions qu'il manifeste ici.
- Queensrÿche - Condition Hüman (2015) ★ ½
Leur album précédent (le premier avec leur nouveau chanteur) m'avait
laissé espérer qu'une nouvelle ère intéressante pouvait s'ouvrir pour
Queensrÿche, cette nouvelle tentative semble hélas refermer la porte.
Non pas d'ailleurs que ce soit fondamentalement mauvais, mais on revient
assez clairement à quelque chose de beaucoup moins heavy, très
sophistiqué mais au fond pas très profond, et qui m'ennuie assez
rapidement. Seul All there was bouge un peu plus, le reste du
temps on est en permanence englué dans du mid tempo (voire pire) plutôt
bien ficelé mais qui manque quand même cruellement d'accroche, il ne
passe jamais rien de vraiment passionnant (un solo comme celui de
Selfish lives, à part faire plaisir au guitariste, il sert à quoi
?), aucune mélodie mémorable, bref un album pas désagréable en fond mais
dont je ne retiens absolument rien après plusieurs écoutes. Bon, tant
pis, Queensrÿche restera pour moi le groupe d'un chef-d'oeuvre, précédé
de deux bons albums, et suivi de beaucoup de déceptions.
- Rammstein - Herzeleid (1995) ★ ★ ★ ★
Qu'on aime ou pas Rammstein (et il y a certes de bonnes raisons de ne
pas les aimer), le groupe a su, à défaut d'en être l'inventeur,
populariser à un niveau assez inattendu un nouveau type de metal, et
surtout un nouveau type de son, qui fera ensuite bien des émules.
Industriel ? Si on veut, plutôt du metal basiquement lourd croisé avec
des sons électro-technoïdes (de ce point de vue, le terme "Tanz Metal"
souvent utilisé par les membres du groupe eux-même est plutôt mieux vu),
et en tout cas reconnaissable des les premières de ce premier disque.
Avec Wollt ihr das Bett in Flammen sehen, on est même plongés
immédiatement dans une caricature totale de ce que les allemands vont
mettre en place (mais ils jouent de toute façon en permanence de cette
image caricaturale, notamment via leurs provocations faciles
probablement un peu trop systématiques) : motif de quatre notes
tellement basique qu'il pourrait être joué par un débutant complet au
synthé kitschouille, rapidement repris à l'identique par des guitares
bien musclées, chant "germanique" quasi parlé de Lindemann (ou du moins,
là aussi, l'image caricaturale qu'on peut s'en faire, avec ce côté
guttural accentué à l'excès et les r roulés en permanence), on répète ça
en boucle pendant cinq minutes et ... ça marche. C'est ça qui est fort
dans cet album : musicalement c'est objectivement très très limité, mais
ça réussit quand même à instaurer un climat prenant qui fonctionne à
merveille. Bon, pas sur toutes les pistes non plus (on note quand même
la volonté de varier un peu avec la curieuse ballade Seemann, pas
totalement réussie mais qui offre quand même une rupture bienvenue),
mais Asche zu Asche, Du Riechst so gut ou
Laichzeit, personnellement, je ne résiste pas. Peut-être aussi le
fait que j'ai découvert le groupe il y a fort longtemps voile-t-il un
peu mon jugement, mais au sein de ce que je connais déjà bien de la
discographie du groupe (en gros les cinq premiers albums), celui-ci
reste un de mes préférés (il faut bien avouer qu'ensuite ils reprendront
beaucoup la même formule, en mieux exécuté et produit, mais sans la
spontanéité du premier jet).
- Rammstein - Sehnsucht (1997) ★ ★ ½
Après un premier album particulièrement efficace, Rammstein tombe dès ce
deuxième essai dans le travers dénoncé à la fin de ma chronique
précédente : refaire la même chose en mieux produit, et pourtant au
final moins convaincant. Il n'y aucun doute, le groupe a eu nettement
plus de moyens à disposition, notamment au niveau des claviers : au lieu
des micro-mélodies jouées au synthé un peu cheap, on a désormais une
avalanche de bruitages et autres samples électroniques très variés sur
toutes les pistes. Mais voila, la qualité des sons ne fait pas tout, et
là où les bzoui-bzoui de Herzeleid formaient un contrepoint
bienvenu qui mettait vraiment en valeur les riffs de mammouth des
guitares, on a désormais un trop-plein d'électronique qui parasite le
discours (la seule exception notable étant probablement les violons
synthétiques de la perturbante Spiel mit mir, assez
intéressants), alors même que le côté dansant du metal produit par les
allemands semble avoir été mis de côté (seule Eifersucht va
chercher de ce côté), et surtout que les riffs eux-même sont dans
l'ensemble beaucoup moins percutants que sur leur premier disque, à
l'exception d'un Du Hast qui surnage nettement au-dessus du
reste. Dommage, car il reste quand même ce son inimitable, cette
ambiance si particulière qui suffisent à rendre le disque largement
écoutable, même s'il marque nettement moins que son prédécesseur.
- Rammstein - Mutter (2001) ★ ★ ★ ★ ½
Après un deuxième essai frustrant, Rammstein trouve définitivement sa
carburation avec ce Mutter, qui le placera pour quelque temps au sommet
des groupes de metal populaires, et déclenchera donc (forcément ?) des
remous chez les fans du groupe, certains l'accusant de s'abaisser à
produire de la musique trop commerciale. Accusation qui n'a pas beaucoup
de sens, dans la mesure où le groupe a dès le départ assumé les
structures très simples de ses chansons et un côté mélodique assez
affirmé (même s'il est certes poussé un cran plus loin dans ce troisième
album). Oui, le son est désormais beaucoup moins brut que sur
Herzeleid (mais toujours aussi reconnaissable et sacrément
impressionnant), et les claviers sont définitivement passés en mode
symphonique avec notamment l'intervention de violons sur une grande
majorité des pistes. On pourra trouver ça trop sucré pour du Rammstein,
mais quand c'est aussi bien utilisé que sur le tonitruant Mein Herz
brennt qui ouvre le disque (quel parpaing dans la tronche une fois
de plus, personnellement je ne peux pas résister), ou dans un tout autre
registre sur un Mutter qui réussit enfin admirablement le plan
"ballade mélancolique" déjà recherché avec Seemann puis
Klavier sur leurs deux premiers opus, on ne peut que s'incliner.
On retrouve par ailleurs les bruitages électro caractéristiques, les
refrains hyper efficaces et les riffs en béton armé. Probablement un peu
trop calibré et prévisible (que des chansons assez courtes, les
rythmiques martiales parfois répétitives), mais tellement bien fichu que
ça reste un incontournable de la discographie du groupe.
- Rammstein - Reise, reise (2008) ★ ★ ★ ★ ★
Avec ce quatrième album, le groupe continue dans la droite ligne du
précédent (et même un peu plus, c'est sûrement l'album le plus mélodique
et accessible du groupe), mais en ajoutant une bonne dose d'humour qui
le place à mon sens encore au-dessus de Mutter (ben oui, cinq
étoiles pour Rammstein, hop, c'est fait). Alors bien sûr c'est de
l'humour (volontairement) pas subtil, mais la doublette Amerika
(pour les paroles pour une fois) et surtout Moskau restera
toujours irrésistible pour moi (et pourtant ce délire avec choeurs
féminins n'a probablement pas vraiment sa place ici, ni sur aucun autre
album de metal d'ailleurs, mais j'adore quand même). Le reste est
extrêmement solide, que ce soit dans le registre classiquement
provocateur cher au groupe (Mein Teil), ou dans celui de la
ballade émotionnelle qui prend de plus en plus de place dans le
répertoire rammsteinien (Ohne dich). Quelques touches
d'originalité bienvenues (l'accordéon à la fin de la chanson titre), et
le tout suffit à prouver qu'un album "facile" peut très bien être une
grande réussite. D'ailleurs (hélas), le groupe, en gardant pourtant une
recette similaire, n'arrivera plus à produire quoi que ce soit du niveau
de ce Reise, reise, ni même un album lui arrivant à la cheville
d'ailleurs.
- Rammstein - Rosenrot (2005) ★ ★
Il arrive régulièrement, lorsqu'un groupe tente de renouveler un peu
trop brutalement, qu'on pense d'un album "Ils ont voulu faire autre
chose, mais ils se sont plantés". Avec ce Rosenrot, Rammstein réussit un
autre genre de plantage "Ils ont voulu faire la même chose, mais ils se
sont plantés". Sorti un an seulement après l'excellent Reise,
Reise, ce nouveau disque en est un copier-coller beaucoup trop
manifeste (plusieurs pistes sont d'ailleurs des chutes de studio qui
n'avaient pas été retenus pour l'album précédent), mais en beaucoup
moins inspiré. On retrouve ce côté très mélodique et limite commercial,
encore plus assumé (le duo avec la chanteuse de Texas, faut pas
pousser, ça n'a vraiment rien à faire là), un certain nombre de pistes
lentes qui jouent la carte de l'émotion (probablement les meilleurs du
disque, un Wo bist du ? reste réussi, la conclusion Ein
Lied est également et simplement belle), quelques titres qui gardent
une accroche plus bourrine mais peinent à franchement impressionner
(Hilf mit mir sort quand même de ce lot), et une piste gag où on
se rend finalement compte que la frontière entre délire jouissif (le
Moskau de l'album précédent) et bouse grossière (ce Te quieto
puta) est bien ténue. Du coup, sans être franchement mauvais, le
disque déçoit et constitue le premier réel faux pas du groupe, qu'on
peut à ce moment-là mettre sur le coup d'un excès de précipitation.
- Rammstein - Liebe ist für alle da (2009) ★ ★
Après un Rosenrot franchement pas terrible, on était en droit
d'attendre des allemands une réaction, malgré les dissensions internes
qui minent le groupe depuis plusieurs années. Bon point a priori, ils
sont revenus à leurs habitudes pour cet album, à savoir plusieurs années
de maturation, mais surtout un retour à un son plus massif que sur les
opus précédents, sans revenir toutefois à l'indus des origines du groupe
(définitivement remplacé par des sonorités plus synthétiques que
réellement électro, avec utilisation un peu trop facile de bouts
d'orchestration dispensables). Et pourtant, même si l'album fait preuve
d'un savoir-faire indéniable, il peine à convaincre totalement. On a en
fait la toujours pénible impression que Rammstein s'est contenté
d'aligner une suite de titres bien calibrés, totalement dans l'esprit du
groupe, mais sans prise de risque, et a fait dans tous les domaines une
copie carbone un peu pâle de ce qu'il avait produit dans ses meilleurs
albums. Titres musclés qui n'arrivent pas vraiment à enclencher le turbo
(l'ouverture Rammlied essaie de pimenter la chose avec ses
choeurs surprenants, mais ça ne suffit pas), ballades vraiment pas très
inspirées (Frühling in Paris, ok c'est rigolo pour un francophone
mais on ne peut pas dire que ça vous remue beaucoup), même la
provocation facile de Pussy est un gros pétard mouillé qui
n'arrive pas plus à agacer qu'à enthousiasmer. Un album qui s'écoute
très agréablement comme musique de fond mais qui manque trop
d'approfondissement pour un groupe qui a fait tellement plus fort
auparavant.
- Rammstein - Rammstein (2019) ★ ★ ½
Après pas moins de dix ans de silence (enfin, façon de parler, puisque
le groupe a toujours continuer à tourner), et alors que plus personne
n'y croyait trop, voila que Rammstein ressort un album, que la rumeur ne
tardera pas à qualifier d'adieu de la part du groupe (à tort, puisqu'un
huitième a été publié depuis). Après une grosse baisse de régime sur les
deux opus précédents, ce disque sans titre à la pochette
particulièrement minimaliste commence bien, en laissant définitivement
tomber les titres bourrins (seul Tattoo en fin d'album propose un
riff rappelant les premières heures du groupe) et en remettant très
clairement les claviers au premier plan. On a même droit à des sonorités
assez désuètes sur Radio (justifiées par le thème de la chanson,
sympathique malgré son refrain un peu agaçant) et à une louche de disco
sur le très bon Ausländer (on retrouve un côté décalé réussi, ça
fait plaisir). Mais la piste la plus marquante est probablement
Puppe, glauque et dérangeante comme aux plus belles heures de
Rammstein, avec un Lindemann qui éructe comme un possédé, c'est assez
impressionnant. Mais hélas, après un demi-album vraiment convaincant,
les dernières pistes retombent dans une sorte de routine molle sans
grand intérêt (la ballade Diamant, qu'est-ce que c'est
poussif...). L'ensemble reste le meilleur album proposé par le groupe
depuis le sommet Reise, Reise, mais on n'arrive pas à monter
au-dessus d'un album bilan honorable.
- Rammstein - Zeit (2022) ★ ★ ★ ½
L'album éponyme de 2019 n'était donc pas le dernier, le groupe revient
cette année avec une nouvelle livraison (même si le titre de la chason
conclusive, Adieu, risque fort de relancer la machine à rumeurs).
Et ils ont bien fait, car ils proposent là leur meilleur album depuis
bien longtemps. Au lieu d'essayer de revenir sans y parvenir aux
parpaings industriels de leurs débuts, ils choisissent ici consciemment
une ambiance générale nettement plus posée, mais surtout assez
dépressive, qui leur réussit finalement assez bien. L'album débute
d'ailleurs avec deux titres au tempo très retenu (Armee der
Tristen, dont on se doute que ça ne va pas être très joyeux, et
l'encore plus étonnante chanson-titre après son piano assez minimaliste,
un registre vraiment inattendu pour Rammstein), un contre-pied qui
fonctionne très bien. On aura certes droit par la suite à des choses
plus classiques pour le groupe (les titres humoristiques à tendance
lourde comme Zick zack et Dicke Titten ne sont pas les
plus géniaux du disque, mais dans un genre proche, j'aime beaucoup
OK), et aussi à quelques moments faibles (Schwartz,
Lügen et ses effets dispensables), mais les trois quarts d'heure
de musique passent sans qu'on s'en rende compte. Pour le coup, s'ils en
restent là, les allemands auront tiré leur révérence sur une bonne note.
- RATM - Rage against the machine (1992) ★ ★ ★ ★ ★
Je l'avoue volontiers, parmi les albums "que tout le monde a déjà
écoutés", celui-ci ne me tentait a priori pas le moins du monde. Le
mélange metal-rap, très peu pour moi (le rap étant l'un des domaines
musicaux avec lequel je n'ai vraiment aucune attache), et la
revendication politique me passe par-dessus les oreilles quand j'écoute
de la musique. Autant dire qu'il m'a quand même mis une baffe assez
monumentale pour que je lui accorde a posteriori la note maximale. De
fait, c'est bien une baffe qu'on prend en pleine poire avec
l'enchaînement des deux premiers titres, Bombtrack et Killing
in the name, qui ont bien mérité leur statut de tubes
incontournables : violent, puissant, pas besoin de vraiment faire
attention à ce qui est chanté pour la sentir, la "rage" des musiciens,
et ça fonctionne remarquablement. D'ailleurs, le reste de l'album
réussit à maintenir un niveau assez impressionnant : mélange des genres
vraiment réussi (je suis moins fan des plages plus déclamatoires comme
Settle for nothing, mais il y a toujours quelque chose de
musicalement intéressant malgré tout qui fait dresser l'oreille),
trouvailles qui relancent constamment l'intérêt (les sonorités étranges
de Bullet in the head, le petit passage choral de Know your
enemy), et en plus une qualité sonore exceptionnelle pour un premier
album. Bref, un album d'une maturité et d'une efficacité
impressionnantes, susceptible de convaincre même les plus rétifs au
genre comme moi.
- RATM - Evil empire (1996) ★
Après le choc que m'avait procuré le premier album du groupe, je devais
forcément attendre beaucoup du deuxième, probablement trop. La déception
aura donc été à la hauteur de cette attente, car cette fois-ci je
n'accroche pas du tout. En fait, je trouve là les défauts que je
craignais avant de découvrir l'album précédent, avec une musique qui
tire nettement plus vers le rap (même le chant est nettement plus
clairement orienté rap, ça braille moins que dans l'album éponyme), mais
aussi tout de même des accompagnements beaucoup plus basiques et
répétitifs, moins variés et percutants, en un mot nettement moins
inspirés. Sur le fond, les deux albums ne sont pourtant pas si éloignés
que ça, mais j'ai l'impression d'entendre "le même en plus rap et en
moins bien" et ça suffit à me le rendre très nettement moins agréable à
écouter (je suis quand même moi-même surpris de l'écart d'appréciation
que je ressens entre les deux). On verra si leur troisième album me
remet la pêche ou pas.
- RATM - The Battle of Los Angeles (1999) ★ ★ ½
Face au dernier album du groupe, je me sens un peu comme je l'étais
parfois au moment de décider ou non d'aller voir au ciné le troisième
volet d'une série où le film inaugural avait été un énorme choc, et la
suite une tout aussi grande déception. Nos rappeurs métalleux
allaient-ils remonter la barre, ou bien devrais-me contenter de me
remettre encore leur premier album dans les oreilles pour oublier aussi
celui-là ? Eh bien, un peu entre les deux, on retrouve ici sur certains
titres une véritable inspiration et une efficacité indéniable (les
intros de Calm like a bomb ou de Ashes in the fall font
tendre l'oreille), et la variété des sons produits à la guitare est à
nouveau impressionnante, mais on reste quand même assez loin du compte
car on ne retrouve par contre toujours pas les "coups de poing dans la
gueule" du premier album, et il y a encore trop de titres bouche-trou
répétitif et trop axés rap pour moi (Born as ghosts, New
millenium homes). Clairement, cet album ne m'aurait pas suffi à
vraiment considérer le groupe comme une découverte majeure, même si je
l'écoute nettement plus facilement que le précédent.
- Rhapsody - Legendary tales (1997) ★ ★ ★ ½
Vous l'attendiez tous avec impatience depuis des mois, il est enfin
temps que je consacre quelques semaines à éplucher la discographie de
Rhapsody (oui, ça prendra du temps, car l'historique du groupe est un
peu compliquée depuis quelques années), mythique groupe de metal
symphonique qui laisse rarement indifférent. Il faut dire que la force
de Rhapsody (ou ses limites, selon le point de vue), c'est le côté
complètement premier degré de leur entreprise, là où beaucoup auraient
joué la carte de la parodie. Ils ont donc mis au goût du jour à la fin
des années 90 (ils seront copiés par une quantité invraisemblable de
groupes ensuite, notamment du côté de la Finlande, même si eux-même sont
italiens) un nouveau genre de metal qu'ils ont eux-même baptisé
"Hollywood metal", ce qui est pour le moins révélateur. Univers fantasy
hyper balisé (les cinq premiers albums du groupe racontent l'histoire du
chevalier de Glace parti tataner les vilains et sauver les princesses,
il vaut mieux ne pas trop faire gaffe aux textes si on ne veut pas être
affligé par la quantité de clichés niais débités au mètre carré),
alternance de titres speed épiques (avec grand renfort de choeurs, de
claviers mais aussi de vrais instruments classiques, violon et flûtes en
tête) et de ballades hyper mielleuses, avec un soupçon de folk par
moments, et des influences qui mêlent musique classique (sur ce premier
album, on a du clavecin, des choeurs bien orffiens, mais aussi une
citation des Danses slaves de Dvorak assez incongrue) et musique de film
(sans surprise, on peut penser par exemple à celle de Conan le
barbare...). Tout ça sent le carton-pâte à plein nez, mais c'est
complètement assumé, et assez irrésistible car les gugusses ont du
talent à revendre. Bon, ce premier essai souffre quand même d'un
équilibre précaire et de compositions parfois très bizarrement
construites (Rage of the winter ou Flames of revenge, ça
fait plus juxtaposition d'idées plus ou moins sympa qu'autre chose), et
surtout de passages vraiment ratés (le break folk de Forest of
unicorns tombe complètement dans la ridicule). Mais ça reste un
premier album assez fascinant, tant tous les éléments constitutifs de
l'univers rhapsodiesque sont présents et dans l'ensemble maîtrisés :
intro monumentale qui débouche sur un titre speed imparable (Warrior
of ice, mais dans le genre speed, Land of immortals et
Lord of the thunder déboîtent bien aussi), instrumental médiéval
en cours de route (Virgin skies), belle utilisation du piano et
du clavecin, et une longue dernière piste narrativo-épique qui deviendra
une marque de fabrique sur les albums suivants, les fans se régaleront
déjà, et les autres détesteront déjà !
- Rhapsody - Symphony of Enchanted Lands (1998) ★ ★ ★ ★ ★
Un an après un premier opus remarqué, Rhapsody enfonce violemment le
clou en proposant l'un des albums incontournables du genre qu'il a
contribué à ressusciter. C'est très simple, on a ici droit à un
Legendary tales puissance mille. Le principe reste le même, une
sorte de BO imaginaire d'un film d'heroic fantasy bien carton-pâte (ici,
le héros part à la recherche des trois clés de la sagesse qui lui
donneront accès à la légendaire épée d'émeraude, aidé en cela d'un fier
dragon auquel il a laissé la vie sauve et qui devient son fidèle allié,
le sauvant plusieurs fois d'une mort certaine avant de succomber
lui-même à ses blessures à la fin de l'épopée, on se demande vraiment
comment ils ont fait pour créer une histoire aussi originale !), dopée
par un orchestre et des choeurs toujours plus présents (la star du
disque est clairement l'orchestre beaucoup plus que le groupe de metal
qui joue avec, c'est d'ailleurs le plus symphonique des cinq disques
constituant la première saga illustrée par Rhapsody). Mais alors que
leur premier album était encore un peu bancal, celui-ci emporte tout sur
son passage, alignant les titres speed épiques imparables avec un
naturel confondant (Emerald sword, Beyond the gates of
infinity), usant des flûtes et du clavecin avec justesse (bon, ok,
la ballade Wings of destiny risque de ne pas passer pour ceux qui
n'aiment pas le supplément de crème), et arrivant même à insérer
bruitages grotesques (pépiements d'oiseaux, cavalcades) et autres
passages narrés (ah, les "mighty warriors" chers à Rhapsody !) sans que
ça ne tombe dans le n'importe quoi (bon, ça reste évidemment très
subjectif comme affirmation, mais l'album dans son ensemble tient
vraiment incroyablement bien la route si on rentre dans le trip, il n'y
a vraiment aucun titre qui sonne faux). Les amateurs de musique baroque
apprécieront (ou pas) The Dark tower of abyss et son côté
"Vivaldi revu à la mode metal", et le motif épique qui conclut la très
longue piste éponyme finale conclut de façon inoubliable un disque que
j'ai du écouter quelques centaines de fois (j'exagère à peine) en 20
ans, sans jamais m'en lasser.
- Rhapsody - Dawn of victory (2000) ★ ★ ★ ★ ½
Après un Symphony of Enchanted Lands qui semblait être une
référence quasiment insurpassable (et qui, de fait, n'a probablement
jamais été surpassée dans ce genre), le troisième album de Rhapsody
pouvait difficilement faire autre chose que décevoir ses fans de plus en
plus nombreux. C'est (un tout petit peu) le cas, mais les italiens ont
été assez malins pour ne pas donner dans la surenchère symphonique,
orientant beaucoup plus nettement leur nouvelle proposition du côté d'un
heavy metal certes encore largement agrémenté de touches symphoniques
(on a toujours droit à quelques touches de clavecins et autres flûtes
aussi), mais beaucoup plus direct, avec des guitares qui reprennent
clairement le dessus sur l'orchestre (il faut dire aussi que le tournant
pris par l'histoire le justifie, on est dans l'épisode médian de la
série, donc comme il se doit celui où le côté obscur semble prendre le
dessus de façon irréversible, et comme d'habitude on a fait dans la
subtilité côté textes, avec mort brutale de moult héros et autres
atrocités). Cette tendance atteint même son paroxysme dans un Holy
thunderforce où le groupe se fait manifestement plaisir, Fabio Lione
forçant même pas mal côté vocal. Le reste du temps, on reste sur une
majorité de titres speed très mélodiques, avec une intro symphonique
spectaculaire mais pas de vraie ballade cette fois-ci (à la place, on a
un Village of dwarves en mode gigue revue à la sauce Rhapsody et
un Trolls in the dark instrumental nettement plus intéressant que
le premier cité à mon sens), et une dernière piste de plus de dix
minutes épico-narrative (même si les interventions parlées sont réduites
au strict minimum sur ce disque). Et le moins qu'on puisse dire, c'est
que Rhapsody maîtrise sacrément bien son sujet, les mélodies sont
imparables, les interventions du choeur font mouche à chaque fois, pas
un seul titre faible dans le lot, c'est de la très belle ouvrage. En
fait, le seul petit défaut de cet album, c'est d'arriver juste après un
chef-d'oeuvre dont il n'arrive pas à égaler le côté magique. C'est
"seulement" un excellent album, qui prend probablement moins de risques,
mais d'une efficacité absolument redoutable.
- Rhapsody - Rain of a thousand flames (2001) pas de note
Une fois n'est pas coutume, je vais dire quelques mots d'un album sorti
sous le format EP (mais pas de note, pour les raisons expliquées
ci-dessous : il n'y a en fait pas assez de Rhapsody là-dedans à juger).
Un EP certes, mais quand même 42 minutes de musique, et un nouvel
épisode de la saga de l'épée d'émeraude (comme le titre peut le laisser
penser, il s'agit ici essentiellement de raconter les massacres
perpétrés par Gros Méchant qui a récupéré l'épée que le gentil s'était
pourtant cassé le cul à chercher pendant tout un CD). Pourtant, le
format se comprend dans la mesure où il y a en fait très peu de contenu
réellement composé par Rhapsody dans le disque, puisque les deux
morceaux de bravoure sont des adaptations d'oeuvres préexistentes. Au
niveau du contenu original pour commencer, on a la chanson-titre qui
nous propose du speed plus brutal qu'à l'accoutumée, pas mal mais ça
force un peu par moments (notamment au niveau du chant), deux titres
instrumentaux très dispensables (un machin folk sans intérêt et un autre
avec du piano sirupeux), et surtout une piste quasiment exclusivement
constituée d'une narration en mode "j'en fais des tonnes" franchement
ridicule (Tears of a dying angel). Pour la première fois, hélas,
Rhapsody tombe dans le piège de l'auto-parodie qu'ils avaient jusque-là
parfaitement su éviter. Les amateurs de classique auront d'ailleurs
probablement le même avis sur la piste finale, The Wizard's last
rhyme, qui reprend le dernier mouvement de la Symphonie du nouveau
monde à la mode Rhapsody, ce n'est pas si mal fichu mais bon, l'intro au
clavier ça ne peut pas éviter un côté nanar. L'autre adaptation (ce ne
sont pas des reprises à proprement parler, le groupe se base entièrement
sur le matériau mélodique d'origine mais en fait une revisite dans son
style si particulier) est plus intéressante, il s'agit de la musique
composée par les Goblins (groupe italien surtout connu pour ses
collaborations avec Dario Argento) pour Phenomena (n'allez
surtout pas regarder le film, Argento dans les années 80 c'est vraiment
pitoyable, par contre la BO qui utilise aussi du Maiden pour les scènes
de meurtres est assez énorme). Le titre, long tout de même de 13
minutes, est vraiment bon, mais on ne peut s'empêcher de penser que
c'est surtout grâce aux qualités de la composition originale, les ajouts
de Rhapsody consistant surtout en adjonctions de parties orchestrales et
chorales bien peu subtiles. Finalement, vous l'aurez compris, voila un
disque qui n'ajoute pas vraiment une ligne essentielle au CV du groupe,
même si ça reste tout à fait sympathique à écouter à la suite des
précédents.
- Rhapsody - Power of the dragonflame (2002) ★ ★ ★ ½
Après un EP un peu trop bouche-trou, voici venir le quatrième véritable
album de Rhapsody, et on est en droit d'attendre un beau feu d'artifice
puisqu'il s'agit tout simplement de la conclusion de la saga de l'épée
d'émeraude ! Dans cet épisode final, à la surprise générale, le héros
triomphe au dernier moment, quand Dark Vador, pardon Dargor, le bras
droit du gros méchant, se rend compte in extremis que le Mal c'est mal
et se retourne contre son boss. Hum, passons donc sur le scenario
toujours aussi recherché, niveau musique ça donne quoi ? Du symphonique
magique façon Symphony of Enchanted Lands ou du heavy ultra
efficace à la Dawn of victory ? Eh bien, le nouveau venu mélange
plus ou moins les deux styles, hélas sans égaler ses deux prédécesseurs.
Il faut bien avouer que, sur cet album, Rhapsody commence à s'essouffler
et ça s'entend, notamment quand Knightrider of doom démarre sur
un riff qui est à peine une variation de celui de Emerald sword.
En fait, tous les titres de l'album sont bons mais sentent un peu le
réchauffé, et les efforts du groupe pour tenter de le cacher à coups
d'innovations hasardeuses ne fonctionnent que rarement : When demons
awake est excellent instrumentalement, mais Lione qui essaye
d'éructer façon metal extrême c'est mauvais; la ballade Lamento
eroico chantée en italien pèse quelques gigatonnes (les choeurs
lyriques...); et les 19 minutes du Gargoyles final ne se
justifient pas du tout, l'intro à la guitare sèche hispanisante est à
côté de la plaque et la deuxième moitié s'éternise en sections inutiles
(un solo technique sans âme, des interruptions de chanteurs lyriques
déplacées, et un petit bout de narration grand-guignolesque), comme
s'ils avaient absolument voulu battre leur record de longueur juste
parce que c'est le disque final de la saga et qu'il faut bien marquer le
coup. Bref, à trop vouloir en faire, le groupe a un peu raté sa sortie.
Et pourtant le disque reste très écoutable, et même au-dessus d'une
grosse proportion de productions du genre. Mais venant d'un groupe qui a
mis aussi vite la barre aussi haut, on est forcément un peu plus
exigeants !
- Rhapsody - Symphony of Enchanted Lands II - The Dark Secret (2006) ★ ★ ★ ★
Après l'achèvement de leur brillante première saga d'heroic fantasy, la
rumeur est allé bon train pour essayer de deviner ce que Rhapsody allait
bien pouvoir trouver comme nouvelle source d'inspiration pour la suite
de leurs aventures. Autant dire que la déception fût grande quand ils
ont décidé... de raconter la suite de la sage de l'épée d'émeraude, avec
un premier épisode qui reprend carrément le titre de leur album le plus
mythique. Euh, attendez deux secondes, comment dit-on "foutage de
gueule" en italien déjà ? Bon, pour compenser, ils ont mis en oeuvre une
débauche de moyens révélatrice du statut acquis en quelques années :
orchestre symphonique et choeur au complet (jusque-là ils n'avaient
jamais disposé de plus que quelques instruments en plus des synthés
d'Alex Staropoli), et même Christopher Lee pour assurer les narrations,
ça a de la gueule. Mais ne serait-ce pas qu'une façon un peu facile
d'amadouer les fans déçus du manque d'ambition du projet ? À l'époque de
sa sortie, en tout cas, j'avais rejeté en bloc ce disque, estimant que
Rhapsody en faisait cent fois trop pour un contenu musical pas à la
hauteur. Je suis en partie revenu sur mon jugement initial. Certes, le
groupe en fait des caisses et ça devient parfois pénible : l'orchestre
et les choeurs bouffent complètement l'espace disponible (en dehors de
quelques solos, les guitares sont quasiment invisibles), les narrations
(l'espèce de voix trafiquée de démon, ouille ouille ouille) et surtout
les bruitages divers (galopade de cheval et autres bruissements de
rivière) sont plus énervants qu'utiles, et les titres les plus longs
manquent de cohésion (l'album dans son ensemble est probablement trop
long avec 72 minutes au compteur, et on a tellement de
citations/allusions à un peu tout et n'importe quoi qu'on a parfois du
mal à y retrouver son latin). Mais malgré tout ça, eh bien, je retombe
immanquablement sous le charme de la musique proposée par les italiens,
qui restent les maîtres pour aligner les titres épiques irrésistibles et
mélanger les influences classiques et les touches orchestrales à leur
speed généreux. Never forgotten heroes, le début de Erian's
mystical rhymes (après la narration !) et une bonne partie de
Sacred powers of raging winds, c'est quand même énorme. Du coup,
je pardonne même un final un peu plat et surtout des ballades très
médiocres (pour le coup, celle en italien, Guardiani del destino,
est la moins moisie des trois). Mais la prochaine fois, les gars, même
si on sait que ça vous démange terriblement, faites un vrai album de
metal et pas une BO de film mal déguisée. Ou alors, à la rigueur, faites
une vraie BO, en supprimant les guitares et le chanteur, et en filmant
quelques scènes tant qu'à faire. Hum, en fait, vu la qualité des clips
produits par Rhapsody à l'époque, c'est sûrement une très très mauvaise
idée...
- Rhapsody of fire - Triumph or agony (2006) ★ ★ ½
Avec ce sixième album commence chez les italiens une assez longue
période de soucis judiciaires (qui sera plus ou moins suivie de
l'éparpillement du groupe en petits morceaux, autant dire qu'il s'agit
vraiment d'un moment charnière marquant pour eux la fin d'une époque
dorée). Rien de trop méchant pour eux pour l'instant, ils ont juste du
modifier quelque peu le nom du groupe pour lui rajouter un appendice
tout de même assez ridicule. Mais ce premier disque de Rhapsody of fire,
donc, est surtout pour moi le premier du groupe à susciter autant de
doute, si ce n'est plus, que d'enthousiasme. On est certes dans la
lignée de l'album précédent, avec un orchestre plus présent que jamais
(il y a encore des guitares saturées en fait ?) mais les quelques
défauts qui pointaient le bout de leur nez sur The Dark Secret se
font ici nettement plus visibles : titres speed qui tournent toujours
sur les mêmes recettes (d'ailleurs peu nombreux cette fois-ci), ballade
en italien bien creuse, plus généralement un abus de chansons mid tempo
qui n'ont vraiment rien à dire (sur The Myth of the holy sword,
Lione en fait des tonnes pour essayer de rattraper le coup mais c'est
franchement voyant), passages pseudo-folk avec ambiance médiévale vus et
revus (Old age of wonders, avec les inévitables flûte et
clavecin, c'est vraiment très cucul la praline), et pour couronner le
tout une piste épique finale (ou presque, il y a une dernière chanson
après), The mystic prophecy of the demonknight, qui enchaîne sur
plus d'un quart d'heure les maladresses (rythmique trop répétitive sur
la partie "classique", puis surtout quelques passages de dialogues façon
"scène de film de fantasy" complètement à côté de la plaque, la volonté
de se rapprocher d'une BO de film pousse vraiment les italiens à faire
complètement n'importe quoi ici), avant une conclusion grandiloquente
avec narration ampoulée qui laisse franchement circonspect sur ce que
pourra donner l'album suivant du groupe. En fait, c'est simple, on a
souvent l'impression d'entendre un groupe de petits jeunes qui admirent
Rhapsody depuis leur plus tendre enfance et qui ont décidé de faire un
disque en les copiant, sans en avoir tout à fait le talent. Et de fait,
venant d'un groupe débutant, ce disque serait un premier jet assez
remarquable, auquel j'aurais mis au-dessus de la moyenne sans hésiter
(car il reste tout de même un savoir-faire et une inspiration mélodique
certains sur une bonne majorité des pistes). Mais venant après cinq
albums quand même très convaincants, on ne peut que constater que
Rhapsody est sur la pente descendante sur ce disque. Allez, la moyenne
quand même, parce qu'on prend quand même du plaisir (un peu coupable,
comme d'habitude) à l'écouter et le réécouter.
- Rhapsody of Fire - The Frozen tears of angels (2010) ★ ★ ★ ½
Comme les italiens sont particulièrement friands d'originalité au niveau
de la construction de leurs albums, la deuxième saga du groupe reprend
exactement la structure de la première pour ce qui est de l'enchaînement
des disques : quatre vrais albums avec un EP apéritif entre les deux
derniers. Et bien sûr, celui-ci qui est le troisième de ce deuxième lot,
est celui où tout va mal. En soi, c'est plutôt une bonne nouvelle, ça
pourrait donner un coup de fouet musical bienvenu après un album assez
mou. Mais en fait de coup de fouet, c'est un gros coup de frein que
Rhapsody va subir à la fin des années 2000. Après avoir du changer de
nom, c'est leur boîte de production qui leur pose des problèmes, au
point d'aller au procès et de rester quatre ans sans sortir de nouveau
disque. Vu la productivité habituelle du groupe, et la quantité de
concurrents prêts à s'engouffrer dans la brèche, quatre ans c'est une
petite éternité. Mais ce silence forcé, et surtout une relative perte de
moyens liée au changement de maison de disque (exit le gros orchestre
symphonique tchèque), seront finalement un mal pour un bien, dans la
mesure où le groupe revient à une formule plus directement centrée sur
le speed metal traditionnel (on entend à nouveau les guitares, on a même
droit à des bouts de solos fréquents, et les claviers aux sonorités
kitsch sont aussi présent que les violons, d'ailleurs tout aussi
synthétiques sur cet album). Et même si on tombe un peu dans la facilité
(les choeurs sur le refrain de Crystal Moonlight, les narrations
de plus en plus dispensables de Christopher Lee, le morceau pseudo-folk
médiévale qui semble devenu indispensable pour le groupe), une majorité
de morceaux sont réussis (Sea of fate, On the way to
Ainor), et l'album contient une improbable tuerie d'un mauvais goût
monstrueux (Reign of terror avec ses choeurs lyriques et son
déchaînement sans retenue de Lione au chant), comme on n'en avait pas
entendues depuis quelques albums de la part de Rhapsody, mine de rien.
Si la chanson-titre finale n'était pas aussi moyenne (non, je ne compte
pas les deux bonus, dont l'un est d'ailleurs un instrumental d'une
laideur sans nom qui n'aurait jamais du être gravé sur disque !), on
tiendrait même une très franche réussite. En l'espèce, c'est déjà
vraiment pas mal, on remonte à un niveau plus conforme aux standards du
groupe.
- Rhapsody of Fire - The Cold embrace of fears (2010) pas de note
Eh oui, Rhapsody nous a refait le coup : pour faire patienter le chaland
entre les deux derniers volumes de sa saga The Dark secret (dont la
sortie ne sera pourtant espacée que d'à peine plus d'un an, alors qu'ils
sortent de quatre années de silence forcé), un petit album
supplémentaire sous forme d'EP, exactement comme pour leur première saga
quelques années plus tôt. Mais autant Rain of a thousand flames
proposait un contenu réellement original par rapport aux albums qui
l'entouraient (pas forcément très convaincant, mais ça c'est une autre
histoire), autant le nouveau venu sent très fort l'attrape-pigeon.
Pourtant, le groupe italien avait promis un truc énorme, une grande
oeuvre symphonique de 35 minutes d'un seul tenant (à peine découpée en
quelques chapitres), on allait voir ce qu'on allait voir (l'EP est
d'ailleurs sous-titré, avec l'habituel manque de tenue de nos copains
italiens, A Dark romantic symphony...). En fait, c'est plutôt "circulez,
y a pas grand chose à voir" (en même temps, quand on connaît Rhapsody,
on sait que les effets d'annonce sont à prendre avec de grosses
pincettes). Il s'agit bel et bien de sept pistes distinctes, dont une
bonne partie de remplissage (dialogues complètement surjoués avec
quelques passages orchestraux qui débitent les clichés les plus éculés
de la musique de film hollywoodienne, même si c'est proprement réalisé),
une ballade en italien qu'ils n'ont pas du oser mettre sur le disque
précédent, et, quand même, un morceau de bravoure avec un titre de 16
minutes (The Ancient fires of Har-Kuun) varié et dans l'ensemble
réussi (celui-ci, pour le coup, il aurait eu sa place sur un "vrai"
album de Rhapsody), mais qui n'a rien de plus symphonique que ce que
propose habituellement le groupe (ok, on a une intro à l'orchestre
synthétique, mais c'est tout). Bref, un contenu pas déshonorant mais
tout de même assez maigre, et surtout l'impression tenace que le disque
a surtout été fait pour forcer ceux qui suivaient encore les déboires du
père Dargor (le héros de la saga en cours, j'ai arrêté de bous bassiner
avec le scenario depuis un ou deux albums, je vous rassure, c'est
toujours aussi cliché) à débourser quelques euros pour ne pas rater
quelques étapes majeures de sa quête (les fameux dialogues font autant
avancer le schmilblick que tout un album traditionnel), et ça c'est tout
de même assez mesquin...
- Rhapsody of Fire - From chaos to eternity (2011) ★ ★ ★ ½
À peine quinze ans après l'avoir entamé, mais surtout à peine plus d'un
an après être revenus aux affaires après leur imbroglio avec leur maison
de disque (avec tout de même un EP et un autre album depuis cette
reprise), les italiens de Rhapsody concluent définitivement la saga
d'heroic fantasy qui les accompagne depuis leurs débuts, et qui aura
marqué l'histoire du genre. Faut-il voir dans cette rapidité (habituelle
pour eux ceci dit) un regain d'inspiration et la volonté de conclure sur
un feu d'artifice cette épopée ? Probablement pas, puisqu'il filtrera
ensuite que les désaccords ayant mené à la rupture des deux principaux
compositeurs du groupe, qui interviendra après cet album, était déjà
latente au moment de sa composition. Les musiciens étaient donc
prosaïquement plutôt pressés de passer à autre chose... Mais, et c'est
tout à leur honneur, ils n'en ont pas profité pour bâcler ce dernier
disque, qui nous propose une musique tout à fait dans la moyenne de
celle de ses prédécesseurs (ce qui pour les premières années de Rhapsody
est tout de même signe d'une qualité très élevée !). Pas de grosses
surprises même si le groupe tente parfois d'innover un peu (Ghosts of
forgotten worlds et son ambiance étrange, titre toutefois trop
décousu, et surtout les choeurs très envahissants de I Belong to the
stars, que je ne suis pas sûr de vraiment aimer), c'est un disque
qui propose un tour d'horizon assez fidèle de ce que Rhapsody sait faire
de mieux, en se concentrant sur l'aspect heavy (l'orchestre est discret,
comme sur le disque précédent), et on a donc droit à un hymne speed
efficace (la chanson-titre qui ouvre le disque, après une intro presque
sobre pour du Rhapsody), un titre néoclassique rigolo (Tempesta di
fuoco), une chanson "dark" vraiment sympa (Aeons of raging
darkness, même si côté vocal ça part un peu dans le décor), et bien
sûr à une piste finale épique de 20 minutes parce quand même on est en
train de finir notre saga, faut bien qu'on batte notre record hein. Mais
ne nous plaignons pas, c'est réussi, et l'idée d'accompagner le passage
narratif d'une sorte de récitatif de guitare surprend (dans le bon sens
du terme). On n'en dira pas autant de l'extrêmement dispensable ballade
en italien Anima perduta, mais on est rassurés : Rhapsody (of
Fire) nous quitte donc sur une bonne note, avant de revenir très
rapidement sous... deux autres formes dont je parlerai bientôt.
- Luca Turilli's Rhapsody - Ascending to infinity (2012) ★ ★ ½
Après avoir bouclé leur deuxième saga, les deux têtes pensantes de
Rhapsody, Luca Turilli le guitariste et Alex Staropoli le claviériste
ont donc décidé de se séparer à l'amiable. Le second cité garde les
rênes de Rhapsody of fire (et conserve en gros tous les membres du
groupe, en premier lieu le chanteur Fabio Lione), tandis que Turilli
s'en va donc fonder... un autre groupe Rhapsody (auquel il colle très
simplement et modestement son patronyme), avec le même logo et même
pendant un temps le même batteur. Les italiens ne peuvent décidément pas
s'empêcher d'être grotesques, mais le bon point (ou pas ?) c'est que ça
nous promet une double dose de Rhapsody pour le même prix. Et c'est sans
surprise le guitariste qui a tiré le premier. Sans surprise car le sieur
Turilli avait déjà pondu auparavant plusieurs albums en solo, qui
proposaient une copie conforme de la musique de Rhapsody, avec quelques
sonorités plus électroniques, mais surtout en beaucoup moins subtil
(j'en vois qui froncent les sourcils, mais je vous assure que c'est
largement possible !) et avec un chanteur médiocre. Bonne nouvelle ici,
il en a embauché un autre plutôt compétent (ça part un peu plus dans
l'aigu qu'avec Lione toutefois, faut aimer). Pour la subtilité par
contre, on repassera. Le disque conserve une structure qui rassurera les
fans (intro orchestrale suivie d'un titre speed, chanson épique de plus
d'un quart d'heure pour conclure l'album), mais débarrassé du carcan
heroic fantasy imposé par les albums de Rhapsody (et qui contribuait
mine de rien à maintenir une certaine unité stylistique), Turilli se
donne le feu vert pour absolument tout et n'importe quoi, sans aucune
retenue : orchestrations bien lourdes évidemment, des touches
néoclassiques sans surprise, mais aussi quelques inspirations orientales
qui déboulent comme un cheveu sur la soupe, des apparitions incongrues
de chanteurs lyriques, des sons électroniques, et des moments
complètement pop. Le tout pouvant cohabiter au sein d'un même titre, ça
devient donc très rapidement bancal (Excalibur par exemple a une
construction absolument incompréhensible). Mais si on dénombre une
certaine quantité de gros ratages (la voix de l'introduction façon
bande-annonce hollywoodienne est risible, la reprise de pop italienne
Luna est d'une terrible médiocrité, et le long titre final est
tellement confus qu'on s'en lasse avant d'en avoir atteint la fin), ça
reste souvent suffisamment bien fichu (surtout point de vue mélodique)
pour qu'on prenne un plaisir quand même assez clairement coupable à
écouter le tout. Parmi les vraies réussites, la chanson-titre efficace
et un Dante's inferno vraiment bon. Parmi les trucs que je ne
peux pas défendre mais que je réécoute quand même en cachette,
l'inénarrable Tormento e passione, duo lyrique avec intro de
piano qui vire à la pop sans crier gare, c'est absolument énorme de
mauvais goût ! Ce qui est sûr, c'est que ceux qui ne supportaient déjà
pas le Rhapsody des débuts ne risquent pas se réconcilier avec le groupe
en écoutant ce genre de disque.
- Rhapsody of fire - Dark wings of steel (2013) ★ ★
Quelques moins après le disque de son ex-confrère Luca Turilli, c'est
donc au tour d'Alex Staropoli (toujours accompagné du reste de la bande,
et notamment de Fabio Lione au chant) de sortir son album estampillé
Rhapsody. Lui aussi reste d'une certaine manière fidèle à l'ADN du
groupe, mais les deux albums reflètent tout de même énormément la
personnalité des deux musiciens : là où Turilli en faisait des tonnes
niveau orchestrations et visait manifestement à créer le disque le plus
spectaculaire possible, Staropoli joue nettement plus sur la sobriété,
puisant dans les racines les plus heavy du groupe pour proposer une
suite de titres assez homogène, la plupart du temps mid tempo, avec bien
sûr une grosse base mélodique, et la présence inévitable de quelques
choeurs et touches orchestrales. Et là où son pote pêchait par excès de
zèle, c'est sûrement un excès de prudence (matérialisé entre autres par
l'abandon complet de la grosse piste épique en fin d'album) qui pourra
être reproché au claviériste, qui rend une copie certes propre mais trop
gentillette, qui manque justement de la flamme débordante des
compositions de Turilli. On démarre pourtant bien avec un Rising from
tragic flames efficace (comme le sera d'ailleurs un peu plus loin la
chanson titre, les deux titres sont d'ailleurs les plus rapides du
disque), mais assez rapidement on s'enlise dans des compositions certes
travaillées, mais trop scolaires, peinant à vraiment décoller (surtout
sur les titres lents, la ballade My Sacrifice est terriblement
laborieuse et s'étire sur plus de 8 minutes). Les orchestrations sont
discrètes, les choeurs manquent de puissance, et les tentatives de créer
des choses un peu inattendues niveau synthés (notamment un peu de saxo
sur les dernières pistes) ne convainc pas totalement. Sans être vraiment
mauvais, l'album ne peut que décevoir au regard du reste de la
discographie du groupe, n'arrivant pas vraiment à la cheville du moindre
album de la grande époque de Rhapsody. À tout prendre, je préfère encore
le délire de Turilli à la tiédeur de Staropoli, mais aucun des deux n'a
vraiment réussi à reprendre le flambeau Rhapsody de manière à le laisser
brûler au sommet de la hiérarchie du speed symphonique.
- Luca Turilli's Rhapsody - Prometheus - Symphonia ignis divinus (2015) ★
Avec son premier album sous la bannière de "son" Rhapsody, Luca Turilli
avait produit un disque pas inintéressant mais vraiment trop boursouflé
pour être totalement convaincant. Avec le suivant... eh ben c'est la
même chose en cent fois pire. Toute notion de mesure ou de sobriété a
définitivement disparu de l'univers musical du guitariste italien, qui
annonce d'ailleurs tout à fait sérieusement la couleur en prétendant un
changement de style : il ne fait plus du "Hollywood metal" (ce qui était
déjà assez révélateur) mais du "cinematic metal"). Sans compter bien sûr
le titre et la pochette qui augurent du pire. Le pire, on l'a
effectivement assez souvent dans ces compositions tellement noyées sous
les choeurs et l'orchestre que le côté metal en devient à peine
perceptible, et qui n'hésitent pas à tenter des mélanges pour le moins
douteux : chant grégorien-techno-speed héroïque sur Rosenkranz,
choucroute égypto-symphonique sur l'hilarant King Solomon and the 72
names of god (à côté, Ketelbey fait de la musique orientalisante
tout à fait sérieuse), et comme summum une adaptation du 19ème nocturne
de Chopin avec duo lyrique (la qualité de l'original suffit à sauver le
morceau du naufrage total, mais le simple fait que personne n'ait
empêché Turilli de mettre un tel truc sur son disque montre bien qu'il
n'y a plus personne à ses côtés pour freiner ses délires). Bien sûr, il
reste quelques belles mélodies et un certain savoir-faire, mais
l'ensemble est tellement incohérent qu'on ne peut plus adhérer, même à
moitié comme pour le disque précédent (celui-ci sera d'ailleurs le
dernier de cette formation, mais on recroisera toutefois Turilli dans
ces chroniques). Quand on compare au kitsch naïf et sincère des premiers
albums de Rhapsody, ça fait mal.
- Rhapsody of fire - Into the legend (2016) ★ ★ ★
Pendant que son compère Turilli se vautre dans le n'importe quoi, Alex
Staropoli continue d'essayer de faire survivre le Rhapsody "historique"
en restant plus fidèle aux fondamentaux du groupe. Et si la copie
précédente était un peu trop sage, celle-ci est déjà beaucoup plus
convaincante. On retrouve ici une musique beaucoup plus symphonique (on
a même droit pour la première fois depuis un petit moment chez Rhapsody
à de vrais instruments classiques), des choeurs présents, et une grosse
piste épique finale qui dépasse joyeusement le quart d'heure (même si
elle est trop morcelée pour être totalement convaincante, il y a de
bonnes idées, notamment le passage à la guitare acoustique typé
flamenco). Bref, du Rhapsody pur jus, avec ses hymnes épiques attendus
(Distant sky enchaîné après l'intro symphonique comme au bon
vieux temps), sa ballade ultra crémeuse (Shining star, dont
l'absence ne m'aurait pour le coup pas du tout gêné), et les tentatives
folk ici matérialisées par des sortes de cornemuses plutôt sympathiques.
Et puis, on a de vraies pistes ambitieuses qui atteignent plutôt bien
leur objectif, comme ce Winter's rain avec ses choeurs assez
inspirés. Bref, sans atteindre au chef-d'oeuvre (on reste loin des plus
grands disques du groupe, ça manque d'une ou deux pistes vraiment
mémorables), on passe un bon moment avec un groupe qui semble simplement
avoir à nouveau pris du plaisir à composer et à jouer, sans trop se
soucier du poids du passé.
- Rhapsody of Fire - The Eighth mountain (2019) ★ ★ ★ ★
Ce qui est bien avec nos copains italiens, c'est que même quand leur
musique commence à ronronner, on peut toujours se rattraper avec
l'agitation en coulisses : après un Into the legend pourtant
encourageant, le chanteur Fabio Lione a décidé de se barrer du groupe
pour aller rejoindre Angra, et le batteur a disparu aussi. Autant
dire que Staropoli s'est vraiment retrouvé tout seul aux commandes du
groupe. Le temps de tirer sa révérence ? Pensez-vous ! On recrute un
nouveau chanteur ayant fait ses classes sur The Voice (mais si...), et
on repart ! Le premier projet de cette nouvelle formule du groupe, une
reprise à l'identique des plus grands tubes historiques de Rhapsody,
laissait craindre le pire (on sentait qu'ils voulaient juste se rassurer
eux-même avec un album n'ayant strictement aucun intérêt), autant dire
que la grande réussite de cette "huitième montagne" est une excellente
surprise ! Rhapsody a un peu modernisé son approche (son plus dense et
un côté plus énergique que réellement speed dans le très bon Seven
heroic deeds), tout en conservant des marqueurs clairs de l'identité
du groupe (des titres vraiment classiquement speed comme Master of
peace ou Clash of times, mais aussi les ballades pas
franchement emballantes...), mais propose surtout des titres ambitieux
vraiment très réussis, comme The courage to forgive ou March
against the tyrant. Au rayon des petits nouveaux, le chanteur
Giacomo Volli est en fait très bon, par contre la batterie prend
vraiment trop de place (surtout quand c'est de la double en continu
comme sur les quasiment tous les titres rapides), c'est même le
principal point noir du disque avec les ballades foirées. Mais
indiscutablement, le groupe a retrouvé un niveau qu'il n'avait pas
atteint depuis bien longtemps, et ça fait plaisir ! Même Christopher
Lee, qui fait une apparition d'outre-tombe à la fin de la piste épique
qui conclut le disque (censé être le début d'une nouvelle saga, d'où le
clin d'oeil) sera sûrement d'accord.
- Turilli/Lione Rhapsody - Zero Gravity (Rebirth and Evolution) (2019) ★ ★
Quoi, encore un nouveau groupe, avec un nom encore plus grotesque que
tous les autres réunis, dans la galaxie Rhapsody ? Eh ben oui. En 2017,
pour fêter les 20 ans d'existence du groupe, les musiciens d'origine ont
décidé de faire une grande tournée anniversaire. Ou plutôt, uniquement
les musiciens ayant quitté le navire en cours de route, puisque tout le
monde est là sauf Staropoli qui continue toujours à essayer de faire
vivre le Rhapsody historique dans son coin. Une curieuse conception de
la fête, mais ils pousseront le bouchon un peu plus loin ensuite en
décidant d'enregistrer un nouvel album ensemble (alors même qu'un an
plus tôt Turilli jurait qu'il abandonnait définitivement le metal), et
de le faire sous la bannière Rhapsody (avec toutefois un sous-titre qui
laisse clairement entendre qu'ils n'assument pas complètement). Tout ça
ne donne guère envie d'apprécier l'album, mais essayons de le juger d'un
point de vue strictement musical. C'est simple, on est dans la droite
lignée des précédents efforts de Turilli : zéro gravité peut-être, mais
surtout zéro discernement et zéro subtilité, on fait beaucoup de bruit
et on mélange tout et n'importe quoi, avec choeurs et orchestre
obligatoires sur chaque piste. Au rayon des incongruités cette fois-ci,
des bouts de Queen repompés à l'identique et des citations de
l'Otello de Verdi sur la piste finale. Pour le reste, l'univers Rhapsody
est maintenant assez lointain, on est clairement dans une ambiance SF
futuriste, avec grand renforts de sons électroniques (dès fois que tout
le reste ne suffirait pas à saturer les oreilles de l'auditeur). C'est
parfois franchement nul (la ballade Anima immortale où Lione
force de façon ridicule au chant, le gloubi-boulga I am et son
saxo complètement perdu), souvent gentiment divertissant malgré tout
(Phoenix rising ou le bon duo Origins/Multidimensional).
Nul doute que Turilli pourra à nouveau composer de vrais bons albums le
jour où son melon aura un peu dégonflé...
- Rhapsody of Fire - Glory for salvation (2021) ★
Eh ben voilà, on en arrive au bout, de cette discographie à rallonge du
meilleur groupe de metal italien de l'histoire (y a-t-il énormément de
concurrents sérieux d'ailleurs ?) ! Les disques précédents l'ont
clairement fait comprendre, c'est bel et bien Staropoli avec son line-up
entièrement refondu qui détient vraiment les clés pour continuer
l'aventure en restant fidèle à l'esprit du Rhapsody originel. Mais si
The Eighth mountain avait laissé espérer que Rhapsody puisse même
retrouver la superbe de ses débuts, il faut bien avouer qu'on déchante
très vite cette fois-ci. Les ingrédients sont là, l'esprit aussi, mais
ce qui manque cruellement, c'est tout simplement l'inspiration. Les
titres bateaux et poussifs, avec refrain choral nunuche de rigueur,
s'enchaînent les uns aux autres sans qu'aucun ne retienne véritablement
l'attention. Pourtant, Son of vengeance lançait les hostilités de
façon tout à fait correcte, mais ensuite on s'enlise pour ne plus jamais
revoir le jour, la seule autre piste convaincante étant (heureusement)
la plus ambitieuse, Abyss of pain II (le titre ridicule étant du
au fait que le groupe a "développé" sur plus de dix minutes l'intro de
40 secondes de l'album précédent, un concept surprenant). On navigue
même pas loin du fond avec un Terial the Hawk dont les teintes
folk sont à la limite de la musique d'ambiance Disneyland, ou un
Magic signs très pop qui a droit à pas moins de trois versions
différentes en comptant les bonus du CD (une en italien, une en
espagnol, ils auraient pu au moins mettre du mandarin ou du tamoul pour
donner plus d'intérêt à la chose). Bon, du coup, on est bien obligés
d'espérer que le groupe ne s'arrêtera pas là, ce serait dommage de
partir sur une note pareille.
- Riot - Rock city (1977) ★ ★ ½
Pour s'aérer l'esprit entre deux albums de prog metal imbittables, quoi
de mieux qu'un bon vieux disque de rock (on est pas encore vraiment dans
le domaine du metal pour l'instant, mais la discographie à rallonge du
groupe le verra muscler son jeu assez rapidement) bien vintage marquant
les débuts d'un groupe un peu oublié ? Tout ici sent bon les années 70 :
la production un peu vieillie (mais qui a le mérite d'être d'une netteté
surprenante), le chant aigu de rigueur (fort bien maîtrisé d'ailleurs
dans l'ensemble), les riffs très groovy dans la lignée d'un Led
Zeppelin, et même la durée famélique du disque (33 minutes pour neuf
chansons, on ne s'éternise pas dans les développements alambiqués, et
pourtant il y a du solo sympa sur à peu près tous les titres). Mais pas
besoin de plus que ça quand c'est bon, et ce premier album est bon...
pendant sa première moitié (Warrior et son refrain entraînant, la
chanson titre qui est de fait rock jusqu'au bout des ongles,
Angel hyper classique mais terriblement efficace). Le reste est
plus poussif (quelques expérimentations sonores douteuses sur le titre
final This is what I get, le chanteur qui se met à en faire trop
pour compenser une inspiration en berne sur Tokyo rose), mais
bon, vu la durée très réduite de l'ensemble, ça s'écoute tout seul. Et
puis quand même, je me devais de consacrer une série à un groupe qui
repousse aussi loin les frontières du n'importe quoi au niveau de la
laideur des pochettes avec celles particulièrement "what the phoque" de
ses premiers albums !
- Riot - Narita (1979) ★ ★ ★ ½
Je vous ai déjà dit que j'adorais les premières pochettes de Riot ? Oui
? Ah mince, du coup on va être obligé de parler de musique. Dans la
droite lignée de leur premier album, celui-ci propose un rock pas encore
vraiment métallisé mais déjà un peu plus viril que sur Rock City.
Surtout, l'ambition est revue à la hausse avec des titres qui s'étalent
majoritairement sur quatre ou cinq minutes, pour une durée totale
approchant les trois quarts d'heure. L'inspiration, elle, est toujours
au rendez-vous, avec ce côté syncopé vraiment très plaisant et une
maîtrise technique appréciable. Et surtout, pas de baisse de régime
cette fois-ci, le disque allant même plutôt crescendo : après deux ou
trois titres un peu timides pour démarrer (comme si les musiciens en
gardaient un peu sous la pied) et une reprise sans intérêt de Born to
be wild, l'excellent instrumental qui donne son titre à l'album est
suivi d'une deuxième moitié de disque très convaincante, alignant les
chansons au feeling irrésistiblement entraînant (on tombe quand même
dans l'excès avec les bruitages douteux à la fin de la bien nommée
Hot for love) jusqu'à un Road racin' final excellent. Pas
vraiment la découverte d'un trésor oublié, mais un bon disque qu'on a
envie de réécouter quand on arrive au bout de la dernière piste, que
demander de plus au fond ?
- Riot - Fire down under (1981) ★ ★ ★ ★ ½
Ce troisième disque de Riot, le dernier avec son premier chanteur (et
avec sa mythique mascotte phoque en couverture) représente l'apogée de
sa première période très teintée rock. Mais l'évolution est déjà notable
ici, le son est beaucoup plus tranchant et les influences du metal
britannique manifestes. 1981, ce sont en gros les débuts d'Iron
Maiden, mais on pense plus aux albums contemporains de Judas
Priest ici, avec toujours sur certaines pistes un arrière-goût
zeppelinien prononcé (Feel the same, l'excellent Don't hold
back). Mais l'essentiel, c'est que ce disque est une tuerie (à mon
sens meilleur justement que les pourtant plus réputés Judas Priest de la
même période), avec des titres presque speed ultra efficaces (Swords
and tequila, la chanson titre, Run for your life), bien
contrebalancés par les titres plus rock déjà cités. On aurait juste aimé
que le groupe fasse preuve d'encore un peu plus d'ambition et de
personnalité (les quelques notes d'intro de Outlaw par exemple
sont géniales mais ça ne dure qu'une dizaine de secondes !), et aussi
évite de terminer son disque par un Flashbacks foireux (un bout
d'enregistrement live qui ne comporte pas de réel morceau, c'est très
bizarre). Mais tel quel, ce disque mériterait déjà d'être plus souvent
cité parmi les tous meilleurs des débuts du metal.
- Riot - Restless breed (1982) ★ ★ ½
J'avais dit des bêtises dans ma chronique précédente, le phoque est une
espèce en voie de disparition mais pas encore éteinte sur la curieuse
pochette de ce quatrième opus de Riot. Mais le plus important ici, c'est
surtout le changement de chanteur, le nouveau n'a pas du tout le même
registre que le précédent, tessiture plus medium et chant plus agressif,
pas mauvais mais on n'y gagne clairement pas au change (il force pas mal
pour essayer de rendre Loved by you intéressante, mais le fond
musical est trop pauvre pour qu'il y parvienne). La qualité musicale est
aussi nettement en baisse après un magistral Fire down under :
son plus brut (quelque part ça colle au changement de chanteur) et
surtout des constructions trop basiques, à la limite de la paresse (hop,
un petit motif de cavalcade qu'on répète un peu trop et ça fait tout un
morceau). On conserve quand même quelques titres tubesques (Hard
loving man, la chanson titre, le très speed Violent crimes
qui conclut le disque) pour rendre l'album acceptable, mais
contrairement au précédent, celui-ci n'a aucune raison majeure d'être
sorti de l'oubli dans lequel il est tombé.
- Riot - Born in America (1983) ★ ★ ★ ½
Le départ de son premier chanteur et son échec à vraiment trouver sa
place parmi les ténors du genre après son pourtant excellent Fire
down under finiront par avoir raison de Riot un peu à retardement,
puisque le groupe va couler corps et biens après ce cinquième album...
avant de renaître quelques années plus tard sous une tout autre forme
(son fondateur et guitariste Mark Reale était pour le moins persévérant
!). Le temps tout de même de nous gratifier d'un dernier disque qui
remonte la pente après un Restless breed décevant. Il ne faut pas
se fier à la pochette une fois de plus ratée et à l'hymne patriotique
testostéroné qui sert d'ouverture, le reste est nettement plus
intéressant, on retrouve le goût pour les titres rapides et autres
cavalcades déjà présent sur l'album précédent, mais Running from the
law, Gunfighter ou Heavy metal machine (sans surprise
le titre le plus heavy du disque !) retrouvent une efficacité qui les
rend immédiatement irrésistibles. Un peu de déchet tout de même (la
reprise Devil woman simplement hors sujet) et un son brouillon
irritant quand on pense à la netteté des premiers enregistrements du
groupe quelques années auparavant, mais ça reste un album carré, solide,
une bonne sortie de scène pour la deuxième mouture de Riot.
- Riot - Thundersteel (1988) ★ ★ ★ ★
Cinq ans après ce qui semblait devoir être son dernier album, Riot
renaît de ses cendres grâce à la ténacité de son leader, mais ce dernier
est bien tout ce qu'il reste du groupe d'origine. Non seulement le
lineup a été intégralement revu, mais surtout le style musical lui-même
à fortement évolué : on oublie les racines rock vintage du groupe, et on
sort un album... de speed mélodique avec chanteur à la voix très haut
perchée façon Helloween. Et le pire, aussi surprenant que ça
puisse paraître, c'est que Riot réussit ainsi un come-back assez
impressionnant, alignant sur le début de l'album les tubes imparables
(la chanson titre, Sign of the crimson storm notamment), les
refrains (souvent appuyés de petites intervention chorales) sont d'une
simplicité désarmante mais hyper efficaces, ça va à fond les ballons
sans jamais faiblir, les solos sont réussis, bref c'est tout bonnement
excellent. Seule petite ombre au total, le chant devient vite assez
horripilant (faut aimer le suraigu quoi). C'est vraiment au niveau des
meilleures productions du genre pendant une petite demi-heure, avant que
la fin de l'album ne baisse clairement de régime (Run for your
life, pour le coup, ressemble à une caricature ratée avec ses
choeurs robotiques hilarants, et Buried alive essaye de proposer
une conclusion heavy épique de huit minutes mais ne colle pas au style
du reste de l'album et paraît poussive en comparaison). Ce qui n'empêche
pas le disque de mériter l'étiquette de classique complètement inattendu
dans un de mes genres de prédilection.
- Riot - The Privilege of power (1990) ★ ★
Riot est un exemple assez frappant de groupe qui a sûrement raté son
rendez-vous avec la gloire, et à plusieurs reprises qui plus est ! Alors
qu'ils venaient d'effectuer un retour en force avec l'excellent et très
speed Thunderspeed, la voie semblait toute tracée pour eux :
encore un ou deux albums dans ce genre porteur, et leur popularité sera
définitivement assise. Mais quand ils lui proposent un successeur deux
ans plus tard, c'est certes un album speed... mais unique en son genre.
En effet, comme si c'était trop facile de se contenter de produire
quelques tubes déchaînés (et il y a du bon speed sur ce disque, même si
on frise le n'importe quoi sur un Dance of death où la mélodie
finit par disparaître sous le délire technique et où le chant trop aigu
et pas totalement maîtrisé est assez terrible), le groupe a décidé de
lui ajouter quelques éléments supplémentaires : des ballades, bon
pourquoi pas, ça rompt la monotonie (mais elles sont quand même assez
mièvres). Une reprise de Race with the devil on a spanish highway
pour conclure le disque, ça c'est une excellente idée (qui doit
évidemment beaucoup à la qualité de l'original jazzy d'Al di Meola,
pourtant pas trop mon rayon a priori). Les introductions interminables à
base de samples divers (parfois près de deux minutes !), par contre,
c'est vraiment saoulant. Et surtout, surtout, inviter la section cuivre
du groupe de funk avec qui on partage le studio d'enregistrement à
intervenir sur quelques titres du disque, là c'est vraiment la faute de
goût totale. Le mélange incongru donne au mieux un On your knees
encore sauvable, au pire le terrifiant Killer qui ne ressemble
vraiment strictement à rien. Ce auto-sabordage incompréhensible
transforme un disque qui aurait du être très bon en curiosité
difficilement recommandable, et provoquera hélas rapidement une nouvelle
dissolution du groupe Riot. La vraie fin de l'aventure ? Pensez-vous,
Riot est immortel, il se relèvera encore une fois (ou deux) !
- Riot - Nightbreaker (1993), The Brethren of the long house (1995), Inishmore (1997), Sons of society (1999), Through the storm (2002), Army of one (2006) ★ ★ pour le tout
Six albums d'un seul coup, ça me permettra de rattraper efficacement mon
retard des vacances, mais ça se justifie ici aussi par le contenu. Après
un nouveau split, Riot s'est une nouvelle fois reformé quasi
intégralement, embauchant un quatrième chanteur depuis sa création, et
surtout subissant une nouvelle évolution stylistique en forme de retour
en arrière. C'est assez curieux d'ailleurs, on a l'impression que le
groupe adapte sa musique à son chanteur plutôt que le contraire. Le
nouveau venu est un peu dans le style de Rhett Forrester (celui qui
avait participé à Restless breed et Born in America), typé
hard rock classique et assez passe-partout (sans être du tout mauvais).
Et la musique laisse donc complètement tomber le côté speed des deux
albums précédents du groupe, et retourne à un heavy assez tranquille qui
manque sérieusement de nerf et d'ambition, et semble assez daté vu la
période à laquelle sont sortis les six albums produits avec ce line-up
(le plus stable du groupe, seul le batteur changeant deux ou trois fois
sur cette période). On ne peut pas dire pour autant que les albums
soient ratés, c'est joué avec un grand professionnalisme, les
compositions ne sont pas infamantes, mais il faut bien avouer que ça
manque vraiment d'un petit truc en plus pour qu'on en retienne quelque
chose une fois l'album terminé (Nightbreaker est le meilleur du
lot et mériterait probablement une note un poil meilleure que les
autres, les deux suivants sont sauvés par leur thématique intéressante,
"native americans" pour l'un et immigration irlandaise pour l'autre, les
trois derniers sentent vraiment fort la routine malgré quelques bons
titres). Par ailleurs, les quelques reprises et autres ballades peu
inspirées (qui lorgnent vers le Scorpions de Wind of
change sans en arriver à la cheville) forment un remplissage dont on
se serait volontiers passé. Rien de déshonorant donc, mais la tenace
impression que le groupe a tout bonnement laissé tomber ses rêves de
grandeur et s'est contenté d'assurer proprement un rôle de groupe de
seconde zone. Quand on voit la tenue de leurs meilleurs disques, c'est
tout de même décevant.
- Riot - Immortal soul (2011) ★ ★ ★ ★
Après 20 ans à vivoter, il ne devait pas rester grand monde pour espérer
une résurrection digne de ce nom chez Riot. Et pourtant, en 2011, son
fondateur et compositeur de toujours Mark Reale, alors déjà bien malade
(il décédera début 2012), tente une sorte d'improbable baroud d'honneur
en convoquant pour un dernier album le line-up de l'énorme
Thundersteel et en revenant pour l'occasion à une musique
infiniment plus rapide que celle qu'il proposait dans les disques
précédents du groupe. Et alors paf, d'un coup de baguette magique, ils
vont ressortir une tuerie speed comme s'ils n'avaient pas pris une ride
entre temps ? Eh bien, aussi extraordinaire que ça puisse paraître, oui
! Le Riot (c'est le nom de la première chanson de l'album)
initial est une tuerie absolue qui nous met proprement sur le cul (bon,
il faut toujours supporter le chant très aigu de Tony Moore, qui n'a
curieusement absolument pas bougé en deux décennies). Et la suite du
disque, loin de décevoir, comportera son lot de titres speed (moins
tonitruants que le premier certes, mais Wings are for angels ou
Sins of the father sont quand même très bons) et d'autres plus
classiquement heavy mais pas en reste niveau inspiration mélodique
(Whiskey man entre autres). Même si la deuxième moitié de l'album
pêche un peu plus (un trou d'air notamment sur le duo Immortal
soul/Insanity notamment), ça reste très recommandable. Un
retour en grâce totalement inespéré mais sacrément réussi !
- Riot V - Unleash the fire (2014) ★ ★ ★ ½
Le groupe le plus immortel de l'histoire du metal aura même survécu à la
mort de son leader et membre permanent depuis sa création... à une
lettre (ou un chiffre pour désigner le cinquième chanteur de l'histoire
du groupe ? Ce n'est pas très clair) près ajoutée à son nom, subtil
changement qui en dit long sur le respect que les musiciens formant
désormais le groupe vouent à Mark Reale. C'est d'ailleurs absolument
flagrant tout au long de l'album : on est ici en plein hommage au passé
du groupe, avec une sélection soigneuse de morceaux tirant vers le speed
(la chanson titre, Fight fight fight) et d'autres plus heavy old
school à l'ambiance rock qui regardent carrément vers les tout premiers
albums de Riot (Kill to survive, Take me back), le tout
agrémenté d'une ou deux ballades franchement réussies, et d'un nouveau
chanteur qui perpétue la tradition "chant aigu" remise au goût du jour
par le dernier disque enregistré avec Reale. L'hommage est d'ailleurs
tellement soigné que j'ai été un peu déçu à la première écoute, ça me
semblait un peu trop appliqué (limite scolaire), comme si le groupe
avait eu peur de vraiment se lâcher complètement (de fait, les morceaux
speed n'atteignent pas la furie de ceux qui introduisaient Immortal
soul ou Thundersteel). Et puis quand même, il faut bien
admettre que c'est du tout bon qu'on a sous la main : aucun titre raté,
des ambiances variées, techniquement irréprochable, à défaut de proposer
LE titre qui va vous faire tomber de votre siège, Riot V sait clairement
composer des morceaux d'une solidité à toute épreuve.
- Riot V - Armor of light (2018) ★ ★ ½
Après un album hommage qui renouait en partie avec les racines rock du
groupe, que pouvait nous proposer Riot V pour la suite de son aventure ?
Eh bien, une douzaine de titres heavy speed très calibrés, qui
constituent un album homogène au point d'en être presque lassant. Pas
grand chose à redire pourtant sur la qualité des compositions, ça reste
efficace, mais (c'était déjà un peu le cas dans le disque précédent)
presque trop policé par moments, et donc pas assez varié (plus rien qui
ressemble à une ballade ici, et les atmosphères rock vintage ont aussi
disparu, la seule originalité, c'est l'irruption de cuivres faisant
penser à The Privilege of power sur Caught in the witches
eye). Sans compter une impression de déjà entendu qui confine à
l'auto-plagiat sur l'intro de Messiah qui fait vraiment beaucoup
trop penser à celle d'un certain Thundersteel. C'est d'ailleurs
d'autant plus frappant que ledit Thundersteel est repris en
conclusion de l'album, peut-être une fausse bonne idée : bel étalage de
maîtrise technique de la part des musiciens (ça vaut l'originale), mais
aucune des compositions de l'album n'est aussi tranchante que
celle-ci... Un album correct malgré tout, mais bien en-deça des
principales réussites du groupe.
- Septicflesh - Mystic places of dawn (1994) ★ ★
Allez, aujourd'hui, on tente un nouveau groupe... grec (ça changera des
tarés norvégiens qu'on croise quand on veut écouter du black metal).
Difficile de classer cet album aux influences diverses (le chant est
bien guttural mais il y a une grosse présence de touches orchestrales et
de sonorités inattendues aux synthés, et le tout reste globalement très
mélodique), mais les étoiles attribuées vont essentiellement aux
atmosphères intéressantes crées sur certains titres (le très onirique et
vraiment spécial (Morpheus) The Dreamlord, plutôt sympa, ou
encore Crescent moon, les titres lents sont les plus réussis).
Niveau réalisation, ça sent malheureusement beaucoup trop le premier
album : production médiocre, batterie boîte à rythme (si j'en crois ce
que j'ai lu, c'est en fait vraiment une boîte à rythmes) et basse
inaudible, et surtout une construction des morceaux qui laisse à désirer
(chansons courtes trop répétitives, chansons longues qui s'enlisent dans
des développements peu maîtrisés, et beaucoup de ruptures de ton mal
amenées, c'est souvent trop décousu). Un potentiel certain
(l'instrumental Mythos qui achève le disque en laissant les
guitares au placard, c'est osé mais franchement pas mal), mais encore
trop mal exploité.
- Septicflesh - Esoptron (1995) ★ ★ ★
Avec ce deuxième album, le combo grec a vraiment trouvé sa voie, et un
certain équilibre entre le côté metal extrême (le chant guttural, les
riffs de guitare bien gras) et le côté "antiquité grecque" matérialisé
par les sonorités des synthés (je ne sais pas s'ils sont censés imiter
un instrument particulier, ça sonne la plupart du temps comme une espèce
de harpe antique) et l'introduction de choeurs archaïsants assez
étonnants. Les atmosphères ainsi créées sont vraiment sympa, même si ça
tombe parfois un peu à côté de la plaque (le court intermède
médiévalisant Celebration est un peu hors sujet) et si la
deuxième moitié du disque manque clairement de souffle (Succubus
priestess ou So clean, so empty s'enlisent un peu dans des
développements trop scolaires, même si la structure des chansons est
globalement mieux maîtrisée que dans le premier album du groupe). Mais
il y a aussi de très bonnes choses, surtout au début de l'album donc (la
chanson titre, très efficace, ou Ice castle), mais aussi dans la
piste finale Narcissism qui expérimente pas mal de choses dans sa
première moitié mais finit par convaincre). Pas encore un album
indispensable, mais il y a du progrès.
- Septicflesh - Ophidian Wheel (1997) ★
J'ai lu pas mal d'avis sur le web prétendant que ce troisième album
était le sommet de la première partie de carrière des grecs (ils ont eu
une interruption de quelques années à un moment). Autant dire que je ne
suis vraiment pas d'accord, c'est pour moi assez clairement le moins
réussi des trois que j'ai écoutés. Par rapport au précédent, le groupe a
décidé de remplacer ses synthés atmosphériques évoquant la Grèce antique
par de vraies touches orchestrales... mais toujours jouées sur des
claviers achetés chez Prisunic. Bon, ben les quelques intermèdes
purement instrumentaux ne s'en relèvent pas, c'est complètement
ridicule, Tartarus en particulier ne passerait même pas comme
musique 8-bit de jeu video des années 80. Autre tentative de
renouvellement, une soprano lyrique ajoutée par moments (et mélangée au
chant guttural habituel), c'est tantôt inutile, tantôt kitsch car trop
grandiloquent. Le reste du temps, on retrouve le metal à la fois brutal
et très mélodique du groupe, qui arrive quand même à nous proposer
quelques pistes sympathiques (Geometry in static est la meilleure
selon moi), mais aucune qui marque vraiment. Une grosse déception.
- Septicflesh - A Fallen temple (1998) ★ ★
Oula, pas moins de 76 minutes de musique pour ce quatrième album (un peu
moins dans la première version de l'album en fait), nos amis grecs ont
eu beaucoup d'inspiration ! Ou pas en fait, puisque le disque est un
drôle de patchwork qui contient seulement trois nouvelles chansons (dont
une dans pas moins de trois versions différentes), une reprise, quatre
titres qui sont le réenregistrement d'un vieil EP, et pour compléter le
tout, trois pistes d'une dizaine de minutes chacune qui versent dans le
pseudo-classique symphonique. Aïe ? Pas tant que ça, on est loin du
désastre de Tartarus dans l'album précédent, et il y a même des
moments intéressants dans Underworld (act II) avec des
polyphonies vocales qui accrochent l'oreille (et mêmes des vrais bouts
de chant opératique par moments). Dommage quand même que tout ça soit
encore fait avec une prétention (les passages parlés...) qui colle fort
moyennement avec l'utilisation de synthés. Pour le reste, le plus
intéressant provient curieusement des anciennes chansons, les nouveaux
titres étant dans le style de Ophidian Wheel avec des mélanges de
voix pas toujours inspirés et un manque d'accroche mélodique. Surtout,
évidemment, ce curieux mélange donne un album qui manque cruellement de
cohérence, même s'il est à mon sens nettement moins mauvais que le
précédent.
- Septicflesh - Revolution DNA (1999) ★ ★
Une révolution chez nos amis grecs ? Mais oui, après des albums qui
lorgnaient de plus en plus vers une musique pseudo-classicissante qui se
mêlait de moins en moins bien à leurs racines "metal extrême", ils se
sont rendus à l'évidence en se séparant en deux entités distinctes.
L'une, nommée Chaostar, continuera à creuser la veine classique
(j'avoue ne pas être certain d'aller écouter ce qu'ils ont à proposer),
tandis que Scepticflesh se recentre sur le metal. À tel point d'ailleurs
qu'ils ont carrément supprimé entièrement les claviers (dénaturant quand
même assez profondément l'esprit de la musique du groupe) et introduit
des sonorités très électrofuturistes pour accompagner des titres
extrêmement calibrés (la durée tourne systématiquement autour des cinq
minutes) lorgnant carrément vers du hard FM (ok ça reste mélodique mais
ça tombe franchement dans la facilité dès la première piste, et ça n'en
ressortira que pour une deux expérimentations assez pénibles, comme
Androïd). C'est pas si mal fichu, ça se laisse même très bien
écouter, mais ça s'oublie tout aussi vite, et c'est tout de même assez
déconcertant de la part d'un groupe qui avait jusque-là affiché de
toutes autres ambitions (même si je n'ai pas apprécié outre mesure les
albums précédents, ça n'avait quand même rien à voir !).
- Septicflesh - Sumerian daemons (2003) ★ ★ ★
Je continue mon parcours de la discographie de Septicflesh (j'en suis en
plein milieu, cinq albums sur dix) après un Revolution DNA
surprenant qui laissait de côté les fondamentaux du groupe. Nos amis
grecs allaient-ils continuer dans cette voie ? Eh bien, pas du tout,
même si on retrouve ici quelques utilisations de sonorités électro qui
rappellent l'album précédent (et même un titre comme When all is
none qui n'est pas loin de déraper du côté du metal industriel), on
a surtout droit à un retour en force des claviers (avec leur fameux sons
"harpés"), arrangements symphoniques, choeurs, et mêmes interventions de
soprano (plutôt discrets ceci dit) qui marquaient le style des premiers
albums. Grosse différence tout de même, il n'est plus question de faire
de la musique intellectualisante avec inspiration classique, le but est
désormais de taper fort à peu près tout le temps. Un peu trop de
blastbeat, des choeurs quasiment orffiens, quelques passages qui sonnent
gothique de carton pâte (la chanson titre notamment), cette orgie sonore
s'égare parfois (la dernière piste Shapeshifter, qui mélange tout
sans aucun discernement), mais réussit la plupart du temps à
impressionner, en s'appuyant sur des bases mélodiques efficaces (ça
tombe un peu dans la facilité sur une chanson comme The Watchers,
d'ailleurs). Rien de génialissime, mais un bon album, qui sera suivi
d'une rupture provisoire du groupe, qui reprendra du service quelques
années plus tard pour enfoncer encore le clou dans cette veine puissante
et peu subtile.
- Septicflesh - Communion (2008) ★ ★ ★ ★ ½
Le groupe grec est donc de retour après une rupture qui n'aura
finalement duré que quelques années, et pour marquer le coup, le moins
qu'on puisse dire, c'est qu'ils ne font pas dans la dentelle ! Vrai
orchestre et choeur au grand complet pour les accompagner, prédominance
de chant guttural, batterie brutale, et surtout une volonté de
monumentalité manifeste en permanence (le côté intellectualisant de leur
musique a vraiment complètement été jeté aux oubliettes). Bon ben, je
n'y peux rien, c'est mon mauvais goût qui parle, j'adore ! C'est
vraiment puissant, mélodiquement toujours inspiré et efficace (mention
spéciale pour Anubis, une vraie tuerie, et We, The gods),
et l'orchestre est extrêmement bien exploité, passant d'ambiances très
"musique de film" (tout le début de Persepolis par exemple) à des
choses nettement plus subtiles et inattendues, comme ces cordes
stravinskiennes de l'intro de Babel's Gate, sans jamais être
relégué au rang de faire-valoir. C'est vraiment une oeuvre pour
orchestre et groupe de metal à laquelle on a droit, et pas un disque de
metal coloré par quelques touches symphoniques. Mes seules petites
réserves qui me poussent à ne pas mettre la note maximale :
l'utilisation de la voix claire peu convaincante sur quelques pistes
(mince alors, c'est bien la première fois que je regrette qu'il n'y ait
pas du guttural en permanence !), et une fin d'album moins inspirée (le
Narcissus final n'est pas à la hauteur) alors même que le disque
est très court (à peine 40 minutes). Mais pour ceux qui aiment le metal
Technicolor, franchement écoutez ça, ça envoie du pâté.
- Septicflesh - The Great Mass (2011) ★ ★ ★
Nouvelle direction confirmée pour Septicflesh, après un Communion
vraiment excellent qui misait tout sur la puissance et les
orchestrations sophistiquées, on reste dans la droite lignée avec ce
nouvel album. À tel point d'ailleurs que celui-ci souffre un peu du
syndrome "c'est le même en moins bien". La première piste The Vampire
from Nazareth est pourtant excellente, mais assez rapidement, on
sent que ça force un peu au niveau des compositions (l'orchestre prend
pour le coup carrément le dessus sur des guitares qui se font presque
oublier par moments) alors que l'inspiration est en-deça de celle du
précédent disque : mélodie un peu facile dans Pyramid god (qui
reste malgré tout une bonne chanson), Five-pointed star un peu
décousu, Oceans of grey qui joue la carte mitraillage de batterie
pour masquer le relatif manque de contenu, et encore une fois le chant
clair assez peu convaincant quand il est employé (dans Rising
notamment). Au niveau des points (très) positifs, on garde quand même un
son absolument énorme, et aucune piste ne tombe non plus dans le
vraiment décevant. Simplement, un album juste bon est nécessairement
décevant quand il suit une tuerie ultime. Notons quand vers la fin du
disque la très curieuse intro avec clavecin de Mad Architect,
peut-être une piste à suivre pour le groupe pour renouveler l'intérêt
dans leurs prochains albums.
- Septicflesh - Titan (2014) ★ ★ ★
Septicflesh a trouvé un bon filon et ne compte manifestement pas le
laisser tomber tant qu'il fonctionne à peu près. Ce nouvel album est
peut-être encore plus épique, monumental, en un mot hollywoodien, que
ses deux prédécesseurs. D'ailleurs, pour bien le marteler, le disque
débute avec plusieurs titres ultra bourrins (blastbeat de rigueur,
rythmes martiaux, orchestre envahissant). Si War in heaven est
une bonne entrée en matière, Burn est nettement moins
convaincant, et Order of dracul ne fait tendre l'oreille qu'en
tentant des alliages osés (le break clavecin+violon tzigane fait un peu
cliché vu le thème de la chanson). À l'image de l'album dans son
ensemble, qui alterne bons moments (les atmosphères angoissantes de la
chanson titre et de Confessions of a serial killer en fin de
disque) et les plages plus anecdotiques. Le savoir-faire est indéniable,
mais encore une fois le metal s'éloigne (en plus de l'orchestre
mammouth, on a droit cette fois à des interventions de choeurs
diaphanes, plutôt sympas d'ailleurs sur Prototype). On écoute
l'ensemble avec plaisir, mais il ne faudrait pas que tout ça finisse, à
l'image de la conclusion abrupte de cet album, par tourner vraiment en
eau de boudin.
- Septicflesh - Codex Omega (2017) ★ ★ ★ ★ ½
Après deux albums qui sentaient un peu la routine, n'était-il pas temps
pour Septicflesh d'évoluer un peu ? La réponse des grecs est sans appel
: non, pas du tout, on est repartis pour un tour de metal symphonique
ultra spectaculaire. Et le pire, c'est que pour le coup, ils ont bien eu
raison ! En effet, ce nouvel album est excellent, retrouvant
pratiquement le niveau du monumental Communion. Dès le premier
titre Dantes inferno, on sent qu'il y a quelque chose :
l'orchestre est parfaitement utilisé, c'est mélodiquement très efficace,
on retrouve la recette magique que le groupe semblait avoir un peu
perdu, et on tient un tube incontournable. Un moment d'inquiétude avec
le 3rd Testament qui suit, qui retombe dans un style "passage en
force" nettement moins convaincant, mais c'est en fait le seul faux pas
de l'album, qui aligne ensuite avec une implacable régularité les
chansons excellentes. Interventions de la voix claire bien senties
(souvent en opposition au chant guttural, comme sur Our church below
the sea), instrumentation variée (je ne sais pas quel est
l'instrument qui est utilisée pour l'intro plaintive de Portrait of a
headless man mais c'est un excellent choix), ambiances variées (mais
si on reste toujours dans le très hollywoodien quand même), y a vraiment
pas grand chose à redire. Ah si : on frise parfois le mauvais goût (les
arpèges triomphalistes de Dark art, j'adore, mais ce ne sera pas
le cas de tout le monde), et surtout il y a des passages qui sont un peu
trop ouvertement inspirés de succès antérieurs du groupe (les guitares
du tube Faceless queen font vraiment furieusement penser à celles
d'Anubis, ça n'est pas pour me déplaire mais c'est un peu
voyant). Du coup, je considère quand même l'album un léger poil
inférieur à Communion, mais ça reste une bonne turie !
- Sepultura - Morbid visions (1986) ☆
Je veux bien admettre qu'enregistrer un album de metal au Brésil au beau
milieu des années 80 ne devait pas être évident, mais là, quand même,
c'est assez terrible, ça ressemble plus à une démo faite entre potes
dans un garage qu'à un truc vraiment commercialisable. Guitares
mochissimes, chanteur qui, euh, en fait c'est difficile à décrire, on a
l'impression qu'il dit son texte sans vraiment chercher à chanter, ça ne
ressemble à rien, son globalement infâme, même si la musique derrière
était génialissime, ce serait dur d'accrocher. Et comme en plus les
guitaristes se contentent d'essayer de jouer des trucs bateaux et
répétitifs le plus vite qu'ils peuvent, ben c'est vraiment très très
mauvais. Seul le batteur se détache vaguement du lot, pour ce qu'on en
entend. En fait, le seul truc miraculeux dans cet album, c'est que le
groupe ait réussi à percer après un début pareil.
- Sepultura - Schizophrenia (1987) ★ ★
Deuxième tentative pour Sepultura, il y a déjà un très net progrès, on
passe de l'inaudible au simplement pas terrible. Pourtant, l'intro
ridicule avec grincements de BO de mauvais film d'horreur suivis d'un
grand cri laissait craindre le pire. Mais déjà, la qualité sonore est
nettement meilleure (bon, ça reste loin d'être fabuleux, notamment au
niveau de la batterie dont les toms semblent avoir été croisés avec un
vibraphone, c'est vraiment très bizarre comme sonorité, peut-être un
effet de remasterisation étrange sur la version que j'ai écoutée, mais
ça avait l'air d'être l'original...), et ça ressemble à de la musique,
avec même des vrais solos et autres plages instrumentales (on se serait
bien passé ceci dit de The abyss où le guitariste semble juste
s'entraîner à faire quelques arpèges). Après, pas de miracle non plus,
c'est du thrash hyper classique, souvent répétitif, et dont le but
suprême semble toujours être uniquement de jouer très vite (pas une
seule chanson dont le tempo ne soit pas rapide sur le disque). Surtout,
si côté instrumentistes c'est nettement mieux (et les riffs sont dans
l'ensemble corrects), niveau chant c'est toujours aussi mauvais. Bref,
ça se laisse écouter, mais il y a nettement plus intéressant dans le
genre et à la même époque.
- Sepultura - Beneath the remains (1989) ★ ★ ½
Troisième album de la part de nos brésiliens, et changement de calibre
pour eux, puisqu'ils se font produire pour la première fois par une
boîte américaine. Eh ben, indiscutablement, ça se sent... Le son est
infiniment meilleur (même si je trouve la batterie bien sèche), on a
enfin droit à un album vraiment maîtrisé et même tout à fait
professionnel de la part de presque tous les membres du groupe (je ne
suis toujours pas emballé par le chanteur, mais ça se fond déjà
nettement mieux dans la musique ici). Tellement pro d'ailleurs que ça en
devient presque un défaut tant l'album est carré, sans rien qui dépasse,
dans un style très uniforme (du thrash qui va vite, encore et toujours,
avec des riffs corrects mais souvent semblables et qui ne font pas non
plus sauter au plafond), et surtout sous influence manifeste (j'ai lu
que Slayer avait beaucoup influencé Sepultura, mais n'ayant rien
entendu d'eux, j'aurais du mal à en juger, c'est plutôt l'influence
Metallica, évidente dans l'intro de la première piste qui cite
quasiment Call of Khtulu ou dans le riff initial de
Lobotomy, qui me saute aux oreilles), au point de devenir
franchement impersonnel. Bref, rien de spécial à reprocher, mais ça
s'oublie presque aussi vite que ça n'a été entendu.
- Sepultura - Arise (1991) ★ ★ ½
Les copains, je suis bien obligé de l'admettre, j'ai manifestement un
problème avec Sepultura. En fait, ce nouvel album m'a fait
essentiellement le même effet que le précédent : encore plus parfait
techniquement (même pas spécialement de mal à dire du chant, et les
intros ajoutées à pas mal de titres, même si elles sont très courtes,
sont un bonus appréciable), je n'aurais vraiment aucun reproche à
formuler, mais je ne sais pas pourquoi, je n'accroche pas vraiment.
Chaque début de chanson, je me dis "celle -ci, c'est sûr, elle va me
faire décoller", et puis non, j'écoute sans déplaisir, mais il me manque
quelque chose, peut-être un élément un peu plus mélodique qui me titille
l'oreille, des formules un peu moins stéréotypées à la batterie, des
riffs qui explosent vraiment, en tout cas je continue à trouver cette
musique assez désincarnée. En fait ce que j'ai préféré ce sont les
courtes intros (celle assez tribale de Altered state
notamment)... Bon, je ne désespère pas et je vais quand même continuer à
explorer la discographie du groupe, puisqu'il semblerait qu'ils aient
changé de style ensuite.
- Sepultura - Chaos A.D. (1993) ★ ★ ★ ★
Eh bien voilà, il suffisait d'être patient, enfin un album de Sepultura
qui me parle ! Bon, pas entièrement non plus, mais beaucoup, beaucoup
plus que les précédents quand même. C'est effectivement nettement plus
varié, avec une volonté claire de faire intervenir régulièrement des
percussions exotiques pour donner un côté tribal qui me plaît vraiment
(les intros de l'excellent Refuse/Resist et des moins excellents
mais intéressants quand même Territory et Manifest), mais
aussi quelques respirations bienvenues, avec l'instrumental "tribal"
acoustique Kaiowas et l'exploration de sonorités électroniques
plus industrielles dans le strident Clenched fist (pas mon titre
préféré de l'album, mais intéressant). Dommage qu'il y ait un creux en
cours d'album, où le groupe retombe dans la succession de chansons soit
super speed, soit très lourdes mais sans grande conviction
(l'enchaînement Biotech is Godzilla - Nomad - We who
are not as others) car l'album dans son ensemble est vraiment
séduisant.
- Sepultura - Roots (1996) ★
Le changement de style amorcé par le groupe dans leur album précédent
est ici nettement plus prononcé, et manifeste rien qu'à regarder la
pochette de leur nouvelle production : un retour aux sources avec une
forte inspiration tribale, qui va même envahir le disque jusqu'à ce que
le groupe propose une collaboration étonnante avec un chanteur local
(Ratamahatta, qui a le mérite incontestable d'explorer des pistes
inattendues) et une piste en acoustique avec des chants tribaux
(Itsari) à laquelle on ne s'attend pas forcément quand on lance
un disque de metal. Ma foi, pourquoi pas, j'avais été plutôt conquis par
les premiers éléments tribaux apparaissant dans Chaos A.D.. Mais
justement, mon gros problème, c'est que ça se mêlait bien au metal très
brutal du groupe dans l'album précédent, beaucoup moins dans celui-ci.
Là, on a sur la plupart des pistes des percussions exotiques pour créer
une espèce d'atmosphère de transe, mais par-dessus un metal vraiment
lourd et peu développé, qui plus est gâché par le chant hurlé vraiment
pas beau de Cavalera (qui régresse d'un bon cran alors qu'il avait
atteint précédemment un niveau tout à fait acceptable niveau chant),
quand ce ne sont pas des saturations volontaires qui fatiguent très vite
les oreilles. Qui plus est, c'est très répétitif et le disque dure plus
de 70 minutes (bon, certes, en comptant les 13 minutes du jam tribal de
la dernière piste qu'on peut très bien se dispenser d'écouter), on finit
par décrocher complètement. Dommage, il y avait moyen de faire tellement
mieux...
- Sepultura - Against (1998) ★ ½
Je vais passer assez vite sur cet album-là qui me convainc à peine plus
que le précédent. On n'a plus droit aux hurlements de Max, mais le
nouveau venu est encore ici assez effacé derrière les instrumentistes
(et quand on l'entend, ça reste du beuglement pas très passionnant). Et
surtout, niveau musical, ça reste bien décevant. Le but semble ici avoir
été de créer au niveau du son une mixture entre le côté tribal et un son
très industriel saturé, et ça fonctionne assez mal, surtout que beaucoup
de titres sont courts et ne proposent vraiment pas grand chose. Trop
brut, trop massif, bof bof. Il y a pourtant quelques échappées qui
auraient mérité meilleur traitement : Old earth qui est la seule
piste du début d'album à trouver un équilibre assez intéressant, des
instrumentaux qui fonctionnent (F.O.E), et une fin de disque qui
retourne plus du côté d'un thrash (toujours mêlé d'influences tribales)
nettement plus digeste. La dernière piste T3rcermillenium ajoute
des violoncelles pour créer une ambiance sympa, mais le titre en
lui-même est anecdotique. Dommage, tout ça manque vraiment
d'aboutissement.
- Sepultura - Nation (2001) ★ ★ ★
À la première écoute, j'avais trouvé cet album vraiment très bon,
peut-être en comparaison avec mes déceptions précédentes avec Sepultura.
À la réécoute, je serai moins enthousiaste, mais c'est quand même selon
moi nettement mieux que Against et Roots. Derrick Green
est maintenant mieux intégré au collectif, le chant me semble par
ailleurs un peu plus varié (bon, ça beugle encore pas mal, mais il y a
pas mal de pistes où c'est plus scandé voire presque rappé, et Green
gère bien ce style), et surtout on a un fond musical qui respire un peu
plus (beaucoup de tempos lents, les rares chansons rapides sont
d'ailleurs expédiées en à peine une minute et peu intéressantes) et un
peu plus mélodique, bien que ça reste globalement très lourd. Toujours
des percussions tribales régulièrement utilisées, mais pas spécialement
mises en avant, on retrouve une certaine unité ... jusqu'à l'étonnante
dernière piste où les violoncelles font irruption, je trouve ça assez
réussi. Le problème du disque reste quand même une certaine monotonie et
le manque de titres vraiment très accrocheurs (malgré quelques
expérimentations plutôt réussi, comme le riff bizarre et entêtant de
Vox populi, ou celui très bourdonnant de Saga), mais
l'ensemble est quand même dans une bonne moyenne. Encourageant.
- Sepultura - Roorback (2003) ★ ★ ½
Ce troisième album avec Derrick Green au chant opère un espèce de
curieux retour en arrière, alors qu'un équilibre plutôt intéressant
semblait avoir été trouvé sur Nation. Ici, l'aspect tribal qui
était devenu une marque de fabrique du groupe disparait totalement, on
se retrouve face à un album de metal bourrin tout à fait standard... et
c'est bien le problème, car même si c'est bien exécuté, c'est beaucoup
trop homogène, avec beaucoup de titres qui manquent sérieusement
d'ambition (ça va vite sans réfléchir, on se croirait presque revenu aux
débuts du groupe). Les bonnes nouvelles viennent en fait des quelques
chansons où les brésiliens tentent justement de sortir un peu des
sentiers battus, comme la très bonne More of the same avec son
atmosphère plus aérée et ses passages en chant clair, et As it is
ou Bottomed out où Green fait preuve d'une belle capacité à
varier son chant (plus crooner sur la première, carrément coloré blues
sur la seconde). Ces quelques pépites éparses montrent que ce
Sepultura-là est tout à fait capable de produire de l'excellente
musique, dommage que ce ne soit pas assumé tout au long de l'album.
- Sepultura : Dante XXI (2006) ★ ★ ★ ★
Après plusieurs tentatives plus ou moins intéressantes, voici enfin
l'album de la maturité pour Sepultura version Derrick Green !
Manifestement inspirés par le thème de ce concept-album (pas de piège,
c'est bien de la Divine Comédie de Dante qu'il s'agit), nos
brésiliens livrent un album plus ramassé (moins de 40 minutes), plus
mélodique, et surtout plus inspiré que la plupart de ceux qui le
précèdent. Certes, on reste dans le domaine du gros son, mais une touche
orientalisante (sur City of dis), quelques riffs à base de notes
répétées bien exploités (sur False notamment) et même des touches
orchestrales (surtout présentes dans les très courtes pistes de
transition, avec encore une fois une prédominance de violoncelles, on
peut même regretter que le groupe n'ait pas osé en mettre un peu plus)
rendent le tout vraiment moins dense et tout bêtement plus intéressant.
Certes, ça s'essouffle un peu dans la deuxième moitié de l'album
(Buried woods ou Crown and miter sont trop basiquement
bourrines), mais une conclusion inattendue (Still flame avec ses
choeurs et le retour du violoncelle) confirme s'il le fallait qu'on a
vraiment trouvé l'album du renouveau pour le groupe. Encore inégal et
perfectible, mais plus qu'une promesse, un bon album.
- Sepultura - A-lex (2009) ★
Mes amis brésiliens sont pour le moins déroutants. Après un album
vraiment réussi inspiré par Dante, ça paraissait une bonne idée de
repartir sur un concept similaire, cette fois-ci à partir d'Orange
Mécanique. Bon ok, ils se sont crus obligés de caser un hommage à
Beethoven, et sans surprise la piste sobrement intitulée Ludwig
van n'a pas l'ombre d'un intérêt (mais y a-t-il des reprises de
classique par des métalleux qui dépassent le stade de la simple
curiosité anecdotique ?). Mais pour le reste, on pouvait espérer quelque
chose de sympa. Grosse déception, le groupe revient quasiment tout le
temps à un metal speed ultra rentre-dedans et franchement peu inspiré,
c'est long, poussif et lassant. Les meilleurs moments sont même
peut-être les quelques pistes intitulées A-Lex qui servent de
transitions, c'est dire... Allez, soyons honnêtes, quelques tentatives
de diversifier l'ambiance fonctionnent à peu près (We've lost
avec son intro acoustique, la première moitié de Sadistic values
en chant clair, ou Strike et ses effets de vibrato bizarres mais
intéressants), mais c'est bien peu sur un album de 18 titres (certes
courts pour la plupart). Un net recul de la part de Sepultura.
- Sepultura - Kairos (2011) ★ ½
Encore un album décevant pour Sepultura, on remonte légèrement la pente
après A-Lex mais ça ne va tout de même pas chercher bien loin, avec
beaucoup de titres similaires, une batterie qui mitraille souvent de
manière très répétitive, et des pistes de transition totalement
inutiles. En fait, et c'est assez symptomatique, les meilleures pistes
du disque sont celles où Sepultura ne fait pas du Sepultura : reprise de
Ministry avec Just a fix (je ne connais pas du tout
l'original, mais cette version est efficace), une autre reprise en fin
d'album (piste bonus initialement si j'ai bien compris) et, encore plus
inattendu, une collaboration avec le groupe de percussions français
Les Tambours du Bronx. On se demande un peu comment cette
improbable rencontre a pu avoir lieu, mais elle donne complètement autre
chose à entendre, et à vrai dire ça fait du bien tant l'album est
globalement attendu.
- Sepultura - The mediator between head and hands must be the heart (2013) ★ ★ ★
Prix du titre à rallonge gagné haut la main par Sepultura avec ce
disque. Fort heureusement, il n'y a pas que le titre qui soit plus long
que d'habitude, les morceaux aussi gagnent en durée par rapport à la
plupart des albums précédents (seulement 11 chansons sur cet album de 50
minutes), et c'est bon signe, car ça marque une nouvelle fois un retour
de nos brésiliens à un metal beaucoup plus posé, en fait assez proche du
thrash teinté de percussion tribales (qui, elles, sont à nouveau assez
présentes, surtout sur les derniers titres de l'album) d'un Chaos
A.D.. Bon, ne rêvons pas non plus, le disque n'est pas à la hauteur
de ce dernier car encore trop inégal, mais il y a vraiment de bons
moments : l'intro de The Vatican un peu facile (choeurs et
cloches, vu le thème, c'est cliché) mais efficace, le très déjanté Da
lamo ao caos (ne pas chanter en anglais, mine de rien, ça change
beaucoup), ou le très dépressif mais excellent Grief (acoustique
et lent quasiment tout le temps). Globalement, peu de tempi très rapides
(on en retrouve sur Obsessed par exemple, et c'est loin d'être
bon), quelques incursions pas forcément géniales vers une ambiance plus
urbaine (The Age of the atheist), mais aussi des titres thrash
efficaces à défaut d'être très originaux, globalement c'est un album
très acceptable.
- Sepultura - Machine Messiah (2017) ★ ★ ★ ½
Après un The Mediator [...] qui effectuait une sorte de retour
aux sources plutôt réussi, Sepultura allait-il capitaliser et nous
proposer à nouveau un metal soigné et (un peu) calmé par rapport aux
excès précédents ? Eh bien, oui, et en même temps non... À nouveau très
peu de titres speed et brutaux (I am the enemy ou Silent
violence qui sont d'ailleurs les chansons les moins intéressantes du
disque), mais côté tranquillité on repassera tant le groupe semble
volontairement shooter dans toutes les directions à la fois ! Dès la
chanson titre inaugurale, surprise, un tempo lent, du chant clair, une
ambiance futuriste glaciale, c'est très épuré mais surtout très réussi !
Mais on est loin d'être au bout de nos surprises, puisqu'un peu plus
loin (sur Phantom self), ce sont carrément des violons
orientalisants qui viennent se combiner avec les percus tribales, pour
un effet, euh, assez spécial (pas sûr d'être vraiment convaincu, pour le
coup). On retrouvera des interventions orchestrales dans Resistant
parasites (assez anecdotiques) et surtout dans l'excellent Sworn
oath qui lorgne vers un côté épique rarement présent chez les
brésiliens. La piste fait accessoirement suite à Iceberg dances,
un instrumental (là aussi c'est très rare chez Sepultura) qui part
vraiment dans tous les sens. Sans même compter le bonus ridicule (une
reprise de générique d'anime assez grandiose), on a donc un album très
varié, surprenant, qui se prend parfois un peu les pieds dans le tapis,
mais qui arrive aussi à renouveler grandement l'intérêt que pourrait
porter l'auditeur blasé à Sepultura, plus de trente ans après ses
débuts. Vraiment un album à tenter.
- Sepultura - Quadra (2020) ★ ★ ★ ★
Me voilà donc arrivé au bout de la discographie de Sepultura et (ça
tombe particulièrement bien), cet album prétend faire une sorte de tour
d'horizon des différents styles du groupe depuis ses débuts. De fait, on
a un peu de tout au fil des différentes pistes : ça commence de façon
assez brutale avec un Isolation toutefois plutôt inspiré, les
choeurs (très présents sur tout l'album) ne tardent pas à faire leur
apparition (sur un Last time qui s'éparpille un peu), et on passe
carrément dans un autre monde avec Capital enslavement, qui
convoque à la fois les percus tribales devenues classiques pour le
groupe et l'orchestre orientalisant de leur album précédent, avec des
choeurs tribaux par-dessus le marché. Indigeste ? Eh bien non pas tant
que ça, ça passe même franchement bien. On n'est même pas loin de penser
à certaines chansons de Gojira sur le refrain, et ce sera à nouveau le
cas un peu plus tard dans le très bon Raging void. Mais le
meilleur est peut-être encore à venir, avec une deuxième moitié d'album
plus ambitieuse qui réussit par moments à créer des ambiances vraiment
prenantes, comme sur la superbe Guardians of earth avec son intro
acoustique et ses choeurs encore très présents. On a aussi droit à un
instrumental sympathique... et à une dernière piste (Fear, Pain,
Chaos, Suffering, tout un programme) dispensable avec invitée qui se
mêle moyennement bien au son Sepultura. Peu importe, les brésiliens ont
encore poussé le curseur un peu plus loin par rapport au déjà très
intéressant Machine Messiah, et les grandes réussites font
oublier les quelques pistes plus convenues. Au point de se demander si
on ne tient pas là, tout simplement, le meilleur album du groupe...
- Shadow Gallery - Shadow Gallery (1992) note réelle ☆ nanar ★ ★
Suite aux bons conseils d'amis qui adulent ce groupe, je m'attaque
aujourd'hui à la (courte) discographie de Shadow Gallery, même si je
sens confusément que je ne vais pas leur faire extrêmement plaisir
concernant ce premier disque. Je dois en fait avouer que je suis
parfaitement incapable d'écouter ce disque sans qu'un irrésistible fou
rire s'empare de moi tant les clichés les plus caricaturaux d'un certain
prog (pas vraiment metal d'ailleurs, ceux qui espèrent de vraies
guitares accrocheuses seront très déçus) sont ici présents : claviers
festifs aux sonorités totalement improbables (le motif initial de
Darktown, il est tout droit tiré d'un vieux Castlevania, non ?),
chant crémeux, voix de tête et interventions du choeur (ou d'une flûte
sortie de nulle part) d'une niaiserie insupportable, on se vautre dans
une sorte de béatitude nunuche qui me rend vraiment l'écoute sérieuse de
cette musique impossible (en fait, les premières secondes de The
Dance of the fools sont déjà absolument rédhibitoires pour moi).
Après, au second degré, ça peut presque se défendre, il y a des mélodies
rigolotes (et les musiciens savent jouer), et ça a l'air tellement fait
au premier degré (ce qui me semble personnellement bien peu crédible,
mais bon) que le côté "nanar musical" en ressort encore plus. Mais même
sous cet angle, les 17 minutes de The Queen of the city of ice,
avec ses arpèges guillerets en boucle (à côté, Philip Glass, c'est de la
musique hyper variée) et sa narration qui se veut épique mais qui tombe
complètement à plat, sont bien difficiles à digérer. Du coup, même la
note nanar ne volera pas très haut. En tout cas, là, on touche vraiment
le fond concernant ce que je n'aime pas dans le prog.
- Shadow gallery - Carved in stone (1995) ★ ★ ½
Malgré un premier essai vraiment pas concluant, je continue la
discographie de Shadow Gallery, avec ce deuxième opus qui est pour moi
nettement plus écoutable que le précédent. Déjà il y a du mieux niveau
son, même si les claviers ont toujours une place prépondérante et que
les passages "orchestraux" font souvent mal aux oreilles (on n'a quand
même toujours pas l'impression que ça a été enregistré au milieu des
années 90 tout ça). Mais surtout, le côté "ravi de la crèche" est moins
omniprésent ici, avec des atmosphères plus sombres (rien que l'intro du
titre initial Cliffhanger est carrément dépressive en comparaison
de l'ouverture de l'album éponyme), et même une volonté de se lancer
dans une suite aux forts relents épiques avec le Ghostship
(découpé en huit sections) qui conclût l'album, et qui est dans
l'ensemble réussi malgré des passages, euh, discutables (les effets
foireux sur les voix, le solo de piano néoclassique incongru). C'est un
peu à l'image du disque en fait, qui est capable de faire côtoyer des
bouses innommables (Alaska, sommet de kitsch gnangan qui laisse
littéralement pantois) avec un titre hyper énergique et carrément
excellent comme Deeper than life. J'en viens même, en le
réécoutant, à me dire que le groupe pourrait faire un excellent album en
allant plus clairement dans cette direction heavy et en laissant tomber
les flûtes mièvres et autres interludes sans intérêt. Ce disque-là,
amputé de la moitié de son contenu, ferait même déjà l'affaire...
- Shadow Gallery - Tyranny (1998) ★ ★ ★
Après un deuxième album en nette progression mais qui conservait pour
moi pas mal de déchet, allais-je enfin être emballé par le troisième
disque de Shadow Gallery ? Eh bien oui, du moins l'espace de deux
minutes, celles de l'immense piste introductive Stiletto in the
sand qui, en quelques dizaines de secondes fait plus que tout le
reste de l'album réuni. La basse qui claque, les violons dissonants, les
idées de génie s'enchaînent sans répit, c'est vraiment une claque
monumentale. Forcément, après un tel démarrage, on ne peut qu'attendre
un disque phénoménal, et on sera donc déçu de n'entendre qu'une copie
correcte du Operation : Mindcrime de Queensrÿche (tout y
fait penser, tant dans le style que dans la construction de ce qui est
de fait aussi un concept album avec visées politiques), sans gros point
faible même si des relents de mièvrerie flottent encore par-ci par-là
(les titres avec piano Broken et Spoken words, on s'en
passerait très bien) et quelques fautes de goût sont encore audibles (la
batterie est globalement pas terrible, mais elle atteint des sommets de
vacuité sur Hope for us ?). Peu de points faibles donc, mais ça
manque tout simplement de titres mémorables, les chansons-fleuves ne
sont pas suffisamment emballantes, et je me rends compte au fil des
albums que j'apprécie de moins en moins le chanteur (faut dire que
j'avais la comparaison avec Geoff Tate en tête et ça ne lui fait pas du
bien). On reste sur la bonne voie donc pour Shadow Gallery, mais bien
que j'y aie cru un instant, le chef-d'oeuvre ne sera pas encore pour
cette fois-ci.
- Shadow Gallery - Legacy (2001) ★ ★ ★
Après un album-concept au format inhabituel pour eux, retour à l'album
prog pur et dur pour Shadow Gallery : 70 bonnes minutes de musique
pour... 6 titres, dont un dernier qui affiche pas moins de 34 minutes au
compteur (ils ont fait une reprise prog d'un mouvement de symphonie de
Mahler ?) ! En fait, c'est une (petite) blague, il ne dure qu'une
vingtaine de minutes, mais il est suivi d'une ghost track qu'il vaut
mieux éviter d'aller écouter si on n'est pas fan de niaiseries au
clavier. Oui, je sais, les ghost track devaient déjà être passées de
mode depuis un certain temps quand ce disque est sorti, mais la
modernité n'a jamais été l'objectif majeur du groupe : claviers datés,
production pas puissante pour deux sous, difficile de croire à l'écoute
que l'album a été enregistré dans les années 2000. Peu importe, il
contient une fois de plus de la bonne musique, notamment dans les deux
titres très développés situés aux extrémités du disque (Cliffhanger
2, qui reprend textuellement l'intro du titre du même nom de
Carved in stone, est vraiment pas mal du tout). Entre les deux,
un enchaînement étrange de deux sortes de ballade, dont un Colors
qui rentre dans la catégorie des chansons de Shadow Gallery que je ne
peux vraiment pas écouter, et deux titres courts, dont la chanson-titre,
sorte de tube heavy mélodique, fort sympathique au demeurant, mais qui
ne semble pas vraiment à sa place ici (bon si, les choeurs restent
typiques du groupe quand même). Bref, j'ai encore une fois un peu de mal
à comprendre la construction de l'ensemble (et à apprécier certaines
pistes...) mais il y a du bon planqué derrière le côté suranné de cette
musique. J'attends quand même encore le disque qui me convaincra
complètement.
- Shadow Gallery - Room V (2005) ★ ★ ★ ½
Après l'intermède Legacy, Shadow Gallery revient terminer la
grande oeuvre démarrée quelques années plus tôt avec Tyranny :
deux nouveaux actes de sept titres chacun, 75 minutes de musique
supplémentaire, on repart comme si de rien n'était à la suite du premier
disque. À tel point d'ailleurs que l'instrumental Manhunt qui
ouvre l'album tambour battant, enchaîné curieusement avec une ballade,
prend par surprise, on a vraiment l'impression de débouler au beau
milieu d'un disque déjà entamé. Une fois remis dans le bain, on a droit
à du Shadow Gallery classique, avec alternance de titres mélancoliques
souvent bien mièvres (Vow ou même Encrypted, très peu pour
moi) et de choses nettement plus animées (The Archer of Ben
Salem), avec une place plus grande que d'habitude laissée aux
nombreux développements instrumentaux. Et ça c'est une fort bonne
nouvelle, car le groupe assure vraiment dans ce domaine malgré quelques
fautes de goût côté claviers (dans la chanson titre notamment). Au point
d'ailleurs qu'un disque purement instrumental de Shadow Gallery aurait
vraiment pu être une tuerie. Mais contentons-nous de ce qu'on a, à
savoir un disque bien ficelé et peut-être un peu plus à mon goût que les
précédents. Non, ce n'est pas encore l'illumination qui ne viendra
jamais pour moi, mais quand même, ça commence à devenir vraiment très
bon.
- Shadow Gallery - Digital ghosts (2009) ★ ★ ½
Fin 2008, le chanteur Mike Baker décède d'une crise cardiaque. Pour une
groupe confidentiel comme celui-ci (musiciens semi-professionnels, pas
de tournées), cet évènement risquait fort de marquer la fin abrupte de
leur discographie. En fait, pas tout à fait, puisqu'ils ont décidé de
sortir dès l'année suivante un sixième album (qui sera par contre
probablement le dernier puisque le groupe, pourtant pas officiellement
dissous, n'a rien publié depuis) avec un nouveau chanteur. J'étais loin
d'être un fan de Baker, mais ça fait bizarre d'entendre un tout autre
type de voix (disons plus terre-à-terre) sur la musique de Shadow
Gallery, ça colle moyennement. Un peu à l'image finalement d'un album
qui semble ne pas trop savoir dans quelle direction partir : on a d'un
côté, et d'assez loin, le son le plus moderne qu'ait jamais eu le
groupe, avec un riffing inhabituellement agressif sur certaines pistes
(Venom en particulier, c'est sombre et grave, sans surprise
j'aime beaucoup cette tentative de renouvellement), et d'un autre côté
une overdose de choeurs (comme s'ils voulaient vraiment souligner que,
même sans Baker, ils continuaient à faire du Shadow Gallery) qui finit
personnellement par vraiment me gâcher le plaisir (sur Strong
entre autres). Dommage dans la mesure où il y a, comme d'habitude
finalement, de très bonnes choses parsemées dans les titres alambiqués
qui constituent cette dernière offrande (notamment With honor et
son étonnante citation de la Rhapsodie espagnole qui fera plaisir aux
fans de Ravel).
- Slayer - Show no mercy (1983) ★ ★
Allez, aujourd'hui je démarre, après l'exploration de la disco de
Megadeth il y a peu, celle d'un autre géant du thrash. Je dois bien
l'avouer, les quelques fois où j'ai déjà écouté du Slayer, j'ai plus ri
qu'autre chose tant le côté "on va provoquer le bourgeois" est outré au
point qu'on se demande en permanence si tout ça est bien sérieux
(probablement pas totalement de fait). Après, il faut remettre les
choses dans leur contexte et rendre à César ce qui lui appartient : ce
premier album du groupe sort alors que le thrash est à peine balbutiant
(Metallica vient tout juste de lancer son Kill'em all) et, pour
l'époque, le style Slayer est sacrément ravageur, et ouvrira grandes les
portes qui mèneront tout droit au metal extrême dans les années qui
suivent. Au moins, on ne peut pas reprocher à Slayer d'avoir simplement
suivi les autres avec un train de retard comme Megadeth. D'un autre
côté, quand on écoute ce premier essai, il faut bien admettre que ça ne
vole pas très haut : certes c'est énervé, mais la vitesse d'exécution
est encore mal gérée (un morceau comme The Final command avec ses
ruptures de tempo incompréhensibles, ça fait très amateur), les solos
sont bordéliques (m'enfin ça c'est une constante du groupe hélas) et le
chant qui hésite entre le suraigu et le beuglement ne ressemble
objectivement à rien malgré la sympathie naturelle qu'on peut avoir pour
Tom Araya. Quelques bons titres font quand même un peu plus que surnager
: The Antichrist, Metal storm/Face the slayer ou Black
: magic, il y a des riffs efficaces et on passe un bon moment. Mais
: le disque dans son ensemble n'a vraiment rien de transcendant.
- Slayer - Hell awaits (1985) ★
Il y a un truc bien avec les albums de Slayer, c'est que si on
n'apprécie pas leur musique, on n'a pas à la subir trop longtemps. Sept
chansons, moins de 40 minutes de musique, et on peut passer à autre
chose. Et pourtant, pour du Slayer, les titres sont plutôt développés
puisqu'on a quand même droit à trois chansons qui dépassent les six
minutes, avec des tentatives de construction presque recherchée et
d'assez longues intros instrumentales. Pas sûr que ce soit un très bon
plan d'ailleurs, dans la mesure où le principal (le seul ?) intérêt de
la musique de Slayer est de taper vite et fort, là le mince propos
musical est fortement délayé (et bien sûr, faut pas compter sur les
solos pour nous éblouir). Pire, le groupe a encore radicalisé son
approche, ce qui fait que sa musique tend dangereusement vers le néant :
aucun riff marquant, une espèce de chant parlé franchement laid (malgré
quelques tentatives de cris divertissantes en cours de route), et un son
qui vise tellement l'agressivité qu'il devient lui aussi moche et
désagréable. Bref, tout ça confirme que j'ai du mal avec le thrash
primaire de cette époque (constatation déjà fait avec certains des
premiers albums de Sepultura, par exemple), mais dans la mesure
où il est unanimement reconnu que Slayer a eu une grosse baisse
d'inspiration après la "bonne" période constituée de ses cinq premiers
albums, je m'inquiète franchement pour la suite...
- Slayer - Reign in blood (1986) ★ ★ ★ ½
Eh bien nous y voilà arrivés, à cet album qui est non seulement le plus
connu du groupe mais même, assez objectivement, l'un des plus mythiques
de toute l'histoire du metal : quiconque s'intéresse de près au genre a
forcément déjà entendu l'inoubliable cri de Tom Araya qui ouvre Angel
of death, ou le riff mythique de Raining blood. Bon, ok, mais
musicalement, ce troisième opus est-il vraiment meilleur que ses
prédécesseurs ? Assez indiscutablement, oui. Déjà, il bénéficie de la
présence de deux titres réellement excellents, ceux que j'ai déjà cités.
Angel of death, nonobstant le scandale que ses paroles ont
provoqué, est une ouverture hyper percutante et efficace, et même si
Raining blood retombe dans certains travers slayeriens (c'est
vraiment construit n'importe comment, plus une juxtaposition de
séquences énormes qu'une vraie chanson en fait), elle conclut l'album de
façon magistrale (bon, ok, les bruitages de pluie c'est quand même très
cliché). Et entre les deux ? Eh ben, c'est du Slayer typique et plus
difficile à digérer (solos super moches au son très métallique
notamment), mais au moins les titres sont balancés en deux minutes
(c'est vraiment la durée moyenne de ces pistes, le disque entier
n'atteint même pas la demi-heure !), c'est super rapide et agressif, on
n'a pas vraiment le temps de réfléchir, même si à la fin on n'en a pas
retenu grand chose. C'est à la fois la force et la faiblesse de l'album
finalement : un coup de poing d'une violence inouïe pour l'époque, mais
qui semble paradoxalement trop extrême aujourd'hui (alors même que le
metal a produit quantité de choses nettement pires depuis). Mais bon,
rien que les deux titres "longs", il mérite vraiment d'être écouté.
- Slayer - South of heaven (1988) ★ ★ ★ ★
Que faire après un album aussi brutal et sans concession que Reign in
blood ? Slayer a eu la présence d'esprit de ne pas tenter de faire
"le même en pire", mais au contraire de revenir à un thrash nettement
plus posé et classique, avec un ralentissement de tempo très net,
manifeste dès la superbe chanson-titre qui ouvre l'album avec un intro
lente et très mélodique qui met immédiatement dans le bain. De toute
façon, Slayer a une qualité indéniable : ils savent mettre leurs
meilleurs morceaux aux bons endroits pour accrocher l'auditeur. Ici
comme dans leur disque précédent, les deux pistes les plus mémorables
sont sûrement la première et la dernière (Spill the blood, qui
comme par hasard joue aussi la carte de l'ambiance lourde et du tempo
très retenu). Mais ce qui se trouve entre les deux est globalement de
meilleur tenue que sur Reign in blood, c'est assez varié (on a quand
même du bourrin rapide avec Silent scream ou Ghost of war,
à mon sens les titres les plus faibles de l'album, mais aussi des pistes
comme Live undead ou le très bon Mandatory suicide où on
se croirait presque chez Metallica), on a même une reprise
(franchement dispensable) de Judas Priest, et aucune chanson
n'est vraiment décevante. Malgré tout, ce n'est pas encore suffisant
pour moi pour dépasser une très bonne note, la faute encore une fois à
des solos indigestes (sur Mandatory suicide ou Cleanse the
soul) et quelques titres quand même moins bons déjà signalés. Je
préfère quand même assez largement ça à leurs albums précédents.
- Slayer : Seasons in the abyss (1990) ★ ★ ★ ★ ½
Me voici donc arrivé à ce cinquième album censé représenter la
quadrature du cercle pour Slayer, proposant le meilleur des deux mondes
(le Slayer survolté de Reign in blood et celui nettement plus
posé et mélodique de South of heaven) et maîtrisant totalement
son sujet. De fait, l'album est assez inattaquable : quelques titres
vraiment monstrueux (comme d'habitude, l'ouverture et la clôture du
disque sont particulièrement soignées, aux deux extrêmes niveau style
d'ailleurs), pas de temps faible vraiment gênant, et surtout
l'impression que les musiciens ont de fait atteint une sorte de maîtrise
technique absolue de ce qu'ils font qu'on ne ressentait pas jusque-là
(le chant varié et souvent surprenant d'Araya fait mouche à chaque fois,
et même les solos sont pour une fois quasiment tous corrects). Sans
surprise, je suis plus séduit par les titres plus lents aux ambiances
glauques (la chanson titre, quand même, avec ce refrain hyper marquant,
c'est énorme !) que par le déferlement des titres plus rapides (même si
je dois admettre que War Ensemble est assez imparable ou qu'une
chanson comme Expandable youth est également très réussie), et
les quelques tentatives d'expérimentation sont réussies (l'excellent
refrain de Skeletons of society ou les bizarreries qui émaillent
le glauquissime Dead skin mask, par exemple). Bon, mais alors, si
tout est bon, pourquoi pas la note maximale ? Eh bien, je vais faire le
pénible de service, mais je continue à penser que le groupe s'appuie un
peu trop sur le principe "on met une bombe au début, une bombe à la fin,
et le reste passera tout seul", ce qui crée une sorte de ventre mou en
cours d'album (surtout la deuxième moitié en fait, Temptation et
Born of fire, c'est pas mauvais, mais un peu paresseux). Et puis
bon, presque par principe, je n'ai pas envie de mettre autant qu'aux
albums ultimes du thrash que sont pour moi le Rust in Peace de
Megadeth et les premiers albums de Metallica. Malgré tout,
ce disque-ci n'a clairement pas usurpé son statut de grand classique.
Allez, je me remets Seasons in the abyss (la chanson) pour la
cinquantième fois de la semaine...
- Slayer - Divine intervention (1994) ★ ½
Beaucoup de fans de metal considèrent que la carrière de Slayer s'est
brutalement arrêtée après l'an de grâce 1990 (celui de la sortie de leur
album précédent, pour ceux qui n'auraient pas suivi). Il me restera
quelques disques à écouter après celui-ci, mais pour l'instant, il faut
bien être honnête, je ne peux pas trop leur donner tort. Déjà,
contrairement aux bonnes habitudes du groupe, ça part assez mal avec un
Killing fields inaugural qui n'a pas la force de frappe
recherchée et qui souffre surtout d'un son plus froid (et, disons-le
clairement, plus moche) qu'à l'accoutumée. Le nouveau batteur qui a
succédé à Lombardo signe une entrée remarquée, mais en fait on l'entend
trop (sur tout le disque d'ailleurs), et Araya passe son temps à
brailler sans nuances. Mais le pire est encore à venir, une bonne moitié
de l'album étant constituée de titres au mieux écoutables (Fictional
reality) au pire franchement mauvais (Dittohead et Circle
of beliefs, simplement pénibles), et souvent coupés de façon
absurdement brutale (il faut dire aussi que l'album parait long malgré
ses 36 minutes au compteur). Heureusement, alors qu'on y croyait plus,
le groupe retrouve un peu d'inspiration en fin de parcours et arrive à
aligner quelques titres sympas (le riff de SS-3 est le premier à
vraiment m'accrocher, 213 est un bon titre de type "lent et
glauque"). Pas suffisant pour sauver le disque, mais peut-être pour
croire encore un peu en l'avenir.
- Slayer - Diabolus in musica (1998) ★ ★ ½
Des fois, on ne devrait pas se renseigner avant d'écouter un disque.
Ayant parcouru le web pour lire des avis sur la discographie de Slayer,
j'ai pu constater que cet album avait une réputation assez désastreuse,
souvent cité même comme pire opus du groupe. Eh bien je ne suis
franchement pas d'accord, et le trouve assez nettement plus réussi que
le précédent Divine intervention (oui, j'ai sauté le disque de
reprises punk qui a été sorti par le groupe entre les deux). Après, je
comprends très bien les problèmes que les fans du groupe ont pu avoir :
Slayer ne fait plus du tout du Slayer. Au lieu d'innover en proposant
une musique ultra agressive comme il l'a fait dans le passé, le groupe
se contente désormais de suivre les modes et de produire un metal
relativement passe-partout. C'est flagrant dans le titre d'ouverture,
Bitter peace, avec son intro hyper lourde, ou dans quelques
pistes tentant de sonner urbain (Death's head, Desire)
sans d'ailleurs trouver une formule qui marche réellement (un gros point
faible de l'album est de toute façon le chant hurlé sans nuance
d'Araya). Mais peu importe que Slayer copie, si au moins c'est bien
fait, et c'est le cas pour une bonne partie des chansons de ce disque :
Bitter peace fonctionne très bien, Perversions of pain
aussi (même si je ne peux pas l'empêcher de penser à Fight fire with
fire quand j'entends ce genre de motif de guitare), et Point
est une bonne conclusion. Entre deux, c'est vrai, pas mal de pistes un
peu poussives ou plombées par des lignes vocales médiocres, mais
instrumentalement, ça assure quand même plutôt bien. Au final, un disque
très écoutable, même si on ne retrouve pas le niveau des sommets du
groupe.
- Slayer - God hates us all (2001) ★ ★
Cet album doit une partie de sa célébrité au fait qu'il est sorti le 11
septembre 2001 (et avec Slayer, on peut être sûr qu'il y aura au moins
un ou deux passages douteux dans le disque pouvant conférer à cette
coïncidence une portée inattendue). Bon, 20 ans après, demandons-nous
plutôt ce qu'il y a de neuf point de vue musical. Eh bien, en fait de
neuf, c'est plutôt un retour vers du "vrai" Slayer, comprendre du
bourrinage thrash avec solos médiocres mais une exécution instrumentale
qui force quand même le respect. Peu de titres vraiment marquants (les
meilleurs sont probablement Disciple, belle ouverture de disque
après une intro à la limite du supportable, et surtout Bloodline
qui est l'un des seuls titres à vraiment proposer une ambiance
intéressante), pas franchement de gros ratage, c'est tout à fait correct
sans grosse prise de risque (sauf peut-être sur Deviance qui se
démarque un peu). Le genre d'album qui s'écoute tout seul et qui
vaudrait une bonne moyenne s'il n'était plombé par deux défauts : l'un
assez mineur, le son est spatialisé de façon parfois franchement pénible
quand on écoute au casque, et l'autre beaucoup plus gênant, Tom Araya ne
semble définitivement plus savoir faire autre chose que brailler en
continu (c'est plus de la hargne à ce niveau d'acharnement), c'est
vraiment fatiguant et ça gâche carrément quelques titres par ailleurs
corrects (New Faith, War Zone). Du coup, on descendra à un
simple "passable", on est en droit d'attendre mieux de la part d'un tel
groupe.
- Slayer - Christ Illusion (2006) ★ ★ ★
Plus le temps passe, et plus les albums de Slayer se font rares. En même
temps, 20 ans après Reign in blood, le groupe a-t-il encore
suffisamment de choses à proposer pour se (re)faire une place au sommet
du thrash violent et provocateur dont il fut l'un des pionniers ? Eh
bien oui, au niveau de la pochette du moins, ils ont encore de la
ressource (qu'est-ce que c'est moche, quand même !). Pour ce qui est de
la musique on sera plus circonspects, même si là aussi un certain retour
aux sources d'un thrash assez speed semble acté (la seule piste
proposant quelque chose de franchement différent, Jihad, ne
ressemble d'ailleurs pas à grand chose). Deux bonnes nouvelles en tout
cas : Araya a retrouvé des nuances dans son chant, mine de rien ça
change tout. Et le titre d'ouverture est à nouveau (comme au bon vieux
temps) excellent et très percutant, de quoi rêver à un retour au sommet
pour le groupe. Ce début en fanfare ne sera toutefois pas vraiment
confirmé par la suite du disque, qui se contente de faire du classique
efficace sans grande imagination, en retrouvant accessoirement les solos
de guitare bien pourris. Tout cela est très correct (Catalyst,
Cult, ça passe tout seul) mais on est loin de l'agressivité qui a
fait les beaux jours du groupe (on est même à la limite de la rigolade
sur le bizarre Consfearacy). Simplement un bon album de thrash
avec quelques années de retard, quoi.
- Slayer - World painted blood (2009) ★ ★ ½
Voilà un album bien déroutant, et du coup pas si évident à juger. Non,
Slayer ne fait pas énormément évoluer son fonds musical, mais la
dichotomie "rapide et violent"/"plus lent et glauque" est ici
particulièrement douloureuse tant les chansons à ranger dans la première
catégorie sont ratées. Unit 237 sauve encore les meubles avec son
solo assez étrange mais qui pour une fois chez Slayer n'est pas
totalement inintéressant, mais Snuff ou Hate worldwide,
franchement, on a l'impression que les guitaristes ont joué quelques
notes très vite au hasard, mis ça en boîte et gardé en se disant "allez,
ça passera". Comme en plus Araya n'a plus l'air très motivé par ce qu'il
chante (au moins, c'est moins fatiguant pour les oreilles que sur les
albums précédents), ces pistes sont tout simplement à jeter à la
poubelle. Mais c'est vraiment dommage, car le reste est bon ! La
chanson-titre initiale ne ressemble pas vraiment à du Slayer pour le
coup, mais finit par séduire (je ne suis pas emballé du tout par le
début), et surtout, les pistes qui jouent la carte plus atmosphérique
(Beauty through order, Playing with dolls et surtout
Human strain, qui semble même retrouver l'inspiration de
Seasons in the abyss (la chanson)) sont excellentes. Du coup, on
a la curieuse impression que l'album est deux fois trop long (il est
pourtant dans les standards du groupe, à peine 40 minutes de musique),
tout en se disant que si le groupe n'insistait pas à vouloir produire
des titres dans un style qu'il n'est plus capable d'assurer, il pourrait
encore faire de sacrés disques...
- Slayer - Repentless (2015) ★ ★ ★
Slayer aura été, pendant un peu plus de trois décennies d'existence, un
groupe d'une stabilité absolument exceptionnelle dans le monde du metal
: quelques crises de son batteur Dave Lombardo mises à part (toujours
remplacé par le même Paul Bostaph quand il n'était pas là, d'ailleurs),
le quatuor est resté immuable jusqu'à ce dernier album. Ici, le
changement s'est effectué par la force des choses puisque Jeff Hanneman,
l'un des guitaristes inamovibles du groupe, est décédé, et le groupe ne
lui survivra d'ailleurs pas longtemps, se retirant définitivement après
ce dernier disque. Si on pouvait du coup s'attendre à une sorte de
disque testament, il n'en sera en fait absolument rien, puisqu'on a ici
droit à un travail étonnamment appliqué et limite scolaire de la part de
Slayer. Après une intro qui lorgne du côté de Maiden (au moins la
mélodie initiale), s'alignent des titres ni trop rapides ni trop lents,
avec des solos parcimonieux et pour une fois tout à fait audibles, mais
surtout une exécution propre et soignée qu'on n'attend pas vraiment de
la part de Slayer. Rien ne dépasse vraiment, aucun titre n'est une
tuerie inoubliable, aucun non plus n'est complètement raté (mes préférés
quand même : l'espèce de ballade When the stillness comes et
Piano wire), c'est en fait très homogène (parfois même à la
limite du répétitif), parfait pour une écoute en musique de fond, un peu
moins si on espère y trouver de quoi vraiment se réveiller. En fait, un
peu le genre d'album qu'on attendrait d'un groupe prometteur à ses
débuts (et que Slayer était à des années-lumière de proposer à ses
propres débuts, d'ailleurs !), très sympa mais un peu lisse et assez
vite oublié. Une conclusion loin d'être indigne pour le groupe, en tout
cas.
- Slipknot - Slipknot (1999) ☆
C'est bien beau d'écouter de l'obscur black norvégien ou de l'improbable
metal prog aux influences variées, mais pour faire un tour d'horizon un
peu complet des différentes tendances du metal, il fallait bien aussi
que j'aille un peu plus regarder du côté commercial de la force obscure,
par exemple avec l'album éponyme de Slipknot, qui après tout a du vendre
à lui seul plus de disques que tous les groupes des deux genres cités en
début de critique réunis. Au pire, j'aurai perdu une heure à écouter de
la merde. (Une heure plus tard). Ah ben oui, j'ai perdu une heure à
écouter de la grosse merde (je ne suis même pas honnête, j'ai essayé le
disque plusieurs fois avant de le critiquer). Premier point relativement
anecdotique : je suis très dérangé par le look des membres du groupe,
avec leurs masques. C'est assez curieux dans la mesure où les outrances
nettement plus limite de certains groupes de black, par exemple,
auraient plus tendance à me faire rigoler, mais là ça me rend mal à
l'aise. Deuxième point qui me surprend énormément : que ce groupe ait pu
avoir un tel succès commercial dépasse mes capacités de compréhension.
On est ici très loin d'un metal gentillet ou mélodique accessible au
plus grand nombre, ça lorgne plutôt vers vers les penchants les plus
extrêmes et bordéliques du genre. Déjà, le groupe est constitué de neuf
gugusses, et hélas ça s'entend : bruitages, samples et autres joyeusetés
en permanence, c'est bien simple, c'est le foutoir constamment, dont
émergent à peine quelques riffs médiocres répétés sans inspiration, et
surtout le "chant" de Corey Taylor, qui mérite à lui seul un triple
carton rouge. Les rares fois où on l'entend en voix claire (sur quelques
refrains), ce mec chante tout à fait correctement, mais il passe une
écrasante majorité de l'album à beugler le plus hideusement possible et
à prendre un style slammé complètement atroce (oui, le groupe veut
manifestement faire de temps à un autre une sorte de metal fusion) qui
rendent sa performance sur l'intégralité des pistes de l'album tout
bonnement insupportable. Le pire du pire : la piste finale
Scissors, longue suite de hurlements sur fond de bouillie sonore
indistincte, le premier album de grindcore venu est mieux construit (et
ça dure une minute par chanson et pas huit comme ici). Le mieux : une
indéniable énergie se dégage de certaines pistes, (sic) par
exemple c'est très très bourrin mais presque audible. Globalement quand
même, on peut quand même constater que la fusion du metal et
d'influences urbaines n'est pas donnée à tout le monde : quand on a du
talent à revendre ça donne le génial premier album éponyme de Rage
Against The Machine, quand on en a aucun, ça produit la grosse bouse
malodorante qu'est celui de Slipknot.
- Slipknot - Iowa (2001) ½
Malgré ma critique assassine de ce qui n'était en fait pas le premier
album du groupe (ils avaient apparemment enregistré un premier effort
avant d'embaucher Corey Taylor au chant, peut-être que c'était moins
inaudible mais je n'ai pas eu la curiosité de tenter le coup), je
continue la discographie du groupe, dont la qualité est strictement
croissante au moins sur les premiers disques (je n'ai pas encore terminé
mes premières écoutes). Oui, c'est même très net, on passe de "bouse
absolue avec rien à sauver" à "bouse absolue avec quelques titres
surprenants". L'essentiel de ce disque est en effet à nouveau composé de
titres bourrins et confus où alternent beuglements et chant plus ou
moins rappé complètement insupportable (et puis on atteint quand même un
fond assez indépassable au niveau des paroles avec par exemple
People=shit), mais il y a quelques échappées inattendues qui
laissent penser que Slipknot pourrait être capable avec un petit effort
de produire de la musique (de la vraie, je veux dire) : l'introduction
presque subtile de Gently (hélas, ça se gâte assez vite au cours
de cette piste), les percussions un peu recherchées de Skin
ticket (dommage que ce soit aussi répétitif, mais quand Slipknot a
une idée, en général, ils ne vont pas chercher plus loin ensuite que la
répétition pure et simple), et surtout l'ovni que constitue la piste
finale Iowa. Là, c'est carrément un quart d'heure de musique
quasi expérimentale, avec un espèce d'ostinato de percussion qui évolue
à peine, et pas mal de passages essentiellement bruitistes par-dessus.
C'est beaucoup trop statique pour tenir la longueur, mais il y a
là-dedans un minimalisme étonnant qui arrive à instiller une ambiance
assez spéciale. Bien insuffisant pour sauver le disque, mais on est
quand même en progrès, ce qui me permet d'utiliser pour la première fois
dans ces critiques la note généreuse de 0.5.
- Slipknot - Vol.3 : The Subliminal verses (2004) ★ ★ ½
Le deuxième album du groupe avait laissé entrevoir un léger mieux par
rapport au premier (on partait il est vrai de bien bas), celui-ci sera
le premier à être réellement écoutable. Mais curieusement, pour cela, le
groupe a mis de côté une partie de ce qui faisait son identité pour
proposer quelque chose de nettement plus policé, peut-être curieusement
poussés par un succès dépassant leur attente à proposer quelque chose de
plus commercial pour le justifier a posteriori. En tout cas, le son est
plus propre, c'est moins le bordel, et on a de plus en plus de pistes où
Taylor ne beugle pas (je rassure les fans de la première heure, il en
reste d'assez inaudibles, comme Welcome ou The Nameless).
Un prélude assez mélancolique, les interludes Vermilion (bon, le
chant est trop poseur et pop pour ne pas agacer mais l'effort est quand
même louable), et surtout la très belle Circle avec ses
violoncelles (si on pouvait supprimer le break aberrant, ce serait
parfait), franchement, on n'imaginerait pas du tout du Splipknot. Et
même le reste du temps, il y a de gros progrès, avec des riffs plutôt
efficaces parfois hélas gâchés par un chant encore hystérique (The
Blister exists). Et puis, pour conclure cet album finalement assez
varié, on a à nouveau droit à des trucs expérimentaux assez
invraisemblables mais loin d'être inintéressants (la piste finale
Danger - keep away me plaît bien). Tout ça est encore trop
inégal, mais montre cette fois vraiment que le groupe est capable de
produire de bonnes choses.
- Slipknot - All Hope is gone (2008) ★ ★
C'était latent dans leur album précédent, c'est maintenant complètement
manifeste, Slipknot n'assume plus du tout son côté "bad boys". On a
toujours une partie des pistes qui proposent certes un metal assez
violent, qui louche de plus en plus vers une influence thrash ma foi pas
désagréable (les première et dernière chansons, Gematria et
All Hope is gone, sont assez réussies), mais cette brutalité est
en permanence gommée, d'abord par une production et une organisation des
compositions de plus en plus aseptisées (le foutoir total des premiers
albums est loin, ça on ne s'en plaindra pas, mais on se demande souvent
s'ils sont vraiment encore neuf dans le groupe), mais surtout par
l'adjonction systématique de refrains en chant clair limite pop (pour le
coup, ça devient vraiment un procédé un peu fatiguant) et de petits
morceaux de choeur vraiment dispensables. Et comme si ça ne suffisait
pas à s'assurer un public suffisamment large, on a même des chansons
complètes en chant bien clair, qui vont parfois chercher une espèce de
guimauve pour midinettes (j'ai pensé à Type O Negative sur
Gehenna, c'est vraiment pas bon signe) à des années-lumière de
l'univers du groupe. Pas de titres expérimentaux pour nous perturber
cette fois-ci, dommage, car le fond musical est toujours en progrès,
mais c'est frustrant de ne pas l'exploiter mieux et de ne proposer qu'un
disque qui s'écoute tranquillement, mais au fond très passe-partout et
vite oublié.
- Slipknot - .5 : The Gray chapter (2014) ★ ★
Après un nouveau break de plusieurs années, Slipknot se décide à sortir
un nouvel album en hommage à l'un de ses anciens membres récemment
décédé (ils ont aussi perdu leur batteur dans l'intervalle). Comme
d'habitude, on a droit à 14 titres, ce qui est sûrement trop, mais le
disque s'ouvre de façon très encourageante avec un XIX à faire
pleurer les pierres. La promesse d'un album émotionnellement fort ne
sera pas vraiment tenue puisque le groupe alterne ensuite sans prendre
le moindre risque entre des titres rapides au chant agressif
(Sarcastrophe ou The Negative one, un peu dans le style de
leurs premiers albums, c'est toujours aussi mauvais) et d'autres
nettement plus easy listening lorgnant même franchement vers la pop,
avec un succès variable (Killpop, c'est vraiment horrible, mais
Nomadic par exemple est vraiment sympathique). Bien sûr, on a
aussi droit quelques fois à la facilité de la dichotomie couplets
énervés / refrain mielleux qui est devenu un classique du groupe
(AOV s'en sort assez bien dans ce genre). En fait, une sorte de
compilation de ce que le groupe sait faire de mieux (le titre final,
If rain is what you want, très atmosphérique, conclut l'album en
beauté) mais aussi de moins bon, à peu près au niveau de leurs deux
productions précédentes. Toujours pas de quoi justifier le statut de
groupe majeur de Slipknot, mais ça s'écoute gentiment.
- Slipknot - We are not your kind (2019) ★ ½
Dernière résurrection en date pour Slipknot avec cet album à la pochette
sympathique. Corey Taylor aurait prétendu à propos de cet opus vouloir
revenir aux sources de la musique produite par le groupe (ce qui, pour
moi, ressemble à une très mauvaise nouvelle !), mais c'est en fait
plutôt à un résumé de toute leur carrière auquel on a droit :
hétéroclite, souvent agaçant, et au fond musicalement trop limité. On se
pose quand même des questions en entendant l'intro de Unsainted
(précédé comme d'habitude par une piste bruitiste sans intérêt), ses
choeurs angéliques et ses lignes de chant clair très pop, vite
interrompus par des passages nettement plus agressifs au chant pseudo
rap complètement insupportable (Taylor n'avait pas totalement menti, il
arrive hélas à être pratiquement aussi horripilant au niveau du chant
que sur les deux premiers disques du groupe), où cela est-il censé nous
mener ? On n'aura pas vraiment de réponse puisque le groupe continuera
tout du long à alterner chant slammé ignoble (sur Critical
darling ou Orphan, on touche vraiment le fond) et chant clair
(parfois sur une même chanson, en réservant comme d'habitude le chant
clair aux refrains), et à entrecouper le tout d'interludes qui ne
semblent avoir été insérés que pour atteindre le compte habituel de 14
pistes (ils ne sont pas désagréables, mais la cohérence du tout laisse à
désirer). Et finalement, là où le groupe me convainc le plus, c'est
quand il part tellement en cacahouète qu'il propose des choses qui n'ont
plus rien à voir avec le metal (le début de la ballade de rigueur A
Liar's funeral, l'amusant Spiders, ou même My pain
qui pour le coup part vraiment complètement en vrille). Quelque part, ça
prouve une fois de plus que le fond de commerce de Slipknot est vraiment
une musique qui ne m'intéresse pas, ce qui explique en partie le fait
que je n'ai trouvé aucun de leurs albums vraiment satisfaisant. Mais je
suis quand même allé jusqu'au bout de l'aventure...
- Sonata Arctica - Ecliptica (1999) ★ ★ ★
Fin du millénaire dernier, alors que le metal speed est un genre à la
mode et qu'il est même devenu une spécialité finlandaise (notamment
grâce à Stratovarius), le premier album d'un groupe venu du froid
reçoit un accueil enthousiaste assez unanime chez les fans du genre. Le
genre de disque fait pour moi donc ? Eh bien je dois admettre que la
réputation de ce disque me semble assez grandement exagérée. On peut
sûrement l'expliquer par le fait que, contrairement à d'autres qui ont
pas mal tâtonné avant de proposer un contenu vraiment convaincant, le
tout jeune groupe (une vingtaine d'années de moyenne d'âge à l'époque)
semble déjà en pleine possession de ses moyens, à quelques
approximations du chanteur près (surtout quand il essaye de chanter aigu
pour faire comme tous les autres chanteurs de speed alors que sa voix
n'est clairement pas faite pour ça). Mais même au maximum, ce qu'ils
produisent ressemble quand même sérieusement à un gros alignement de
clichés (les guitares hyper speed mais brouillonnes de Blank
file, le clavier en mode clavecin, la ballade crémeuse accompagnée à
la flûte Letter to Dana), sans jamais avoir l'étincelle de folie
qui permette de tout emporter sur son passage (Picturing the past
est le seul titre vraiment irrésistible du disque à mon sens), ou la
mélodie hyper bien troussée qui se retient toute seule (en fait, niveau
lignes vocales, on penche dangereusement du côté d'une pop quelconque).
Après, ça reste très bien fait et tout à fait agréable à écouter pour
qui aime le genre, mais il faut remettre les choses à leur place, c'est
"seulement" un bon album, rien de plus.
- Sonata Arctica - Silence (2001) ★ ★ ½
Avec ce deuxième album au titre surprenant (on ne peut pas dire que la
musique du groupe soit chiche en décibels), Sonata Arctica confirme
assez exactement mon avis donné sur leur premier disque : une musique
hyper balisée qui navigue entre les titres speed aux refrains pop un peu
faciles avec claviers qui en font des tonnes (c'était le chanteur qui
gérait les claviers dans leur premier opus, ils ont embauché un musicien
supplémentaire pour celui-ci, du coup c'est encore pire de ce point de
vue) et ballades avec piano terrifiantes de mièvrerie (Tallulah,
quand même, c'est assez dur à avaler). On a même droit cette fois-ci à
un court instrumental (Revontulet) plutôt rigolo dans son côté
totalement exubérant. L'ensemble est à nouveau tout à fait sympathique
quand on aime le genre, mais tout autant frustrant car on sent
parfaitement que le groupe pourrait faire infiniment mieux s'il ne
cédait pas autant à la facilité : cette fois-ci le titre qui sort du lot
est Wolf and raven, réellement irrésistible avec son chant
rageur. Mais c'est une nouvelle fois le seul à se situer au-dessus du
"bon sans plus".
- Sonata Arctica - Winterheart's guild (2003) ★
Après deux premiers albums pleins de fougue juvénile mais manquant de
profondeur au niveau du contenu musical, Soanata Arctica semble décidé à
se poser un peu plus, et leur nouveau disque ralentit globalement le
tempo (enfin, y a encore plus de ballades nunuches quoi), et allège les
accompagnements, qui deviennent même par moments aux frontières de
l'indigence (le très bizarre Broken). Et du coup, on voit encore
plus clairement qu'ils n'ont essentiellement rien de nouveau à raconter.
Un ou deux titres rapides potables (Victoria's secret, malgré son
titre improbable), mais aussi une tentation néoclassique mal digérée
(Champagne bath et sa section de solos complètement foirée), des
ballades insupportables (The Misery, Draw me) qui feraient
tâche au milieu d'une set-list de tubes FM, et enfin, et c'est peut-être
le plus inquiétant, des lignes vocales souvent carrément moches (The
Ruins of my life, entre autres). Bref, pas grand chose à sauver,
même si l'envie manifeste des musiciens donne encore envie de ne pas les
dézinguer complètement. M'enfin, encore un ou deux albums comme ça et je
passerai quand même à autre chose.
- Sonata Arctica - Reckoning night (2004) ★ ★
Définitivement, Sonata Arctica est un groupe frustrant, pour ne pas dire
franchement agaçant. Pour ce quatrième album, ils ont beaucoup moins
forcé sur les ballades que sur le précédent (ouf !) et font
indiscutablement preuve de plein de bonnes intentions, mais arrivent à
chaque fois à les gâcher partiellement (quand ce n'est pas totalement).
Par exemple, la volonté de faire de White pearl, black oceans une
longue piste épique portée par ses choeurs (de toute façon, des choeurs,
il y en a partout dans l'album, avec même un peu d'influence
Queen surprenante sur The Boy who wanted to be a real
puppet), mais qu'est-ce que c'est mielleux et gnangnan (le titre
reste écoutable mais aurait pu et du être nettement meilleur) ! Pourtant
je ne suis pas franchement allergique au glucose, mais là on a vraiment
beaucoup trop souvent de la ligne mélodique bien crémeuse à peine
accompagnée par une guitare et une batterie en mode pilotage automatique
(faut dire qu'ils ont pas grand chose à faire, les claviers ont plus de
boulot). Même sur un Wildlife plus énervé (le groupe essaie de
refaire, sans y arriver, le coup de Wolf and raven deux albums
plus tôt), ça finit par partir complètement en vrille sur un solo
presque gênant tellement on a l'impression que les notes ont été
balancées au hasard. En fait, c'est sur les morceaux les plus
classiquement speed que le groupe s'en sort le mieux (Misplaced,
Don't say a word, My Selene) et propose des titres sympa
même si là encore bien cliché. Pas de pot, à partir de l'album suivant,
ils vont décider de laisser tomber les titres au tempo rapide pour faire
quelque chose de plus complexe et réfléchi. Bon, ben sauf miracle
improbable à l'écoute, je me dispenserai d'analyse détaillée pour la
suite de leur discographie...
- Strapping Young Lad - Heavy as a really heavy thing (1995) ☆
Démarrons aujourd'hui une longue aventure avec l'un des touche-à-tout
les plus prolifiques du metal actuel : Devin Townsend. Depuis ses débuts
il y a une trentaine d'années, le canadien a en effet mené en parallèle
plusieurs projets et sorti des albums par dizaines, en solo ou avec ce
groupe, Strapping Young Lad, qui représente en quelque sorte un exutoire
aux penchants les plus violents et extrêmes du gugusse (je ne sais pas
si je me farcirai toute la discographie disponible, mais comme à mon
habitude (qui a dit "maniaque" ?), je vais essayer de procéder
chronologiquement). De fait, brutal, ça l'est très souvent, en plus
d'être expérimental, au point même de proposer une bonne partie du temps
une sorte de condensé de sonorités industrielles ou électro et de metal
hardcore bien bourrin, le tout avec un son dense et franchement moche.
N'y allons pas par quatre chemins : en fait, c'est vraiment de la grosse
merde, comme j'en ai entendu assez peu depuis que j'ai commencé ces
chroniques, il n'y a pas une piste à sauver dans ce machin franchement
pénible à écouter jusqu'au bout. Bon, ce ne sera ni le premier ni le
dernier groupe à mal commencer sa carrière, mais espérons quand même que
la suite sera nettement meilleure.
- Strapping Young Lad - City (1996) ★ ★
J'aurais peut-être du accepter l'offre de boules Quies faite par un
camarade quand il a su que j'écoutais ce groupe, car Strapping Young Lad
est de retour pour une deuxième offrande, et on ne peut pas vraiment
dire qu'elle calme le jeu par rapport à la précédente. Devin hurle
beaucoup, la rythmique est monstrueusement brutale, les pistes
s'enchaînent sans pause, la production très (trop) riche (on a vraiment
l'impression qu'il y a "trop de son", comme si le but était d'assourdir
l'auditeur), bref ça dépote sévère. Mais, et c'est ce qui justifie la
note en forte progression, la musique n'a cette fois-ci pas totalement
été oubliée, et il y a même des pistes dont l'intérêt dépasse celui de
la jouissance primaire provoquée par la puissance de la chose. All
hail on the new flesh est vraiment intéressante, AAA et son
côté scandé fonctionnent, et Room 429 est une belle curiosité
avec son ostinato de piano incongru déboulant après une demi-heure de
violence absolue. La dernière piste qui lui succède semble d'ailleurs
également hors-sujet, comme si le groupe n'avait pas pu se résoudre à
mener à terme son projet jusqu'au-boutiste. On peut d'ailleurs se
demander s'ils ont produit ce disque dans le but d'être admirés ou
détestés. En pratique, pour moi, ce ne sera ni l'un ni l'autre : pas
assez de fond musical pour en faire un chef-d'oeuvre, et au fond trop
inoffensif pour être rejeté, ça ressemble juste à une espèce de caprice
d'un gamin doué, qu'on écoute avec indulgence mais auquel on n'a plus
envie de revenir que ça.
- Strapping Young Lad - Strapping Young Lad (2003) ★ ★ ★
La boulimie productive de Devin Townsend est régulièrement coupée par
des phases de rejet où il promet qu'il ne sortira plus jamais de
disques. Mais en général, ça ne dure pas longtemps, et quand il revient
c'est avec deux ou trois nouveaux projets sous les bras. Ainsi, après
une première coupure en 2001, Devin déboule deux ans plus tard avec deux
albums quasiment simultanés, le retour de son groupe défouloir Strapping
Young Lad avec un disque éponyme, et un nouveau projet solo dont je
causerai donc ailleurs. Pas de grosse surprise pour la facette brutale,
c'est du bien bourrin, mais il y a tout de même eu une évolution des
sonorités, on quitte le côté indus et vraiment ultraviolent des deux
premiers disques du groupe, pour trouver un son nettement plus rond
(avec pas mal de claviers, comme si la mise entre parenthèses du projet
pendant quelques années lui avait fait subir l'influence de la carrière
solo de Townsend) et plus "classique" (beaucoup de blast beats, des
guitares qui martèlent leurs notes dans les fréquences graves, on
pourrait presque se croire dans un album de death ou de black standard
par moments), mais avec par-dessus tout ça de vrais motifs travaillés et
même parfois mélodiques et la voix de caméléon de Townsend qui passe du
hurlement bestial à des passages plus clairs avec talent. Tout ça pour
un résultat à mon sens nettement plus intéressant que sur City,
j'aime vraiment bien le long Aftermath et sa rythmique
intraitable et le curieux Bring on the young conclusif qui
s'éloigne pour le coup sensiblement de la brutalité du reste du disque.
Un disque que je n'écouterais pas tous les deux jours (ça blaste quand
même trop sévèrement pour moi) mais qui propose vraiment quelque chose
d'intéressant dans un cadre d'expression a priori assez limité.
- Strapping Young Lad - Alien (2005) ★
Strapping Young Lad était initialement le défouloir "plus extrême tu
meurs" de Devin Townsend, mais plus le temps avance, moins ce projet
semble avoir de sens pour le canadien. Ne pouvant plus guère pousser
plus loin le curseur de la violence, il essaye quand même de continuer à
proposer de nouvelles choses en ajoutant des éléments plus ou moins
incongrus à son metal extrême (ici pas mal de choeurs, y compris des
choeurs de gamins dont on se demande ce qu'ils font là, une utilisation
étrange des guitares sur We ride, et même Two weeks, piste
acoustique calme qui semble avoir été casée là juste pour faire
contraste avec le reste). Mais sur le fond, il ne semble pas avoir grand
chose à dire, et il comble le vide à grands coups de synthés comme il le
fait sur ses albums solo, au point d'ailleurs que, s'il n'y avait pas le
chant extrême (pas du tout systématique d'ailleurs, il y a nettement
plus de chant clair sur ce disque que sur les précédents du groupe), on
pourrait confondre. Et puis, rien que pour le foutage de gueule que
constitue le Info dump final (douze minutes de bruits
inaudibles), l'album mérite sa sale note, même si le reste est loin
d'être minable (simplement pas très intéressant). Le groupe aura encore
droit à un album en 2006, The New black, dont je ne ferai pas de
chronique, plus ou moins dans la même lignée, avec quelques bizarreries
(des cuivres sur une piste, entre autres), quelques titres sympa (le
très exubérant Far beyond metal) mais trop peu de musique
consistante à se mettre dans les oreilles. Ensuite, Devin Townsend
comprendra qu'il est temps de ranger ce projet au placard pour se
consacrer à autre chose.
- Stratovarius - Fright night (1989) ★ ★ ★
Pour ceux qui ne le sauraient pas, Stratovarius est l'un des ces groupes
de metal "symphonique" (comprendre : avec plein de claviers de mauvais
goût) venus du Nord qui proposent un metal très mélodique, volontiers
épique ou au contraire bien crémeux, et qui n'hésitent pas à rajouter
une bonne dose de guimauve pour faire passer les choses. De toute façon,
si vous vous voulez mesurer votre perméabilité au groupe, testez donc le
début de My eternal dream (première piste tirée de leur dernier
album) et, selon l'endroit où vous positionnerez votre curseur entre
"génialement épique" et "horriblement pompier", vous saurez à quoi vous
en tenir. Mais revenons pour l'instant une trentaine d'années en
arrière, avec les débuts nettement moins pyrotechniques du groupe. À
l'écoute de ce Fright night, on a l'impression d'entendre le devoir de
fin d'études bien appliqué d'étudiants en école de musique qui se
lancent dans le grand bain (ce qui est de fait à peu près le cas des
finlandais à l'époque). Mais assez curieusement, ça n'a pas du tout un
esprit metal (ce n'est pas le machin enregistré dans un garage avec soli
approximatifs), on aurait plutôt la sensation d'entendre des musiciens
classiques qui voudraient soudain faire autre chose et tenter du metal :
c'est assez épuré (de ce point de vue, on est vraiment loin de la future
musique du groupe !), l'utilisation de gammes ou autre motifs n'est
vraiment pas conforme à ce qu'on entend habituellement dans le genre, et
on a même droit en guise de Goodbye à un instrumental qui sonne
carrément médiéval. Amusant, et même si c'est un peu trop lisse, j'avoue
passer un très bon moment à écouter ce machin (le chant sur Future
shock, la cavalcade de Witch hunt, le refrain de Fright
night, ça passe très bien). Clairement pas un chef-d'oeuvre, mais un
début prometteur.
- Stratovarius : Twilight time (1992) ★ ★ ★
Après un premier album assez surprenant, Stratovarius change de cap avec
un deuxième disque qui annonce beaucoup plus clairement ce que fera le
groupe par la suite : son beaucoup plus heavy, mais surtout un metal
très mélodique avec des claviers qui ne s'imposent pas encore totalement
mais qui font tout de même des apparitions remarquées et même quelques
bruitages d'un goût pas toujours excellent (la combinaison des
grincements stridents et du synthé "fantômatique" en intro de Madness
strikes at midnight, c'est vraiment kitsch), tout pour me plaire. Et
de fait, le Break the ice qui ouvre l'album est très réussi, ça
se répète beaucoup mais c'est c'est assez irrésistible, avec même un
break assez inspiré en cours de route. La suite sera tout de même très
inégale, des hauts (Madness strikes at midnight avec sa belle
utilisation du registre grave des claviers et son refrain tellement
efficace qu'on l'entend au moins cinquante fois), des titres power trop
basiques pour vraiment marquer (The hands of time et sa batterie
insipide, le joyeux Out of the shadows), et un instrumental de 2
minutes qui essaye de claquer mais qui finit dans le mur faute
d'intentions claires. Mais surtout, le disque s'achève en apothéose avec
Lead us into the light. Dès les premières mesures on craint le
pire : tempo très retenu, tchac poum béats de la batterie et motifs de
violons synthétiques, ça sent fort la ballade FM sirupeuse en diable. Eh
bien on a raison puisque c'est exactement ça, mais fait avec une telle
envie sincère d'émouvoir l'auditeur indulgent que ça passe crème (avec
supplément chantilly). À l'image d'un album que je ne peux m'empêcher
d'apprécier malgré ses gros défauts, même si je ne le conseillerais qu'à
ceux qui apprécient déjà fortement le genre à la base.
- Stratovarius - Dreamscape (1992) ★ ★
Après deux premiers albums très différents mais tous les deux
prometteurs, Stratovarius semble prêt à passer à l'étape supérieure avec
cette troisième proposition : pas moins de 14 chansons, des ambiances
très variées, sur le papier c'est intéressant. À l'écoute, hélas, c'est
plutôt la déception qui l'emporte. Déjà, les aléas de l'écoute sur
deezer font que j'ai du faire pour cet album avec une version
"d'origine" quand j'avais très certainement eu une version remastérisée
pour le précédent, car la qualité sonore est très moyenne (les guitares
sonnent brouillon et assez grises, c'est bizarre, en tout cas sur
certains titres c'est vraiment pas très beau). Mais surtout, après un
début de disque plutôt sympathique (Chasing shadows a un refrain
efficace même si beaucoup trop répété, 4th reich et son ambiance
oppressante intrigue, et Eyes of the world est vraiment sympa
même si on tombe un peu dans la facilité), le groupe expérimente à tout
va et ne convainc que trop rarement : Magic carpet ne ressemble à
rien, les titres Thin ice et Atlantis sont certes
intéressants mais quand même franchement bizarres, et les chansons plus
classiques ne provoquent aucune étincelle (la ballade Tears of
ice tombe encore dans la caricature avec ses ajouts de flûte, les
quelques titres speed comme We are the future) sont tout
bonnement quelconques). Le tout s'achève avec un Wings of
tomorrow aux cuivres synthétiques datés et au refrain pop vraiment
mauvais, probablement la piste de trop qui fait vraiment pencher la
bascule du mauvais côté. Dommage, les finlandais ont des choses à dire,
mais ont probablement voulu en mettre trop dans ce disque-là, même si
tout n'est pas à jeter.
- Stratovarius - Fourth Dimension (1995) ★ ★ ★ ★
Pour ce quatrième opus au titre subtil et à la pochette, euh, datée, les
finlandais ont changé de chanteur (le nouveau venu est une sorte de
caricature du chanteur de speed à la voix bien claire qui peut
facilement monter dans l'aigu, mais en même temps il assure tout à fait
correctement) mais ont surtout laissé tomber les expérimentations
diverses et parfois difficiles à suivre de leur précédent album. Les
deux premières pistes Against the wind et Distant skies
l'affichent haut et fort : maintenant on fait vraiment du bon vieux
speed à tendance héroïque, avec refrain un peu facile mais tellement
entraînant que personne ne peut y résister. Pas moi en tout cas, puisque
de fait j'accroche à fond sur ces deux titres. Il y aura ensuite des
choses moins réussies, mais toujours intéressantes (bon ok, l'intro
kitsch de Galaxies est d'un goût discutable, mais le reste de la
chanson est franchement sympa ; et puis j'aime beaucoup le curieux
030366 avec son ambiance quasiment indus qui semble déplacée sur
un disque de ce type). Dans la deuxième moitié de l'album, le groupe
essaye de varier un peu les sonorités : de la flûte sur Nightfall
(un peu cliché tout ça) et des claviers qui semblent faire une obsession
sur le mode clavecin, c'est assez amusant même si Twilight
symphony (qui contient par ailleurs un peu de vrais violons) frise
le trop plein. Finalement, c'est probablement quand ils essaient de
rester le plus classiques possible que les finlandais s'en sortent le
mieux mais l'album dans son ensemble est quand même assez irrésistible à
mon goût.
- Stratovarius - Episode (1996) ★ ★ ★ ★
Avec ce cinquième album, on rentre vraiment de plain pied dans la
période "classique" de Stratovarius. Le nouveau chanteur est maintenant
bien installé, mais surtout la production est nettement plus propre (et
clinquante, il faut bien l'avouer) qu'auparavant, et le style speed
mélodique avec une bonne dose de mauvais goût complètement assumé. Les
plus allergiques seront donc complètement horripilés par les tics
parfois énervants (entre autres l'utilisation du synthé clavecin
caractéristique du groupe, l'instrumental Stratosphere est
franchement à la limite du n'importe quoi, et l'intrusion assez
incongrue d'une citation de Bach dans Will the sun rise ? de
trop), et probablement terrifiés par la ballade Forever qui
conclu l'album (ah, ces violons dégoulinants ! Même pour moi c'est un
peu too much !). Les fans, au contraire, se réjouiront d'une première
moitié d'album vraiment excellente (les très speed Father time et
Speed of light, et l'assez décousue mais vraiment attachante
Eternity). La fin n'est pas tout à fait au niveau, les pistes
Babylon (avec, on s'en serait douté, un peu plus que quelque
touches d'orientalisme de bazar) et Night time eclipse ne
justifiant pas vraiment leur assez longue durée (plus de sept minutes).
Dans l'ensemble, ça reste quand même un classique du genre tout à fait
appréciable.
- Stratovarius - Visions (1997) ★ ★ ★ ★
Stratovarius avait atteint une sorte de vitesse de croisière avec son
précédent essai Episode, il confirme avec ce nouvel album assez
unanimement considéré comme son plus grand classique. Je suis assez
d'accord avec cet avis, mais avec quelques réserves. Oui, il s'agit d'un
disque assez imparable pour qui apprécie ce metal speed très mélodique
(et, bien entendu, supporte le clavecin si cher à nos finlandais), qui a
par rapport au précédent l'énorme avantage d'être extrêmement homogène :
aucune piste vraiment faible, une belle alternance entre titres rapides
qui lorgnent toujours un peu trop sur la virtuosité gratuite (Forever
free dont la fin est un peu lourdingue), chansons plus calmes mais
aux ambiances travaillés (le réussi Kiss of Judas qui ouvre
l'album), les inévitables ballades (Before the winter et
Coming home, toutes les deux réussies pour qui supporte la
guimauve), l'instrumental de rigueur (pour le coup, niveau virtuosité et
clavecin, on est servis) et même une piste finale éponyme beaucoup plus
ambitieuse que de coutume, dix minutes de délire sur les prédictions de
Nostradamus, c'est intéressant à défaut d'être tout le temps génial.
Non, vraiment, tout ça fait un excellent album sur lequel on peut
difficilement cracher, et pourtant, quelque part, c'est trop lisse, trop
"facile" (Black diamond, un des tubes absolus du groupe, me
semble relativement peu intéressante à cause de ce côté franchement
prévisible, et puis singer Bach au clavecin en intro et en conclusion,
désolé, ça ne suffit pas à m'impressionner), il manque probablement un
titre qui surprenne vraiment pour monter au-dessus de la catégorie
"album très recommandable". Je laisse quand même quatre étoiles pour la
qualité globale (et homogène, encore une fois) des titres proposés, mais
je crois que je préfère légèrement le disque précédent.
- Stratovarius - Eternity (1998) ★ ★ ★ ★
Probablement mon album préféré de la grande période du groupe. On est
dans la même lignée que les deux précédents, malgré un ton globalement
moins enjoué, ce qui se traduit notamment par une présence encore plus
grande que d'habitude de morceaux lents (l'excellent 4000 rainy
days, les moins mémorables Years go by et Venus in the
morning, qui sauvent les meubles avec un peu de piano pour la
première et d'orchestrations pour la seconde). On a tout de même droit à
quelques titres speed comme il faut (No turning back, où le
chanteur semble dangereusement proche du plantage quand il part dans
l'aigu, c'est d'ailleurs encore plus manifeste sur les titres live de la
même époque où on est souvent sur le fil du rasoir, ou le très
sympathique Playing with fire). Mais les deux morceaux de
bravoure du disque, ce sont les longues fresques qui ouvrent et
clôturent l'album, Destiny avec sa très belle utilisation de
choeurs angéliques (si, si, c'est possible), et Anthem of the
world, qui donne plus dans l'épique et confirme que Stratovarius se
dirige de plus en plus clairement vers un metal orchestral. Même pas un
seul instrumental, et le clavecin qui se fait rare, le résultat est
peut-être un peu moins personnel mais quand même encore une fois
sacrément maîtrisé.
- Stratovarius - Infinite (2000) ★ ½
Après trois albums consécutifs particulièrement solides, Stratovarius
semblait avoir trouvé la recette qui lui permettait d'assurer le succès
à chaque coup. Et pourtant, comme ça arrive parfois sans qu'on puisse
réellement expliquer pourquoi, ici, la recette pourtant pas franchement
renouvelée accouche d'un plat sans saveur franchement décevant. En fait
on a l'impression que, l'inspiration en berne, le groupe force en
permanence pour accrocher l'intérêt de l'auditeur (Freedom, on se
croirait dans un générique d'anime lambda), sans réellement y parvenir.
L'album démarre pourtant correctement, Hunting high and low
(malgré un son assez électro qui me plait moyennement) et
Millenium disposent de refrains efficaces et font le job, comme
on dit. Mais ça se gâte terriblement avec Mother Gaia, espèce de
ballade de huit minutes complètement destructurée qui démarre sur fond
de piano sans âme, et termine avec des envolées de violons synthétiques
qui font très "mauvaise musique de film des années 70". L'autre morceau
long du disque, la chanson titre, fait à peine mieux en tournant trop
souvent à vide. En fait, ce sont les titres les plus classiques qui
sauvent l'album de la déroute (A Million light years away) si on
oublie les solos gratuitement virtuoses. Mais l'ensemble reste vraiment
médiocre en comparaison des précédents disques du groupe.
- Stratovarius - Elements Pt. I (2003) ★ ★ ★
Ceux qui avaient aimé la pochette de l'album précédent devraient
logiquement adorer celle-là. De toute façon, c'est bien simple, avec ce
nouvel album (qui n'est que la première partie d'une espèce de concept
autour des quatre éléments), Stratovarius, se sentant probablement
menacé sur son terrain de prédilection par une quantité de groupes qui
montent (faut dire que leur précédente tentative était vraiment en
retrait) décide de réagir en en faisant des tonnes, en rajoutant dans
tous les domaines : un vrai orchestre symphonique pour les accompagner
(à part dans l'épique et assez sympathique Elements, il est
relativement mal employé, il faut bien le dire), un instrumental
(Stratofortress) encore plus délirant de virtuosité gratuite qu'à
l'habitude (j'avoue beaucoup aimer), un break d'accordéon improbable sur
Fantasia (là, par contre, désolé, mais c'est vraiment
complètement décousu, un gros ratage), une ballade lacrymale sur fond de
bruits de vagues pour conclure l'album (A drop in the ocean),
finalement les titres speed "standard" sont presque noyés dans ce
déferlement de mauvais goût (Eagleheart qui ouvre l'album est
réussie, mais Learning to fly est franchement pénible (Kotipelto
devient de plus en plus horripilant quand il part dans l'aigu). Oh, mais
j'allais presque oublier de signaler la cerise sur le gâteau,
l'extraordinaire Papillon : intro avec petit braillard en voix de
tête sur fond de clavecin, orchestre mielleux, à l'image du chant qui
pèse des tonnes, c'est vraiment du concentré de sirop à la guimauve en
barres. J'en suis moi-même assez désolé tellement c'est indéfendable
mais j'adore. À l'image d'un album qui creuse très profondément la
caricature d'un style déjà peu subtil, mais que je prends quand même un
malin plaisir à écouter (bon, pas tout, quand même...).
- Stratovarius - Elements, Pt. II (2003) ★ ★ ½
En écoutant la deuxième partie du projet de Stratovarius centré sur les
éléments (et sorti à peine quelques mois après le premier disque), on se
pose une question un peu gênante : pourquoi avoir fait ce deuxième
disque ? Là où le premier avait le mérite (discutable certes) d'en
rajouter des tonnes avec ses orchestrations sirupeuses, le deuxième
volet revient à quelque chose de beaucoup plus classique pour le groupe
(l'orchestre ne sert objectivement à peu près à rien), tout en se
restreignant pas mal sur les titres speed (on a droit à pas moins de
trois ballades, et il faut bien avouer qu'on tombe bien bien bas de ce
côté là, Liberty et surtout Luminous sont vraiment des
bouses infâmes). On a quand même droit à quelques belles réussites
(Alpha & Omega qui ouvre l'album après avoir repris les bruits de
vagues clôturant le précédent histoire de créer un lien complètement
artificiel, Awaken the giant et son côté bourrin sans complexe
qui me plait), et à des caractéristiques habituelles pour le groupe (le
clavecin virevoltant sur Know the difference est plutôt rigolo,
le chant poussif dans l'aigu sur le même titre beaucoup moins). Un album
qui reste largement écoutable mais assez anecdotique.
- Stratovarius - Stratovarius (2005) ★ ★
Les hasards de ma programmation font que j'enchaîne avec un disque qui a
un certain nombre de points communs avec le Turbo de Judas
Priest (dont la critique a été tapée la veille de celle-ci,
NdRoupoil) : des claviers horriblement datés (les synthés ont toujours
joué un rôle important chez Strato, mais quand même, l'intro de
l'horripilante Maniac Dance qui inaugure ce disque fait mal aux
oreilles avec ces bip-bips façon jeux vidéo 8 bits), et surtout un
changement de cap inattendu qui renie complètement l'ADN musical du
groupe. Il faut dire que cet album de 2005 a été enfanté dans la
douleur, après deux ans de déchirements au sein du groupe, et qu'il sera
d'ailleurs le dernier avec Timo Tolkki (quasiment unique compositeur
depuis la création de Stratovarius) à la barre. Mais le choix de laisser
tomber les orchestrations, les titres speed héroïques et même les
ballades sirupeuses (The land of ice and snow joue plutôt la
carte pseudo folklorique avec r roulés et flûtiaux en accompagnement, un
titre assez mignon à mon avis) qui ont fait tout le succès du groupe est
quand même très surprenant, surtout sur un album éponyme dont la
pochette arbore uniquement le logo du groupe. On a donc ici droit à des
titres globalement nettement plus heavy, au tempo modéré, teintés donc
(surtout en début d'album) de sons électroniques très dispensables.
L'ensemble n'est pas franchement mauvais, même si les quelques
expérimentations laissent plutôt perplexe (Back to madness avec
son chanteur lyrique et son texte lu à la fin, United qui termine
quand même dans la grosse guimauve avec choeur nunuche et trompette),
mais semble quand même légèrement à côté de la plaque dans la
discographie du groupe.
- Stratovarius - Polaris (2009) ★ ★
On pouvait craindre que le départ du fondateur Timo Tolkki et les années
de tension n'aient tout simplement raison de l'existence même de
Stratovarius, mais pas du tout, les membres restants du groupe ont
recruté, ont presque tous contribué à composer les titres d'un nouvel
album, et annoncent la couleur dès la pochette : on revient à du Strato
bien coloré et spectaculaire, quitte à tomber dans le kitsch. Et en
effet, on retrouve les titres speed (Forever, très classique mais
très bien), les refrains mélodiques joyeusement chantés en choeur,
beaucoup de synthés qui font mal aux oreilles (dès l'introduction de
Deep unknown) et du clavecin réminiscent de Bach (l'intro de
Blind), sans compter un poil de violons synthétiques par-dessus
(poil qui se transforme en baobab sur l'improbable When mountains
fall qui conclut l'album et qui est assez désarmant de mièvrerie).
En fait, l'album compile tous les clichés du genre habituellement
pratiqué par Stratovarius, mais avec quelques maladresses de composition
(lignes vocales souvent mal fichues) qui font plutôt penser qu'on est en
train d'écouter un groupe débutant essayant de singer son modèle (ce
qui, quelque part, est effectivement le cas, sauf que le groupe qui
singe est le même que le groupe singé !). Tout ça n'est ni vraiment
convaincant, ni franchement raté, mais laisse en tout cas de l'espoir
pour les futurs albums du groupe.
- Stratovarius - Elysium (2011) ★ ★ ★ ½
Après un premier album "sans Timo" (enfin, sans Timo le compositeur
guitariste, l'autre Timo, le chanteur, est toujours là) qui manquait
d'assurance mais affirmait résolument un retour aux sources du speed
mélodique, Strato confirme largement avec ce premier album sorti dans
les années 2010. Encore une fois, absolument rien de révolutionnaire, on
se base sur une recette largement éprouvée avec tempi rapides (on a
quand même droit à la ballade de rigueur, Move the mountain et
son piano dans une atmosphère folk gentillette), du refrain choral
quasiment systématique, et surtout du clavier très très présent (les
touches orchestrales le sont par contre beaucoup moins). Pas tellement
de clavecineries néoclassiques de ce côté, plutôt une vraie sonorité
d'ensemble électro kitsch qui passe curieusement très bien. Et le tout
se termine avec une très ambitieuse chanson titre de 18 minutes qui
arrive à tenir la route sans toutefois complètement impressionner. C'est
un peu le problème général de l'album d'ailleurs : tout est très bien et
s'écoute avec plaisir, mais il manque un titre un peu plus accrocheur
qui permettrait de ne pas oublier trop vite ce qu'on a entendu (allez,
j'aime quand même beaucoup Lifetime in a moment avec son intro
façon choeurs grégoriens et son riff qui ne vous lâche pas). On n'est
pas peut-être pas encore remontés au niveau des meilleurs albums du
groupe, mais franchement, c'est déjà du très très solide.
- Stratovarius - Nemesis (2013) ★ ★ ★
Révolution totale chez Stratovarius : alors que depuis toujours ils
proposaient pour leurs albums des pochettes ultra-kitsch avec forte
dominante de couleurs froides, voilà qu'ils passent soudain aux couleurs
chaudes (mais en donnant toujours dans l'ultra kitsch, faut pas trop en
demander non plus) ! Faut-il y voir un signe de renouvellement musical ?
Pas franchement non, même si les claviers se fendent d'un peu plus de
variété et d'originalité que d'habitude (les bruitages de Halcyion
days ou de Dragons, avec la volonté de créer une curieuse
ambiance épique pseudo futuriste, font assez mal), on reste dans un
registre hyper balisé pour le groupe, avec intro du disque qui tape
volontiers dans le grandiose (Abandon, moi j'adore), nombreux
titres speed aux refrains accrocheurs mais déjà entendus des centaines
de fois, quelques fautes de goût en cours de route (le break
atmosphérique de One must fall, la modulation au demi-ton
supérieur honteuse de Dragons), et la ballade de rigueur If
the story is over qui fait son petit effet même si elle épuise là
aussi des recettes franchement éculées. En fait, si on veut être
objectif avec ce genre d'albums, on ne peut pas nier que c'est beaucoup
trop facile pour prétendre être un chef-d'oeuvre, et en même temps le
groupe nous joue ça avec un enthousiasme communicatif (et un son énorme,
comme toujours chez eux) qui emporte l'adhésion. Sans être le moins du
monde révolutionnaire, ça s'écoute vraiment tout seul pour qui aime le
genre.
- Stratovarius - Eternal (2015) ★ ★ ★ ★
Encore une longue discographie qui s'achève avec le dernier véritable
album en date de Strato (depuis 2015, ils n'ont sorti qu'une misérable
compilation). En trente ans et une quinzaine de disque, le groupe sera
finalement resté très fidèle à son metal très mélodique et haut en
couleurs, n'atteignant jamais véritablement un niveau exceptionnel (de
toute façon, je persiste à penser que c'est un groupe qui s'adresse aux
fans du genre et pas aux autres), mais en ne proposant presque pas non
plus d'album réellement décevant. Cette dernière offrande est à l'image
des deux précédentes, du pur Stratovarius hyper enthousiaste mais bien
calibré, ça va souvent (très) vite, les refrains sont imparables, et on
passe un très bon moment sans se prendre la tête. Je le préfère même à
ses prédécesseurs car il en rajoute une couche avec un caractère épique
bien affirmé et ça marche toujours avec moi : The Lost saga qui
conclut l'album est une longue fresque qui ne fait absolument pas dans
la subtilité mais qui marche très bien, et surtout le titre d'ouverture
My eternal dream est absolument énorme avec ses claviers
symphoniques déchaînés. Le reste est trop classique mais bien fichu,
avec une mention particulière pour Man in the mirror qui tente de
sortir des sentiers battus et s'en sort assez bien.
- Stratovarius - Survive (2022) ★
En faisant mon petit tour des albums sortis en 2022, j'avais raté la
résurrection de Stratovarius, pourtant relativement inattendue sept ans
après leur dernier disque. Il faut dire qu'après plus de 30 ans de
carrière et quinze albums au compteur, les finlandais sont désormais des
dinosaures du speed mélodique, mais leur précédent effort Eternal
m'avait plus qu'agréablement surpris par son souffle épique et son
inspiration. Le nouveau-venu jouissant d'un avis assez unanimement
positif chez les amateurs du genre, j'étais donc confiant sur la qualité
de la musique proposée. Eh ben douche froide assez claire. Ce n'est même
pas tant que le disque soit mauvais, mais il part avec une insstance
désespérante dans une direction qui me déplaît fortement, en
l'occurrence celle d'une musique ultra consensuelle et accessible, avec
mélodies crémeuses en permanence, un son "électro moderne passe-partout"
gonflant (une évolution malheureusement assez prévisible vu ce que
proposait déjà le groupe auparavant, mais là c'est vraiment pire),
surtout quand les claviers prennent le dessus, et surtout des lignes
vocales complètement pop sur tous les morceaux, et ça c'est
impardonnable (sans compter les nombreux effets complètement inutiles
sur la voix). On a même droit à quelques expérimentations franchement
ridicules (l'intro dance de We are not alone). Restent quand même
des refrains efficaces (celui beaucoup trop répété de Firefly, le
côté irrésistible de Before the fall) et plus globalement une
inspiration mélodique toujours présente, mais quelle idée de la mettre
au service d'une soupe à peine digne d'être écoutée à la radio en
corrigeant ses copies ? J'avoue avoir une certaine crainte à me remettre
les albums plus anciens du groupe, de peur de ne rendre compte que je
les ai complètement surestimés il y a quelques mois dans l'élan de la
découverte pas-à-pas de leur discographie (mais bon, j'ai réécouté
Eternal et y a vraiment pas photo, donc c'est probablement infondé).
- Summoning - Lugburz (1995) ½
Histoire denous immerger un peu dans une ambiance fantasy,
attaquons-nous à la discographie de Summoning, groupe autrichien (enfin,
groupe, façon de parler, ils sont en gros deux) qui a la particularité
de s'être spécialisé dans la revisite des écrits de Tolkien à une sauce
black metal très personnelle. Mais en 1995, les deux zigues (qui sont
d'ailleurs accompagnés sur cet album par un batteur qu'ils
s'empresseront de virer juste après) en question tournent encore dans
plusieurs groupes de black et, au moment de lancer ce nouveau projet,
s'ils ont déjà bien en tête le thème (tout est vraiment issu de Tolkien,
à commencer par le titre du disque), ce n'est pas encore vraiment le cas
en ce qui concerne le style musical. On a bien droit à de (beaucoup
trop) rares moments avec un peu de claviers (l'introduction Grey
Heavens, très minimaliste mais intrigante) et à des riffs vraiment
mélodiques (éléments qui deviendront centraux dans les albums suivants),
mais pour l'instant, c'est noyé sous une épaisse couche de black bien
crasseux, avec production abominable et un chant piaillé tellement
atroce qu'il suffit à lui seul à rendre une bonne partie du disque à peu
près inaudibles. Ce n'est pas totalement nul (non, vraiment, il y a des
riffs qui auraient mérité meilleur traitement), mais on n'en est pas
loin. En fait, quand on écoute la suite de la discographie de Summoning,
il est bien étrange que ce premier essai ait été publié sous la bannière
du groupe, tant il n'a rien à voir avec ce qui va suivre...
- Summoning - Minas Morgul (1995) ★ ★ ★ ★ ½
À peine quelques mois après un premier essai sans intérêt, Summoning
démarre réellement avec Minas Morgul son entreprise d'illustration d'une
Terre du Milieu fantasmée, très personnelle mais ô combien envoûtante.
Ceux qui ont de l'univers de Tolkien la seule image retranscrite par les
adaptations hollywoodiennes de Peter Jackson et qui imagineraient une
musique spectaculaire (à grands coups d'orchestration type
Rhapsody par exemple, après tout le groupe italien a eu un temps
le projet de se lancer dans une saga inspirée de Tolkien) en seront pour
leur frais, la musique de Summoning est beaucoup plus rustique et
minimaliste, ne serait-ce qu'à cause des moyens très limités dont
dispose le duo autrichien. S'ils ont conservé des guitares grésillantes
et un chant extrême (toutefois beaucoup moins hystérique que sur
Lubgurz, en adéquation avec des tempi beaucoup plus retenus), il
ne s'agit ici que d'un élément complétant une musique essentiellement
atmosphérique, basée sur des motifs très mélodiques répétés jusqu'à
l'obsession (les pistes s'étirent volontiers aux frontières de la
dizaine de minutes), des claviers très cheap énormément mis en avant,
quelques instruments typés pour donner une ambiance médiévale
(l'inoubliable bombarde de The Passing of the grey company) et
une boîte à rythmes minable histoire de simuler deux ou trois tambourins
en guise de base rythmique. C'est bien peu mais ce minimalisme assumé,
s'il rate parfois le coche (sur l'intro Soul wandering, on se
demande quand même où on a débarqué, et l'interlude Orthanc et sa
mélodie orientale semblent aussi s'être un peu perdus), réussit
régulièrement à mettre en place une ambiance mélancolique assez irréelle
mais surtout absolument magique (Marching homewards et sa superbe
mélodie en tête en ce qui me concerne), et, ce qui est peut-être la plus
grande réussite de l'album, à ouvrir en grand les portes de l'imaginaire
de l'auditeur, quel qu'il soit. Est-ce que le mélange improbable
"instrumental Renaissance-black metal doux" est vraiment une
illustration appropriée de la Terre du Milieu ? On s'en contrefiche,
cette musique invite au voyage, et chacun y apposera les images mentales
qu'il souhaite. Ce qui est certain, c'est que s'il rentre dans cet
univers surprenant, il ne sera sûrement pas déçu.
- Summoning - Dol Guldur (1997) ★ ★ ★ ★ ½
Ayant désormais trouvé sa voie, Summoning propose ici un disque dans la
lignée de l'excellent Minas Morgul : claviers omniprésents,
titres étirés à l'extrême par la répétition de riffs très mélodiques
mais assez simples (on est systématiquement à quasiment onze minutes sur
les pistes chantées), ambiance médiévale assez mélancolique, et surtout
une capacité incroyable à créer des atmosphères prenantes à partir de
pas grand chose. Cette fois-ci, pas besoin d'attendre longtemps pour
être conquis, l'introduction Angbands schmieden, avec ses
cloches, sa sublime mélodie à la harpe et ses espèces de gémissements en
fond, est absolument extraordinaire. C'est d'ailleurs à mon sens le
sommet de l'album avec Khazad-dum, qui reprend le principe déjà
mis à l'oeuvre sur le disque précédent d'une mélodie naïve jouée sur des
instruments typés "médiéval" (avec cette polyphonie basique mais
tellement efficace), sur laquelle le chant black apaisé vient se coller
très naturellement pour nous envoûter, c'est superbe. Presque trop même,
car en comparaison les titres n'arrivant pas à tutoyer les mêmes sommets
peuvent paraître un peu fades (la fin de l'album notamment, Unto a
long glory... et Over old hills sont moins réussis). Mais
l'expérience reste globalement inoubliable, et le disque est un digne
successeur à Minas Morgul, même si je rechigne encore à mettre la note
maximale (en même temps, un album qui réussit à être constamment au
niveau des meilleures chansons de Summoning, ça mériterait probablement
6/5).
- Summoning - Stronghold (1999) ★ ★ ★
La malédiction du quatrième album a encore frappé : alors que j'ai lu un
peu partout que Stronghold constituait un sommet de la discographie de
Summoning, je le trouve nettement moins bon que les deux disques qui
l'ont précédé (le tout premier, on est d'accord, on l'ouble de toute
façon). Et ce n'est pas la première fois que je bloque un peu sur ce
numéro 4 (au hasard, le phénomène s'était déjà produit pour des groupes
obscurs comme Black Sabbath, Iron Maiden ou
Metallica). Mais au moins, cette fois-ci, j'en identifie
facilement la raison. Sans révolutionner son style, le duo autrichien
propose ici un disque nettement plus metal que les précédents : certes
les claviers sont toujours très présents (heureusement !) et les tempi
lents, mais les guitares ont vraiment repris le dessus, et on n'a plus
droit à l'instrumentarium typé médiéval qui apportait ce charme désuet
si délectable aux meilleures pistes de Minas Morgul ou de Dol
Guldur. Ici, tout de même, quelques cuivres sympathiques (sur
l'intro Rhun qui nous met correctement dans l'ambiance, sans
plus), mais aussi des violons pas très inspirés. Même la production,
moins bancale que d'habitude, fait paradoxalement rentrer cet album dans
le rang, c'est dommage. Tout ça n'empêche quand même pas notre duo de
nous proposer un bon album, aux ambiances travaillées, qui contient
quelque nouveautés pas forcément convaincantes (le chant féminin sur
Where hope end daylight die, les samples guerriers de la piste
finale) mais surtout quelques très belles chansons (Long lost to
where no pathway goes loin devant tout le reste, mais The rotting
horse on the deadly ground vaut le coup d'oreille aussi). On reste
donc au-dessus de la moyenne, mais ça reste une petite déception, en
attendant la suite de pied ferme.
- Summoning - Let Mortal heroes sing your fame (2001) ★ ★ ★ ½
Pour cette cinquième offrande en quelques années, le duo autrichien
n'offre pas de révolution notable, mais quelques nouvelles pistes pour
agrémenter ses compositions toujours aussi lancinantes (même si le tempo
sur la première moitié de l'album est légèrement revu à la hausse par
rapport à ce qu'ils produisent d'habitude) : de petites apparitions de
samples (on en avait déjà eu dans le titre conclusif de
Stronghold) qui tiennent plus du gadget qu'autre chose, et un peu
de choeurs fantomatiques qui contribuent discrètement mais plutôt
efficacement à ajouter encore un peu de cachet à une musique qui n'en
manquait déjà pas. Pour le reste, on est en terrain très connu, avec une
volonté manifeste ici de faire dans le majestueux, matérialisée par une
utilisation assez massive de claviers très cuivrés (sur la très bonne
intro A new power's rising, entre autres). On ne retrouve
toujours pas la magie naïve des premiers albums, mais il y a quand même
pour moi un assez net regain d'inspiration, l'album se terminant très
bien avec Ashen cold et Farewell qui retrouvent une sorte
d'évidence mélodique un peu perdue de vue depuis le disque précédent. Un
dernier bémol tout de même, je ne sais pas si c'est un problème de
version, mais l'écoute au casque fait apparaître des problèmes de son,
comme une sorte de spatialisation mal gérée, qui est assez déroutante.
Dommage, mais l'album reste quand même très recommandable.
- Summoning - Oath bound (2006) ★ ★ ★ ★ ½
C'est à partir de ce sixième disque que le rythme des sorties de
Summoning se ralentit très nettement. Des difficultés à retrouver
l'inspiration pour de nouvelles compositions ? Ce qui est sûr en tout
cas, c'est que le style inimitable des compères autrichiens reste le
même, les quelques nouveautés (un peu de piano et de flûte, totalement
synthétiques comme il se doit, et des bruitages de bestioles évoquant
les armées ténébreuses des adaptations hollywoodiennes de Tolkien) s'y
insérant en douceur, sans rien révolutionner. Et ce n'est pas un mal,
car on est arrivés là à une sorte d'aboutissement pour cette musique,
parfaitement maîtrisée, toujours aussi évocatrice et tout simplement
belle (Across the streaming tide, Menegroth, ou le
monumental (presque 13 minutes au compteur, toutes les pistes sont de
façon longues sur cet album) Land of the dead avec ses superbes
choeurs grésillants). Je continue, comme sur les deux albums précédents,
à regretter le côté bric-à-brac féerique de leurs premières productions
(ici, on est clairement dans du plus concret, matérialisé notamment par
les bruitages déjà évoqués) qui me semblait encore plus magique, mais
dans son genre, c'est un disque inattaquable.
- Summoning - Old mornings dawn (2013) ★ ★ ★ ½
Incontestablement, Summoning est l'un des groupes à la discographie la
plus homogène que j'ai pu découvrir ces derniers mois. Si on excepte
leur premier disque, on ne risque pas d'être déçu en se mettant leurs
oeuvres les plus récentes dans les oreilles tant leur musique repose
toujours sur les mêmes ambiances et les mêmes types de mélodies. Le
risque au bout d'un moment, c'est évidemment la lassitude, et celle-ci
pointe un peu le bout de son nez sur ce septième album, un temps
pressenti comme étant le dernier du duo (qui commençait lui-même à se
lasser un peu, d'où probablement également les temps d'attente désormais
bien longs entre deux sorties). Le début du disque laisse même un peu
craindre le pire, tant ils semblent avoir du mal à renouveler un tant
soit peu leurs propositions (l'intro est différente de ce qu'ils font
d'habitude, mais pas vraiment convaincante, la chanson-titre est proche
de l'auto-plagiat). Et puis, petit à petit, l'ambiance assez lourde (le
chant sur Earthshine se fait franchement désespéré) finit par
nous prendre, et on replonge avec délectation dans cet univers onirique
inimitable, avec notamment deux derniers titres très réussis. Sûrement
pas de quoi convaincre ceux qui n'ont pas aimé les albums précédents,
mais les fans y trouveront encore leur compte.
- Summoning - With doom we come (2018) ★ ★ ★ ★
Après quelques atermoiements (et quelques années supplémentaires
d'attente), Summoning est donc bien revenu avec une nouvelle offrande.
Et cette dernière pousse le style du groupe dans ses derniers
retranchements, en permanence à deux doigts de tomber dans
l'auto-caricature (Mirklands notamment semble recycler des motifs
mélodiques déjà entendus dans les albums précédents). Les sept titres
proposés (plus un interlude instrumental, mais pas d'intro à proprement
parler ici, même si la première piste ne fait pas intervenir le chant
black habituel) sont encore plus étirés et répétitifs que d'habitude, et
constamment noyés dans une sorte de demi-teinte dépressive qui était
déjà bien présente sur l'album précédent du duo. Et cette atmosphère
fatiguée sied ma foi très bien à la musique des deux compères, plus
hypnotique que jamais même si le côté "émerveillement magique" est
maintenant un lointain souvenir, malgré l'usage assez intensif de
cuivres majestueux. Qu'importe de toute façon, seuls les fans trouveront
un intérêt à cette enième variation sur un même thème, mais ceux-là
seront reconnaissants à Protector et Silenius de leur avoir procuré une
dernière heure de bonheur avant de (probablement) se retirer de la
scène. Ils laisseront un vide irremplaçable tant leur musique est
unique.
- Symphony X - Symphony X (1994) ★ ★ ★ ½
Je vais faire plaisir aux fans de metal progressif en m'attaquant à l'un
des ténors du genre. Ceci dit, les influences de Symphony X pour ce
premier disque éponyme sont assez variées et parfois surprenantes : une
volonté manifeste de faire du "progressif technique" avec des guitares
qui nous gratifient régulièrement de solos "enfilade de notes" à la
limite de la virtuosité gratuite, une basse bien audible, des claviers
bien présents et variés (clavecin, orgue, piano, on a droit à un peu de
tout, du néoclassique avec citations de Bach à des trucs nettement plus
orientés pop qui font parfois mal aux oreilles, comme sur la très
dispensable ballade Shades of grey), et un chanteur, euh, un peu
à la ramasse hélas (si les titres plus faciles ne passent pas c'est
d'ailleurs aussi parce qu'il est incapable de les porter) qui ne fera
d'ailleurs qu'un album avec le groupe. Mais en plus de tout ça donc, on
a niveau vocal une énorme influence de Queen (les interventions
assez systématiques du choeur sur les refrains sont souvent à la limite
de la copie conforme) qui à mon sens donne une fraîcheur et une sorte
d'évidence mélodique à l'ensemble franchement bienvenues (ça s'écoute
tout seul). En tout cas, ça donne irrésistiblement envie d'y revenir
malgré les maladresses (trop de titres semblables, une piste finale qui
s'essouffle au long de ses 12 minutes, et des transitions pas toujours
adroites, on a souvent l'impression que les solos sont là pour faire un
peu de remplissage), et surtout d'écouter la suite de la discographie.
- Symphony X - The Damnation game (1995) ★ ★ ★
Grosse évolution pour le groupe dès ce deuxième album, en grande partie
due au changement de chanteur. Le nouveau venu, Russell Allen, il faut
le dire, est autrement plus qualifié que le précédent, et donne
clairement une autre dimension aux titres proposés par le groupe. Mais
en même temps, il n'est sûrement pas étranger non plus à un changement
de direction musicale assez net : on a encore des choeurs présents, mais
l'influence Queen est beaucoup moins présente, et surtout le
groupe semble se reposer beaucoup plus sur les lignes vocales d'Allen,
se contentant assez souvent d'accompagner son chanteur (attention quand
même, hein, ça continue à tricoter pas mal niveau instrumental et à
proposer des soli techniques régulièrement). En fait, malgré les
passages néoclassiques encore présents (l'introduction éponyme, bien
fichue, ou la citation de Bach de rigueur sur Dressed to kill),
on se rapproche dangereusement (à mon goût !) d'un metal progressif "à
la Dream Theater", moins mélodique et accrocheur que sur leur
premier album (on a même des sonorités de clavier à la limite du
ridicule par moments, mais ça passe encore). Mais, pour finir sur une
note nettement plus positive après ces bémols, ça reste quand même
bougrement bien fichu, et après une première écoute mitigée, je me suis
laissé prendre (The Edge of forever, le titre le plus développé,
est vraiment sympa, Savage curtain aussi). Pas non plus (ou pas
encore ?) de sommet inoubliable (le dernier titre A winter's
dream, séparé en deux parties qui n'atteignent même pas les 10
minutes au total, ressemble un peu à un pétard mouillé), mais encore un
bon album. Je préfère quand même leur premier.
- Symphony X - The Divine wings of tragedy (1996) ★ ★ ★ ★ ★
Eh non, pour une fois, le ronchon de service ne va pas aller à
contre-courant de la doxa des fans du groupe ! Après un deuxième album
encore un peu hésitant sur la voie à suivre, Symphony X enclenche la
vitesse supérieure, et a même du en griller quelques-unes au passage
tant cet album présente un aboutissement fulgurant par rapport au
précédent. C'est bien simple, ici, l'équilibre entre les différentes
composantes qui fondent maintenant la musique du groupe est parfait :
influence néoclassique bien digérée (Sea of lines, The
witching hour), tricotage technique jamais gratuit, riffing lourd
(plus d'ailleurs que sur leur album précédent), chant maîtrisé (allez,
pour chercher la petite bête, les lignes vocales de Russell Allen
pourraient être un peu moins lisses par moments, mais bon, c'est quand
même sacrément bien interprété), et bien sûr une composante progressive
qui se traduit régulièrement par des breaks complètement inattendus et
qui se fondent pourtant parfaitement dans l'ensemble (le changement
d'ambiance brutal vers la fin de The eyes of the medusa, ou le
passage avec les cloches dans The Accolade). Le tout sans
sacrifier le versant mélodique, bien présent ici (plus que sur The
Damnation game même, par exemple dans le thème qui apparaît après
les citations de Mars dans la chanson-titre, on retrouve même un peu de
choeurs "queenesques" dans l'excellent Of sins and shadows),
c'est une quadrature du cercle parfaitement réussie. Seul très léger
bémol de ma part : la construction de l'album se veut un piédestal pour
la chanson-titre fleuve de 20 minutes qui arrive presque à sa
conclusion, mais cette dernière n'est finalement pas tellement une
apothéose dans la mesure où elle ne se hisse pas vraiment à mon sens
au-dessus du niveau de qualité de toute façon phénoménal de l'ensemble
des titres qui la précédent. Reprendre Holst est par ailleurs une
facilité dispensable (alors que l'intro a cappella qui précède est
superbe). Mais ça reste très bon, à l'image de cet album sans point
faible.
- Symphony X - Twilight in Olympus (1998) ★ ★ ★
Après un troisième album extraordinaire, Symphony X n'a que légèrement
relâché le rythme de ses sorties, voici donc que déboule un quatrième
opus qui vise manifestement les mêmes sommets épiques et progressifs que
le précédent, mais qui n'y arrive pas tout à fait. Pourtant, l'intro de
Smoke and mirrors met bien en jambes, mais on n'est pas encore
arrivés à la fin de ce titre d'ouverture qu'on sent déjà que la
mayonnaise prend un peu moins bien. Déjà, les influences classiques sont
moins subtiles et s'insèrent moins bien dans le propos : passe encore
pour la citation de Bach de rigueur à la fin de ce premier titre, mais
l'interlude Sonata qui se contente de réorchestrer des bribes de
la Pathétique de Beethoven, je trouve ça vraiment complètement raté (le
thème du finale pris au ralenti...). Un peu à l'image de l'ensemble du
disque finalement, où on retrouve bien les ingrédients habituels, mais
avec un certain manque de fluidité (la piste finale, Lady of the
snow, prend même des chemins de traverse curieux avec ses côtés
orientalisants). Restent quand même une réalisation impeccable et
quelques titres qui suffisent à rendre l'écoute plus que sympathique (le
plus court et franchement épique In the dragon's den, et les plus
progressives, un peu inégales, Church of the machine et
Through the looking glass). Un bon album quand même donc, mais on
attendait forcément mieux après le chef-d'oeuvre qui le précède (là on
est en gros au niveau de The Damnation game).
- Symphony X - V : The New mythology suite (2000) ★ ★ ★ ★ ½
Après un quatrième album un peu décevant, Symphony X revient plus
ambitieux que jamais à l'orée des années 2000 : album concept enchaînant
une heure de musique sans interruption, avec des interludes symphoniques
(aux claviers, pas de véritable orchestre convoqué ici) pour servir de
transitions (interludes qui frisent d'ailleurs le mauvais goût par
moment, On the breath of Poseidon a un côté Disney assez
prononcé, qui sera confirmé dans certains passages de l'album suivant du
groupe). Si l'inspiration est là, pourquoi pas, mais le prélude douche
assez vite notre enthousiasme. Déjà, je l'ai déjà dit, les reprises de
tubes classiques sont une facilité qui ne me plaît pas trop, mais il
faudrait au moins bien les choisir : autant Bach sur A Fool's
paradise s'intègre sans souci, autant le requiem de Verdi au clavier
cheap, il est assez évident que ça ne peut qu'être ridicule par rapport
à la puissance de l'original (je suis d'ailleurs très surpris que les
membres du groupe eux-même ne s'en soient pas rendu compte). Et
pourtant, après ce faux départ, on retrouve une musique vraiment super
bien fichue, qui nous convie à un voyage assez fantastiquement
dépaysant, presque au niveau de The Divine wings of tragedy.
Evolution envoie du pâté, l'enchaînement avec l'excellent
Fallen est parfait, et malgré des claviers parfois trop crémeux
(sur Communion and the oracle notamment), pas vraiment de titres
ratés (l'ambiance orientale de Egypt arrive à éviter les clichés,
les passages techniques sont présents mais pas envahissants). C'est
encore un excellent album auquel on a droit là.
- Symphony X - The Odyssey (2002) ★ ★ ★ ★ ½
Sixième disque déjà pour Symphony X, et on sent vraiment désormais un
groupe sûr de sa force et de la qualité de la musique qu'il nous
propose, enchaînant les titres aussi mélodiques que techniques avec une
régularité impressionnante (Wicked par exemple, sans surprise
mais tellement bien fichu). Mieux, les citations d'oeuvres classiques
sont ici beaucoup plus discrètes et intégrées (un petit coup presque
obligé de Dukas dans Incantations of the apprentice, et Uranus de
Holst qui hante la fin de la chanson-titre), et le ton est globalement
plus agressif que dans les disques précédents. Ca ne plaira d'ailleurs
pas nécessairement à tout le monde (le chant d'Allen notamment est plus
rugueux), mais s'il y a moins de claviers crémeux (encore présents ici
dans The Accolade II, par ailleurs très réussi, et
Awakenings, qui pour le coup me semble être un des rares creux de
l'album), je ne vais personnellement pas m'en plaindre (encore une fois,
d'ailleurs, cette nouvelle tendance sera encore nettement accentuée dans
le disque qui suivra, l'évolution globale du groupe est extrêmement
cohérente). Non, la seule chose dont je me plaindrai cette fois-ci, ce
sont les premières minutes de la monumentale The Odyssey (24
minutes pour conclure le disque, la construction générale de l'album
fait fortement écho à celle de The Divine wings of tragedy), qui
convoquent ses claviers en mode "dessin animé" complètement assumé (une
espèce de croisement de musique de Disney années 80 et de Elfman versant
Simpson), c'est pour le moins perturbant, et pourtant après quelques
écoutes on finit par s'y faire et admettre que l'ensemble est assez bien
construit. Un choix tout de même discutable pour un album qui est par
ailleurs une nouvelle grande réussite (plus je l'écoute, plus je
l'apprécie).
- Symphony X - Paradise Lost (2007) ★ ★ ★ ★ ★
Jusqu'ici, Symphony X avait enchaîné les albums à un rythme soutenu
(jamais plus de deux ans entre deux sorties), mais il aura fallu
patienter pas moins de cinq ans pour voir un successeur à The
Odyssey. Autant dire qu'ils ont eu largement le temps de mûrir leur
choix d'évoluer vers un style nettement plus rentre-dedans, plus metal
et moins progressif en gros. C'est déjà nettement visible au niveau de
la production, qui met souvent les claviers en retrait, mais surtout
dans les premières compositions proposées : après une intro pour une
fois réellement symphonique façon Hollywood (avec des choeurs qu'on
retrouvera utilisés avec parcimonie à d'autres moments de l'album), les
trois premiers vrais titres sont très musclés, tout en conservant les
mélodies efficaces et la technique sans faille habituels du groupe, et
autant le dire tout de suite, j'adore. J'irai même jusqu'à placer
Domination comme mon titre préféré du groupe tous albums
confondus. Ensuite ça se calme un tout petit peu, même si seules la
chanson titre (et son piano mélancolique) et The sacrifice jouent
la carte de la (relative) douceur (on retrouve par exemple une ambiance
très épique sur The Walls of Babylon). Et tant mieux car c'est
excellent de bout en bout, tout le temps inspiré, fabuleusement
accrocheur, on voudrait que ça ne s'arrête jamais (et de fait j'ai bien
du mal à ne pas me repasser au moins les trois quarts du disque à la fin
de chaque écoute). Alors bien sûr on y a perdu les longues suites hyper
progressives qui manqueront à certains (rien qui atteigne les dix
minutes ici), et Russell Allen force un peu sur le côté rauque de son
chant, mais honnêtement, ça ne modère même pas mon enthousiasme. Non
seulement il s'agit là de mon album préféré du groupe, mais il va même
se faire une place de choix parmi mes albums de metal préférés.
- Symphony X - Iconoclast (2011) ★ ★ ★ ★
Après l'énorme claque infligée par Paradise lost, il aura fallu
encore quatre ans à Symphony X pour proposer un nouvel album. Signe
d'une nouvelle évolution, peut-être confirmée par la pochette et les
thèmes assez futuristes abordés cette fois-ci (on est plus proche de
Terminator que des histoires mythologiques auxquelles le groupe a
consacré plusieurs de ses premiers albums) ? En fait, pas vraiment, le
thème semble surtout être un prétexte pour proposer une musique
définitivement plus métallique dans la droite lignée de l'album
précédent. On a d'ailleurs l'impression un peu pénible tout au long de
l'album que le groupe a suivi une ligne où la prise de risque est
volontairement limitée : assez peu de variations de tempo, (Light up
the night s'approche quand même dangereusement du speed mélodique),
une ambiance robotique relativement uniforme (jusqu'à When all is
lost et son intro au piano, les titres se ressemblent pas mal), des
refrains hyper mélodiques et parfois un peu faciles (mais toujours
indéniablement efficaces, à l'image de la chanson titre qui ouvre
l'album), et bien sûr des riffs techniques et autres soli estampillés
Symphony X qui ne se démarquent pas de ceux des albums précédents du
groupe mais sont toujours parfaitement calibrés. Le groupe se repose sur
ses acquis ? Oui, un peu, mais il a quand même fait l'effort de proposer
plus de 80 minutes de musique (à vrai dire, c'est peut-être un peu
trop), et surtout ça reste dans l'ensemble de la très bonne musique (en
vrac, Dehumanized, Heretic ou la fin de When all is
lost, c'est excellent). Il repassera moins souvent sur les platines
que le précédent (moins de morceaux qui déchirent vraiment, un effet de
surprise atténué), mais on ne peut vraiment pas dire que l'écoute soit
décevante malgré tout.
- Symphony X - Underworld (2015) ★ ★ ★ ★ ★
Le rythme des sorties a définitivement ralenti puisque cet album, sorti
quatre ans après le précédent, est le dernier en date à ce jour. Mais
tant que la qualité reste à ce niveau, on peut difficilement se
plaindre. Si Iconoclast était un poil trop "facile", le petit
dernier retrouve une inspiration éclatante et se permet même le luxe
d'être plus varié que son prédécesseur. On reste globalement dans un
registre musclé, mais To hell and back (et ses presque 10
minutes) rappellent les tendances les plus progressives du groupe, et
surtout Without you (malgré tout pour moi le point faible de
l'album, les lignes de chant sont vraiment tarte à la crème) et Swan
song (avec son piano très présent) jouent une carte nettement plus
apaisée, qui contribuent à rendre l'album moins uniformément dense et
donc plus digeste. N'empêche que je continue à préférer quand ça envoie
du bois, et là on est franchement servis : après une Ouverture
grandiose qui n'est pas loin de taper dans le kitsch, Nevermore
ouvre le bal de façon classique pour le groupe (avec un refrain un peu
facile) mais tellement efficace, et un peu plus loin, la paire Kiss
of fire (le titre qui déménage le plus, avec des touches
symphoniques crânement assumées)/ Charon (plus subtile mais pour
le coup les lignes vocales sont irrésistibles) enfonce le clou. Peu
importe si la fin de l'album est moins inoubliable (j'avoue ne pas bien
comprendre la fin brutale du dernier titre), peu importe si la chanson
titre tend parfois dangereusement à se rapprocher de ce que produisent
certains groupes de power peu subtils (bon, moi, ça ne me dérange guère,
bien entendu), on a une nouvelle fois eu une dose de musique sacrément
maîtrisée de la part d'un groupe dont la discographie toute entière est
de toute façon assez exceptionnelle.
- System of a down - System of a down (1998) ★ ★ ½
Encore un groupe que je n'avais jamais écouté et que je découvre donc
complètement. Première réaction : "Waoh, ça décoiffe, excellent !".
Deuxième réaction (à peine dix minutes plus tard) : "Ah ouais, on
comprend pourquoi le CD est pas très long, c'est assez vite saoulant en
fait". De fait, ce qui fascine au premier abord, c'est vraiment
l'énergie dévastatrice dispensée quasiment en continu par le groupe (en
concert ça doit être quelque chose), tellement peu canalisée qu'on peut
quand même s'en lasser beaucoup trop vite. Notamment, le chant du
leader, qui fait en permanence le grand écart entre tout et n'importe
quoi (on est parfois proche du chant "folklorisant", des fois ça penche
presque vers le rap) est franchement horripilant à la longue.
D'ailleurs, on peut très bien avoir dans une même chanson (elles ne sont
pourtant pas longues) envie de se laisser entraîner, et d'arrêter tout
(sur Sugar, par exemple). En fait, j'ai été très embêté pour mettre une
note, tant j'oscille entre l'impression que c'est pas loin d'être
génial, et celle qu'on se fout de moi. Du coup j'ai mis une "moyenne"
qui n'a pas beaucoup de sens.
- System of a down - Toxicity (2001) ★ ★ ★ ★
Bonne surprise avec ce deuxième album, certes dans la lignée du
précédent, mais qui à mon avis penche beaucoup plus du côté génial que
du côté horripilant, même si le chanteur continue à en faire des tonnes
et que certaines pistes gâchent un peu l'ensemble (Bounce, et surtout
Shimmy et Psycho, je m'en serais bien passé). Le reste du temps,
on retrouve le côté survitaminé (la première chanson, Prison, réussit à
lancer l'album malgré le chant bien hystérique), mais surtout un peu
plus d'équilibre et quelques titres vraiment excellents, comme Forest
ou Aerials.
- System of a down - Steal this album ! (2002) ★ ★ ★ ½
Un troisième album totalement dans la lignée des précédents, qui aligne
très majoritairement des chansons courtes et très énergiques, mais en
conservant l'équilibre trouvé dans Toxicity (à part Fuck the
system, pas vraiment de piste qui donne envie de donner des baffes).
Dommage tout de même que le groupe semble capitaliser sur son style sans
chercher à se renouveler (une piste comme Roulette, qui part vraiment
dans une autre direction, est pourtant très intéressante), il y a un petit
côté paresseux dans cet album qui le rend moins intéressant que le précédent
(ça manque aussi de chansons vraiment mémorables, c'est assez homogène
dans le "bon mais pas transcendant"). Tout de même, il y a très souvent
chez eux une touche mélodique ou rythmique bien sentie qui fait qu'on ne
s'ennuie jamais.
- System of a down - Mezmerize/Hypnotize (2005) ★ ★ ½
Déjà la fin pour SOAD avec ce faux double album que j'ai choisi de
regrouper dans une même critique. Deux disques beaucoup moins survitaminés
que les précédents, et même globalement moins metal, on sent la volonté
de se renouveler, que ce soit en adoptant des tempos nettement plus
modérés (l'espèce de balade Lonely day) ou en assumant encore plus
clairement le côté floklorique de certaines mélodies (on a carrément des
bouts d'accompagnement arabisants par moments). Je ne vais pas m'en
plaindre, mais le problème c'est que cette diversification semble par
ailleurs être là pour cacher une baisse d'inspiration assez manifeste,
la plupart des chansons manquent de spontanéité, les multiples
changements de ton au sein d'une même plage (certes un des marqueurs du
groupe depuis son premier album) sont trop souvent artificiels, et il y
a bien peu de titres dans lesquels on retrouve ces éclairs qui
faisaient dire régulièrement à l'écoute de leurs précédents opus "quand
même, y a du bon là dedans". Rien de déshonorant non plus, tout ça
s'écoute plaisamment, mais on sent un peu le groupe (déjà) à bout de
souffle qui court après ses propres succès sans parvenir à vraiment les
rééditer. Ils ont peut-être eu raison de mettre l'activité du groupe en
pause après ces deux albums...
- Testament - The Legacy (1987) ★ ★ ★
Encore un petit tour par la case "seconde zone du thrash metal" pour les
semaines à venir. Mais si Testament n'a pas totalement réussi à se faire
sa place dans le panthéon du genre, c'est peut-être tout simplement
parce qu'il est arrivé un peu tard. Quand sort ce premier disque, les
géants du Big Four sont déjà installés, et on peut ne considérer le
groupe américain que comme un suiveur de ses illustres aînés. Alors oui,
c'est vrai, les ingrédients ressemblent à des choses déjà entendues
ailleurs, mais pour autant leur mixture est assez personnelle, avec ces
solos étonnants, très mélodiques, qui partent parfois carrément dans une
direction néoclassique (celui de First strike is deadly)
surprenante vu l'enrobage quand même assez brut de l'album (qui
constitue d'ailleurs une de ses grosses limites, le son est quand même
vraiment trop typé années 80, et les titres les plus rapides comme Do
or die tournent un peu à la bouillie sonore). Et il y a quand même
une certaine variété dans les riffs, comme sur Burnt offerings
(que je trouve à vrai dire assez raté, mais au moins c'est différent),
et une énergie (le titre d'ouverture Over the wall, très bon) qui
rend l'album intéressant même si très imparfait.
- Testament - The New order (1988) ★ ★ ★ ½
Un deuxième album dans la droite ligne du premier : du thrash bien carré
mais avec un son assez brut (c'est toujours pas folichon de ce point de
vue), avec une influence Metallica (période Ride the
lightning) encore plus évidente : intros avec quelques arpèges
acoustiques assez fréquentes, et surtout une dernière piste
instrumentale qui ne peut que faire penser à Call of Ktulu et
Orion. Sauf qu'évidemment ça n'arrive pas à leur cheville, et que
ça renforce donc l'image de Testament comme étant un groupe qui imite
avec moins de talent. Et pourtant, l'album dans son ensemble est
vraiment pas mal, il y a du titre bien frontal et direct (Into the
pit) mais aussi une recherche d'atmosphère plutôt sympathique au
niveau des introductions (la première piste Eerie inhabitants est
une franche réussite, Disciples of the watch est bien également)
et, comme dans le premier album, une pincée d'orientalisme (ici sur la
chanson titre) qui aurait sûrement mérité d'être développée pour
renforcer un peu l'identité du groupe. Mais tel quel, si on oublie un
peu les références écrasantes, on tient déjà un album bien solide.
- Testament - Practice what you preach (1989) ★ ★ ★ ½
Avec ce troisième album, Testament continue son petit bonhomme de chemin
et semble trouver une sorte d'équilibre : le son est nettement meilleur,
les tempi assez tranquilles (sauf sur la salement brutale
Nightmare), et l'influence Metallica est plus que présente
une fois de plus (au niveau des lignes vocales, on a très souvent
l'impression d'entendre des chutes des premiers albums des Horsemen).
Bref, aucune surprise dans tout ça, mais quand c'est bien fait on n'a
pas vraiment de raison de se plaindre, et il y a du bon là-dedans : la
basse bien audible, un caractère mélodique sympathique avec quelques
refrains bien sentis (j'aime notamment l'atmosphère de Time is
coming) et même un instrumental final nettement plus original (et
donc convaincant) que sur l'album précédent (là, pour le coup, on n'est
pas dans l'ombre de Metallica, et c'est fort bien). Dommage tout de même
que le groupe se soit cru obligé d'introduire une ballade brillamment
intitulée The Ballad et à peu près aussi inspirée que son titre
(on a vraiment l'impression qu'ils ne savent pas quoi en faire !).
Encore un album qui, sans atteindre le chef-d'oeuvre, est très
recommandable pour Testament.
- Testament - Souls of black (1990) ★ ½
Après un début de carrière d'une remarquable régularité, ça devait
arriver, à force de se contenter de produire un thrash metal générique
bien troussé mais assez répétitif, Testament a foiré un album pour la
première fois. Pourtant, l'introduction en mode "galopade flamenco" à la
guitare sèche, quoique totalement incongrue, laissait imaginer un
certain renouveau. En fait, pas du tout, le groupe aligne ensuite sa
dizaine de titres thrash plus ou moins inspirés (tout n'est pas mauvais,
Face in the sky ou Malpractice s'écoutent très bien) mais
qui se ressemblent beaucoup trop, et surtout plombés par un son très
saturé franchement pénible à la longue. On a d'ailleurs presque
l'impression que les solos toujours aériens de Skolnick ont été plaqués
par-dessus et pas enregistrés au même moment (leur son étant très pur
comparé au reste). Ajoutez à ça une ballade assez affligeante de
niaiserie prévisible, et on se retrouve avec un disque qui, sans être
désespérant, est essentiellement sans intérêt.
- Testament - The Ritual (1992) ★ ★ ½
En 1991, Metallica bat tous les records de vente pour un album
metal avec son black album. Du coup, en 1992, presque tous les groupes
pratiquant un thrash sur la pente descendante s'engouffrent dans la
brèche et y vont de leur album commercial au tempo ralenti. Testament ne
fait pas exception à la règle, ce qui ne surprendra d'ailleurs personne
tant l'influence de Metallica était déjà patente dans les premiers
albums du groupe. Mais, sans surprise également, ils proposent une copie
soignée mais qui manque tout simplement de talent. À part dans le très
bon Electric crown qui ouvre le disque, les titres sympathiques
mais un brin poussifs (typiquement, la chanson titre peine à vraiment
instaurer l'atmosphère sombre qui est manifestement voulue)
s'enchaînent, au point que la ballade de fin d'album semble cette
fois-ci particulièrement raffraîchissante. Et puis bon, on sent que les
musiciens ne sont pas totalement dans leur élément, notamment le
chanteur qui s'accommode comme il peut de ce tournant très mélodique
(c'est à des années-lumière de ce qu'il proposera sur les albums
suivants du groupe !). Les solos de Skolnick, par contre, trouvent ici
une place assez naturelle pour se mettre en valeur. Bref, une curiosité
finalement pas si ratée que ça.
- Testament - Low (1994) ★ ★ ★ ★
Après un virage heavy commercial qui n'a pas plu à tout le monde,
Testament a explosé, perdant une partie de ses musiciens et en
particulier son guitariste prodige Alex Skolnick parti faire
complètement autre chose (bon, les mauvaises langues diront qu'il
faisait déjà complètement autre chose que ses camarades quand il
enregistrait avec eux). Déjà la fin d'un groupe qui n'aura finalement
pas vraiment eu le temps de proposer une musique personnelle ? Eh bien
pas du tout, c'est au contraire l'occasion pour Testament d'une
renaissance inattendue. On change à nouveau de style en revenant à un
thrash vraiment moderne (pour l'époque), qui lorgne même vers l'extrême
sur certains points (le chant plus qu'agressif de Chuck Billy sur
Legions), et porté par une production puissante qui envoie
vraiment du pâté (ça change très agréablement de ce à quoi on avait
droit sur les premiers disques du groupe). Et comme une bonne partie des
titres est sacrément efficace (la chanson titre, Dog faces gods,
Ride), ça donne tout simplement un excellent album qui ne pêche
que par son côté un peu trop primaire et quelques titres plus
discutables (l'instrumental Urotsukidôji est vraiment spécial
avec ses samples de voix japonaises intégrées, mais surtout la ballade
niaise Trail of tears a pour unique intérêt de calmer un peu le
jeu). Encore un peu inégal, mais quand même une bonne baffe dans la
tronche inattendue pour un groupe qui semblait au bord de la rupture !
- Testament - Demonic (1997) ★ ★ ½
Après le changement de cap surprenant mais réussi de l'album précédent,
Testament entend bien enfoncer le clou sur celui-ci, et même aller un
peu plus loin en direction du metal extrême. Encore quelques changements
de personnel pour ce disque (preuve que le groupe est en recherche de
stabilité), et surtout un chanteur qui franchit complètement le pas du
growl, désormais omniprésent. Bon, je ne suis toujours pas un grand fan
de ce type de chant, mais ça ne fait pas une si grande différence par
rapport au chat déjà agressif de Low. Niveau instrumental, c'est
du lourd (le son est à nouveau énorme), bien pesant et poisseux, le
tempo s'emballe rarement, mais le groupe a eu la bonne idée de jeter la
ballade traditionnelle à la poubelle (ça aurait vraiment fait tâche vu
l'ambiance de ce disque). Pas mal dans l'ensemble, avec même une
chanson-titre vraiment très efficace, mais peu de titres totalement
emballants, et des choeurs qui s'insèrent mal sur quelques pistes
(Together as one), on reste dans le passable mais c'est un recul
assez clair par rapport à l'album précédent.
- Testament - The Gathering (1999) ★ ★ ★
Pour son huitième album, Testament continue à tourner autour d'un thrash
teinté de death à l'équilibre pas toujours totalement convaincant (c'est
moins extrême que sur le Demonic précédent, mais on se demande
d'autant plus pourquoi par exemple un break avec growls très moches a
été inséré dans un titre très mélodique comme True believer, ça
ne colle pas du tout), mais avec encore un changement de line-up. Cette
fois-ci c'est Dave Lombardo qui vient s'occuper de la batterie, et le
moins qu'on puisse dire est qu'il prend pas mal de place (énormément de
double, et l'instrument est mis en avant dans un mixage par ailleurs
plus brouillon que sur les deux disques précédents du groupe, ce qui est
bien dommage). Bon, il fait bien son boulot, et le disque fait preuve
d'une variété appréciable, qui le place au-dessus de son prédécesseur,
sans atteindre toutefois la puissance et l'efficacité de Low. De
bons moments quand même, notamment sur Eyes of wrath (intro
morbide, sonorités orientales), mais on a quand même un peu l'impression
que Testament a retrouvé sa place de bon artisan du metal, aux disques
solides mais pas inoubliables.
- Testament - The Formation of damnation (2008) ★ ★ ½
Alors qu'il semblait avoir retrouvé une certaine continuité dans sa
seconde vie de groupe de metal presque extrême, Testament a fini par
exploser. Il faut dire aussi que le cancer de son chanteur n'a pas aidé,
mais ce dernier s'en est sorti, et voilà que, près de 10 ans après le
précédent album, le groupe est de retour, et qui plus est dans sa
formation d'origine ou presque (avec notamment le retour de Skolnick à
la guitare). On se doute que le virage death va être oublié (de fait,
quasiment pas de growl sur ce disque), mais on n'a pas pour autant droit
à un vrai retour au thrash crasseux des origines du groupe, on est
plutôt dans une sorte de heavy passe-partout et même franchement mou du
genou (les tempi sont dans l'ensemble bien tranquilles, la batterie en
arrière-plan, il faut quasiment attendre FEAR, l'avant-dernière
piste, pour que ça s'énerve un peu). On a en fait vraiment l'impression
que le groupe n'a pas voulu prendre le moindre risque pour son retour,
proposant un metal consensuel noyé dans une production moderne au son
très riche (c'est à mon avis trop clinquant pour du Testament) et en
même temps souvent synthétique (niveau son on est assez proche de ce que
fait Megadeth depuis un bon moment maintenant). Rien de
déshonorant là-dedans (même si ça manque de puissance, les compositions
tiennent la route), mais un sentiment mitigé face à un album qui
s'oubliera très vite.
- Testament - Dark roots of earth (2016) ★ ★ ★ ★
Après un retour en mode mineur en 2008, on pouvait imaginer que la
reformation de Testament verrait le groupe finir sa carrière dans une
certaine indifférence. Grosse erreur, puisque ce galop d'essai est suivi
quatre ans plus tard (ils ont appris à prendre leur temps, ce sera
désormais la durée standard entre deux de leurs albums) de la sortie
inattendue d'un classique immédiat qui vient sans problème concurrencer
les premiers disques du groupe en termes de qualité, la production
moderne et efficace en plus. Rise up met tout le monde d'accord
dès l'entame, redoutablement entraînant et efficace. Il marque le début
d'une série de titres maîtrisés, suffisamment variée pour ne pas lasser
(le côté épique de Throne of thorns, la ballade Cold
embrace qui met tout de même trop de temps à décoller) bien que tout
ça ne soit pas d'une originalité folle (en même temps, un bon thrash à
l'ancienne en 2012, ça fait plaisir !). Le tout est conclu par une série
de reprises pas franchement indispensables mais bien fichues (ça fait
toujours plaisir d'entendre Powerslave même si cette version
n'apporte rien à l'originale). Tout ça donne vraiment envie de continuer
à écouter ce que Testament a à nous proposer.
- Testament - Brotherhood of the snake (2012) ★ ★ ★ ½
Après avoir créé la surprise avec un Dark roots of earth
excellent, Testament était forcément à nouveau attendu au tournant,
peut-être même plus qu'il ne l'avait jamais été dans la première partie
de sa carrière. Le groupe a de nouveau pris son temps (quatre ans pour
un album, on vous a dit !), mais c'était pour mieux assurer, puisque le
nouveau cru est tout à fait satisfaisant, presque aussi bon que son
prédécesseur. Il lui manque peut-être un ou deux titres vraiment
emballants (seul la chanson titre qui ouvre l'album tambour battant a le
côté "classique immédiat" qui caractérisait une majorité des pistes de
l'album précédent), mais ça reste en permanence solide et maîtrisé, avec
une accélération globale du tempo qui montre que les dinosaures du
thrash ne sont pas le moins du monde rouillés (le très vitaminé The
Number game qui conclut l'album, entre autres). Je regretterai quand
même certaines tentatives pas très heureuses côté vocal (le passage
parlé de The Pale King par exemple), mais, porté à nouveau par un
son moderne qui claque parfaitement, voilà du bon boulot, sans grand
génie mais diablement efficace.
- Testament - Titans of creation (2020) ★ ★ ★ ★
Quatre ans pile poil après le précédent, voici donc le nouveau (et donc
dernier en date... en attendant 2024 ?) album de Testament, qui a
désormais revêtu le costume du groupe qui défend avec une solidité
remarquable un thrash bien traditionnel avec un son tout ce qu'il y a de
plus moderne. On a même l'impression avec ce dernier disque qu'ils
prennent un malin plaisir à placer dans un écrin bien de son temps
(production énorme une fois de plus) une musique aux accents vintage en
refusant totalement d'y faire poindre la moindre parcelle d'imprévu. Et
en même temps, on ne peut pas leur en vouloir tant c'est carré, maîtrisé
et surtout redoutablement efficace. Les titres sont consistants (souvent
cinq à six minutes par morceau) sans jamais être lassants (même si on
peut regretter une uniformité de style qui est clairement volontaire),
et les excellents morceaux abondent (Children of the next level
en ouverture, Symptoms, Curse of Osiris). Il manque
peut-être encore la touche de génie qui rendrait l'album totalement
inoubliable, mais franchement, on passe un très très bon moment à son
écoute.
- The Gathering - Always... (1992) ★ ★
Je démarre aujourd'hui la discographie d'un groupe pour lequel je sais
bien que mes comptes-rendus s'arrêteront avant d'avoir atteint la fin.
Non pas que j'aie décidé à l'avance ne pas pouvoir supporter très
longtemps leur musique, mais tout simplement car ils ont évolué d'un
style qu'on peut encore raisonnablement qualifier de metal vers une
sorte de pop-rock sophistiquée à la Radiohead qui n'aurait
vraiment plus rien à faire ici. Mais ce tout premier album est (donc) le
plus metal de toute leur discographie, notamment via l'emploi d'un
chanteur en voix gutturale (pas tout à fait tout seul, il est parfois
rejoint par une soprano qui chante faux, mais c'est heureusement assez
rare). Les guitares sont bien grasses, mais le rythme global très lent,
on est en fait face à une sorte de doom pimenté par... des claviers très
très kitschs beaucoup trop présents (surtout que les sons proposés
devaient déjà faire mal aux oreilles en 1992, sur Second sunrise
notamment il y a quelques interventions assez hilarantes). En fait, il
s'agit vraiment d'un premier galop qui manque cruellement de tenue et
fleure bon l'amateurisme, mais curieusement c'est aussi ça qui lui donne
un certain charme. Mélodiquement c'est pas si mal (The Mirror
waters qui ouvre l'album notamment), on sent l'envie de créer des
atmosphères intéressantes sans se prendre la tête (même si on peut
douter que le chant guttural soit ce qui convienne le mieux au fond
instrumental proposé par le groupe), et ce n'est pas du tout désagréable
à écouter, même si on est quand même loin du chef-d'oeuvre.
- The Gathering - Almost a dance (1993) ☆
Ce deuxième album confirme que le groupe n'a pas encore trouvé sa voie.
Le côté doom du premier disque a complètement disparu ici, et même la
classification metal de l'ensemble pourrait prêter à discussion (les
guitares saturées étant planquées bien loin au fond pendant une
écrasante majorité de l'album, il n'y a presque que sur The Blue
vessel qu'on les entend vraiment), on est déjà assez proche de
l'esprit pop rock qui prévaudra dans la suite de la discographie du
groupe. Mais surtout, la chanteuse qui fera la célébrité du combo n'est
pas encore là, on garde cette fois-ci un duo masculin-féminin, mais
différent du précédent. Si on n'y perd pas vraiment au niveau de la
soprano (interventions très ponctuelles, et voix constamment nimbée
d'une sorte de halo qui fait qu'on ne distingue à peu près rien à ce
qu'elle chante, mais cette fois la justesse est là), le remplacement du
chanteur guttural du premier disque suffit à faire passer le deuxième
dans la catégorie "navet indéfendable". C'est bien simple, il est
absolument impensable que le nouveau venu ait pu faire une carrière
musicale faisant intervenir son chant, il ne passerait pas le tour
préliminaire de la première audition pour The Voice (chant complètement
faux, voix nasale, timbre atroce, c'est vraiment complètement
inécoutable, mettez juste les premières secondes de la piste inaugurale
On a wave et vous pourrez constater l'ahurissant effet repoussoir
qu'il produit). Comme le fond musical assez vaporeux qui l'entoure,
quoique plutôt sympathique, n'est pas du tout suffisamment original pour
être mémorable, c'est direction la poubelle pour cet opus à oublier très
vite.
- The Gathering - Mandylion (1995) ★ ★
Ce troisième album est souvent considéré comme le véritable point de
départ pour le groupe, qui est rejoint ici par sa chanteuse Anneke van
Giersbergen. Il faut bien avouer que ce changement a de grosses
conséquences sur la musique produite par le combo : déjà la dame chante
infiniment mieux que ceux qui l'ont précédée (c'était pas très dur, mais
on a vraiment un chant puissant et incarné, qui plus est à une époque où
les chanteuses dans le milieu du metal n'étaient pas encore devenues
populaires), mais du coup l'accompagnement instrumental qui l'entoure
évolue pas mal lui aussi pour lui laisser un maximum de place. Le disque
est considéré comme un classique du "metal atmosphérique", étiquette qui
me fait doucement rigoler. En gros, c'est de la pop vaporeuse
accompagnée par des guitares saturées, quoi. Pourquoi pas, mais c'est
assez loin de mes préoccupations quand j'écoute du metal, et même si
c'est assez beau (et bien chanté donc), c'est à mon avis beaucoup trop
lisse (en gros, on met un écrin de guitares qui se contentent de figures
d'accompagnement assez simples pour entourer les lignes vocales) et
surtout uniforme (tempo lent identique à chaque piste, des titres qui
s'étirent au-delà des six minutes sans que le contenu ne le justifie)
pour faire mieux que créer un fond musical agréable mais assez
anecdotique (chanté par quelqu'un d'autre, en fait, ça serait vraiment
complètement insignifiant). La piste la plus intéressante est la chanson
titre, instrumental aux influences ethniques qui a le mérite de proposer
quelque chose de plus recherché. Je n'irai pas plus loin dans la
discographie de ce groupe, les albums suivants ont conservé peu ou prou
la même ambiance générale en troquant la saturation pour des
bidouillages electro (même si on reste loin du chef-d'oeuvre, j'aime
assez If_then_else par exemple, mais ce n'est plus du tout du
metal), et accessoirement en perdant sa chanteuse emblématique pour les
derniers en date (bon, depuis 15 ans quand même en fait), ce qui les
rend pour les coups (et sans surprise tant le groupe se reposait sur sa
chanteuse) extrêmement mauvais.
- Tool - Undertow (1993) ★ ★ ½
Je me lance dans l'écoute d'un groupe controversé, dont l'étiquette
"metal expérimental" me laisse a priori plutôt perplexe. Mais bon, il y
a un paquet de fans dythirambiques et au moins, il y aura peu d'albums à
écouter, que j'accroche ou non ! Concernant cette première proposition,
je suis assez circonspect. Assez clairement, je n'aime pas la voix du
chanteur (je ne saurai pas dire exactement pourquoi d'ailleurs, je me
demande si ce ne sont pas les lignes mélodiques, ou plutôt pas
mélodiques du tout justement, du chant qui me posent problème). Tout
aussi clairement, j'aime bien par contre ce que font les instrumentistes
(guitares assez massives, un son très froid et souvent assez urbain, des
motifs pas très mélodiques non plus aux rythmes très hachés, on n'est
pas loin de RATM quelque part, même si c'est beaucoup moins
direct et rentre-dedans quand même). Mais l'ensemble me laisse un
sentiment assez mitigé, aucun titre ne me faisant vraiment sauter au
plafond (mon préféré est probablement Bottom, malgré le break
pénible au milieu), et aucun ne me semblant franchement désagréable
malgré quelques bizarreries que je trouve plus agaçantes qu'autre chose
(on sent que ces gusses là n'ont pas envie de faire la même musique que
M. Tout le monde, même si sur cet album on reste dans des choses assez
standard, mais certains éléments semblent placés là uniquement pour
faire dans le bizarre, comme l'intro de 4° par exemple).
Bizarrement, toutefois, je ne trouve pas complètement insupportable les
premières minutes de Disgustipated, qui devraient pourtant me
donner envie de jeter le CD par la fenêtre si je n'écoutais pas en
dématérialisé (bon, par contre, quasiment 10 minutes de bruit blanc pour
finir l'album, là c'est vraiment du foutage de gueule !). Finalement, un
disque indiscutablement très intéressant, mais qui ne me donne pas plus
envie que ça de le réécouter régulièrement.
- Tool - Ænima (1996) ☆
Le premier album du groupe m'avait laissé relativement indifférent, mais
avait un potentiel de bizarrerie qui laissait envisager que je puisse
être au choix très emballé ou très agacé par le suivant. Assez
clairement, c'est la deuxième option qui a prévalu. Les premières pistes
m'ont laissé à peu près sur la même impression que Undertow, à
savoir de la musique assez inutilement sophistiquée (les sons de
guitares de Eulogy, l'intro de Stinkfist) mais pas
désagréable, qui me laisse toutefois fortement sur ma faim car j'ai
l'impression que ça ne décolle jamais vraiment (j'ai encore une fois eu,
notamment sur la première chanson, l'impression d'entendre une espèce de
RATM plus délayé et intellectualisé, sans le côté directement
percutant). Puis, Forty six & 2 m'a même plutôt agréablement
surpris, et j'ai cru un instant que ça décollait vraiment et que
j'allais passer un bon moment avec la fin de l'album (enfin, ça c'était
l'espoir de la première écoute...). Grosse douche froide ensuite, non
seulement il n'y a plus un seul titre valable au niveau des "vraies"
chansons, mais en plus le côté conceptuel prétentieux du groupe prend le
dessus avec des pistes intermédiaires complètement gratuitement fumeuses
(sérieusement, Cesàro summability comme titre d'une piste où on
entend un bébé beugler puis des bruitages inaudibles ? Ok, ça attire
l'oeil du matheux que je suis, mais c'est vraiment d'un ridicule absolu,
le pire étant qu'il y a des gens pour essayer de vraiment aller déterrer
un sens profond derrière ça, les membres du groupe doivent bien se
marrer dans leur coin...), et là pour le coup le disque rejoint la
catégorie "à fuir absolument". D'ailleurs, tout ça se conclut presque
logiquement par une piste de 13 minutes alignant les effets pédants et
se concluant de façon insupportable... Je n'étais pas sûr de vouloir
réécouter leur premier album, celui-ci, pour le coup, je suis tout à
fait certain de ne plus vouloir l'entendre.
Tool - Lateralus (2001) ★ ★
Vu ma déconvenue avec leur album précédent, c'est avec une certaine
appréhension que j'ai enchaîné sur le troisième disque de Tool. Bonne
nouvelle, celui-ci ne m'a pas agacé comme Aenima, il faut dire
que le groupe a fait un effort en se contentant d'une piste finale d'un
peu moins de trois minutes incompréhensible, le reste se concentrant sur
un contenu qu'on peut qualifier de musical. Bon, de la musique certes à
nulle autre pareille, tant ils mélangent tout et n'importe quoi
(percussion tribale, passages planants, chant tour à tour doux et
hurlé). On ne sait jamais trop où ils vont essayer de nous transporter,
mais je dois bien avouer une fois de plus que, si je trouve tout ça très
écoutable, je ne décolle guère de mon canapé. Là où beaucoup vivent
l'écoute de l'album comme un trip émotionnel inoubliable, je navigue en
ce qui me concerne entre un réel intérêt (The Patient ou
Schism arrivent vraiment à créer une atmosphère surprenante), une
certaine incompréhension (assez rare toutefois, il n'y a que Ticks &
Leeches qui me semble franchement ratée) et, la plupart du temps,
une sorte de bercement hypnotique qui finit par se transformer en ennui
poli (à partir de la deuxième moitié de la chanson-titre, l'album tire
horriblement en longueur, une piste comme Reflection étalée sur
11 minutes c'est au moins deux fois trop à mon goût). Pas totalement
mauvais donc, mais loin d'être brillant. Ma réputation de bourrin
primaire ne va pas en ressortir grandie (ou plutôt si, justement), mais
je prends mille fois plus mon pied en écoutant Amon Amarth (NdRoupoil : mes
critiques des albums de ce denrier groupe ont été tapées en parallèle de
celles de Tool).
Tool - 10000 days (2006) ★
Je ne vais pas être très poli ce soir, Tool est définitivement un groupe
qui m'emmerde. Au sens propre d'abord : sur cet album-ci, on a bien sûr
droit à une piste conclusive complètement absconse, comme si c'était une
sorte d'obligation morale de la part du groupe (et celle-là vaut
vraiment son pesant de cacahuètes dans le genre délire fumeux même pas
drôle), à un interlude risible, et à quelques plages où le côté mystique
hypnotique se transforme bien vite en ennui profond (dommage, en général
ces plages durent très longtemps, comme l'(inter)minable Rosetta
stoned). Au sens figuré ensuite, car je ne sais toujours pas
vraiment quoi penser de leur posture. Il y a de bonnes choses
disséminées ici et là, comme sur leur disque précédent (ici, j'aime bien
la progression de Right in two, et le côté hypnotique fonctionne
bien sur la chanson titre par exemple), une qualité d'exécution
évidente, mais aussi, encore et toujours, cette insupportable manie de
faire différent simplement pour faire différent, de trouver des
sonorités inhabituelles voire même franchement désagréables (Lost
keys, pour moi, c'est à peu près inécoutable), de la jouer inspiré
en proposant des trips minimalistes où il ne se passe en fait
strictement rien, bref de donner infiniment plus d'importance à l'effet
lui-même qu'à son sens musical. Au final, dans la mesure où le chant
m'intéresse toujours aussi peu et où je ne trouve jamais de chanson qui
me fasse vraiment un effet monstrueux sur leurs disques, c'est ce côté
poseur et prétentieux qui me reste le plus en tête, malheureusement...
Tool - Fear Inoculum (2019) ★ ★ ★ ★
Autant le dire très franchement, avant d'écouter le dernier disque en
date de Tool, mon a priori était plus qu'ultra négatif. En plus de ne
jamais vraiment être entré dans les albums précédents, j'ai eu le
malheur d'apprendre via mes lectures sur le web que le groupe avait
vendu celui-ci sous forme physique uniquement en édition limitée avec
bonus risibles (un système audio-video inséré dans le boîtier pour
permettre la diffusion d'un clip) et à un prix complètement gerbant.
Bref, ces gars sont quand même des ordures assez gratinées ("eh, nous on
fait de la vraie musique conceptuelle coco, alors tu vas raquer sévère
pour nous ok ?"). Mais, je suis bien obligé de l'admettre, j'ai trouvé
l'album très bon... Ben oui, cette fois-ci, enfin, je suis rentré dans
les atmosphères très hypnotiques concoctées par le groupe, je n'ai pas
été trop gêné par la voix (il est vrai peu présente, beaucoup de longs
développements instrumentaux), j'ai même franchement aimé les motifs
rythmiques répétés inlassablement (presque à la Opeth) et les
progressions dynamiques des longs titres proposés, et encore mieux, j'ai
trouvé certains moments réellement très inspirés (l'intro magique de la
piste titre, la fin de Pneuma). Non, franchement, malgré quelques
longueurs dispensables et (dans la version numérique) la présence
d'intermèdes à zapper de toute urgence pour ne pas gâcher la fête, j'ai
passé un fort bon moment à écouter de la bonne musique (pas très metal
d'ailleurs, mais peu importe). Bon, il sort quand le prochain album de
ces abrutis, en 2050 ?
- Triptykon - Eparistera Daimones (2010) ★ ★ ★ ★ ½
Celtic Frost est mort, légendaire groupe Suisse précurseur du métal
extrême, est mort en 2006, mais pas le son monstrueux qu'il avait
développé dans son dernier album, dont celui-ci (première proposition du
nouveau bébé de Thomas Fischer, le fondateur et leader de Celtic Frost)
est au fond une sorte de jumeau. On retrouve en effet telle quelle cette
chape de plomb de guitares grésillantes qui vous tombe dessus dès la
première piste pour ne (quasiment) jamais vous lâcher, ces tempos lents
et cette atmosphère complètement dépressive, et c'est à nouveau très
convaincant, les deux premières pistes Goetia et Abyss within
my soul (une dizaine de minutes chacune) plantant magnifiquement le
décor glaçant à souhait de ce nouvel opus. La suite nous proposera tout
de même un peu plus de variété, d'abord via un intermède bruitiste
dispensable puis un titre plus thrash (A thousand lies) que je
trouve personnellement nettement moins bon que le reste (à ce moment-là,
lors de ma première écoute, j'ai même craint que l'album ne gâche son
superbe départ), puis un peu plus loin avec des surprises qui ne sont
pas si loin de rappeler les jeunes années de Tom Fischer (l'improbable
intermède au piano de Myopic empire, qui suit sans transition un
passage ultra massif, est assez génial, et My pain offre une
respiration infiniment plus intéressante que celles proposées sur
Monotheist). Et puis, il y a cette dernière piste, The
prolonging. Et là, on touche le fond. Non, non, pas en termes de
qualité musicale, au contraire, il s'agit d'une litanie de 19 minutes
(oui, oui) qui ne vous lâche jamais, répétant ad nauseam les mêmes
paroles sur un fond hypnotique. Fascinant, le point d'orgue d'un album
qui réussit l'exploit d'être sûrement encore plus sombre que son
prédécesseur, mais surtout encore plus intéressant (encore quelques
petits défauts à gommer, ça reste notamment un peu long, mais on est pas
loin du chef-d'oeuvre).
- Triptykon - Melana chasmata (2014) ★ ★ ★ ★
Après avoir atteint ce qui semblait être un sommet de noirceur assez
indépassable avec son premier album, qu'allait bien pouvoir proposer
Triptykon pour le second ? La même chose, au risque de lasser (il parait
assez difficile d'aller encore plus loin dans ce style) ? Autre chose au
risque de ne pas réussir à atteindre la même intensité ? En fait, c'est
un peu des deux, on reste globalement dans le même univers (non, ça ne
va pas être très joyeux encore une fois), mais avec des tentatives pour
s'appuyer sur des riffs plus clairement thrash (sur Breathing) ou
même pas spécialement lents et dépressifs (l'intro presque bluesy de
Boleskine house). C'est surtout palpable dans la première moitié
du disque, et je dois avouer avoir été un peu déçu, car même si ça reste
intéressant, j'ai trouvé les premières pistes globalement moins
accrocheuses que celles de l'album précédent. Heureusement, le groupe
nous réserve une fin d'album à nouveau extrêmement pesante,
l'enchaînement In the sleep of death/Black snow étant même
particulièrement énorme et réussi. Et puis, au beau milieu de tout ça,
il y a Aurorae et son ambiance indescriptible que je trouve
vraiment génial. Comme d'habitude avec Fischer, on a aussi droit à
quelques apparitions de voix féminine qui ajoutent à la richesse de
l'ensemble (l'hypnotique Waiting conclusif). Finalement, même si
ce disque est peut-être moins maîtrisé et terrassant que leur premier
(ou même que le Monotheist de Celtic Frost qui les a
précédés), ça reste de la très belle ouvrage.
- Turisas - Battle Metal (2004) ★ ★ ★ ½
Tiens, ça faisait longtemps que je ne m'étais pas penché sur un groupe
finlandais produisant du metal à forte teneur mélodique et d'une
subtilité pas toujours évidente ! Non ? Bon, tant pis, j'y retourne
quand même. Turisas, donc, est un groupe assez mineur à la discographie
restreinte (quatre albums quand même) qui prétend faire du... battle
metal, comme le nom de l'album l'indique. En pratique, il s'agit sans
grande originalité d'un metal sous forte influence viking, avec une
grosse touche folklorisante (on a du violon, de l'accordéon, un peu de
flûte), énormément de fanfares qui pouët-pouëtent à mort (hélas, pour le
coup, ce sont bien des synthétiseurs qui gèrent la chose) pour justifier
le côté guerrier, et même quelques interventions très lyriques d'une
soprano qui semble s'être un peu perdue, mais surtout des choeurs
fournis pour le coup assez impressionnants. Mine de rien, ça en fait du
monde (et sur scène ils pimentent le tout avec costumes qui vont bien et
peintures tribales rouges et noires, histoire que la fête soit
complète), et on n'échappe pas par moments à un côté kermesse viking un
peu trop téléphoné. On n'échappe pas non plus à quelques mauvaises idées
quand le groupe essaie de se la jouer cool (les bruits de studio à la
fin de Among ancestors et la ridicule adresse à l'auditeur
Prologue for R.R.R auraient trouvé une place de choix dans la
poubelle la plus proche). Mais quand ils se contentent de faire de la
musique, eh bien c'est loin d'être ridicule, parfois un peu fourre-tout,
mais les titres speed notamment (As torches rise) fonctionnent
particulièrement bien. Le genre de disque dont on n'attend rien, mais
qui procure un plaisir simple et immédiat.
- Turisas - The Varangian way (2007) ★ ★ ★
Après un premier album assez enthousiasmant malgré ses défauts, Turisas
persiste et signe avec une deuxième cuvée tout aussi entraînante, mais
dont la subtilité est peut-être encore plus absente (c'est dire).
Consacré avec une extraordinaire originalité aux vikings (ah, pardon,
aux Varègues, histoire de faire cultivé), le disque nous propose un
voyage assez court (seulement huit titres et 40 minutes de musique) mais
pour le moins mouvementé. Intro symphonique pétaradante aux claviers
(mais plutôt sympathique) de rigueur sur To Holmgard and beyond,
mais on constate rapidement une surprise de taille, le chanteur guttural
qui officiait jusque-là a été remisé au placard pour une grosse majorité
des pistes, laissant la place à du chant clair acceptable mais sans
charme et surtout trop lisse pour coller au style épique voulu par le
groupe. Bon, pas grave (ou peut-être que si ?), les musiciens se
rattrapent en en faisant des tonnes en permanence, comme s'ils avaient
peur que l'inspiration mélodique ne soit pas suffisante (c'est pourtant
plus que correct de ce point de vue). Du coup, ça tourne quand même bien
dangereusement à la choucroute boursouflée qui ferait passer
Rhapsody pour un groupe à la sobriété exemplaire (si, si, le
début de Fields of gold par exemple, c'est assez terrible, et la
touche russe sur In the court of Jarisleif est juste grotesque).
Et pourtant, on passe un moment festif franchement sympathique à
l'écoute de l'album (The Dniepr rapids, c'est très bon), en
regrettant quand même que la lourdeur des arrangements le fasse passer
d'un potentiel excellent à un simple bon. Attention quand même, à force
de charger la barque (le drakkar ?), on va couler vers le mauvais...
- Turisas - Stand up and fight ! (2011) ★ (note réelle) / ★ ★ ★ ★ (note "nanar musical")
Leur deuxième album le laissait craindre, celui-ci va le confirmer,
Turisas s'est définitivement laissé glisser le long d'une pente
douteuse. On pourrait pourtant penser que l'emploi d'un véritable
orchestre en lieu et place des pouët-pouëts synthétiques habituels est
une bonne nouvelle, mais le souci c'est le que le groupe a apparemment
du revendre ses guitares pour pouvoir embaucher l'orchestre. Non,
j'exagère, ce sont seulement les amplis qui ont été sacrifiés, les
guitares sont bien là pour proposer une sorte de fond vaguement
metallisé complètement anecdotique. À la place, on a tout bonnement
droit à une sorte de musique de film sans images, qui reprend et mélange
allègrement tout ce qui a pu se faire dans le genre à Hollywood ces
dernières décennies : un titre égaré depuis la BO d'un Pirates des
Caraïbes (le bien nommé Hunting pirates, rappelons quand même
qu'on est toujours censés suivre l'épopée des Varègues en terres
slaves), des fanfares tirées d'un peplum période Ben-Hur (Vanetoi !
Prasinoi !), des relents de western (March of the varanguian
guard), et plein de cavalcades et autres violons larmoyants, sans
oublier un peu de piano pour rendre le cocktail encore plus indigeste
(End of an empire, probablement le titre le plus foutraque du
lot), des choeurs en veux-tu en voila, et une piste finale qui joue la
carte du récit parlé sur fond symphonique et s'achève avec une cadence
tellement ridicule qu'enfin, on comprend l'intérêt de ce disque ! Mais
oui, tout ça n'était qu'une vaste blague. Pris au premier degré, c'est
effrayant, mais si on admet qu'il ne s'agit que d'une parodie déjantée,
la générosité mélodique, les arrangements pachydermiques et le mélange
absolument pas canalisé de tout et n'importe quoi confine au génie
créatif. En tout cas, je m'amuse follement en écoutant ce machin, même
si je doute très fort que les musiciens l'ayant créé aient eu cet
objectif-là...
- Turisas - Turisas 2013 (2013) ★
Pour son dernier effort discographique à ce jour, Turisas a décidé de
faire dans la sobriété. Plutôt une bonne idée vu le sommet de choucroute
assez indigeste que constituait son album précédent, mais le problème
c'est que ce dégraissage semble avoir carrément vidé de toute substance
la musique du groupe. Les guitares sont sous-mixées, les arrangements
franchement pauvres, même les choeurs sont nettement moins tonitruants
qu'avant, l'ensemble sonne terriblement creux (en fait on a carrément
l'impression qu'ils ont oublié d'enregistrer une bonne moitié des
instruments). Forcément, quand on prétend proposer une musique épique,
ça pose un petit problème (particulièrement flagrant sur Ten more
miles). On retrouve bien quelques touches folklorisantes et des
mélodies sympathiques, mais c'est bien insuffisant au milieu
d'expérimentations au mieux ratées (le chant trafiqué de Greek
fire, les trompettes de We ride together), au pire carrément
indéfendables (le break de Run Bhang-eater, run ! avec son solo
de sax sur fond de gémissements explicites, c'est plus que gênant
d'avoir laissé passer un truc pareil). Pour le coup, quel que soit le
degré auquel on a envie de le prendre, cet album est simplement mauvais.
- Type O Negative - Slow, deep and hard (1991) ☆
Sur le forum de musique classique que je fréquente régulièrement (et qui
ne parle donc pas que de classique...), nous avions il y a quelque temps
l'autoproclamé plus grand fan de France du groupe Type O Negative. Une
bonne raison d'inclure ce groupe à ma liste de choses à explorer dans la
galaxie metal, quitte à en dire du mal ensuite. Eh ben voilà, j'ai
écouté leur premier disque, il est effectivement temps d'en dire
beaucoup de mal. Déjà, le groupe semble baser pas mal de choses sur un
sens de l'humour, euh, particulier. Tour à tour sans intérêt (la plage
entière silencieuse), lourd niveau ado à peine pubère (les gémissements
de plaisir, forcément féminin, qui accompagnent une partie du premier
titre), ou carrément gênant (une chanson dézinguant les assistés sociaux
intitulée Der Untermensch, on franchit allègrement à grands coups
de hache les frontières du bon goût). Mais bon, je suis conciliant, s'il
y a de la bonne musique derrière, je suis prêt à pardonner beaucoup.
Sauf que musicalement, c'est également très lourd : fond de guitares
ultra saturées franchement usant, des claviers étranges (on a droit à un
peu d'orgue par moments), un ennui profond dès que le tempo ralentit
(c'est-à-dire souvent, les chansons sont en plus très longues), et pas
beaucoup d'idées pour sauver le tout (le chant du leader Peter Steele
n'est pas totalement inintéressant, et l'utilisation de choeurs sur
certains passages censés servir de refrains presque rafraîchissante).
Ah, on a aussi droit assez régulièrement à des stridences limite
insupportables qui n'apportent rien au "discours". Notons quand même que
le second disque du groupe sera un faux live (avec fans insultant les
musiciens à coups de "Fuck you"...) reprenant quasiment tout le premier
album (forcément, y avait pas trop le choix, mais c'est quand même
assorti de quelques improbables reprises où on ne reconnaît guère les
originaux) en mode encore plus mauvais. Sûrement une autre tentative
d'humour...
- Type O Negative - Bloody kisses (1993) ☆
Deuxième tentative avec Type O Negative, dont le style a pas mal évolué
depuis le premier album : un son nettement plus avenant, le côté "rapide
et moche" de certaines pistes de leur premier album a quasiment disparu
(on ne le retrouve que sur un ou deux des sortes d'interludes vaguement
humoristiques qui séparent les "vraies" chansons, comme le très étrange
Kill all the white people) pour laisser la place à un genre
apparemment connu sous le nom de metal gothique. En gros, c'est lent,
avec un accompagnement musical franchement minimaliste (des guitares
saturées bien graves histoire de justifier l'appellation metal) et une
atmosphère qui se veut mélancolique, le tout porté par la voix de
crooner neurasthénique de Peter Steele. En pratique, c'est à la fois
beaucoup trop superficiel (pas plus de profondeur que de la mauvaise
pop) et répétitif (les chansons durent dix minutes) pour qu'on ne
s'emmerde pas fermement, malgré les interventions des claviers et des
choeurs (souvent ridiculement angéliques) censés mettre un peu
d'animation. Je vais être tout à fait honnête : je ne comprends pas
comment on peut trouver de l'intérêt à cette musique (et c'est pourtant
censé être ce qui se fait de mieux dans le genre !), c'est donc le
dernier album du groupe sur lequel je me pencherai (avec un beau 0 de
moyenne, il ne risque pas d'être détrôné en tant que plus mauvais groupe
apparaissant sur cette liste...).
- Vanden Plas - Color Temple (1994) ★ ★ ★ ½
Je débute aujourd'hui la discographie d'un groupe probablement connu
surtout des fervents de metal prog, mais qui jouit quand même d'une
belle cote chez les fans du genre. Surprise pour démarrer ce premier
essai, on entend... des extraits du Sacre de Stravinski ! Une bonne
façon d'attirer les fans de classique ? Ce n'est probablement pas le but
visé, mais ça a le mérite de l'originalité, même si ça reste assez
anecdotique. Ensuite, on a droit à un cocktail assez classique pour le
genre de guitares heavy, de claviers tantôt atmosphériques, tantôt
contribuant vraiment à l'assise mélodique des morceaux, de morceaux
assez développés (jusqu'à neuf minutes pour le très intéressant Soul
survives) mais toujours lisibles, l'ensemble restant franchement
accessible (on pense assez souvent au Queensrÿche d'Operation
mindcrime, une excellente référence). Surtout, pour un premier
album, le groupe fait preuve d'une sacrée maturité (peut-être due au
fait qu'ils ont mis plusieurs années avant de pouvoir enregistrer ce
disque), l'équilibre est vraiment bon (jamais de clavier trop kitsch ou
de refrain de mauvais goût) et on ne s'ennuie pas une seconde. Manquent
peut-être un ou deux titres réellement marquants pour accéder à la
catégorie des grands albums, mais pour un début, c'est plus que
prometteur !
- Vanden Plas - The God Thing (1988) ★ ★ ★
Avec ce deuxième album, Vanden Plas semble avoir vraiment trouvé sa
voie. Le premier était pourtant déjà très abouti dans son genre, mais là
on oublie les relents de heavy un peu "facile" pour vraiment se
concentrer sur un metal prog aux claviers très présents (tantôt piano,
tantôt synthés), avec des titres moins directs et plus construits (seul
In you : I believe est assez ramassé) qui durent presque tous six
à sept minutes (la durée moyenne était déjà de cet ordre sur Color
temple mais avec moins d'enchaînements de sections contrastées au
sein d'un même morceau), et des ambiances clairement très travaillées.
D'ailleurs, je n'ai pas grand chose à reprocher à ce disque, c'est
souvent beau (l'intro instrumentale Fire blossom), parfois
puissant (Rainmaker) et ça ne se perd jamais dans des
développements techniques sans intérêt dont sont friands certains
groupes du genre que je ne dénoncerai pas. Et pourtant, globalement, je
passe un bon moment, mais il manque quelque chose pour que je sois
emballé, il n'y a aucun titre qui m'accroche définitivement et que
j'aurais envie de réécouter en boucle. En fait, je crains de ne devoir
classer l'album dans la catégorie des disques indiscutablement réussis,
mais dans un style pas totalement fait pour moi. À confirmer en écoutant
la suite de la discographie du groupe, mais je préfère finalement leur
premier opus à celui-ci.
- Vanden Plas - Far off grace (1999) ★ ★ ★ ½
On m'avait prévenu, il ne fallait pas que je m'attende à de gros
bouleversements une fois que Vanden Plas avait trouvé sa voie dans
The God thing. Pourtant, ce troisième album débute avec un titre
(I can see) nettement plus direct que ceux du disque précédent,
cherchant clairement une séduction très immédiate avec ses mélodies
accrocheuses sur fond de riffing bien gras. J'aime beaucoup, mais ce
n'est en fait pas représentatif de ce que le groupe a envie de nous
proposer, les titres musclés étant les exceptions (Into the sun)
au milieu d'autres où les synthés (et même le piano) sont souvent sur le
devant de la scène. C'est encore une fois très bien fait, parfois même
vraiment convaincant (Inside of your head et son refrain
entêtant), même si les titres plus lents penchent dangereusement vers
une guimauve bien collante (I don't miss you, malgré la belle
mélodie introductive), et les passages accompagnés au piano sont pour
moi de trop (à la fin de I'm in you notamment). J'ai quand même
globalement trouvé plus de saveur à ce disque-là qu'au précédent, sans
que ça n'atteigne encore pour moi l'excellence.
- Vanden Plas - Beyond daylight (2001) ★ ★ ★ ½
Ce quatrième album du groupe représente la fin d'une première période
très productive pour Vanden Plas (quatre albums en 7 ans, ensuite ça va
s'espacer nettement plus). Pas de profond changement de style par
contre, on reste dans un metal prog où les claviers se taillent souvent
la part du lion mais avec aussi une recherche d'accessibilité, le groupe
ne rechignant pas à laisser de la place à un versant mélodique affirmé,
et à des guitares souvent très heavy. Le titre d'ouverture
Nightwalker est d'ailleurs très représentatif de ce mélange, et
c'est une fort belle réussite ! Les meilleures chansons sont de toute
façons regroupées en début de disque, puisqu'on enchaîne avec un Cold
wind lui aussi très bon, et avec un Scarlet flower fields
sauvé par un refrain mélancolique magique (pour le reste, c'est une
bluette dispensable). La suite est moins convaincante (si le disque
était resté au niveau de ses premiers titres, il aurait sûrement eu
droit à une étoile de plus), End of all days s'étire sans
vraiment trouver son rythme, Can you hear me est franchement
mauvaise, mais on retrouve un peu d'énergie en fin d'album pour conclure
dignement ce qui est une nouvelle fois un bon disque. Peut-être même mon
préféré du groupe jusqu'ici malgré une certaine irrégularité.
- Vanden Plas - Christ-O (2006) ★ ★ ★ ★
Pour ceux qui se demanderaient à quoi peuvent faire allusion le titre et
la pochette étranges de ce cinquième album de Vanden Plas, sachez qu'il
s'agit d'un concept album basé sur l'oeuvre d'Alexandre Dumas (le comte
de Monte-Cristo donc). Je dois dire que j'ai un peu de mal à faire
cohabiter mes souvenirs du bouquin avec le metal prog proposé par le
groupe, et que le fait d'avoir été lire les paroles ne m'a pas vraiment
éclairé non plus (il y a bel et bien des références culturelles
improbables, y compris une tentative de jeu de mots foireux sur
Depardieu par exemple...). Oublions donc tout ça pour nous concentrer
sur la musique, qui elle ressemble comme deux gouttes d'eau à ce que
propose Vanden Plas à chaque fois, avec tout de même l'ajout de quelques
choeurs et des claviers "orchestraux" encore plus présents qui donnent
une dimension plus épique à ce disque. Pour le reste, c'est toujours
très touffu sans jamais sacrifier la mélodie, remarquablement maîtrisé
même si on n'évite pas quelques longueurs (sur les trois titres
dépassant les huit minutes, même s'il y a plein de bons moments dedans),
probablement moins convaincant tout de même sur les titres plus calmes
(finir sur Lost in silence, si on exclut la reprise qui conclut
réellement l'album, est à mon avis dommage car c'est un titre vraiment
plat). Le meilleur en fait, ce sont les titres "courts" qui mélangent
idéalement les claviers et l'assise très heavy, comme la chason titre ou
Somewhere alone in the dark. Mais tout l'album est de fort bonne
tenue, même s'il ne faut probablement pas en attendre une révélation si
on n'est pas déjà amateur du genre. Pas de réelle surprise, pas de titre
qui vous scotche à votre siège, simplement du bon boulot très bien fait.
C'est déjà pas mal !
- Vanden Plas - The Seraphic Clockwork (2011) ★ ★ ★ ½
Pour son sixième album, Vanden Plas a changé de label, et peut-être
voulu marquer le coup en infléchissant un peu leur musique vers quelque
chose de plus heavy, et qui lorgne plus clairement vers le symphonique.
L'intro assez dissonante et vraiment musclée de Frequency pourrait même
sembler contre nature pour le groupe (ça m'a même fait penser au Virus
de Haken, excellente référence ceci dit, mais nettement postérieure), et
puis on s'y fait et surtout on se rend compte que le titre est sacrément
efficace. On gardera cette tendance heavy sur les deux titres suivants
(la fin de Scar of an angel impressionne), puis la naturel revient au
galop : titres qui s'allongent de plus en plus (près d'une heure dix
pour seulement huit chansons, ça fait une moyenne plus que respectable
!), probablement même un peu trop, breaks dans tous les sens, retour des
claviers sur le devant de la scène, on retrouve finalement l'univers
bien calibré de Vanden Plas (et la maîtrise qui va avec, bien entendu).
Je le regrette quand même, car cette deuxième moitié d'album me semble
moins intéressante, le groupe ayant déjà sorti auparavant plusieurs
albums dans ce genre, avec une conviction plus claire (sur
Christ-O notamment). L'ensemble reste tout de même de très bonne
facture, et poursuit une belle série d'albums très solide de la part du
groupe.
- Vanden Plas : Chronicles of the Immortals : Netherworld (2014/2015) ★ ★ ★
Si Vanden Plas a désormais pris l'habitude de laisser passer plusieurs
années entre deux disques, quand ils se décident à sortir quelque chose,
on ne peut pas dire qu'ils se foutent du monde : ici un énorme
concept-album inspiré d'une oeuvre d'un auteur de SF allemand, près de
deux heures de musique réparties en une vingtaine de chansons et deux CD
complets. On est en fait pas loin dans l'idée d'un "opéra metal prog",
mais qui serait chanté quasiment exclusivement par le vocaliste du
groupe (il y a bien une voix féminine sur certaines pistes, mais ça
reste assez anecdotique). C'est peut-être d'ailleurs la principale
limite du projet, la musique de Vanden Plas a déjà un côté assez
monotone et relativement peu accessible (ce ne sont pourtant pas les
mélodies qui manquent, mais il faut toujours plusieurs écoutes pour
vraiment rentrer dedans avec eux), mais là, avec une durée doublée,
c'est encore pire (pour le coup, c'était probablement un choix judicieux
de la part du groupe que de sortir les deux albums de façon vraiment
séparée, à un an d'intervalle l'un de l'autre). On ne peut pas
s'empêcher ici de déplorer quelques longueurs et autres moments faibles,
même si l'ensemble reste, comme toujours avec les allemands,
remarquablement construit. En fait, on retient forcément les morceaux de
bravoure (les 13 minutes de Blood of Eden évidemment, mais
plusieurs titres du premier disque, notamment The Black Knight ou
New vampyre, tirent aussi leur épingle du jeu), sans d'ailleurs
qu'il n'y vraiment un titre qui arrache tout sur son passage (ce n'est
pas vraiment le style de la maison), et on oublie un peu trop facilement
le reste. Peut-être aurait-il fallu un peu plus de variété, de sorties
de route par rapport au style quand même très calibré du groupe, pour
maintenir l'intérêt constamment. Le Ghosts requiem du premier
disque, ou le Diabolica comedia du second (presque joyeux pour du
Vanden Plas), jouent un peu ce rôle de respirations, mais ce sont
vraiment les exceptions. L'expérience reste évidemment intéressante (et
la musique loin d'être mauvais, n'exagérons rien), mais à mon sens moins
convaincante que les albums "classiques" du groupe.
- Vanden Plas - The Gost Xperiment (2019/2020) ★ ★ ★
C'est apparemment devenu le mode de fonctionnement normal de Vanden Plas
: deux CD publiés à un an d'intervalle pour raconter une même histoire
fleuve, sorte d'opéra metal prog qui, au niveau du sujet et des
intentions, n'est pas loin de marcher sur les plates-bandes
d'Ayreon. Sauf qu'une fois de plus, on a un seul chanteur pour
nous accompagner (même la voix féminine du précédent projet a disparu,
dommage). Faut-il craindre qu'à nouveau la monotonie ne vienne affadir
quelque peu l'effet de la musique toujours très travaillée du groupe ?
Oui et non. Non, car le premier disque a le bon goût de se resserrer sur
six titres (mais quand même 45 minutes de musique) où le groupe tente
une approche assez directe (Cold december night pourrait presque
faire office de tube, les cinq minutes de The Phantoms of
prends-toi-garde (oui, le titre montre que le groupe continue à
flatter sa fanbase française tout en maîtrisant moyennement la langue)
passent toutes seules), et fait preuve d'une conviction qui fait mouche.
D'ailleurs, c'est bien simple, cette première moitié est probablement
mon disque préféré du groupe, qui ne révolutionne évidemment pas son
style mais laisse une belle place à des claviers vintages sympathiques,
aucun titre à part peut-être la chanson titre conclusive ne me déçoit.
Mais oui quand même, car une fois de plus la durée pose problème. Le
deuxième disque s'étale sur une heure, et même s'il y a encore pléthore
de bon momens, les coutures finissent par devenir apparentes, notamment
les refrains braillés en choeur qui se ressemblent un peu tous et qui
finissent par lasser. Pris tous seul, ce second CD serait probablement
très correct, mais à la suite du premier, c'est tout simplement trop
(après, bien sûr, rien n'oblige à les écouter à la suite). L'ensemble
reste tout de même plus que correct (probablement même un peu meilleur
que le double disque précédent, grâce à cet excellent démarrage), mais
une fois de plus Vanden Plas fait du Vanden Plas, qui ravira les fans de
longue date, et ne fera pas frémir les autres.
- Vanden Plas - The Empyrean equation of the long lost things (2024) ★ ★ ★ ★
Critique d'un alnum tout frais pour moi ce soit, puisque le dernier
Vanden Plas est sorti il y a à peine quelques semaines. Et alors, à part
une tentative de record du monde du titre d'album le plus abscons, quoi
de neuf ? Eh bien déjà, pour la première fois en plus de trente ans de
carrière, un changement de lineup, avec un nouveau claviériste. Je vous
rassure tout de suite, ça ne change absolument pas le style immuable du
groupe, mais on notera quand même des sonorités un peu plus modernes à
ce niveau-là (pas mal de piano notamment), ce qui ne fait pas de mal. On
oublie aussi les doubles albums monumentaux de la décennie précédente,
cette fois on a "seulement" droit à six titres pour une heure de musique
(sacrée moyenne), dont une March of the saints finale de plus
d'un quart d'heure. L'inspiration est-elle suffisamment au rendez-vous
pour faire passer ce copieux menu ? Majoritairement, oui ! On a un peu
l'impression par moment d'entendre une sorte de best-of de ce que
propose le groupe depuis plusieurs décennies, notamment dans ce fameux
titre final à rallonge, mais les pistes les plus réussies sont vraiment
excellentes (la chanson-titre majoritairement instrumentale qui ouvre
l'album de flamboyante manière, mais aussi la première partie de la
ballade They call me god, qui prouve que le groupe peut faire des
merveilles dans un style très épuré mais émotionnellement fort), alors
que celles qui sentent un peu trop le réchauffé et les procédés trop
entendus (le refrain fatiguant de My icarian flight) restent
largement écoutables. De toute façon, Vanden Plas ne tombe jamais dans
le franchement raté, comme en témoigne l'impressionnante régularité de
leur discographie. Ce dernier album en date ne fait pas exception à la
règle, et il s'agit même selon moi de l'un des sommets de leur carrière.