Mon avis personnel sur les disques de Turisas
- Turisas - Battle Metal (2004) ★ ★ ★ ½
Tiens, ça faisait longtemps que je ne m'étais pas penché sur un groupe
finlandais produisant du metal à forte teneur mélodique et d'une
subtilité pas toujours évidente ! Non ? Bon, tant pis, j'y retourne
quand même. Turisas, donc, est un groupe assez mineur à la discographie
restreinte (quatre albums quand même) qui prétend faire du... battle
metal, comme le nom de l'album l'indique. En pratique, il s'agit sans
grande originalité d'un metal sous forte influence viking, avec une
grosse touche folklorisante (on a du violon, de l'accordéon, un peu de
flûte), énormément de fanfares qui pouët-pouëtent à mort (hélas, pour le
coup, ce sont bien des synthétiseurs qui gèrent la chose) pour justifier
le côté guerrier, et même quelques interventions très lyriques d'une
soprano qui semble s'être un peu perdue, mais surtout des choeurs
fournis pour le coup assez impressionnants. Mine de rien, ça en fait du
monde (et sur scène ils pimentent le tout avec costumes qui vont bien et
peintures tribales rouges et noires, histoire que la fête soit
complète), et on n'échappe pas par moments à un côté kermesse viking un
peu trop téléphoné. On n'échappe pas non plus à quelques mauvaises idées
quand le groupe essaie de se la jouer cool (les bruits de studio à la
fin de Among ancestors et la ridicule adresse à l'auditeur
Prologue for R.R.R auraient trouvé une place de choix dans la
poubelle la plus proche). Mais quand ils se contentent de faire de la
musique, eh bien c'est loin d'être ridicule, parfois un peu fourre-tout,
mais les titres speed notamment (As torches rise) fonctionnent
particulièrement bien. Le genre de disque dont on n'attend rien, mais
qui procure un plaisir simple et immédiat.
- Turisas - The Varangian way (2007) ★ ★ ★
Après un premier album assez enthousiasmant malgré ses défauts, Turisas
persiste et signe avec une deuxième cuvée tout aussi entraînante, mais
dont la subtilité est peut-être encore plus absente (c'est dire).
Consacré avec une extraordinaire originalité aux vikings (ah, pardon,
aux Varègues, histoire de faire cultivé), le disque nous propose un
voyage assez court (seulement huit titres et 40 minutes de musique) mais
pour le moins mouvementé. Intro symphonique pétaradante aux claviers
(mais plutôt sympathique) de rigueur sur To Holmgard and beyond,
mais on constate rapidement une surprise de taille, le chanteur guttural
qui officiait jusque-là a été remisé au placard pour une grosse majorité
des pistes, laissant la place à du chant clair acceptable mais sans
charme et surtout trop lisse pour coller au style épique voulu par le
groupe. Bon, pas grave (ou peut-être que si ?), les musiciens se
rattrapent en en faisant des tonnes en permanence, comme s'ils avaient
peur que l'inspiration mélodique ne soit pas suffisante (c'est pourtant
plus que correct de ce point de vue). Du coup, ça tourne quand même bien
dangereusement à la choucroute boursouflée qui ferait passer
Rhapsody pour un groupe à la sobriété exemplaire (si, si, le
début de Fields of gold par exemple, c'est assez terrible, et la
touche russe sur In the court of Jarisleif est juste grotesque).
Et pourtant, on passe un moment festif franchement sympathique à
l'écoute de l'album (The Dniepr rapids, c'est très bon), en
regrettant quand même que la lourdeur des arrangements le fasse passer
d'un potentiel excellent à un simple bon. Attention quand même, à force
de charger la barque (le drakkar ?), on va couler vers le mauvais...
- Turisas - Stand up and fight ! (2011) ★ (note réelle) / ★ ★ ★ ★ (note "nanar musical")
Leur deuxième album le laissait craindre, celui-ci va le confirmer,
Turisas s'est définitivement laissé glisser le long d'une pente
douteuse. On pourrait pourtant penser que l'emploi d'un véritable
orchestre en lieu et place des pouët-pouëts synthétiques habituels est
une bonne nouvelle, mais le souci c'est le que le groupe a apparemment
du revendre ses guitares pour pouvoir embaucher l'orchestre. Non,
j'exagère, ce sont seulement les amplis qui ont été sacrifiés, les
guitares sont bien là pour proposer une sorte de fond vaguement
metallisé complètement anecdotique. À la place, on a tout bonnement
droit à une sorte de musique de film sans images, qui reprend et mélange
allègrement tout ce qui a pu se faire dans le genre à Hollywood ces
dernières décennies : un titre égaré depuis la BO d'un Pirates des
Caraïbes (le bien nommé Hunting pirates, rappelons quand même
qu'on est toujours censés suivre l'épopée des Varègues en terres
slaves), des fanfares tirées d'un peplum période Ben-Hur (Vanetoi !
Prasinoi !), des relents de western (March of the varanguian
guard), et plein de cavalcades et autres violons larmoyants, sans
oublier un peu de piano pour rendre le cocktail encore plus indigeste
(End of an empire, probablement le titre le plus foutraque du
lot), des choeurs en veux-tu en voila, et une piste finale qui joue la
carte du récit parlé sur fond symphonique et s'achève avec une cadence
tellement ridicule qu'enfin, on comprend l'intérêt de ce disque ! Mais
oui, tout ça n'était qu'une vaste blague. Pris au premier degré, c'est
effrayant, mais si on admet qu'il ne s'agit que d'une parodie déjantée,
la générosité mélodique, les arrangements pachydermiques et le mélange
absolument pas canalisé de tout et n'importe quoi confine au génie
créatif. En tout cas, je m'amuse follement en écoutant ce machin, même
si je doute très fort que les musiciens l'ayant créé aient eu cet
objectif-là...
- Turisas - Turisas 2013 (2013) ★
Pour son dernier effort discographique à ce jour, Turisas a décidé de
faire dans la sobriété. Plutôt une bonne idée vu le sommet de choucroute
assez indigeste que constituait son album précédent, mais le problème
c'est que ce dégraissage semble avoir carrément vidé de toute substance
la musique du groupe. Les guitares sont sous-mixées, les arrangements
franchement pauvres, même les choeurs sont nettement moins tonitruants
qu'avant, l'ensemble sonne terriblement creux (en fait on a carrément
l'impression qu'ils ont oublié d'enregistrer une bonne moitié des
instruments). Forcément, quand on prétend proposer une musique épique,
ça pose un petit problème (particulièrement flagrant sur Ten more
miles). On retrouve bien quelques touches folklorisantes et des
mélodies sympathiques, mais c'est bien insuffisant au milieu
d'expérimentations au mieux ratées (le chant trafiqué de Greek
fire, les trompettes de We ride together), au pire carrément
indéfendables (le break de Run Bhang-eater, run ! avec son solo
de sax sur fond de gémissements explicites, c'est plus que gênant
d'avoir laissé passer un truc pareil). Pour le coup, quel que soit le
degré auquel on a envie de le prendre, cet album est simplement mauvais.