Mon avis personnel sur les disques de Lamb of God
- Lamb of God - New American Gospel (2000) ★ ★ ★ ½
Au tournant du millénaire, un énième groupe américain se présente pour
tenter de raviver une fois de plus la flamme du thrash, dans les traces
plus ou moins claires d'un Pantera. Pour ce premier essai, on a
donc droit à du bien bourrin, avec une rythmique ultra lourde mais qui a
un certain cachet notamment du à un son de batterie très brut qui donne
du relief à l'ensemble (faut aimer quand même, c'est assez spécial).
Niveau purement musical, c'est assez minimaliste, des motifs basiques
étant souvent beaucoup répétés et les vrais riffs mélodiques assez
rares. C'est un peu dommage dans la mesure où justement les pistes
lentes et hypnotiques qui jouent un peu plus la carte de la mélodie
(The black dahlia, Pariah) sont de loin les plus réussies,
j'irais d'ailleurs même jusqu'à dire que je les trouve personnellement
excellentes. Les pistes plus rapides sont globalement moins percutantes
(sauf la rigolote piste bonus Nippon, à l'ambiance étonnante)
mais ne déméritent pas totalement non plus (c'est quand même un peu trop
homogène). Mais le plus gros point d'interrogation c'est la prestation
du chanteur, qui braille des choses inintelligibles en fond
(apparemment, il chante vraiment des "paroles" qui n'ont aucun sens sur
certains titres, à cause d'un manque de temps lors de l'enregistrement
de l'album !), on pourrait carrément l'effacer qu'on n'y perdrait pas !
Mais malgré quelques bémols, c'est un premier album dont l'ambiance m'a
vraiment convaincu, à suivre.
- Lamb of God - As the palaces burn (2003) ★ ★ ★ ½
Pour son deuxième album, Lamb of God affine la recette entrevue dans son
premier essai : les rythmiques implacables martelées sans répit sont
toujours de la partie, mais sans le côté lent et hypnotique qui était
présent sur une partie des titres de New American gospel. Ici, ça
va vite, et même souvent très vite, on ne s'attarde pas (les titres
tournent autour de 3 ou 4 minutes, seul le Vigil final dépasse
cinq minutes, mais c'est du à sa partie introductive calme). C'est
carré, presque trop (on aimerait de temps en temps que ça respire un peu
plus), mais on ne peut pas nier que ça donne un résultat implacable qui
est souvent assez impressionnant (Ruin, 11th hour). Je
crois que je préfère quand même à titre personnel leur premier album (on
a un peu perdu en feeling ce qu'on a gagné en maîtrise), mais celui-ci
est une réussite assez indiscutable.
- Lamb of God - Ashes of the wake (2004) ★ ★
Ce troisième album est celui de la consécration pour Lamb of God, avec
une reconnaissance de la part des fans qui perdure encore aujourd'hui
puisqu'il est souvent cité comme le sommet de la discographie du groupe.
Après un certain nombre d'écoutes (avec la rentrée, je traîne pour taper
mes critiques !), je comprends pourquoi, mais je reste relativement
déçu. On a clairement ici une sorte d'aboutissement dont As the
palaces burn était le brouillon, mais sans le côté urgent de ce
dernier. Là c'est vraiment hyper carré et maîtrisé, dans un tempo
toujours retenu, et avec une volonté manifeste de refuser la facilité au
niveau des riffs, qui les fait malheureusement dériver régulièrement
vers une sorte de technicité stérile, limite prog mais sans les
constructions savantes qui en feraient l'intérêt. Et puis ça manque
cruellement de renouvellement par rapport à leurs premiers disques (les
triolets sur The faded line, par exemple), sauf peut-être
l'insertion de passages parlés probablement censés augmenter l'immersion
dans une ambiance froide et oppressante. De fait, ce disque est froid,
probablement trop pour moi, même si je ne peux pas nier que, pris un par
un, la plupart des morceaux sont réussis.
- Lamb of God - Sacrament (2006) ★ ★ ★ ★ ½
Alors que leur précédent album (et soi disant classique) Ashes of the
wake m'avait déçu, celui-ci me réconcilie avec Lamb of God. C'est
celui-ci qui devrait être considéré comme leur classique ! C'est hyper
maîtrisé (comme d'habitude) mais surtout entraînant en permanence, la
mélodie n'est pas sacrifiée, l'ensemble est d'une efficacité
impressionnante. On commence très fort avec un Walk with me in
hell qui emporte tout sur son passage, mais je crois que je préfère
encore le Again we rise qui lui succède (certes les "Rise"
beuglés en choeur sont d'une subtilité toute relative, mais qu'est-ce
que ça fonctionne bien quand même !). Les titres du milieu de disque
sont un peu moins monstrueux, mais on retrouve sur la fin de quoi ne pas
rester sur une note affadie, avec un Requiem qui combine les
qualités déjà décrites (urgence, belle utilisation des choeurs), et un
Beating on death's door final qui joue la carte de la vélocité
sans perdre en efficacité. Vraiment, sans rien révolutionner de son
style une fois de plus, le groupe réussit là un quasi sans faute.
- Lamb of God - Wrath (2009) ★ ★ ★
Après un petit mois passé à écouter autre chose que du métal, reprise en
douceur et en force de mes petites chroniques. En douceur car avec Lamb
of God on a toujours un peu l'impression d'écouter une sorte de digest
(très bien fichu) de beaucoup de choses à la mode à l'époque de la
sortie du disque. Mais en force quand même, car le groupe joue
volontiers ici la carte du brutal (In your words, ou encore pire
le très défouloir Contractor, rigolo même si relativement
limité), ou du speed qui cherche à tout défoncer. C'est comme toujours
exécuté de main de maître, tournant même par moments à la démonstration
technique un peu vide (Set to fail), en tout cas on ne peut pas
nier que ça s'écoute très plaisamment. Je me serais quand même bien
passé des sonorités de batterie souvent "plastoque pas beau", et la
comparaison avec son prédécesseur fait de ce Wrath un bon album, mais
qui ressemble à un album de transition pour le groupe (à supposer qu'ils
veulent faire évoluer un jour leur style, ce qui n'a rien d'évident).
- Lamb of God - Résolution (2011) ★ ★ ½
Je me demandais, à propos de leur album précédent, si une évolution
pouvait être à l'ordre du jour pour Lamb of God. La réponse au vu de
celui-ci est nette, c'est un non franc et massif. Le groupe assène ici
son credo habituel en mode passage en force : guitares puissances (et
batterie assez laide), touche technique toujours présente avec un
riffing volontiers alambiqué (The Undertow), et surtout un chant
gueulé vraiment trop uniforme qui contribue à la lassitude qui envahit
assez rapidement l'auditeur (faut dire que le disque contient pas moins
de 14 pistes, c'est beaucoup). On ne peut pourtant pas nier une nouvelle
fois la maîtrise technique évidente, et une certaine efficacité quand on
prend certains titres séparément (Desolation, Invictus),
c'est l'ensemble qui est un peu indigeste (sans tomber dans le mauvais,
n'exagérons rien). D'ailleurs, un signe qui ne trompe pas, c'est que les
quelques tentatives de changement paraissent très inspirées en contraste
avec le reste de l'album : quelques touches de guitare sèche, les
étonnants choeurs clairs de Insurrection, et surtout la
conclusion King me qui dénote carrément avec son côté symphonique
inattendu pour le groupe. Là, on se dit vraiment que le changement de
cap serait une bonne façon pour Lamb of God de proposer quelque chose de
beaucoup plus frais. Mais, sincèrement, on n'y croit pas trop.
- Lamb of God - VII : Sturm und Drang (2015) ★ ★ ★ ★
Pour son septième album studio, Lamb of God décide à la surprise
générale d'enregistrer des reprises de symphonies de Haydn. Ah non, ce
n'est pas pour ça qu'ils ont intitulé leur disque Sturm und Drang ? Peu
importe à vrai dire la raison profonde de ce choix, il illustre en tout
cas un renouveau très palpable de l'inspiration et de l'envie de
proposer des choses accrocheuses après deux albums en demi-teinte. Il
faut dire que la période qui a précédé la parution de cet album a été
pour le moins difficile pour le chanteur du groupe, qui a fait un petit
tour par la case prison après le décès d'un fan lors d'un concert
(accident pour lequel il a fini par être disculpé). Sans surprise, la
musique de ce nouvel opus est influencée par ces évènements, avec une
urgence inquiète qui explose dès le titre d'ouverture, l'excellent
Still echoes, et qui culminera dans un 512 assez
impressionnant de maîtrise. En fait, c'est toute la première moitié du
disque qui voit le groupe retrouver son meilleur niveau, comme quoi
finalement le fait d'avoir des choses à dire, même sans vraiment
renouveler le style, suffit à élever le niveau de la musique produite.
Ca ne tient pas totalement sur la durée du disque (la pseudo-ballade
Overlord est inutile, les quelques passages en chant clair
disséminés ça et là ont pour seul mérite de surprendre), mais on a
encore droit à quelques titres bien sentis, notamment Engage the
fear où la maîtrise technique (toujours présente chez Lamb of God de
toute façon) ne prend pas le pas sur l'inspiration mélodique. Tout ça
est largement suffisant pour produire un disque hautement recommandable,
l'un des meilleurs de ses auteurs.
- Lamb of God - Lamb of God (2020) ★ ★ ★ ½
Après un Sturm und drang vraiment réussi, Lamb of God a de
nouveau connue une période troublée marquée par le départ d'un de ses
membres, une première depuis la création du groupe (en gros 20 ans de
lineup intact, c'est une constance rare pour un groupe de métal). Les
mauvaises langues diront que c'est peut-être un mal pour un bien, une
occasion d'enfin changer un tout petit peu leur recette. Eh bien pas du
tout, comme le choix du titre éponyme pouvait le laisser penser, Lamb of
God revient asséner avec force un credo déjà entendu quesiment à
l'identique sur tous ses albums précédents : le son est immédiatement
reconnaissable, le chant n'a pas bougé (quelques rares incursions dans
le domaine du chant clair qui semblent tout aussi anecdotiques que sur
le disque d'avant), les riffs assez techniques sont toujours déclinés
avec une maîtrise assez redoutable même si l'ensemble manque très
clairement de renouvellement (et puis bon, on sent un peu le service
minimum, 10 titres pour moins de trois quarts d'heure de musique, on
invite un ou deux potes, dont le chanteur de Testament, pour
remplir la deuxième moitié de disque, et hop ça passera tout seul). En
même temps, on ne peut pas nier qu'il s'agit à nouveau d'un album
réussi, qui s'écoute tout seul (Momento mori ou Reality
bath, c'est du bon Lamb of God, indiscutablement).
- Lamb of God - Omens (2022) ★ ★ ★
Après avoir traversé une période trouble, Lamb of God a repris son
rythme de croisière, cet album sortant deux ans après le précédent. Une
sorte de routine pour un groupe qui a remarquablement peu évolué depuis
sa création. De fait, ce neuvième album présente bien peu de surprises
par rapport aux précédents, on reconnaît rapidement le style du groupe
et la plupart des titres auraient pu figurer sans aucun problème sur à
peu n'importe lequel des albums de la discographie du groupe, la seule
exception notable étant le September song conclusif et ses
touches orchestrales inattendues (des claviers discrets, puis carrément
des violons synthétiques, ça a le mérite de renouveler un peu le
discours). En même temps, "pas de surprise" signifie aussi "pas de
mauvaise surprise" : le groupe maîtrise toujours son sujet et, sans
faire de vagues (façon de parler, ça reste très rentre-dedans, mais
aucun titre ne se démarque vraiment du lot), aligne sa dizaine de
chansons qui s'écoutent agréablement (encore une fois, on la joue un peu
service minimum avec un album de trois quarts d'heure). Tout à fait
correct donc, et en même temps d'une inutilité totale puisque le groupe
a déjà fait pareil... en mieux.