Usual suspects,

film de Bryan Singer (1995)



Avis général : 9/10
:-) Bien sûr, le scénario diabolique, mais aussi la réalisation parfaitement maîtrisée, les acteurs tous parfaits et la musique efficace.
:-( Ce film est finalement une vaste arnaque. Mais on se fait avoir avec tellement de plaisir :-).

Il est des films qui semblent avoir été touchés par la grâce. Sorti de nulle part pour débouler au festival de Cannes en 1995, réalisé par un gamin inconnu, pas de grosse star à l'affiche, mais un phénomène immédiat et une place d'emblée acquise et jamais remise en question au Panthéon du septième art, Usual suspects fait indiscutablement partie de cette catégorie. Keyser Söze est devenu rapidement l'objet de conversations animées et de fascination de la part des cinéphiles estivaux qui pour une fois n'auront pas perdu complètement leur mois d'août.

La construction de l'intrigue étant plus ou moins l'intérêt majeur du film, je ne vais pas trop en dire, mais dans la mesure où on peut raconter en détail 90% du film sans en dévoiler la chute, je ne risque pas grans chose :-). A San Pedro, un bateau pète sur le port, faisant une trentaine de morts et deux survivants. D'une part un marin hongrois brûlé à mort mais qui aura le temps de faire une ou deux révélations, d'autre part Verbal Kint, escroc miteux qui se retrouve rapidement dans les bureaux du lieutenant Kujan pour un interrogatoire en règle. Peu coopératif au départ, il finit par raconter son histoire : suite à un vol de camion, il se retrouve enfermé en compagnie de quatre autres truands pour une confrontation qui sent l'arnaque. Peu importe, les cinq lascars décident de faire un ou deux coups ensemble avant de se séparer. Ce qui va les mener bien involontairement sur les traces du mystérieux et redouté Keyser Söze.

Ce film est tout de même un sacré tour de force. Quand on y réfléchit un peu, la révélation finale avait tout de même de fortes chances de tomber comme un cheveu sur la soupe et de décevoir le spectateur ayant tenté de démêmer l'écheveau de faux indices donnés pendant le film. Mais Synger et son scénariste déjouent aisément ce piège, tout simplement par la façon dont l'intrigue est présentée : à travers les yeux des suspects. Ils ne comprennent pas trop ce qui se passe, nous non plus, et même si on ne peut s'empêcher de faire des hypothèses, on se contente plus de reconstruire petit à petit l'histoire (comme Kujan face à Kint) que d'en chercher le fin mot. Tout cela peut sembler un peu fastiduex à première vue : une heure quarante de film pour un choc de deux minutes à la fin ? Pas vraiment, ce que nous raconte Verbal, sans être d'une extrême originalité, est déjà suffisament complexe pour retenir l'attention, et surtout très bien mis en scène. Alternance de face-à-face dans le bureau et de flash-backs illustrant le récit, on ne s'ennuie pas une seconde. Certaines scènes d'action sont franchement excellentes (j'dore celle de l'ascenseur) et le final dans le bateau, qui n'a sur le papier rien de très palpitant, nous accroche complètement avec son ambiance glauque parfaitement retranscrite.

Et que dire sur le final (sans le dévoiler) ? On pourrait craindre qu'il ne tue a posteriori l'intérêt du film, mais au contraire, Usual suspects est un de ces rares films qui sont encore meilleurs à la deuxième vision qu'à la première (d'ailleurs, il mérite d'être vu deux fois de suite pour en capter toutes les subtilités) car on se rend compte qu'à côté de tout ce qu'on a vu, Synger a accumulé des petits détails révélant la supercherie, qui nous sont complètement passés au dessus de la tête la première fois. Pour ceux qui n'auraient pas encore vu le film, je ne peux que vous prévenir : tout dans la réalisation est significatif, rien n'est laissé au hasard.

Après, il faut bien admettre qu'à la fin de la deuxième vision, on se rend compte qu'on s'est fait avoir :-). Mais on ne s'en plaint pas. S'il fallait trouver un défaut au film, je citerais plutôt la scène où apparait Keyser Söze jeune, qui est un peu trop mauvais goût par rapport au reste du film. Mais inon, c'est que du bon. Vous pouvez foncer.

Roupoil, 29 décembre 2004.



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