Eh bien oui, à la surprise générale (y compris la
mienne), trois ans après avoir été peu convaincu par l'art de Desplechin
dans Rois et reine, j'ai remis le couvert à l'occasion de son
dernier film. Pourtant, de loin, ça a bien l'air d'être exactement la même
soupe : un film interminable sur un sujet banal, encensé par la critique
française et détesté par à peu près la moitié des autres gens. Mais il
faut toujours laisser une seconde chance (après tout, j'en suis bien à
quatre ou cinq pour Tarantino).
Pour changer, donc, Desplechin nous raconte les petites histoires d'une
famille, qui en l'occurence se retrouve pour Noël dans la maison familiale
de Roubaix. Une première depuis bien longtemps puisque l'un des enfants,
Henri, a été quelques années plus tôt banni par sa propre soeur. La raison
de cette réunion, c'est la maladie de la mère, qui a besoin d'un donneur
pour soigner son cancer.
Je vous épargne la liste complète des protagonistes, mais elle est assez
longue pour procurer son lot de souvenirs, engueulades et autres sans que
l'accumulation des péripéties paraisse artificielle. De fait, par rapport
à Rois et reine, Desplechin a eu le bon gout d'élargir un peu son
horizon, évitant de nous étouffer avec un nombre trop limité de
personnages antipathiques. Ici, les personnages restent antipathiques, je
vous rassure (à croire que le réalisateur a vraiment des comptes à régler
avec le genre humain ; c'en est même frustrant car on a encore une fois
du mal, non seulement à s'identifier, mais même à cerner les motivations
de cette belle bande d'ordures), mais au moins on en change souvent.
Allié à une réalisation toujours précise et parfois inventive (la
présentation des personnages dans la première demi-heure du film est
franchement réussie), et à des choix esthétiques, musicaux et autres
intéressants, finit presque par faire digérer correctement la longueur du
film. Presque seulement, parce que ça finit tout de même par tourner un
peu en rond. Mais bon, ne nous plaignons pas, Desplechin a fait cette
fois-ci un film tout à fait regardable.
Par contre, s'il y a bien un détail que je ne peux pas passer sous silence
avant de clore cette critique, c'est l'invraisemblable médiocrité du son.
Il faut se battre pour comprendre suffisamment des mots de Jean-Paul
Roussillon et reconstituer le texte ensuite, c'est ahurissant (et il n'y a
pas que pour lui, mais c'est le plus frappant). On a également droit, bien
entendu, à quelques pédanteries de la part de Desplechin qui seraient
presque drôles si elles n'étaient pathétiques (l'explication du matheux à
coup d'intégrales, tout à fait correcte par ailleurs, est tout de même
plus qu'incongrue), mais bon an mal an, avec un coup de ciseau par ci par
là, on serait même arrivé à un très bon film. C'est ballot, je vais me
sentir obligé d'aller voir son prochain pour voir si c'est encore mieux...
Roupoil, 3 juillet 2008.