En ces temps de grande frilosité scénaristique (faut
dire, vu les sommes en jeu...), nos amis hollywoodiens ont trouvé deux
fons filons à exploiter : les remakes et les suites. Et comme chacun sait,
une bonne saga se déroule en trois épisodes (une des nombreuses raisons
qui devraient décourager l'ami Spielberg de remettre Indy au turbin, soit
dit en passant). Voici donc le retour de l'homme-araignée pour de
nouvelles aventures, à n'en pas douter plus spectaculaire, romanesques et
pleines d'cation que jamais.
De fait, ça commence sur les chapeaux de roue. A peine l'ami Parker a-t-il
le temps de s'extasier sur l'amour que lui porte le peuple new-yorkais
qu'il se retrouve, au milieu de ses tentatives désespérées pour demander
M.J. en mariage, face au retour du Bouffon, incarné par Harry Osborn
décidé à venger la mort de son papa. Paf, vingt minutes après le début du
film, c'est déjà le grand duel ! Ben oui, parce qu'en fait ce n'est qu'une
fausse, puisqu'Harry perd la mémoire et redevient donc gentil après avoir
pris un coup sur le crâne. Pas grave, il y a de quoi faire quand même avec
l'homme-sable et l'espère de schbleurb noir parasite.
Il y aurait peut-être même un peu trop, car pendant la première
demi-heure, les péripéties s'enchainent de façon assez mécanique sans
qu'on ait vraiment le temps de souffler. Pire, Raimi semble tomber dans
tous les pièges qu'il avait habilement évité dans les deux opus précédents
: scènes d'action où on ne comprend rien, abus d'effets numériques
voyants, scènes mièvres pour faire transition (bon, ça, on y avait déjà
droit avant), scènes tellement peu crédibles qu'elles en deviennent
ridicules (ah, l'accélérateur de particules). On finit par craindre de
devoir descendre en flammes ce troisième volet qui semble être celui de
trop.
Et puis, de façon presque inattendue, Raimi finit par prendre le temps de
développer son intrigue, et comme par miracle, le film retrouve tout son
équilibre. Bien sûr, ça reste farci de clichés parfois à la limite du
supportable (le drapeau américain en toile de fond, on s'en serait très
volontiers passé), et la fin est tellement convenue et tarte à la crème
que ça en ferait presque rigoler, mais pour le reste, on retrouve les
qualités d'un bon blockbuster (eh oui ça existe) : c'est rythmé,
spectaculaire, avec notamment une musique sympatoche (même si ce n'est
plus Elfman aux manettes), le côté comics est assez bien rendu (comme
d'habitude, les méchants sont bien, même si leur accumulation empêche un
peu d'approfondir les spécificités de chacun. On peut regretter que Tobey
Maguire continue à jouer façon ado attardé (m'enfin, le problème est
surtout qu'il commence à être vraiment trop vieux pour le rôle), mais
Kirsten Dunst est toujours aussi raffraichissante, et Bryce Dallas Howard
lui donne un contrepoint fort intéressant (ok, j'avoue, surtout pour les
yeux).
Bref, ça se mange sans faim, et on sort de la salle avec une envie
certaine de tout casser autout de soi, malgré les nombreux défauts
irritants déjà signalés. Et on se prend à accorder à Sam Raimi un dernier
bon point (à peine au-dessus de la moyenne quand même) pour le plaisir un
brin coupable auquel il nous a conviés. Mais attention quand même, si
quatrième épisode il y a, il va finir par être urgent de redresser un peu
la barre...
Roupoil, 5 juin 2007.