Voilà donc le petit polar futé de l'été, qui essaie de se
faire sa place au soleil en embrouillant le spectateur. Le titre fait
penser à Seven, les complications dans le scénario à Usual
suspects, le style à Tarantino, et le casting ferit trembler tous les
films préités réunis. Lourde hérédite donc, pour le presque débutant
qu'est Paul McGuigan. N'aurait-il pas eu, par hasard, les yeux un peu plus
gros que le ventre ?
En tout cas, il assume pas mal. Après un générique parsemé de cadavres, on
retrouve Bruce Willis dans un curieux monologue avec flash-back à la clé,
puis on découvre enfin le Slevin du titre. Loin de nous expliquer les
scènes précédentes, celui-ci est lui-même entrainé dans un imbroglio
invraisemblable. Alors qu'il débarque chez son pote Nick Fisher après
s'être fait virer de son boulot puis agresser dans la rue, il est pris
pour lui et se retrouve trimbalé torse poil, tout d'abord chez le Boss
puis chez le Rabbin, les deux caïds de la ville, avec des missions plutôt
tendues à la clé. Slevin n'a pas l'air de trop s'en faire, il dragouille
sa voisine et s'apprête à s'improviser tueur.
Le fin mot de l'histoire ne sera comme il se doit dévoilé qu'à la fin,
mais ne vous attendez pas à un jeu de piste calibré au millimètre comme
dans Usual suspects. L'intrigue embrouille au fond assez mal le
spectateur, l'explication est terriblement plate (essentiellement, on
reprend les scènes clés en montrant le visage des protagonistes...) et le
tout n'est pas d'une cohérente absolue. Mais bon, finalement, on a déjà vu
nettement pire de ce point de vue là, et la tentative d'originalité dans
la construction est notable. On passera par contre gentiment sur les
caricatures de personnages qui nous sont proposées (les juifs en
particulier sont gratinés).
Le film mise de toute façon, asez clairement sur l'ambiance, mélange de
violence et de décalage, voire de cool attitude, qui fait forcément penser
à Tarantino, et qui n'est jamais facile à maitriser (d'ailleurs, vous
n'êtes pas sans savoir que je considère que tarantino lui-même ne le
maitrise pas vraiment :-) ). Eh bien ici, au moins pendant une demi-heure,
ça tourne vraiment pas mal, l'absurdité de certains dialogues faisant écho
à l'intrigue qui part dans tous les sens. Ensuite, ça se répète un peu,
mais il y a tout de même un certain nombre de perles à repêcher dans les
dialogues. On passerait finalement un fort bon moment si McGuigan n'avait
pas voulu trop en faire. Ca a ses bons côtés (quand même, Morgan Freeman
et Ben Kingsley en chef de gang, c'est pas rien !), mais aussi ses
mauvais, niveau réalisation notamment, les divers effets tentés lors des
flashs-back agaçant plus qu'autre chose.
On peut donc dire que oui, le ventre n'a pas tout à fait tenu le choc par
rapport aux yeux, que le film était peut-être un poil ambitieux.
Finalement, il aurait mieux fait de ne jamais prétendre être plus qu'un
petit polar sympa car dans cette catégorie, il se défend tout à faut
honnêtement.
Roupoil, 10 juillet 2006.