Polisse,

film de Maïwenn Le Besco (2011)



Avis général : 5/10
:-) Quelques scènes très fortes, de bons acteurs, et un sujet intéressant.
:-( Le côté fictionnel est raté. Ca fait très patchwork sans point de vue.

De mieux en mieux, théoriquement, pour ma revue des films cannois français, avec celui qui a reçu le prix du Jury et pas mal fait parler de lui depuis. Je n'avais pas tenté les précédents films de Maïwenn car cette fille a une furieuse tendance à m'énerver, et j'ai donc mis un certain temps à tenter celui-là aussi, mais la bande-annonce, admettons-le, était pour une fois plutôt accrocheuse.

Il s'agit donc, par le biais de l'introduction d'un reporter photographique au sein de la brigade (joué par Maïwenn elle-même), de suivre le quotidien d'un groupe de flics de la Brigade de Protection des Mineurs. Autrement dit, des gens qui cotoient à longueur de journée de la pédophilie, des gamins battus et autres cas sociaux plus ou moins lourds à gérer. Je ne vais certainement pas vous faire le portrait de tous les protagonistes du film, il y en a beaucoup trop.

Maïwenn, elle, tente tout de même le coup, essayant d'ancrer ce qui au fond ressemble quand même pas mal à un documentaire, dans un vrai cadre de fiction "chorale" (je trouve ce qualificatif grotesque, mais c'est bien de ça qu'il s'agit, plein de monde qui interagit plus ou moins). Ce n'est pas pour me déplaire a priori (le docu, ça me saoûle), mais encore eût-il fallu faire ça avec un minimum de subtilité, et ne pas y sacrifier toute tentative de construction scénaristique. Ici, donc, les flics passent l'essentiel de leur temps à parler de cul grossièrement, hurlent en permanence, bref sont pareil dans leur vie privée qu'au boulot. Accessoirement, leurs histoires, pour ceux qui ont la malchance d'en avoir une, sont clichés et sans intérêt, le tout culminant dans une péripétie finale complètement risible.

Tout cela bouffe malheureusement pas mal de place et de temps sur ce qui est le coeur et le principal intérêt du film, l'observation de la brigade au travail, que ce soit dans les bureaux ou sur le terrain. Dans cette dernière catégorie, il faut reconnaitre à Maïwenn une force de frappe certaine, avec quelques séquences franchement réussies, comme la descente dans le camp de roumains, ou la très forte scène de la séparation du petit black de sa mère. On peut lui reprocher d'en faire trop (c'est de toute façon une constante de son cinéma, comme si elle se croyait obligée d'en rajouter trois tonnes à chaque scène de peur que ce ne soit creux), mais ça marche. On est alors d'autant plus déçu de constater que toutes ces bribes d'intrigues ne sont que ça, des moments captés sur le vif et jamais développés. Il n'y a pas l'ombre d'un jugement, d'un point de vue, ou même d'une analyse de tout ce qui est montré dans ce film. Un salaud pédophile aux relations haut placées se fait choper, mais il est protégé, il se prend un gnon d'un flic énervé lors de l'interrogatoire, on se pose mille questions ... on n'aura pas une réponse. Le fait, et c'est tout. Il n'était pas forcément nécessaire de plomber le film de scènes de tribunal pour donner un minimum de suite à ce qui passe face à la brigade. Là, le film fait très sérieusement foutoir.

Au fond, Maïwenn a encore réussi à m'énerver, parce que son idée de film est excellente, ses acteurs sont excellents, même la réalisation est bonne, et pourtant le film lui-même est trop souvent irritant, tout simplement car il n'est pas tenu. Bien sûr, il fait mal, mais avec un tel sujet c'était la moindre des choses. En en faisant moins mais mieux, il aurait pu être tellement plus qu'un simple coup de poing sans lendemain.

Roupoil, 28 novembre 2011.



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