Au cas où vous ne l'auriez pas remarqué, ce début
d'année 2009 sonne le grand retour des vampires au cinéma. Enfin, le dix
ou vingtième grand retour, car nos amis hématovores (ça, c'est du mot
technique qui impressionne, hein ?) ont toujours fait partie des monstres
préférés du septième art. Après une enième version hollywoodienne que j'ai
préféré laisser aux midinettes à qui elle était manifestement destinée (je
parle de Twilight), voici donc quelque chose de radicalement
différent : un film d'horreur d'auteur suédois, primé à Gerardmer. Ca me
rappelle vaguement Norway of life, que j'avais tenté et peu
apprécié il y a deux ans, mais avec une pointe de masochisme, je retente
l'expérience.
Dans une banlieue très froide et très blanche de Stockholm (il neige tout
le temps dans ce coin), Oskar vit l'existence assez peu réjouissante de
jeune ado timide et mal dans sa peau : parents séparés, brimades de la
part de ses camarades auxquelles il n'ose pas répliquer, et une curiosité
presque malsaine pour les affaires sordides qui parsèment les pages faits
divers des journaux locaux. Un jour débarquent dans l'appartement voisin
un vieux monsieur et une jeune fille de son âge. Elle s'appelle Eli, ne va
pas à l'école, et est un peu bizarre. Ils se sentent rapidement attirés
l'un par l'autre.
Bien sûr, vous l'aurez compris, la jeune fille est un vampire, ce qui
perturbe un peu l'histoire d'amour naissante entre nos deux protagonistes.
Le concept de renouveler un thème rebattu du cinéma fantastique en le
plaçant au coeur d'un autre thème classique, mais plutôt du cinéma
d'auteur (les émois des débuts de l'adolescence) était plutôt prometteur.
De fait, sur le papier, le mélange entre film de genre et film
contemplatif est séduisant, et le parti pris de réalisme poétique attire
la curiosité.
Mais (quoi, vous aviez deviné depuis plusieurs lignes qu'un gros mais
allait venir ?) le problème, c'est qu'en pratique, malgré ses belles
intentions, le film ne m'a convaincu d'aucun côté. Le côté fantastique est
franchement raté, en partie faute de moyens (les effets spéciaux sont très
bofs au vu des standards actuels, et la scène avec les chats par exemple
frise le comique, mais aussi faute de se décider à mettre en place un
scénario qui tienne un peu la route. Ok, on a compris, la crédibilité et
un point totalement mineur dans ce film, mais ce n'est même pas ça le
problème, c'est surtout que ça part un peu dans tous les sens, en étant
parfois simplement cliché (les brimades à l'école), parfois carrément
inintéressant (le groupe de personnages secondaires constitué par les
adultes du village), et la plupart du temps tout simplement ennuyeux.
Le côté poétique est un nettement mieux géré, mais pas transcendant pour
autant. Le réalisateur a la chance de pouvoir s'appuyer sur le magnétisme
naturel de son interprète (je parle de la gamine, le garçon étant
essentiellement inexistant) pour distiller un peu de charme au milieu de
tant de froideur. Mais quel dommage de s'être attardé sur des dialogues
très banals et d'avoir coupé à la hache dans toutes les ambiguïtés
sexuelles du bouquin (que je n'ai pas lu, mais je me suis renseigné
ensuite ; je vous conseille de le faire aussi, car le film est plus
qu'elliptique sur certains points). Il y avait de quoi faire un superbe
film à l'ambiance malsaine, là on a juste une bluette colorée de quelques
gouttes de sang. Dommage, car franchement, j'aurais bien aimé défendre
plus ce film, et y voir (comme beaucoup d'autres) un vrai film achevé
plutôt qu'essentiellement un gâchis de bonnes idées.
Roupoil, 20 février 2009.