Ah, il est bien loin le temps où le cinéma d'animation
se résumait à Disney et ses guimauves pour bambins ! Aujourd'hui les
films déboulent par dizaines chaque année, avec des techniques
d'animation et des sujets de plus en plus variés, pour le bonheur des
petits mais surtout des grands (d'ailleurs, je ne conseillerais pas
vraiment aux petits d'aller voir le film dont je fais la critique ici
!). Dernier en date, ce Mary et Max nous présente deux
personnages en pâte à modeler, et nous conte leur amitié assez peu
ordinaire.
En effet, Mary est (au début du film) une fillette de huit ans solitaire
et triste, qui s'ennuie dans sa banlieue australienne entre sa mère
alcoolique et son père féru de taxidermie. Un beau jour, elle écrit une
lettre à une adresse prise au hasard dans un bottin, dans le but d'avoir
enfin un ami. Ce sera donc Max Horowitz, juif obèse dans la quarantaine
vivant à New York et atteint d'une drôle de maladie mentale qui lui rend
ses semblables très peu compréhensibles. Lui aussi est désespérement
seul et bien content de se trouver une amie.
Pas besoin d'aller plus loin que ce pitch et un coup d'oeil à l'affiche
du film pour comprendre que ça va être sombre. Et encore, l'affiche est
beaucoup plus colorée que le film proprement dit, qui navigue en
permanence dans les tons grisés, ce qui ne l'empêche d'ailleurs pas
d'être une réussite esthétique indéniable. D'ailleurs, techniquement
parlant, difficile de faire un reproche, tant l'animation et la
réalisation sont fluides et maitrisées.
Finalement, c'est vraiment au niveau du fond que le film est à mon avis
très imparfait. Déjà, le scénario, pourtant très original et fourmillant
d'idées intéressantes, était bien difficile à mettre en images,
difficulté pas vraiment surmontée : une illustration de lettres sur fond
de voix off pendant une heure et demie, c'est trop statique, et ça finit
par lasser. On entend à peine les deux principaux protagonistes en
dehors de leurs longs monologues, et les seconds rôles sont
essentiellement inexistants. Pourtant, on ne peut pas dire qu'il ne se
passe rien tout au long de la vingtaine d'années que dure la relation à
distance entre Mary et Max. Oh non, bien au contraire, il leur en arrive
même des tonnes !
C'est d'ailleurs le sujet de ma seconde récrimination : le réalisateur a
réussi un curieux mélange entre le statisme du déroulement de l'histoire
et une accumulation franchement exagérée d'événements sur lesquels on
passe en coup de vent de façon un peu frustrante. Surtout, ce qui finit
par plomber le film, c'est sa désespérante noirceur. Faire un film pour
adultes avec une ambiance sombre ok, mais balancer à la gueule de ses
personnages tous les maux de la Terre, c'est trop. À un moment, on a
envie de dire à Elliot d'arrêter de charger une barque qui a coulé
depuis longtemps (le plongeon de Mary en fin de film m'a personnellement
laissé de côté). Ca n'empêche pas qu'on continue à regarder pour
repérer les quelques perles dans le détail, les choix d'animation
toujours intéressants, et même une dernière scène qui, si elle tombe
assez grossièrement dans la facilité (l'illustration musicale
Puccinienne, pour quoi faire quand on dispose déjà d'une BO plus
qu'acceptable ?), fait tout de même son petit effet.
Je parlais dans ma critique de Là-haut il y a quelques mois
d'un élément indispensable à la réussite d'un film d'animation (et
sûrement aussi d'un film tout court) : trouver le bon équilibre. Ici ce
n'est pas le cas. Il y a vraiment beaucoup de bons ingrédients
(suffisamment pour en faire tout de même une oeuvre qui se démarque du
lot et qui mérite un coup d'oeil et un encouragement) mais la pâte
finale est un peu indigeste. Dommage, mais une affaire à suivre tout de
même.
Roupoil, 12 octobre 2009.