Un petit week-end chez mes parents au milieu des vacances, c'est aussi
l'occasion de regarder quelques DVD sur mon portable. Qualité évidemment
incomparablement moins bonne qu'à la maison, mais ça suffit amplement à se
faire une opinion sur le film. Pour commencer, un petit Chabrol, auteur
qui fait son entrée parmi les réalisateurs passés à la moulinette de ma
critique acerbe.
Ce n'est peut-être pas son film le plus représentatif, lui qui est plus
habitué à la bourgeoisie de privince actuelle qu'à celle décrite par
Flaubert dans son livre. Vous ferai-je vraiment un petit rappel sur le
contenu scénaristique ? Bornons-nous à rappeler que Flaubert, quelques
dizaines d'années avant Giono et ses théories sur le divertissement,
disséquait déjà les effets pervers de l'ennui sur une jeune bourgeoise,
mariée à un mèdecin de provine, ennui dissolu (c'est le cas de le dire)
dans la passion et les dépenses. On s'en doute, la médaille aura son
revers.
Ce projet d'adaptation est, sur le papier, extrêmement séduisant. Un
producteur exigeant qui a donné les moyens nécessaires à une bonne
reconstitution, une distribution prestigieuse et à la caméra un homme qui
connait son métieret auquel le thème devrait convenir. On est donc
d'autant plus désolés d'avoir à reconnaitre que l'adaptation est un
terrible ratage. Ma note est certainement un peu sévère, le film étant
tout simplement sauvé par la puissance de l'intrigue de Flaubert, mais
dans un tel projet, on ne juge pas le fond, mais ce qui en a été fait, et
ce n'est ici guère réjouissant.
A quoi est du ce naufrage ? Difficile à dire, mais il semble simplement
que Chabrol n'ait pas réussi à s'intégrer dans le roman. Non seulement il
se contente la plupart du temps d'illustrer sans se mouiller (ce qui, au
fond, ne risque que de déboucher sur un film chiant), mais la volonté
apparente de ne pas trahir Flaubert le pousse à tous les mauvais choix.
Image clicheteuse au possible dans les scènes romantiques avec Rodolphe,
musique mal utilisée, et surtout une diction artificielle chez les acteurs
qui empêche en permanence de prendre part au drame. D'inintéressant, le
film devient franchement catastrophique quand Chabrol essaie de lui donner
vie (je le répète, mais les scènes avec Rodolphe font plus pitié qu'autre
chose).
Complètement coincés dans ces parti pris, la plupart des acteurs peinent à
faire exister leurs personnages. Un gâchis, car on sent pourtant le
casting soigné (Balmer et Huppert ont tout à fait le profil). Au milieu de
tout cela, une satisfaction tout de même, Jean Yanne, pas du genre à se
laisser enfermer, campe un Homais truculent, qui souligne malgré lui la
faiblesse des autres personnages par son aisance et son naturel. Il laisse
présager le très bon film qu'on aurait pu avoir en lieu et place de cette
triste pantomime.
Car, ne l'oublions tout de même pas, le fond était là : la reconstitution
est impeccable, la caméra précise, et le texte de Flaubert est le meilleur
des scénarios. Mais Chabrol n'a, définitivement, pas su quoi en faire (je
n'ai pas encore parlé des passages en voix-off ou en monologue,
complètement ratés). Si vous voulez un aperçu de son talent, n'allez pas
le chercher ici, cette rencontre prometteuse a accouché d'un fiasco.
Roupoil, 5 août 2006.