Allez hop, on enchaine, toujours avec les sorties
cannoises, et le dernier opus du sieur Loach. Bon, il faut bien
l'admettre, une comédie avec Eric Cantona dans un des rôles principaux ça
ne ressemble pas trop à ce qu'on voit d'habitude sur la Croisette, mais en
ce qui me concerne c'est plutôt un bonus, dans la mesure où le cinéma
social de Ken Loach ne m'a jamais attiré outre mesure. D'ailleurs, le seul
film que j'aie vu du bonhomme (Land and freedom) était plutôt
dans sa veine "politique historique" mais ne m'avait pas plu pour
autant...
Quoi qu'il en soit, le film reste bien ancré dans le social puisqu'il
s'agit avant tout de l'histoire d'un Eric, mais un autre, qui est postier
de son état, en plein doute existentiel face aux grandes difficultés qu'il
éprouve à élever seul deux adolescents turbulents et à s'occuper de sa
petite-fille tout en évitant soigneusement sa première femme à qui il ne
parle plus depuis une vingtaine d'années. Son seul espoir, c'est son
idole, Eric Cantona himself, qui a le bon goût de venir taper la discute
avec lui quand il a un peu abusé de l'herbe. Avec son aide, Eric est bien
décidé à remonter la pente.
Le concept est assez grotesque mais représente finalement une façon
originale de raconter une histoire somme toute assez banale, et qui ne
résiste pas à de nombreuses échappées dans le très prévisible et même dans
la facilité. Franchement, la réconciliation d'Eric avec sa femme est
beaucoup trop téléphonée, et la fin est d'une mièvrerie assez terrifiante.
Quand à la tentative de mettre un peu de piment dans tout ça via les
tentations d'un des jeunes de virer dans le banditisme, c'est assez
moyennement convaincant. Bref, niveau scénar, c'est globalement assez
bancal.
Mais qu'à cela ne tienne, Loach compense ces faiblesses par sa capacité à
nous mettre en pleine empathie avec son héros débordant d'humanité. Ca a
beau être couru d'avance et peu crédible, on a tellement envie que tout
aille mieux pour lui qu'on est contents à la fin. Quant à la touche Canto,
outre quelques aphorismes complètement absurdes, elle apporte un drôle de
décalage (sûrement moins marquant pour nous autres français) et fait
sourire de temps à autre.
Sans être hilarant, ni hyper émouvant, le film réussit finalement à nous
faire passer un moment tout à fait agréable. De là à l'avoir sélectionné
pour Cannes, il y a quand même un énorme pas qu'on aurait sûrement pas
franchi s'il n'y avait pas le nom de Ken Loach accolé au titre...
Roupoil, 13 juin 2009.