Pour un gars qui prétend ne pas aimer Hitchcock, je me
rends compte que je visionne ses films avec une régularité assez
admirable et, pire, que j'en dis rarement du mal. Celui-ci me rappelle des
souvenirs assez particuliers puisque la première fois (et dernière
jusqu'ici) que je l'avais vu, c'était au collège avec ma classe de
quatrième, et nous avions étudié quelques scènes "à suspense" du film en
cours de français (eh oui, ne me demandez pas pourquoi). En tout cas, à
l'époque, j'avais plutôt aimé, mais la fin sans explication m'avait
beaucoup énervé...
Melanie Daniels, une gentille greluche sophistiquée, croise un beaujour
chez un oiseleur un beau gosse un brin cynique. Elle décide d'aller lui
rendre visite dans son bled paumé en bord de mer, emportant avec elle un
couple d'inséparables (ce sont des oiseaux, bande d'ignares !) en cadeau
pour sa petite soeur (à lui, évidemment, pas à elle). Pensant ne passer
que quelques heures loin de San Francisco, elle va en fait rester tout le
week-end, un week-end dont elle risque d'ailleurs de se souvenir un
moment, vu les étranges événements qui vont s'y produire. Tout commence
par un vol plané de mouette...
Il faut bien le dire, même si près de cinquante ans ont passé depuis la
réalisation des Oiseaux et si le film a techniquement vieilli
(les effets visuels étaient sûrement saisissants pour l'époque, mais sont
juste bizarres aujourd'hui, même si les scènes d'attaque restent plutôt
efficaces), ce classique reste d'une saisissante modernité. Quelques
années avant que Romero ne lâche ses zombies, un bon moment avant
l'avènement du survival comme sous-genre très représenté du cinéma
d'horreur, Hitchcock avait déjà tout inventé, en prenant en guise de
monstres sanguinaires acharnés à détruire toute trace d'êtres humains dans
les parages les plus inoffensives des bestioles, de simples oiseaux.
La construction du film, qui ressemble étrangement à celle de bien des
classiques plus tardifs (lente montée en puissance des attaques, longs
moments d'attente avant les scènes violentes, enfermement progressif des
héros dans le faux abri que constitue leur maison), est absolument
remarquable. On peut juste déplorer quelques bavardages un peu trop
délayés de temps à autre (la scène au café avec la mémé notamment). Quant
à la réalisation d'Hitchcock lors des scènes de tension, elle est
évidemment au top, mais on en attendait pas moins de sa part.
S'il y a un endroit où le bât blesse plus manifestement, c'est sûrement du
côté des acteurs, aux réactions souvent curieuses et effacées. Bon, je ne
demande pas forcément que ça hurle dans tous les coins sous prétexte que
c'est un film d'horreur, mais Tippi Hedren est franchement fadasse. Par
contre, travail intéressant sur le son, les cris d'oiseaux couvrant
souvent tout le reste, ce qui donne une curieuse impression d'irréalité à
ce qu'on voit à l'écran. En fait, le film ne fait pas vraiment peur, ce
qui est un peu ballot, mais reste une très belle expérience de cinéma.
Quant à la fameuse fin, elle me semble aujourd'hui tout à fait bienvenue,
et là aussi, nombreux seront les survival ultérieurs à ne pas donner
d'explication à l'invasion de zombies ou autres horreurs sur les écrans.
Roupoil, 28 juin 2009