Des fois, dans la vie, il faut savoir prendre sur soi,
et se décider à regarder un de ces films (qui se comptent par dizaine,
mine de rien) qui sont considérés comme de vieux classiques vénérables,
mais qui la plupart du temps laissent perplexe quand on se décide à jeter
un oeil dessus. En l'occurrence, j'ai été aidé par un coloc et une copine
de coloc dans le choix dudit classique, et le bon gag du jour, c'est que
je suis assez vite rendu compte que je l'avais déjà vu (mais alors quand ?
c'est une autre histoire).
Derrière son titre français à rallonge finalement assez peu évocateur, se
cache une histoire somme toute typiquement japonaise et assez classique,
mais qui se veut dans l'ensemble réaliste (je dis dans l'ensemble, car il
y a quand même une partie clairement fantastique). Ca passe dans un
univers médiéval, en pleine guerre. Tout le film tourne en fait autour des
conséquences de cette guerre sur deux artisans, à la base pauvres mais
travailleurs. L'un rêve de fortune, l'autre de gloire, tous les deux
auront l'illusion de conquérir ce rêve, mais le prix à payer sera bien
cher au moment du bilan.
Tout cela est au fond bien moral, mais on ne s'attend pas tellement à
autre chose du l'époque de réalisation du film (oui, je sais, à la même
époque, Mankiewicz réalise un All about Eve loin d'être moral,
mais bon voilà). Et puis pourquoi pas, dans la mesure où l'intrigue est
menée de main de maitre et l'étude suffisamment fine pour être
passionnante de bout en bout. Les personnages notamment, bien qu'assez
sommairement caractérisés, sont attachants par leur humanité toujours mise
en avant.
En plus, visuellement, c'est assez sympa. Bien sûr, le côté exotique des
décors et des vêtements compte pour une part non négligeable dans la
fascination que peur avoir un spectateur occidental pour ce genre de film,
mais on sent bien que Mizoguchi n'est pas le premier venu. Travail
intéressant au niveau de la musique également, inhabituelle également pour
mes petites oreilles. Niveau réalisation aussi, Mizoguchi a une certaine
marque de fabrique, avec notamment des fondus au noir extrêmement fréquent
pour séparer une succession de saynètes le plus souvent très courtes. Là,
il faut bien dire que ça pose quand même un petit problème, c'est que le
rythme d'ensemble se retrouve assez haché et surtout très lent pour nos
standards de l'an 2000. Pas forcément un mal en soi, mais on a quand même
la fâcheuse impression d'avoir passé trois heures devant l'écrant quand
c'est seulement la moitié qui s'est écoulée.
Du coup, je mets une note qu'on pourra juger un brin sévère avec ce
classique qui de fait mérite amplement une vision attentive. Simplement,
ne vous attendez pas à ressortir de la séance en bondissant au plafond,
c'est pas trop le style de film qui marque très violemment, plutôt celui
qui fait une bonne impression durable.
Roupoil, 13 février 2007