Le temps passe, mais pour faire un jeu de mots assez
mauvais sur le titre du film, il en reste pas mal avant que ma vision de
la sélection du festival de Cannes 2009 soit achevée. Cinquième oeuvre
au programme donc, le nouveau film du Palestinien Elia Suleiman,
remarqué il y a déjà quelques années de celà avec son oeuvre précédente,
Intervention divine. Etant de longue date assez peu friand de
cinéma politisant, je n'avais pas vraiment été tenter d'aller voir ce
dernier. Ce sera donc pour moi l'occasion de découvrir ce cinéma malgré
tout censé être comique. Si on peut au moins avoir droit à une bonne
rigolade, ce sera toujours ça de pris.
Le film débute sur une assez mauvaise scène montrant (enfin, faàon de
parler, on l'entre-aperçoit à peine) Suleiman dans un taxi le ramenant
dans sa ville natale de Nazareth sous la tempête et les râleries d'un
chauffeur manifestement pas ravi de s'enfoncer dans une zone farcie
d'arabes. Puis, gros flash-back, on remonte en 1948, toujours à
Nazareth, au moment où l'armée israëlienne s'appropie les territoires
palestiniens. Face à cette invasion, la population, ici représentée par
la propre famille de Suleiman, et notamment ses parents, se scinde en
deux camps : ceux qui s'accomodent tant bien que mal de cette nouvelle
situation et fond le dos rond, et ceux qui continuent à se battre
clandestinement.
Première remarque, il vaut mieux ne pas être trop à la ramasse au niveau
de sa connaissance de la situation au proche-Orient depuis 48 si on veut
bien comprendre ce qui se passe, car Suleiman n'est pas du genre à faire
un film didactique. Au contraire, sa tendance marquée au décalage et à
l'absurde embrouille encore un peu plus les choses. J'ai sûrement
moi-même raté un certain nombre d'allusions et autres gags, mais on
finit tout de même par rentrer dans l'histoire, qui n'en est d'ailleurs
pas vraiment une... C'est plutôt une succession de saynètes la plupart
du temps burlesques, plus rarement dramatiques, qui tentent de dépeindre
un peu plus d'un demi-siècle d'occupation israëlienne (si le mot
occupation ne vous plait pas, le point de vue de Suleiman dans le film,
pas vraiment tendre envers les israëliens, risque de vous faire
également frémir).
Le film dispose d'un certain nombre d'atouts indéniables : bien réalisé,
original et intéressant, et présentant une galerie de personnages
amusants, il y avait vraiment de quoi a priori faire un film hilarant
sur un sujet sérieux. Le problème principal, en fait, c'est que
justement, hilarant, le film ne l'est pas. À peine quelques sourires
esquissés devant les clowneries du voisin alcoolique ou l'attitude
impayable de Suleiman (qui joue un rôle complètement muet, parti pris
pour le moins osé et qui a bien du mal à tenir la route à long terme),
c'est peu comparé au nombre de scènes qui laissent simplement perplexe.
Curieusement, le film réussit beaucoup mieux du côté de l'émotion, avec
notamment quelques très belles scènes faisant intervenir la mère du
réalisateur vers la fin du film.
Inégal donc, peut-être pas à la hauteur du précédent film de Suleiman
(du moins à en croire la majorité de la critique), ce Temps qu'il
reste aura au moins réussi à me convaincre que ce réalisateur était
à sortir de la catégorie "sûrement très chiant" où je l'avais hâtivement
catalogué. Ce n'est peut-être pas mon genre de cinéma préféré, mais il y
a tout de même là-dedans quelque chose qui se démarque de l'ordinaire.
Roupoil, 20 août 2009.