Dans la famille découverte tardive, aujourd'hui, je
demande Luis Buñuel. Malgré quelques occasions il y a plusieurs années de
cela (assez curieusement j'ai souvenir d'avoir eu plusieurs possibilités
de voir Los Olvidados, mais pas d'autre film de Buñuel), j'étais
arrivé jusque là à passer entre les mailles concernant le plus célèbre des
cinéastes surréalistes. Mais ce n'est pas avec ses collaborations de début
de carrière avec Dali que je débute, mais avec un opus assez mineur de sa
dernière période française. Remercions au passage Mickey pour nous avoir
prêté le DVD, même si on n'a pas aimé le film !
Le titre est assez révélateur du contenu du film : le journal d'une femme
de chambre, Célestine, qui débarque de Paris pour aller servir dans un
manoir normand, auprès d'une famille de riches tarés. La femme est du
genre autoritaire coincée, le mari mollasson frustré, le père de la
patronne maniaque fétichiste, et au niveau des serviteurs c'est pas
beaucoup mieux, puisque c'est dominé par Jo le facho. Sans compter le
voisin militaire qui balance ses ordures par-dessus la haie et se tape sa
bonne. Bref, que du beau monde. Au point qu'il ne va tarder à y avoir un
crime atroce de commis dans le bois.
On le sait, Buñuel, en plus d'être un surréaliste (ce qui ne se voit pas
du tout sur ce film, réalisé avec un classicisme quasi transparent, même
si le noir et blanc est joli et les mouvements de caméra élégants dans
l'ensemble), était politiquement engagé. Son but ici est manifeste : taper
sur les bourgeois et autres extrêmistes (ça se passe dans les années 30,
donc à une période intéressante de ce point de vue). But tout à fait
louable ma foi, mais encore faudrait-il y mettre, non pas de la
conviction, car Buñuel n'en manquait certainement pas, mais plutôt de la
subtilité. Là, les personnages sont assez vite cernés, pour la plupart
détestables et assez caricaturaux, mais, à part Piccoli qui réussit à être
amusant tout du long, pas du tout approfondis ni intéressants. Pour que la
caricature porte, il faut de l'ironie, du mordant, des répliques qui font
mouche, quelque chose, quoi ! Ici, une seule phrase de dialogue m'a fait
marrer, c'est très très peu pour un film d'une heure et demie.
Sans compter qu'il ne se passe finalement pas grand chose dans tout ça.
Buñuel essaie bien de doubler son étude de caractère d'une enquête
policière, sauf qu'en fait il n'y a pas d'enquête, que c'est mal amené, et
de toute façon trop "facile" pour passionner. Bref, sans réellement
s'ennuyer, on attend un peu désespérement que le film décolle, ce qui
n'arrive en fait jamais.
On en vient à se demander quel est le but de cette assez belle mécanique
qui tourne à vide. Ca me fait un petit peu penser aux polars provinciaux
de Chabrol (pas que j'en ai vu des masses d'ailleurs !) dont je ne suis
déjà pas très fan, mais avec l'intérêt du polar en moins. Que reste-t-il ?
Un film soigné, je l'ai déjà dit, mais qu'on oubliera vraiment très très
vite. Espérons que ce soit effectivement un Buñuel très mineur...
Roupoil, 22 février 2009