Ca faisait longtemps que je ne vous avais pas proposé
dans mes critiques un petit Hitchcock. Mais bon, vous savez bien que je ne
fais pas partie des inconditionnels du maitre. Ceci dit, à force de vous
répéter ça et de continuer à acheter des DVD de ses films régulièrement,
vous allez finir par croire que je me fous de votre gueule. Ou alors je me
déciderai à revoir Les Oiseaux et surtout Vertigo
(auquel je n'avais pas du tout accroché) pour vérifier qu'Alfred a fait de
mauvais films de temps à autre.
Mais pour aujourd'hui, contentons-nous de cette histoire de crime presque
parfait. Tony Wendice veut tuer sa femme. Il a quelques raisons pour ça :
elle le trompe avec un auteur de polars, et surtout elle est beaucoup plus
riche que lui, il gagnerait beaucoup à hériter de sa fortune. Pour mettre
son projet à exécution, il échaffaude un plan diabolique, reposant
notamment sur la complicité d'un ancien camarade d'Ecole. Tout est réglé à
la minute près. Justement, quand la montre de Wendice tombe en panne le
soir fatal, rien ne se passe comme prévu, et le meurtrier meurt. Qu'à cela
ne tienne, Wendice a plus d'un tour dans son sac. A moins que l'inspecteur
Hubbard ne lui mette des bâtons dans les roues.
Tout ça ressemble à une bonne vieille enquête digne d'un bouquin d'Agatha
Christie (ou pas, en fait, car il y manque l'esprit retors de la dame), et
de fait, est en fait une adaptation d'une pièce de théâtre à succès de
l'époque. Pour tout vous dire, ça se sent vaguement : quasiment tout le
film est tourné dans une unique pièce, et le tout est extrêment dialogué.
On a même l'impression qu'Hitchcock a pris un malin plaisir à garder le
plus possible ce côté théatral, ce qui n'aurait rien d'étonnant
connaissant le bonhomme. N'a-t-il pas, la même année, tourné un
Fenêtre sur cour où il s'est complètement imposé cette règle du
huis clos ? Mais ici, il n'est pas question d'exercice de style, il ne
ressent tout simplement pas le besoin d'aérer son histoire.
Il a à la fois tort et raison à mon sens. Raison car de fait le film tient
très bien la route comme cela. Les dialogues superbes de précision et les
personnages extrêmement charismatiques retiennent l'attention du
spectateur sans problème, et l'enquêt, menée de main de maitre par un
impayable inspecteur très british, quoiqu'au fond assez peu originale,
ménage suffisamment de rebondissements pour ne pas lasser. Une très belle
mécanique de précision, en somme. Mais il a aussi tort dans le sens où en
laissant l'intrigue se dérouler presque sans y toucher, il semble assumer
le fait de tourner un divertissement agréable et sans prétention. Une
seule scène, la dernière, où le vilain se trahit, fait monter une tension
réellement palpable, et laisse quelques regrets sur tout ce qui l'a
précédée.
J'aurais presque envie de dire, comme il est de mise quand on parle d'un
film presque banal d'un grand cinéaste, qu'il s'agit d'un Hitchcock
mineur. Peut-être, mais n'empêche qu'il m'a plus plu que certains grands
classique du maitre, y compris Fenêtre sur cour d'ailleurs. En
tout cas, un classique tout à fait recommendable.
Roupoil, 28 juillet 2006.