La vie est un miracle,

film d'Emir Kusturica (2004)



Avis général : 9/10
:-) La fantaisie, l'émotion, la musique, les beaux yeux de l'actrice principale, et tout le reste
:-( Faut aimer le style...

Bon, je ne vais pas y aller par quatre chemins, ce film est certainement la meilleure surprise cinématographique que j'ai eue depuis un bon moment (disons de l'ordre de deux à trois ans). C'est le genre de film où on rentre dans la salle obscure sans trop savoir ce qu'on va y trouver, et où on ressort avec l'envie folle de tomber amoureux de la terre entière (ce qui n'est accessoirement pas très difficile quand il fait beau et que les jeunes filles court vêtues affluent dans les rues comme c'est le cas en ce moment). Dire que j'ai failli ne jamais y entrer, dans la salle en question : la fête du cinéma, une programmation pas franchement passionante, un trou de trois heures à boucher pour profiter au maximum des tarifs réduits, et me voilà donc, pour 1 euro cinquante sans les pop-corns, devant le dernier film de Kusturica, dont j'avoue n'avoir vu aucun des opus précédents, de peur d'un arrière-plan politique trop présents (je n'aime pas les films politiques).

Au moins, avec l'ami Emir, on est vite dans l'ambiance. Il n'y a pas cinq minutes de passées qu'on a déjà croisé quelques-uns de ses curieux personnages, joyeux lurons invraisemblables et attachants, et que l'on est bercé par une musique que, à défaut de connaissances suffisantes sur le sujet, je qualifierai de particulèrement adaptée à l'tmosphère générale du film. Tout se passe en 1992, dans un coin reculé de Bosnie où il ne se passe pas grand chose, et dont la particularité majeure est d'être traversé par une voie de chemin de fer, sur laquelle ne passe pas l'ombre d'un train de voyageurs mais qui sera pourtant le lieu de bien des événements. Pas de quoi fouetter un chat donc mais un bestiaire particulièrement fourni rameuté par Kusturica pour égayer son histoire : des ours tentés par le confort d'un chalet montagnard, une vieille mule suicidaire, un chat gourmand et chapardeur et bien d'autres encore peuplent le film et lui apportent un supplément de fantaisie. Non pas que les humains se comportent beaucoup plus rationnellement : d'un match de foot aux relents surréalistes à un éteignage de télé à coup de fusil, nos amis yougoslaves ont le sang chaud, mais aussi le rire facile.

Le personnage principal du film, Luka, est chargé de surveiller la voie ; il s'est retiré la campagne avec sa femme, chanteuse d'opéra allergique à la poussière et un brin fofolle, et son fils Milos, star du foot en herbe. Les premières scènes sont surtout l'occasion de se plobger dans la folie douce qui attein à divers degrés tous les habitant du village, prompts à boire, manger et faire la fête, s'engueuler et tout casser sans bonne raison... Quoique les raisons ne tarderont pas à venir. Car si les petites histoires au sein du village n'ont pour l'instant rien de tragique, dehors c'est la guerre qui s'annonce. Elle semble bien lointaine à notre Luka, et pourtant elle va s'immiscer dans sa vie, via ce chemin de fer qui devient rapidement un enjeu stratégique du fait de son emplacement proche de la frontière serbe. On ne la verra pas beaucoup pour autant, ladite guerre. A quelques exceptions près, elle ne consctituera qu'une toîle de fond, avec des enjeux qui dépassent largement la compréhension de nos pauvres campagnards ; elle se contentera de passer, sur ces rails, et de prendre et déposer les personnages clés d'une histoire simple, celle d'un homme qui se fait prendre son fils par l'armée et sa femme par un chef d'orchestre hongrois, qui récupère en échange une fort charmante prisonnière (en fait, charmante n'est pas vraiment le mot, rrrrrrraaaaaaaaaaaaahhhhhh looovely serait peut-être plus adapté ; d'ailleurs, son visage me rappelle beaucoup celui d'une certaine biiiiiiiiip, hum, veuillez m'excuser, je crois que je m'égare, fermons donc cette parenthèse le plus vite possible) croisée auparavant sur un chariot d'hôpital (rien n'est impossible chez Kusturica), et qui va rapidement devenir beaucoup plus qu'une monnaie d'échange pour récupérer son fils. On a d'ailleurs l'impression que Kusturica se désintéresse complètement de la guerre l'espace de quelques scènes, et que l'éclat des bombes faisant trembler les murs de la maison ne sont qu'un prétexte à leur rapprochement.

Peut-être est-ce d'ailleurs là le message du film, démontrer l'absurdité de la guerre (scène magistrale d'échange de prisonniers à la fin du film) et sa dérisoire inutilité face à la grandeur des sentiments humains. Et je ne dirai jamais assez la beauté des scènes oniriques et "tire-larmes" de ce film, d'autant plus émouvantes qu'elles tranchent avec l'ambiance délirante savamment entretenue le reste du temps. Peut-être les personnadges de Kusturica sont-ils justement d'autant plus humains qu'ils contiennent une bonne part de folie. En tout cas, un film simple comme la vie, comme l'amour, et bon comme une marmite bosniaque : un peu de tout, et moins ça ressemble à quelque chose de connu, mieux c'est !

Roupoil, 29 juin 2004.



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