Ca faisait un moment que je n'avais pas dit du bien d'un
film de ce bon vieux Sam Peckinpah. Il manqueit tout de même dans mon
exploration de sa filmographie son film le plus célèbre, et un de ces
westerns "classiques" qui étaient sa spécialité. L'actualité ciné étant
plus que morne en ce moment, l'occasion est bonne pour se retourner vers
les grands anciens. Alors, La Horde sauvage, réputé pour sa
violence très crue, a-t-il bien vieilli ?
La horde en question, c'est une bande de malrats menés par un Pike
intraitable mais vieillissant. Il le dit lui-même, il ne cherche qu'à
faire un dernier gros coup pour pouvoir se retirer. Mais ce ne sera pas
l'attaque de banque qui ouvre le film (et se finit accessoirement en bain
de sang) et qui n'était qu'un leurre destiné à l'attirer dans les filets
de son "ami" Deke. Pike et ses hommes s'enfuient vers le Mexique, où c'est
bien le bordel. Peut-être y trouveront-ils l'occasion de se refaire.
Pour ce qui est du veillissement du film, on est rassurés en dix minutes.
Même si bien sûr la violence parait relativement anodine (et le sang bien
rouge) à nos yeux aujourd'hui, la maitrise affichée par Peckinpah est
impressionnante. La montée de la tension et la chorégraphie de la
fusillade (très caractéristique de son style, avec montage haché mais pas
aussi pénible que dans Les Chiens de paille et utilisation
fréquente du ralenti) sont superbes de précision. Les films d'action
actuels et leurs cascades pyrotechniques où on ne comprend rien à ce qui
se passe feraient bien d'en prendre de la graine.
Ensuite, il est temps de poser un peu l'histoire. Sans surprise quand on
connait un peu le père Sam, les personnages sont tous très ambigus, les
méchants ayant droit au traitement le plus amical de la part du
réalisateur, quand les "gentils" sont tous des pourris. Bon, admettons que
Mapache soit un personnage résolument pas cool, mais pour le reste, le
manichéisme est évité, ça fait toujours plaisir. Ceci dit, Peckinpah tombe
presque dans l'excès dans la mesure où, une fois le point de vue accepté,
le tout est assez prévisible. Sans compter que, pendant tout le
développement de l'intrigue, il fait appel assez fréquemment à de bonne
grosses ficelles du genre, notamment tout ce qui touche au personnage
d'Angel, certes moteur de l'histoire, mais pour le coup pas assez nuancé.
Bon, et puis il y a un poil de confusion concernant ce qui se passe
vraiment au Mexique aussi.
Mais je pinaille un peu, car tout le coeur du film, pour classique qu'il
soit, se laisse suivre avec plaisir et intérêt (très beaux paysages), et
nous réserve un morceau de réalisation d'anthologie avec une attaque de
train absolument jouissive. Et puis, et puis, bien sûr, il y a le final.
Je ne voudrais pas en dire trop pour ne pas gâcher le plaisir du futur
spectateur, mais on a là encore droit à une scène grandiose (ah, le
parcours de la ville fusils à la main, un sacré cliché, mais l'a t-on
mieux illustré qu'ici ?) et une conclusion d'une noirceur frappante. Car
finalement, quel est le fond du film de Peckinpah ? La recherche par des
individus pas si différents les uns des autres d'une place au soleil dans
un monde imprévisible et violent. Un thème qui a abondamment nourri le
cinéma dans des genres très éloignés du western. Un thème universel pour
un classique qui a peut-être poignardé dans le dos le genre du western
traditionnel, mais qui, contrairement à la plupart de ces derniers,
restera encore un moment un incontournable.
Roupoil, 16 septembre 2008.