Deux films français en moins de deux semaines, pas de doute,
le Roupoil est devenu fou. Bon, celui-ci, c'est un peu le film dont tout le
monde parle et que le pékin moyen ira donc voir sans même trop savoir
pourquoi. Ce n'est pourtant que la dexième réalisation de la demoiselle
Donzelli, dont le premier film n'avait pas vraiment créé de mouvements de
foule spectaculaires. Mais là, le sujet en est déjà assez spécial pour
attirer le chaland.
Donzelli et son compère Elkaïm donc, ex-compagnons dans la vie mais faisant
toujours route ensemble professionnellement parlant, ont eu ensemble il y a
quelques années un fils qui a survécu à un grave cancer. Dans le film, Roméo
et Juliette ont un film qui a un grave cancer. Ce couple, c'est eux et ce
n'est pas eux. Adam, le garçon du film, c'est leur fils Gabriel et ce n'est
pas lui. Bref, il s'agit de faire de la fiction à partir du réel, mettre en
scène sa propre histoire (je refuse d'utiliser ici le mot catharsis qu'on
trouve dans à peu près toutes les critiques de ce film, à croire que lesdites
critiques sont bonnes simplement parce que leurs auteurs étaient contents
d'avoir réussi à caser ce mot).
On pourrait donc, assez logiquement, s'attendre à un mélo réaliste et
larmoyant. En fait, pas du tout. Nos deux zouaves déréalisent à peu près
tout ce qu'ils peuvent (à commencer par un choix de prénoms discutable...),
et ils ne veulent surtout pas centrer le film sur les souffrances du gamin,
ni même vraiment sur celle du couple. Cette histoire, c'est vraiment avant
tout celle d'un couple, qui se trouve avoir un gamin malade (je n'irais pas
jusqu'à dire que c'est accessoire parce que ça structure évidement beaucoup
le récit, mais ce n'est malgré tout pas primordial). On commence donc avec
meur rencontre, les premiers mois du bébé, pas mal de choses avant l'annonce
de la fameuse maladie. Ces premières scènes font forcément un petit effet
sur le jeune papa spectateur, mais laissent déjà apparaitre les horripilants
défauts du style de réalisation choisi. En fait, c'est bien simple, on a
l'impression qu'il est absolument interdit chez Donzelli de faire une scène
classique, genre juste des personnes qui discutent. Il faut absolument qu'il
y ait des trucs originaux partout, de la musique variée, des dialogues
décalés, bref faut que ça en jette.
Je dois l'avouer, moi ça ne m'impressionne pas vraiment, au contraire ça me
saoule. En fait, c'est bien la première fois que je vais utiliser cet adjectif
pour caractériser un film, mais tout ça est très bobo. Faussement in (on ne
peut pas tenir deux minutes à l'écran sans fumer une clope), ça se veut chic
mais c'est juste toc, et ça frise parfois l'étalage vulgaire (notamment
niveau musique, où on navigue de Vivaldi à la techno). On a donc droit à des
enfilades de morceaux de scène censées illustrer la vie du couple, mais dont
la moitié ne sert au fond à rien (un certain nombre de personnages secondaires
apparaissent pour une scène, en gros sans qu'on ne sache rien d'eux), et finit
par franchement agacer.
Et c'est fichtrement dommage, car le film a malgré tout de bons côtés. S'ils
n'étaient pas aussi tête-à-claque, nos héros seraient plutôt sympas. Et
surtout, au milieu de beaucoupde ratés, Donzelli réussi quelques scènes
superbes, notamment l'improbable miracle de l'annonce de la tumeur du bébé
par coups de fil successifs, qui cumule pourtant à peu près tous les artifices
possibles et imaginables (notamment du Vivaldi vrombissant en fond sonore).
Allez savoir pourquoi, cette séquence touche droit au but, et justifierait
presque à elle seule d'aller voir le film. Si ça ne vous dérange pas de voir,
le reste du temps, des amateurs faire semblant de faire un grand film, vous
pouvez tenter le coup. Mais ne vous laissez abuser par l'ahurissant tapage
fait autour du film, ça n'a vraiment rien d'un chef-d'oeuvre.
Roupoil, 19 septembre 2011.