Ca y est, les vacances sont arrivées, et avec elles
l'occasion de rattraper mon retard au niveau des sorties ciné mais aussi
de me refaire quelques vieilleries à la maison. Pour ce coup-ci ce n'est
pas moi qui ai choisi mais Denis, et c'est un peu fatigués que nous nous
affalons dans le canapé, y a pas intérêt à ce que ce soit endormant. En
tout cas, ma dernière expérience mankiewiczienne était un Eve qui
m'avait plutôt convaincu il y a quelques années. Alors comme on dit, y a
pas de raison...
Le richissime Kirk Edwards, qui a décidé de se lancer dans la production
de films, est en voyage en Europe à la recherche de la future star
hollywoodienne. Il pense l'avoir dénichée à Madrid en la personne de la
danseuse Maria Vargas, mais celle-ci a son caractère et rechigne quelque
peu à le suivre. Heureusement, le vieux metteur en scène Harry Dawes
finira par la convaincre. Trouvera-t-elle vraiment le bonheur dans cet
exil ? Le film nous a déjà donné la réponse...
En effet, c'est à un long et assez lent requiem que nous invite le film,
puisque le destin tragique de la diva est évoqué après sa mort en voix off
par trois des hommes qui auront accompagné ses derniers mois, Dawes en
tête. Cet hommage posthume, parcouru d'assez lourdes références au conte
de Cendrillon, respire la mélancolie du début à la fin. Voila plutôt de
quoi attirer le Roupoil, mais si la tristesse est bien de mise, il manque
un peu d'un ingrédient essentiel pour une telle histoire : la passion.
En fait, à la fin de la projection, ma réaction a été "Ok, c'est pas mal,
mais un peu précieux". Mankiewicz a un peu tendance a pousser trop loin
son sens de l'esthétique (le film est indiscutablement très élégant, avec
ses mouvements de caméra d'une fluidité et d'une précision remarquables),
jusqu'à se laisser franchement regarder filmer. Les champ-contrechamps
finissent presque par agacer, et les dialogues très écrits (sans parler
bien sûr de l'omniprésente voix off) laissent bien peu de place aux
acteurs pour s'exprimer réellement. Et pourtant, avec un Bogart sous la
main, ce n'est pas le potentiel qui manque.
On me rétorquera que c'est comme ça qu'on voyait le cinéma dans les années
50, mais dans mon souvenir Eve be tombait pas autant dans ce
travers. Enfin, ça reste un film tout à fait honnête, mais le côté cynique
et désabusé aurait certainement pu être beaucoup plus marquant s'il
n'était pas nimbé dans une mise en scène apprétée...
Roupoil, 27 décembre 2007.