Parmi les grands films épiques des années 80, il me
restait au moins celui-là à voir, que je n'avais jamais eu l'occasion de
choper à la télé. Pas grave, c'est parti pour une petit séance de DVD, en
deux fois (chose que je fais assez rarement, mais bon, ça vaut mieux que
de s'endormir devant le film :-) ), ce qui fait tout de même des moitiés
d'une heure et demie...
Il faut dire que le film se propose de retracer les débuts de la conquête
spatiale (vus du côté américain) en détail, et même un peu plus puisque
tout le début du film est consacré aux exploits de Chuck Yeager et de ses
potes aux commandes de leurs avions de chasse dans leur base paumée au fin
fond de la Californie. Mais c'est tout de même la Floride et Cap Canaveral
qui verront se dérouler la majeure partie du film.
C'est à un film du genre fresque que nous convie Kaufman, il convient donc
d'avoir du temps à perdre côté spectateur, et une histoire solide à
raconter côté réalisateur. De ce point de vue là, pas de problème, la
conquête spatiale est un épisode fascinant de l'histoire récente, et le
dosage entre scènes purement descriptives d'entraînement ou dans l'espace
et scènes plus fictionnelles faisant intervenir les astronautes est
bon. Surtout, la réalisation s'attarde suffisament sur les personnages
pour qu'on s'attache à eux (et la brochette d'acteurs impeccables n'y est
pas pour rien non plus). Autre bon point, les quelques doses d'humour
insufflées de temps à autre dans le récit. En particulier les réunions
ministérielles qui ne ressemblent à rien sont très sympa. Bref, Kaufman
semble avoir fait tout son possible pour insuffler une âme à son film. Pas
évident cependant qu'il y soit totalement parvenu, faute peut-être à un
trop grand respect pour l'histoire qu'il filme. Nos héros ont beau être
humains et déconner de temps à autre, ils n'en sont pas moins des héros,
et ça se sent. Infaillibles, quasi-immortels (bon, certes, on me dira que
c'est historique, mais tout de même, globalement, le film passe très vite
sur les échecs pour ne retenir que les grands moments) et affreusement
sûrs d'eux-mêmes, on n'évite pas totalement l'écueil de l'hagiographie.
Pas évitée non plus, la relative platitude de l'illustration. Bien sûr,
l'histoire se suffit à elle-même et il est tentant de se mettre un peu en
retrait pour la laisser s'exprimer elle-même. Mais l'accumulation de
fanfares militaires et belles images de l'espace, à défaut de lasser, ne
fait pas non plus réllement vibrer le spectateur (sans vouloir faire mon
obsédé, une fois de plus, une musique plus inspirée aurait pu faire la
différence). C'est d'autant plus dommage que le film est techniquement
très maîtrisé. Images impeccables, aucun doute, on s'y croit, mais en tant
que spectateur seulement, c'est un peu dommage.
Finalement, ce film fait partie de cette catégorie de grands et longs
films qu'il faut avoir vu une fois dans sa vie, mais pas forcément dix...
On passe certes un très bon moment à le regarder, et il n'y a pas grand
chose à lui reprocher, mais il lui manque tout simplement une vraie
personnalité qui différencie un bon film d'une oeuvre d'art.
Roupoil, 26 février 2005.