L'echange,

film de Clint Eastwood (2008)



Avis général : 7/10
:-) C'est impeccable à tous points de vue : scénario, acteurs, réalisation, rythme, décors...
:-( Ben ... pas grand chose du coup. Mais c'est un peu trop léché pour marquer vraiment durablement.

Bientôt 80 ans mais encore toutes ses dents, Clint Eastwood est devenu, depuis son mémorable adieu au western avec Impitoyable, un réalisateur non seulement respecté mais attendu. Quelques mois après sa sélection à Cannes, rien de très surprenant donc à ce que son dernier opus soit bien accueilli à sa sortie en salles. En ce qui me concerne, j'avais pourtant un petit peur : un sujet qui ne m'attirait pas plus que ça, une durée assez nettement au-dessus de la norme, et un mauvais souvenir de ma dernière expérience Eastwoodienne, même si c'est plus le scénario qu'autre chose qui m'avait déplu dans Lettres d'Iwo Jima. Ma copine n'était pas extrêmement motivée au départ non plus, et puis finalement on a réussir à se convaincre d'aller le voir tous les deux. On n'a pas été déçus.

Cette drôle d'histoire d'échange, c'est celle de Christine Collins, une mère seule dans l'Amérique des années 20, dont le fils unique disparait un beau jour (enfin, beau, façon de parler, du coup). Elle fait dans un premier temps confiance à la police locale pour le retrouver mais, quand on lui annonce que le garçon est de retour, elle constate avec effroi qu'il ne s'agit pas de lui. Malgré les évidences, les autorités refusent de reconnaitre leur erreur, et Christine entame un long et difficile combat contre l'absurdité ambiante, soutenue par un pasteur qui ne mâche pas son mépris de l'administration du Los Angeles de l'époque.

Mine de rien, cette base de scénario assez simple est en fait un point d'accroche idéal pour explorer beaucoup d'aspects de la société américaine de l'époque, y compris les plus extrêmes dans leur violence (serial killers et asiles psychiatriques notamment). Le personnage de Christine Collins n'est finalement pas vraiment le moteur de l'action, mais plutôt un point central autour duquel gravitent tout un panel de personnages un poil archétypiques mais qui font de bons héros et méchants de cinoche, bien incarnés par un casting solide (je suis pas fan de Jolie en général, mais elle est plutôt pas mal en mère un brin dépassée par les évènements).

Mais le l'énorme point fort du film, c'est son extraordinaire fluidité. Près de deux heures et demie de long, et pas une scène qu'on aurait envie d'abréger ou de supprimer, pas un enchainement brutal ou incohérent, pas un cadrage ou un mouvement de caméra douteux, pas un détail de reconstitution qui ne soit pas à sa place, c'est tout simplement impeccable de bout en bout, et c'est à la fois tellement rare et en apparence tellement simple qu'on en vient à être surpris que ce film soit, uniquement niveau mise en scène, tellement au-dessus du niveau moyen des sorties actuelles alors même qu'il se complait au fond dans un classicisme que certains ne manqueront pas de trouver un brin poussiéreux. Comme quoi c'est encore dans les vieux pots qu'on fait les meilleures soupes.

Pour être tout à fait honnête, je dois quand même admettre que je n'aurais pas été contre un peu plus de nervosité voire de brutalité dans les moments les plus intenses, le film étant presque trop lisse pour marquer autant que la plupart de ceux que je classe dans la catégorie chef-d'oeuvre. C'est d'ailleurs ce qui explique ma note un poil sévère pour une oeuvre qui est tout de même d'une grande solidité, et indiscutablement l'un des films à voir actuellement au cinéma.

Roupoil, 2 décembre 2008.



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