Et hop, pour enchaîner après une déception, un petit
film bien glauque.Mais au moins, j'étais prévenu de ce que j'allais voir
(contrairement à certains spectateurs qui se sont contatés de noter la
belle unanimité de la critique sans se rendre compte que ce film ne
s'adressait peut-être pas à tout le monde). Mais même en étant préparé,
il est vrai que le film n'est pas vraiment facile. Surtout quand, comme
moi ce jour-là, on se sent souvent très fatigué après vingt minutes de
film, mais c'est bon, j'étais mieux réveillé pour la deuxième moitié, qui
est la meilleur :-).
Keane, c'est le nom du personnage principal. Il vaut mieux aimer la
tronche de l'acteur qui le joue, car on se la prend en pleine face les
trois quarts du temps (et en gros plan qui plus est). Au début du film, il
erre dans une gare, à la recherche de sa fillette qu'on lui a enlevée
quelque temps auparavant. Il a l'air très paumé, voire un peu perturbé. De
bar glauque en hôtel minable, on le colle ainsi un bon moment. Jusqu'à ce
qu'il se découvre une voisine dans son hôtel, avec sa fille de 6 ans. En
leur rendant un ou deux services, il finit par s'attacher à la petite
Kira.
Pour ceux qui ne l'auraient pas encore compris (mais ils le font un peu
exprès, là, quand même), on a ici affaire à un vrai film d'auteur,
ultra-réaliste comme on les aime (ou pas). Ceci dit, faut pas exagérer,
ceux qui prétendent que les mouvements de caméra sont à vomir ont du
oublier leur Lars von Trier aux vestaires, ici, il y a peu de scènes
caméra à l'épaule, ça reste plutôt confortable. C'est d'autant plus
méritoire de la part du réalisateur d'avoir réussi une atmosphère
incroyablement opressante. En collant en permanence à son formidable
acteur, et sans aucun artifice (pas une note de musique au cours du film),
il réussit à rendre palpable la détresse d'un homme perdu. De ce point de
vue, objectif parfaitement atteint.
Et pourtant, il faut bien l'avouer, il y a un petit os. C'est tout
simplement qu'on s'ennuie un brin, notamment dans la première partie. Il
manque à ce film pour en faire un digne successeur d'un Breaking the
waves la force dévastatrice de ce dernier. Ici, on reste un peu sur
place. Kerrigan a voulu privilégier l'émotion dans son histoire, mais dans
ce cas, pourquoi différer jusqu'à la moitié du film l'introduction des
personnages principaux de l'intrigue (Keane mis à part) ? Ensuite, le film
trouve un rythme de croisière satisfaisant, et réussit des scènes
magnifiques entre Keane et la petite Kira.
Rien que pour cette seconde moitié et pour la maîtrise de son auteur, le
film mérite d'être vu, mais il demande une certaine patience et surtout
une perméabilité à la sécheresse du film qui ne va pas de soi. Bref, un
film à ne pas mettre entre toutes les mains, mais si le coeur vous en dit,
vous ferez peut-être une belle dévouverte avec ce Keane.
Roupoil, 3 octobre 2005.