Ce film a parait-il été le succès surprise de l'année
l'an dernier aux États-Unis, dans la catégorie "comédie douce-amère
existentialiste pour trentenaires désabusés" (voire un peu moins que
trentenaires). Le voici qui débarque donc chez nous, et ayant eu deux
occasions de le voir en moins d'une semaine, je n'ai pas réussi à y
échapper. Mais n'allez pas croire que je le regrette :-).
Andrew, l'antihéros du film, est apparement un double du réalisateur qui
s'est d'ailleurs octroyé le rôle principal. En tout cas, jeune et médiocre
acteur à Los Angeles bourré d'anti-dépresseurs, il se retrouve contraint
de retourner dans son New Jersey natal après neuf ans d'absence à la mort
de sa mère. Il y retrouve un passé douloureux, mais aussi des amis de
longue date, et y découvre fortuitement l'amour de sa vie. Tout ça en à
peine deux jours.
Mon résumé est peut-être un brin ironique, mais bon, il faut bien avouer
que le scénario brasse un peu tout ce qu'il peut pour dresser le portrait
de son héros depressif tout en donnant un peu de rythme au film. J'avoue
avoir eu très peur pendant le premier quart d'heure : une scène étrange
dans un restaurant vietnamien (dont je peine toujours à comprendre
l'intérêt), un bout de scène foiré dans un avion, puis après les
retrouvailles avec les vieux potes, une soirée déjantée qui vire à la
caricature, avec des tentatives d'introduction d'humour qui tombent à
plat. En règle générale, le film laisse à désirer quand il s'attache trop
à faire avancer l'histoire ou quand il cherche à faire rire à tout prix
(même si certains gags plus légers passent très bien).
Et pourtant, au final, on ressort de la salle tout ému (il faut dire que
j'ai vu le film un jour où j'étais parfaitement en condition pour me
laisser prendre par les entiments) et avec l'impression d'avoir vu un bon
film (pas étonnant qu'il ait fait un carton, finalement). Mais alors,
comment fait-il ? Eh bien, tout simplement, je pense que, même si c'est
parfois maladroit (on tombe un peu, voire beaucoup, dans les clichés sur
la fin), le film touche le public visé (les jeunes adultes en plein doute
existentiel, donc à peu près tous les jeunes adultes) à un endroit où ça
fait mal, sans avoir besoin de faire grand chose de précis pour cela. Les
meilleures scènes du film sont sûrement les plus simples, celles où Andrew
et Sam discutent de tout de rien. La crédibilité du film est également
renforcé par un jeu d'acteurs séduisant. Zach Braff n'a pas à se forcer
pour être convainquant dans son rôle, et Natalie Portman est délicieuse
(non, non, je ne renie pas mon mauvais goût), parvenant à rendre
parfaitement naturelle une jeune fille hautement improbable.
Ca film a le charme assez inexplicable des oeuvres qui touchent en plein
coeur, et qui font un bien fou tout en faisant mal. Certainement pas un
chef-d'oeuvre car il cumule pas mal de défauts qui devraient même le
rendre irritant (contrairement à d'autres, par exemple, je trouve plus
irritante qu'autre chose la manie de mettre une chanson à la fin de chaque
scène un peu émouvante, comme si on ne savait pas comment faire pour
enchaîner), mais je ne peux qu'encourager tous les gens de mon âge qui se
sentent l'envie de confronter leur déprime à un écran de cinéma à aller le
voir.
Roupoil, 24 avril 2005.