Dracula,

film de Francis Ford Coppola (1992)



Avis général : 8.5/10
:-) C'est beau ! Décors superbes, ambiance prenante, et Coppola filme remarquablement. Oldman est très bien dans le rôle de Dracula.
:-( Une certaine tendance à user voire abuser d'effets visuels inutiles. Un mélange parfois surprenant entre gothique et modernité.

Bon, déjà, soyons honnêtes, quand on a Dracula et Coppola sur la même affiche, ça nous met l'eau à la bouche (en attendant le sang ;-) ). Parce qu'on se doute à l'avance que Coppola saura respecter l'histoire originale et ne pas la transformer en un show dédié uniquement au plaisir du spectateur, mais que ce sera malgré cela certainement spectaculaire.

Est-il vraiment nécessaire de rappeler l'histoire de ce bon vieux Comte Dracula ? De toute façon, je ne pourrais même pas vous dire si c'est fidèle au roman, vu que je ne l'ai jamais lu :-). Ma référence serait donc plutôt le Nosferatu de Murnau. En tout cas, ça commence par une scène assez inattendue, puisqu'on a droit à un Dracula en pleine forme en train de trucider des turcs à la pelle à la fin du Moyen-Âge, puis de pleurer la mort de sa bien-aimée (suite à une fourberie des turcs en question) et de se rebeller contre Dieu dans une fontaine de sang digne du Shining de Kubrick. Cette scène donne le ton du film : c'est spectaculaire (l'armure rouge pétante est même à la limite du mauvais goût) mais ça ne se limite pas à ça. D'une part, Coppola place ici les bases de l'histoire d'amour qui sera le centre du film, et par ailleurs, on est tout de suite frappé par la beauté de la scène. C'est de toute façon le point fort du film (mais il est énorme !), c'est très très beau du début à la fin.

La suite reprend l'histoire bien connue : Jonathan Harker, clerc de notaire à Londres, va faire un tour en Transylvanie pour régler une affaire immobilière avec un certain Comte Dracula, lequel ne va pas tarder à se montrer sous son vrai jour et à débarquer en Angleterre pour s'en prendre à la fiancée de Harker. Un bon point à mon avis de cette adaptation, c'est de ne pas trop s'attarder dans les Carpathes. On y est suffisamment pour être impressionné par Oldman en vieux Dracula inquiétant et pour plaindre le pauvre Harker (quoique, au lit avec Monica Bellucci, il doit bien s'amuser), et c'est tout. Le reste se passe essentiellement à Londres, et Coppola va énormément insister tout au long du film sur le lien Mina-Dracula.

Toute cette partie à Londres est d'ailleurs l'occasion d'introduire une galerie de personnages assez variée. Dracula lui-même, rajeuni et cheveux longs, est vraiment magnifiquement interprété par Gary Oldman. Pour le reste de la distribution, j'avoue être plus mitigé. Winona Ryder est certes très jolie, mais trop réservée à mon avis par rapport à la troublante Lucy, qui nous réussit à elle seule des scènes de lit impressionnantes. Quand au Van Helsing de Hopkins, je le trouve un peu trop illuminé pour être crédible. Mais c'est toute une part du film qu'il représente. À côté des scènes aux châteaux (celui de Dracula et celui de Lucy) qui sont résolument gothiques, il y a des tentatives d'ambiance beaucoup plus moderne. Par exemple, le personnage de Renfield et plus généralement tout ce qui se passe à l'asile a une esthétique assez différente. Est-ce vraiment un mal cependant, dans la mesure où Coppola réussit à conserver une unité visuelle dans son film, et dans la mesure où, une fois rentré dans l'atmosphère un peu particulière, on est fasciné de bout en bout ?

C'est d'ailleurs cette fascination qui permet aussi de ne pas trop s'offusquer des quelques artifices techniques utilisés de temps à autre. Bon, l'espèce de fumée verte, passe encore, les effets de caméra à l'approche du château conservent une certaine efficacité, mais était-on obligé de donner une dizaine d'apparences différentes à Dracula, à grands renforts d'effets spéciaux par ailleurs très réussis ? Dans la mesure où le film n'est justement pas très ancré dans le fantastique, et tente au contraire (et y parvient !) de nous montrer Dracula sous un jour très humain dans les rues de Londres, ce n'était certainement pas indispensable. Ça rend l'histoire d'amour centrale (et c'était pourtant une bonne idée de la mettre tant en évidence) un peu moins crédible et la fin peut-être un peu trop grandiloquente.

Une tentative peut-être pas totalement convaincante donc, mais cohérente dans ses parti-pris, et surtout une ambiance visuelle et sonore (tiens, oui, je n'avais pas encore dit un mot de la musique, très efficace) fantastiques qui suffiraient à faire de ce Dracula une grande oeuvre qu'on a envie de voir et revoir. Et promis, un jour je m'intéresserai plus au fond qu'à la forme quand je regarde un film :-).

Roupoil, 24 octobre 2004



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