Dead man,

film de Jim Jarmusch (1995)



Avis général : 7/10
Pourcentage gozu : 20%
:-) Le très beau noir et blanc, la musique étonnante de Neil Young. L'ambiance surréaliste qui conduit à quelques scènes d'une beauté surprenante.
:-( C'est bien de marcher hors des sentiers battus, mais bon, là, quand même, on a du mal à voir à quoi rime le scénario.

Voilà un film qui ne va pas être facile à critiquer. Au vu de son pourcentage gozu très elevé, vous aurez compris que Dead man n'est pas vraiment le type de film qu'on regarde d'un oeil distrait, en devinant un bon quart d'heure à l'avance le déroulement du scénario. Non, ici, Jarmusch nous entraîne dans une voie différente, celle de l'odyssée mystique d'un homme dépassé par les événements, dont on ne saura rapidement plus très bien qui il est vraiment.

Tout commence par un long voyage en train. William Blake (Johnny Depp, toujours convaincant dans les rôles les plus étranges)y voit défiler une galerie de portraits qui ne lorgne pas encore trop vers le bizarre, à l'exception peut-être d'un massacre de bisons par les fenêtres du train. Il se dirige vers Machine pour y prendre un poste de comptable dans une usine métallurgique. Mais rien ne se passe comme prévu : un employé de bureau ricanant le refuse sous prétexte de retard, et le directeur, étrangement irréel, le chasse carrément à coups de fusil. William va chercher du réconfort auprès de la belle Thel, qui hélas ne tarde pas à se faire trucider par son ancien amant, lui-même refroidi par un Blake transformé en fugitif, avec aux trousses trois redoutables chasseurs de prime, car l'homme qu'il a eu la maladresse de tuer n'est autre que le fils de celui qui aurait du devenir son patron.

Jusque là, ça va, à deux ou trois détails étranges près, le film se tient bien. Ça ne va pas durer... Blake ne tarde pas à croiser un indien solitaire qui se fait appeler Nobody (Personne) et qui commnece à le faire douter de sa personnalité (et le spectateur avec !) : il serait en fait mort, et aurait été de son vivant William Blake, le poète. Il lui faut maintenant retourner au monde des esprits, avec quelques meurtres à commettre sur le chemin. On n'est plus sûr de très bien comprendre où Jarmusch veut en venir, et de fait, on ne tarde pas à laisser tomber toute tentative de compréhension de cet OFNI (Objet Filmique Non Identifié).

Qu'à cela ne tienne, même si on se retrouve devant une succession de scènes sans queue ni tête, on accroche quand même. Pas que les scènes elle-mêmes aient beaucoup plus de sens (non mais franchement, d'où sortent ces trappeurs (dont Iggy Pop déguisé en bonne femme !?) bouffeurs de fayots, par exemple ?), mais on est saisi par la beauté formelle du film. La noir et blanc est vraiment beau, la musique qui accompagne, composée essentiellement de quelques accords de guitare aux moments opportuns, colle parfaitement à l'ambiance, et certaines scènes y gagnent un pouvoir de fascination difficilement explicable (comment expliquer qu'on soit scotché à l'écran quand un cadavre chauve se fait écraser la tête ?).

Avec cet étrange Dead man, Jarmusch n'a peut-être pas vraiment réussi le film culte qu'il semble chercher en permanence (ben non, il ne suffit pas d'aligner n'importe quoi pendant deux heures pour faire un grand film ; là, on a par moments l'impression de se faire avoir), mais à défaut parvient souvent à capter l'attention du spectateur et, en fin de compte, à lui faire suffisament apprécier ce film pour lui donner envie de le revoir quelques années plus tard, comme ça a été mon cas.

Roupoil, 15 août 2004.



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