C'est totalement typique de moi, ça : Bertrand Tavernier
est un cinéaste français reconnu depuis maintenant quelques dizaines
d'années, et il a fallu attendre qu'il aille tourner un film aux
Etats-Unis pour que je me décide à m'intéresser à lui. Ah non tiens, en
parcourant sa filmo, je me rends compte que j'ai vu un film de lui dans sa
jeunesse, La fille de d'Artagnan, sûrement pas son meilleur. En
ce qui concerne son dernier opus, en tout cas, franchir l'Atlantique ne
lui a pas forcément réussi, puisqu'après disputes avec producteurs et
autres difficultés, le film ne sort même pas en salles là-bas. Par contre,
la critique française lui reste fidèle...
La brume électrique, c'est celle un peu mystérieuse des bayous de
Louisiane, où Dave Robicheaux enquête sur un serial killer qui fait des
choses très vilaines à de chamantes jeunes filles. Un lien avec le caïd du
coin ? Dans le même temps, il est hanté par le souvenir du meurtre d'un
noir qu'il a vu étant gamin, et accessoirement victime de visions
curieuses d'un général tout droit sorti de la guerre de Sécession. Il
n'est pas le seul à ne pas se sentir très bien d'ailleurs, une star qui
tourne un film dans le coin voit aussi de drôles de choses à travers les
vapeurs d'alcool qui l'entourent habituellement.
Quel est le lien entre tous ces personnages ? Il y en a, bien sûr, mais
on n'est pas que ce soit ce qui intéresse le plus Tavernier. Le fond de
l'intrigue policière est d'ailleurs assez bateau pour qu'on soit plutôt
content que ça ne prenne pas une place trop importante dans le film, qui
se concentre nettement plus sur la'tmosphère générale et la psychologie de
ses personnages. Pour ce qui est de ces derniers, c'est un peu inégal,
certains étant franchement pas très intéressants ou pas suffisamment
creusés (l'acteur et sa copine notamment), mais Robicheaux et Balboni
ressortant du lot notamment grâce à leurs interprètes (Tommy Lee Jones et
John Goodman) qui tiennent bien la baraque.
Quant à l'atmosphère, c'est assez curieux. À l'image du mélange de ses
influences pour le style, très typé Louisiane plus ou moins de force,
notamment au niveau de la musique, mais refusant assez nettement de singer
les codes du polar américain (les scènes violentes notamment sont très
séches et peu développées), Tavernier semble volontairement mêler beaucoup
de genres, du polar pur jus au fantastique onirique. En découle un drôle
de film inclassable, assez lent et ne semblant pas toujours savoir sur
quel pied danser.
Indiscutablement original, pas toujours totalement convaincant (ça manque
quand même un peu d'éclat) mais réussisant en quelque sorte à faire
ressortir la brume du bayou à l'écran, le film de Tavernier en rebutera
sûrement plus d'un, mais je ne peux pas dire que je n'ai pas aimé. Ni que
j'ai vraiment aimé, d'ailleurs... Bref, une curiosité.
Roupoil, 14 mai 2009.