Comme vous le savez, le cinéma américain en général, et
celui des années 70 en particulier, c'est mon dada. Comme par ailleurs je
n'ai rien contre les polars ou autres films noirs en général, et que
celui-ci, en plus d'être un grand classique, possède une plus-value non
négligeable en la personne de Roman Polanski aux manettes (Polanski aui
aura d'ailleurs, mine de rien, touché à pleins de choses pendant la
première décennie de sa carrière de réalisateur), il est presque
surprenant que ce soit ma première vision du film. Mais c'est comme ça.
Dans un Los Angeles qui n'est encore qu'une grosse bourgade à côté du
désert, c'est la guerre de l'eau. Faut-il ou non construire un nouveau
barrage malgré l'opposition de l'expert Mulwray ? Ledit expert qui se
retrouve par ailleurs éclaboussé par un petit scandale quand le privé
J.J.Gittes publie des photos compromettantes suite à une enquête réalisée
à la demande de sa femme. Tout se complique quand Gittes découvre qu'il a
été sévèrement manipulé. Bien décidé à s'expliquer avec Mulwray, il tombe
nez-à-nez avec son cadavre. Comme il n'aime pas se faire enfumer, il
continue l'enquête.
De rebondissement en rencontres plus ou moins agréables, à force de remuer
les eaux troubles (que ce soient celles du bassin du jardin ou celles des
nombreuses magouilles qui entourent l'affaire), Gittes finira, bien sûr,
par apercevoir la vérité, et surtout par comprendre les curieuses
manigances de madame Mulwray. Bref, tout ça ressemble fort à un scénario
de polar poisseux comme on en a vu tant depuis et, plus que les films
noirs des années 40 ou 50 auxquels il est censé rendre hommage, ce
Chinatown fait terriblement penser aux plus récentes adaptations
d'Ellroy. D'ailleurs, son scénario partage avec elles les défauts de ses
qualités : suffisamment complexe pour tenir en haleine tout du long, mais
parfois inutilement étriqué et volontairement glauque. Sans compter que
certaines pistes sont un peu laissées à l'abandon pour se concentrer sur
le côté humain de l'histoire.
Car au fond, et comme souvent, ce sont les personnages qui font le coeur
du film, et notamment celui, troublant, joué par Faye Dunaway. Quand à
Jack Nicholson, c'est bien sûr toujours un plaisir de le retrouver dans un
de ses premiers grands rôles, avec son désormais mythique pansement sur le
nez. Leur intercation met un peu de temps à se mettre en place de façon
convaincante mais débouche sur une scène finale d'une merveilleuse et
pourtant très sobre intensité. Rien que pour cette conclusion, le film
vaut le coup d'oeil.
Par ailleurs, ne soyons pas vaches, c'est une oeuvre très soignée, qui
dépeint fort bien une époque maintenant lointaine, et délivre son lot de
scènes marquantes (entre autres l'apparition devant la caméra de Polanski
himself). Je regrette juste, personnellement, le relatif manque de
dynamisme de l'ensemble. Peu de scènes d'action, c'est un choix tout à
fait défendable, mais même pour le reste, à part le final, ça manque un
brin d'intensité. Un beau classique malgré tout.
Roupoil, 27 septembre 2008.