Cinquième et dernier film pour cette Fête du Cinéma,
tentons quelque chose d'un peu plus surprenant que ce que j'ai vu jusque
là. Mouret est présenté depuis quelques années comme le successeur de
Rohmer, mais je n'avais pas encore eu l'occasion de voir ses films, et
j'ai par ailleurs un trou béant dans ma culture ciné à la case Rohmer (un
seul essai, concluant mais pas renouvelé).
Déjà, les thèmes abordés me concernent assez directement : un jeune prof
de cor débarque à Paris, où il dégote par hasard une colocation avec une
blonde et faitaisiste jeune femme. Alors qu'on les croit faits l'un pour
l'autre, on apprend que la blonde fantasme sur un de ses clients, alors
que le prof tombe amoureux d'une élève (franchement, quelle drôle d'idée
:-) ). Mais tout ne fonctionne pas comme prévu pour eux...
De loin, comme ça, on pourrait s'attendre à une bonne vieille comédie
romantique comme on les aime (ou pas). De fait, c'en est une, mais
tellement différente de ce qu'on nous sert habituellement qu'on n'a pas
envie de la classer dans la même catégorie. Dès la première discussion
entre nos deux colocs, pleine d'humour absurde débité sur un ton
curieusement détaché, on entre dans un drôle d'univers, dont on se demande
en permanence s'il est ridicule ou génial. En tout cas diablement
séduisant.
Rohmer, vous avez dit ? Oui, l'influence est assez évidente. Les histoires
de coeur farfelues, le milieu artistico-bourgeois, les dialogues
savoureux, etc... Mais Mouret a aussi sa propre personnalité, et oriente
plus volontiers son film vers la franche comédie. De fait, on rit souvent,
et pas seulement grâce au dialogue, car le comique de situation est aussi
largement et fort efficacement exploité. Le souci, c'est que c'est un peu
au détriment de l'intrigue. Mouret multiplie les petits rebondissements
pour faire durer son film, mais ne semble pas avoir grand chose à dire sur
ses personnages, en nombre il est vrai assez limité : en gros quatre, dont
une mutique. Notons au passage les belles performances d'acteurs,
notamment Frédérique Bel en ahurie sympa (qui me fait irrésistiblement
penser à la Phoebe de Friends, d'ailleurs). Ah, et la musique, du
bon classique (concertos pour cor notamment, forcément).
Tout ça fait que je me sens très à l'aise dans le petit monde de monsieur
Mouret, et que malgré les défauts évidents du film (qui réussit à se
répéter pas mal alors qu'il dure moins d'une heure et demie), j'ai passé
un fort bon moment. Mais je ne suis pas sûr que ça plaise à tout le monde,
il faut avoir le bon état d'esprit pour apprécier pleinement ce petit film
plein de fantaisie.
Roupoil, 2 juillet 2004.