Ca faissait un bon petit moment que je n'étais pas allé
voir l'agent secret le plus célèbre de la planète dézinguer les vilains
sur grand écran. Euh, maintenant que j'y réfléchis, ça n'avait même jamais
du m'arriver, les rares James Bond que j'ai vus étant de vieux opus avec
l'ineffable Roger Moore dans le rôle titre. Justement, de ce côté, il y a
du nouveau, puisque Daniel Craig reprend le rôle laissé par Pierce
Brosnan, et un certain changement de cap (pendant quelques secondes de
bande-annonce, on pourrait croire que c'est un méchant, pas vraiment du
type brittanique flegmatique, le Craig). C'est peut-être ça qui m'a poussé
à tenter le coup...
Le tout se passe au tout début de la carrière de James Bond, puisqu'un
petit pré-générique soigné en noir et blanc nous anonce son ascension au
grade de 007. Une fois la bande-annonce passée (pas mal, mais la chanson
choisie a dix fois moins de classe que le mythique thème que l'on
s'attendait à voir débarquer), on retrouve Bond aux prises avec une petite
frappe en Ouganda, en roue libre aux Bahams, puis envoyé pêcher du plus
gros poisson lors d'une partie de poker à très fort enjeu.
Rien de très original dans tout ça, les vilains sont très vilains, les
scènes d'action pullulent et les joies filles sont au rendez-vous. Niveau
action, ça démarre d'ailleurs sur les chapeaux de roue avec une poursuite
assez longue et proprement hallucinante, qui s'apparent assez souvent à du
jeu video mis en images (et que je rebondis sur une caisse providentielle
pour me propulser sur le toit d'en face, et que je tombe de douze et j'ai
même pas mal d'abord je suis trop fort) ; pas crédible pour deux ronds,
mais un côté ludique assez jouissif, on n'est pas très loin dans l'esprit
des combats quasi-burlesques d'un vieil Indiana Jones. Bref, on semble
bien parti pour passer un très bon moment.
Mais, il fallait s'y attendre, un début aussi époustouflant a une
conséquence fâcheuse, c'est que ça a bien du mal à tenir la route ensuite.
Campbell a grillé une bonne partie de son potentiel pyrotechnique, et il a
recours à deux artifices pour nous faire ensuite passer le temps. Le
premier, l'humour, est au fond assez efficace, même si peu subtilemeent
amené la plupart du temps. Le second, James Bond oblige, ce sont les
filles. Il n'y en a que deux, dont l'une qui ne fait pas très long feu,
mais les producteurs ont eu le bon goût (si, si, bon goût, vraiment) de
faire appel à Eva Green et ses yeux à faire tomber le premier Roupoil
venu. Du moins quand elle n'est pas surchargée de maquillage, et j'en
profite pour râler un petit coup : vous pouvez foutre les robes de soirée
au vestaire, la scène où elle est le mieux (et de très loin), c'est celle
où elle se prépare dans la salle de bains. Bref, revenons-en à nos moutons
: pendant ce temps, malgré tout, la tension faiblit dangereusement, les
parties de poker étant trop faciles et prévisibles (et encore une fois pas
crédibles, d'ailleurs) pour ne pas lasser.
Mais le pire est à venir : comme il était difficile de finir le film sur
une bête partie de cartes, on a droit ensuite à une bonne demi-heure
d'emberlificotage et démêlement de scénario, le tout sur fond de romance
mielleuse assez désespérante. Une demi-heure de trop qui flingue le film
aussi efficacement que Bond ne survit à toutes ses aventures. Un final
explosif dans Venise ne suffit pas à compenser, on a définitivement
décroché. Quel dommage, ce decrescendo continu laisse finalement sur une
impression très mitigée, alors que le potentiel était là. Mais je
retournerai sûrement voir ce Bond nouveau style (moins de gadgets, mais
plus de présence) la prochaine fois.
Roupoil, 23 novembre 2006.