Blue Velvet,

film de David Lynch (1986)



Avis général : 7/10
:-) C'est très beau et bien réalisé. À la fois tout bête et sacrément bizarre.
:-( Inégal selon les scènes (la virée menée par Frank est bien longuette). Ca n'a pas le génie d'autre oeuvres de Lynch.

Ah, ce sacré David. En rejetant un oeil à sa filmographie après avoir vu le film que je m'en vais vous critiquer ci-dessous, je me disais "Tout de même, quelle drôle de carrière. Voilà un gars qui, après un premier film de malade (il faut que je vois un jour, tiens), a enchainé avec un classique en noir et blanc, une adaptation d'un classique de la SF, puis qui est revenu à du cinéma plus expérimental tout en insérant Une Histoire vraie au milieu ! Pour aujourd'hui, attardons-nous sur un film qui a beaucoup fait pour sa réputation de réalisateur bizarre mais génial.

Dans un bled paumé des Etats-Unis comme il en existe tant, Jeffrey est obligé d'interrompre la fac et de reprendre un petit boulot suite à l'accident d'arrosage de son père. Lors d'une ballade, il ramasse une oreille. Avec l'aide d'une charamante lycéenne qui n'est autre que la fille de l'inspecteur local, il mène l'enquête, qui ne va pas tarder à l'introduire dans l'univers étrange de Dorothy Vallens, chanteuse de cabaret qui a bien des soucis avec les vilains du coin. La vie de Jeffrey va soudain devenir beaucoup moins tranquille.

De loin, le scnéario n'a rien de très original, une histoire vue et revue d'innocent qui drague une naïve tout en mêlant son nez dans des machinations tout à fait standard pour le premier polar venu. Ce qui fait tout, évidemment, c'est le traitement de Lynch. Je ne parle pas du sexe ou de la violence qui ont pu choquer le bourgeois quand le film est sorti, car ça parait assez anodin de nos jours, juste de quoi pimenter un peu le tout.

Non, ce qui est fascinant dans ce film, c'est la façon qu'a Lynch de détourner les genres, un peu à la manière, finalement, de ce que font souvent les frères Coen dans leurs films, mais en plus franchement déroutant. La romance nunuche est traitée trop sérieusement pour ne pas y voir une pointe d'ironie (la description de la petite ville est criante de vérité à peine exagérée), mais le côté noir du film part carrément en cacahouète. Il n'y a pas vraiment de résolution de l'enquête (Jeffrey devine tout sans problème, les éléments viennent se mettre sous son nez !) et les vilains sont grotesques à souhait (sacré personnage de Frank). On a donc plutôt une suite de scènes tantôt franchement délirantes tantôt plus sérieuses (avec une pointe d'humour assez inattendue par moments, on retiendra quelques répliques mythiques), qui ne sont pas toutes du même intérêt, mais qui donnent un tout très intéressant.

Bien sûr, quand on a vu la suite de la carrière de Lynch, on ne peut s'empêcher de voir ici une sorte de galop d'essai avant de passer à carrément plus étrange et de destructurer le récit (ici, c'est sobrement linéaire), mais ça reste un film très maitrisé (niveau caméra, c'est impeccable du début à la fin) devant lequel on ne s'ennuie pas. Un joli jalon.

Roupoil, 26 août 2008.



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