Il y a peu de critiques de films de films asiatiques dans
ma liste, pour la simple et bonne raison que j'en vois très peu, n'ayant
guère été convaincu par mes dernières expériences. Pourtant, à en croire
la critique spécialisée, une bonne partie des films de qualité qui sortent
sur nos écrans de nos jours nous viendrait d'extrême-orient. Du coup, de
temps à autres, abusé par la critique, je me laisse tenter. Le dernier en
date est ce film singapourien (on dit comme ça) récemment remarqué.
Il nous narre (enfin, façon de parler, vu la quantité de dialogues)
plusieurs histoires en parallèle, qui tournent toutes autour de l'amour et
de la solitude. Une jeune fille se heurte au silence de celle qui fut son
trop court amour, un obèse épie entre deux repas une jolie femme, et un
jeune homme rend visite à une femme sourde et aveugle.
Eric Khoo s'est donc lancé dans un genre innovant mais périlleux : le film
choral documentaire quasi-muet. Pourquoi pas ? Eh bien tout simplement
parce que ce pauvre garçon est dénué de tout talent. Dès le début, avec
cette introduction où la vieille infirme tape à la machine des bouts de
phrase dignes d'un mauvais Arlequin, on le sent mal. On a raison : non
seulement les histoires choisies sont d'une banalité affligeante, mais
elles ne sont sont absolument pas mises en scène (forcément, sans
dialogues, c'est pas facile). Du coup, pour faire passer ça pour un film
intelligent, on nous abreuve de SMS et autres mails en plein écran
(fabuleusement artistique), de musique guimauve et d'images de cuisson de
bouffe (pour le son qui va avec). C'est certes plutôt bien filmé (mais
même pas bien joué !), mais totalement inintéressant.
Au moment où on commence à sérieusement se demander comment l'auteur va
tenir une heure et demie comme ça, changement de cap complet, on passe à
un long passage où la sourde aveugle nous raconte sa vie en voix off (un
lien entre les différentes histoires est pipoté vers la fin du film). En
gros, elle nous lit sa vie sur fond d'images insipides. Mortel. Si on
n'avait pas déjà eu droit au Last Days de Van Sant, ce passage
vaudrait au film de décrocher haut la main le prix de l'oeuvre la plus
chiante de l'année. Soyons sérieux, le sujet est certes intéressant, mais
présenté comme ça, c'est quasiment inregardable.
Sur la fin, on retrouve nos autres histoires, sans plus d'intérêt qu'au
début, et on attend péniblement que le film se décide à en finir. J'avoue
ne vraiment pas réussir à comprendre comment une telle nullité a pu
décrocher un succès critique pareil. Je suis désolé, ramasser les clichés
à la pelle et les insérer dans de belles images (enfin, quand on ne filme
pas en gros plan un portable Panasonic) n'a jamais fait un grand film. Il
faudrait qu'un jour, nos critiques arrêtent de se toucher quand ils vont
voir un film asiatique, ils se rendront peut-être compte alors qu'il nous
arrive aussi des navets de l'Est...
Roupoil, 30 octobre 2005.