Allez, après-midi ciné en amoureux, avec non pas un film,
mais carrément deux, et on commence avec du gros bien lourd. je dois dire
que la perspective d'un film grand format sur l'Australie réalisé par Baz
Luhrmann me faisait a priori plutôt saliver, mais l'enthousiasme modéré
qu'a suscité le film nous avait découragé jusque là d'aller le voir. Et
puis bon, on n'a rien trouvé de mieux pour cette fois, alors tentons le
coup !
1939, alors que la guerre débute, à l'autre bout du monde, c'est juste la
guerre du bétail pour savoir qui alimentera les armées en bon boeuf bien
gras. Lord Ashley est à peu près le seul à tenter de s'opposer au monopole
du vilain Carney, mais sa femme débarque d'Angleterre bien décidée à out
vendre. Sauf que lorsqu'elle découvre son mari mort soi-disant tué par des
aborigènes, et les magouilles auxquelles semble se livrer un de ses
employés, elle va se fâcher, prendre un petit métis sous son aile et, avec
l'aide d'un conducteur de bétail à l'abord un peu farouche mais au grand
coeur (forcément), aller tataner tous les méchants à coup de cravache.
Hum, vous allez me dire, c'est peut-être l'esprit, mais le film ne
présente pas tout à fait les choses comme ça, quand même ? Eh bien, en
fait, si, complètement. Au départ, on se dit que le prologue naïf est du
au regard choisi (celui du gamin) et que ça va être plus sérieux ensuite,
mais non, pas vraiment. Tout au long des deux heures et demie de son film,
Baz Luhrmann accumule soigneusement les clichés, les tonnes de guimauve et
les ralentis aux moments stratégiques (pour ne citer qu'un exemple en
début de film, Hugh Jackman se passant un seau d'eau sur son sorps
musclé, ça vaut son pesant de cacahouètes), les coïncidences
invraisemblables aux moments dramatiques, et globalement une naïveté digne
d'un éléphant qui serait surpris qu'on le trouve un peu encombrant au
milieu d'un magasin de porcelaine. Ce qu'on pourrait au départ prendre
comme une teinte d'ironie n'est en fait que du premier degré total :
Luhrmann a fait son grand film d'aventures à l'ancienne, sans peur de
s'enfoncer totalement dans le ridicule.
Une fois ce point de départ admis (ce qui, je peux le comprendre, risque
de ne pas être possible pour une bonne partie du public potentiel), la
naïveté finit en fait par être touchante et, dans la mesure où l'ami baz a
au moins conservé sens du spectacle indéniable, on passe un moment plutôt
sympathique à voir notre aristo transformée en cow-boy courir après les
boeufs au milieu des paysages australiens. On s'achemine tranquillement
vers le happy end attendu, tout le monde est content, le méchant est
humilié et ... mais attendez, ça fait deux heures et demie qu'on est là,
déjà ? Ah ben non pas du tout en fait. Bien que le film soit manifestement
fini, il va en fait repartir de nulle part pour nous infliger une heure de
plus d'aventures plutôt plus insipides que dans la première partie et
finir par s'achever péniblement en début de deuxième guerre mondiale. Un
syndrome de l'hydravion (vous savez, on a l'impression que ça ne va jamais
s'arrêter) qui, pour le coup, dessert franchement le rythme de l'ensemble.
Au fond, le film possède vraiment trop de gros défauts pour être vraiment
recommendable. On sera d'ailleurs gentil d'éviter des comparaisons qui ne
pourraient qu'être désobligeantes avec Out of Africa et autres
classiques du film d'aventures "exotique". Et pourtant, je garde
l'impression que les intentions de Luhrmann étaient bonnes et qu'en
prenant un peu plus de distance vis-à-vis de son sujet, il aurait pu faire
un très bon film. En tout cas, si vous aimez le romanesque et que vous
n'êtes pas allergique à la tarte à la crème, vous devriez pouvoir retirer
quelques bons souvenirs de la vision du film.
Roupoil, 13 janvier 2008.