Alien est un film qui a accompagné mon enfance de façon
assez curieuse. En fait (attention, je vais raconter ma vie), ayant un
copain fan du film en sixième (j'avais 10 ans), c'est devenu pour moi une
sorte de symbole du film d'horreur à faire frémir les petits n'enfants
comme moi. Du coup, la première fois que je l'ai vu en entier, quelques
années après, j'ai presque été déçu parce que ça ne m'a pas fait peur du
tout. Mais je l'ai quand même revu un certain nombre de fois depuis :-).
Le scénario est tout aussi basique qu'efficace, maintes fois repris depuis
(à subtiles déformations près), rarement aussi bien utilisé. Bon, c'est
fort simple, c'est un huis-clos dans un décor stressant (vaisseau aussi
gigantesque que labyrinthique, plein de couloirs étroits et humides (on se
demande un peu d'où sort, par exemple, la flotte qui raffraichit Brett
juste avant sa mort, d'ailleurs), avec sept passagers (enfin, au début...)
et un méchant monstre mangeur d'hommes. Bon, sauf que j'exagère pas mal,
puisqu'un bon tiers du film se déroule avant que l'Alien ne devienne
vraiment méchant, et que par ailleurs Scott s'intéresse un poil à la
psychologie des personnages par moments.
Difficile de ne pas jouer au jeu des comparaisons en revoyant Alien
quelque 25 ans après sa sortie. Déjà, la première chose qui frappe au
début du film, c'est l'influence évidente du 2001 de Kubrick.
Longs plans sur le vaisseau se mouvant majestueusement dans l'espace, ça
pourrait très vite devenir chiant (comme dans 2001, par exemple
:-) ), mais au contraire, la (longue) introduction capte complètement
l'attention du spectateur, peut-être un peu grâce à la musique planante
mais parfaitement adaptée, ou au subtil dosage entre plans fixes et
détails de la vie dans le vaisseau. En tout cas, toute la scène de
découverte des aliens sur la planète inconnue est fabuleuse, une merveille
de mise en scène réhaussée par des décors magnifiques. Car s'il est bien
une chose qu'on ne peut nier à cet Alien, c'est bien la réussite
plastique, que ce soit au niveau des décors ou plus simplement du fameux
huitième passager. À la fois monstrueux tout en étant très "humanoïde" et
fascinant par ses capacités d'adaptation, il apporte une dimension
étonannte au film (et à ses suites). Que serait Alien sans la fameuse
double machoire (et aussi sans les lance-flammes :-) ) ? Non seulement
cette vieillerie d'Alien n'a pas à rougir devant ses successeurs au niveau
visuel, mais il bat même à plate couture beaucoup de films plus récents.
Au niveau de la gestion de l'horreur, je serais en fait un peu moins
enthousiaste. Certes, il y a des scènes inoubliables (l'apparition de
l'alien lors du repas reste à mon avis une des plus belles scènes-choc de
l'histoire du cinéma), mais globalement, le suspense est assez basique.
Pas totalement inefficace, mais assez prévisible, voire par moments assez
bizarrement foutu (la mort de Dallas dans son tuyau me laisse un peu
perplexe). On parle souvent de l'ingéniosité consistant à montrer le mois
possible le monstre, mais c'est finalement tout aussi stressant quand on
le voit ! Et puis je ne trouve pas la fin ultra-crédible, même si elle est
réussie.
C'est donc plus comme film de science-fiction (dans le style réaliste et
lent plutôt que bondissant comme on le fait aujourd'hui) que comme
classique de l'épouvante que j'apprécie cet Alien. Pas
franchement effrayant (le troisième épisode est à mon avis beaucoup plus
glauque), mais pas contre très beau. En tout cas, une chose est sûre, le
film a très bien vieilli, et mérite sa place au panthéon des classiques de
la SF (quand je pense qu'ils osent mettre sur la jaquette du DVD : "Par le
réalisateur de Gladiator ! Ils ont rien compris à la vie, ces
gens-là...).
Roupoil, 19 février 2005.