Du cinéma, du vrai, de l'artistique qui tâche, qui vous
fera foudroyer du regard par le premier cinéphile venu si vous avouez ne
jamais en avoir entendu parler, mais dont le commun des mortels ne
soupçonne même pas l'existence, voilà qui caractérise assez bien l'oeuvre
de Peter Greenaway. Tenté par l'expérience depuis un bon moment, j'ai fini
par passer à l'acte avec ce film peut-être réputé son plus classique. Tant
que je ne le trouve pas aussi mauvais que le plus récent Tournage dans
un jardin anglais (titre français n'ayant rien à voir avec
l'original, qui n'a du coup lui-même rien à voir avec le film dont je suis
censé parler en ce moment, il est donc temps de fermer cette parenthèse au
fond assez inutile).
Les deux films ont tout de même en commun d'avoir eu leur titre bien
modifié en traversant la Manche, puisque pour celui-ci c'était en VO Le
contrat du dessinateur. De fait, le scénario est là : un dessinateur en
vue est chargé par une noble dame quelque peu délaissée par son mari
d'effectuer quelques croquis de son jardin (anglais, donc), incluant dans
le paiement le privilège de la chère mais aussi de sa chair à elle. Mais
le scénario est-il là ? Comme le fait remarquer à notre cher dessinateur
la fille de la patronne, il y a peut-être plus dans ces dessins que ce que
l'artiste lui-même a voulu y mettre...
Si vous avez un peu de mal à suivre, ne vous inquiétez pas, c'est normal
et sûrement voulu. Comme le titre l'a déjà dévoilé, il sera question de
meurtre à un moment ou à un autre, mais on en saura bien trop peu pour se
faire une idée raisonnable de ce qui s'est passé. C'est tout de même un
peu frustrant, et le film l'est à plus d'un titre, en explorant beaucoup
de pistes alléchantes mais sans jamais vraiment s'y plonger corps et âme.
Polar ? Non, puisqu'au fond il n'y a pas d'enquête. Comédie ? À quelques
dialogues amusants près (le reste du temps, c'est plutôt abscons), on ne
rit pas. Fantaisie érotique ? D'érotisme, en fait, on entend parler, mais
il ne se passe pas grand chose.
Bref, un peu de tout mais surtout beaucoup de rien dans ce film. Certes,
on est intrigué par les cadrages très recherchés du réalisateur (mais pas
vraiment fasciné, en ce qui me concerne), et amusé par la musique de Nyman
(qui, lui, s'est indiscutablement pris au jeu), voire par les costumes
assez grotesques, mais à la fin on cherche toujours l'intérêt de ce truc
un poil hermétique.
Pour résumer, je dirais bien qu'on a la sensation désagréable d'avoir
participé à un jeu dont on ne nous aurait que partiellement les règles, et
de s'être entendu dire à la fin "Vous avez perdu". C'est d'ailleurs à peu
de choses près ce qui arrive au pauvre héros. Peut-être un jour en
revoyant le film en trouverai-je les clés, mais pour l'heure il restera au
rayon curiosités...
Roupoil, 17 juin 2008.