NEOGENE
2-MIOCENE
(23-5,3 Ma)
Le Miocène est marqué par des changements climatiques et écologiques importants. Les courants marins sont fortement remaniés suite à deux évolutions tectoniques : -La séparation de l'Amérique et de l'Antarctique permet la mise en place d'un courant marin circum-antarctique. Il isole ce dernier continent, et diminue le mélanges des eaux polaires et des eaux tropicales. La calotte polaire antarctique peut alors s'étendre. - D'autre part, la plaque arabo-africaine se rattache à l'Asie, supprimant ainsi les échanges longitudinaux entre les reliques de la Téthys et l'océan Indien. La Téthys devient Méditerranée Le climat du début du Miocène est plus chaud que celui de l'Oligocène. Par la suite, vers -13,5 Ma, il devient rapidement plus froid et plus sec, ce que reflète, en particulier, l'apparition et l'expansion des prairies à graminées, aux latitudes moyennes de l'hémisphère Nord. |
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Cette évolution est attribuée à la surrection de grandes
chaînes de montagnes, en premier lieu l'Himalaya (voir l'encadré plus
loin).
Enfin, la fin du Miocène montre une régression marine importante, qui aboutit à l'assèchement de la Méditerranée : c'est l'Evénement Messinien (du nom de l'étage stratigraphique qui enregistre ce bouleversement). Il entraîne la mise en place locale d'un climat plus froid et plus sec, et une expansion des savanes.
Modification climatique
miocène, CO2
atmosphérique, et orogenèse himalayenne :
L'orogenèse
himalayenne, qui débute vers 50 Ma, conna”t une phase d'accélération
vers 10-8
Ma. Cet événement a eu d'importantes conséquences sur le système
climatique, et
peut-être même un impact direct sur les changements qui se produisent
au
Miocène. En effet, l'orogenèse aurait :
- d'une
part, provoqué des modifications des circulations atmosphériques, et
conduit à
la mise en place du régime de mousson indienne.
-d'autre
part, en augmentant la surface et le volume de roche soumis à l'érosion
(au
sens large), elles seraient à l'origine de la chute des teneurs
atmosphériques
en CO2 que l'on constate au cours de cet épisode.
L'altération, avec
la formation de minéraux argileux au détriment des tectosilicates
(quartz, feldspaths), constitue en effet un "puit" de CO2.
On peut en effet représenter l'altération des silicates en milieu
aérien par
les réactions générales :
CaSiO3 + 2 CO2
+ 2 H2O --> Ca2+ + 2 HCO3-
+ H4SiO4
Puis :
Ca2+ + 2HCO3- + H4SiO4
-->
CaCO3 + SiO2 + CO2 + 2 H2O
D'où, au
bilan, une perte d'une molécule de CO2 atmosphérique par
molécule de silicate
altéré.
Cette
baisse du taux de CO2 atmosphérique, en diminuant l'effet de serre
atmosphérique, aurait permis la diminution des températures.
Les Diatomées ont colonisées les eaux douces depuis l'Eocène. Mais au Miocène, elles se diversifient considérablement, en particulier les Diatomées Pennales (Diatomées à test elliptique et aux pores disposés selon une symétrie bilatérale sur les valves, opposées aux diatomées Centrales, à frustule en disque). Les Diatomées atteignent alors leur diversité maximale. Ci-contre, un exemple de Diatomée Pennale |
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Plusieurs arguments paléontologiques indiquent que le refroidissement climatique du Miocène s'accompagne, pour la première fois, de l'expansion des prairies d'herbacées aux latitudes moyennes aux détriments des forêts.
Les données géochimiques, de leur côté, prouvent
que ces
plantes nouvelles ont acquis et utilisent la photosynthèse de type C4,
comme le
montre par exemple cet enregistrement isotopique dans des terrains
d'Amérique
du Nord (ci-dessous)
Cette figure présente à la fois :
- l'évolution des teneurs isotopiques en carbone 13, indice des proportions relative de plantes à photosynthèse en C3 (delta 13C bas, ~ -27o/oo) et en C4 (delta 13C plus élevé, ~ -13o/oo).
Les
plantes en C3 ont des valeurs isotopiques du carbone de leur tissus
basses, delta
13C
~ -27 o/oo, alors que la photosynthèse C4 conduit à des valeurs de
delta 13C plus élevées, ~ -13 o/oo. Les carbonates
des sols ou des dents des animaux enregistrent
ces différences avec un décalage général des valeurs de ~ +14 o/oo.
-l'évolution des températures, reflétée par les teneurs en oxygène 18, d'autant plus élevées que la température locale est basse.
Remarque : Dans cette publication, les valeurs
de delta 18O
sont reportées par rapport au standard PDB, et non par rapport au
standard
SMOW. Autant que possible, on exprime désormais les valeurs isotopiques
de
l'oxygène relativement au SMOW, et l'on réserve le standard PDB aux
valeurs
isotopiques du carbone.
Ainsi que le montre la précédente figure, qui inclut des valeurs isotopiques de dents d'Equidés, ces animaux et d'autres herbivores ont progressivement inclus dans leur régime alimentaire les plantes en C4 de plus en plus présentes dans l'environnement.
Mais ces plantes, et plus généralement les herbacées, sont aussi plus siliceuse et donc plus abrasives que les feuilles tendres des arbres. Ce changement qualitatif de la nourriture explique l'apparition, chez les Equidés en particulier, de dents à l'émail épais, souvent très plissé pour former des crêtes coupantes, à couronne élevée, et hypsodontes (à croissance continue), toute ces adaptations permettant une meilleure résistance à l'usure. La figure qui suit, qui concerne encore les Equidés Nord américains, indique clairement l'évolution parallèle de la forme des dents et des teneurs isotopiques de l'alimentation, et le changement qui se produit vers -14 Ma.
Enfin, ces nouveaux paysages ouverts se traduisent aussi, chez les Equidés entre autres, par une adaptation poussée à la course : par rapport aux premiers Equidés, les espèces miocène atteignent des tailles plus importantes, et se caractérisent par un allongement des membres et une réduction de plus en plus importante des doigts.
Ce crâne, ainsi que des morceaux de la mâchoire et des dents, constituent les restes de ce que ses découvreurs décrivent comme le plus vieil Hominidé connu à ce jour, Kenyanthropus tchadensis, ou Toumai. Déterré en 2002 par une équipe franco-tchadienne, ce fossile bouleverse les connaissances paléoanthropologiques par deux particularités : -son âge, 7 Ma : Si Toumai appartient bien à la "lignée" humaine, le clade des Hominines, il réconcilierait les données fossiles avec les estimations de la génétique moléculaire, qui repoussent la divergence Homme-Chimpanzé à environ 8 Ma. |
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- sa position géographique, au Tchad, donc très loin de l'Afrique de l'Est, d'où provenait jusque là la quasi-totalité des restes fossiles d'Hominidés. Il infirme par conséquent la fameuse thèse de "l'East Side Story", qui supposait que le clade des Hominidés, et sa posture bipède caractéristique, s'étaient développés en Afrique de l'Est, dans la vallée du rift, en relation avec le climat plus sec, et le milieu plus ouvert que dans l'Ouest, qui s'y seraient installés après l'ouverture de ce fossé d'effondrement.
Il convient cependant de signaler qu'une
discussion s'est engagée sur
la nature exacte de ce fossile : Si ses découvreurs en font l'un
des
premiers membres de la lignée humaine, d'autres chercheurs (par
ailleurs
eux-mêmes découvreurs d'un autre fossile ancien, Orrorin tugenensis,
voir ci-après)
l'interprètent comme un représentant primitif de la lignée des
Gorilles. Le
débat est engagé, en termes assez vifs·Les arguments avancés par les
deux
partis ont été présentés dans deux communications du journal Nature, daté du 10
octobre 2002.
Ci-contre, l'ensemble du matériel fossile découvert au Kenya, dans la vallée du Rift, en décembre 2000, et attribué à un nouvel Hominidé, âgé d'environ 6 Ma, Orrorin tugenensis. |