Dans son livre « les victimes, violences publiques et crimes privés », carole DAMIANI définit la victimisation, comme l’ensemble des conséquences médicales, juridiques, socio-économiques, professionnelles, psychologiques d’un accident traumatique.
Le processus de (dé)victimisation :
Avant d’aborder le processus de (dé)victimisation, je vais définir ce qu’est une victime. Sur le plan étymologique, le mot victime désigne un animal de sacrifice. Pour les nations-unies, le terme victime est définie de la façon suivante :
« on entend par victimes des personnes qui, individuellement ou collectivement, ont subi un préjudice, notamment une atteinte à leur intégrité physique ou mentale, une souffrance morale, une perte matérielle ou une atteinte grave à leurs droits fondamentaux, en raison d’actes ou d’omissions qui enfreignent les lois pénales en vigueur dans un état membre, y compris celles qui proscrivent les abus criminels de droit. »
Sur le plan juridique, cela désigne une personne qui subit personnellement ou directement un préjudice physique, morale ou matériel du fait d’une infraction pénale, par opposition à la personne qui le cause : l’auteur.
La personne victime se croit souvent dans une responsabilité et une culpabilité des actes posés. Elle ne peut plus s’imaginer autrement que victime et se résigne à cette situation car elle se sent coupable et ne se considère plus comme sujet agissant. Dans ce même livre, carole DAMIANI définit le sentiment de culpabilité comme un sentiment « conscient ou inconscient consécutif à un acte ou un fantasme jugé répréhensible par le sujet. Il peut-être à l’origine de conduites d’échec ou d’autopunition ».
L’utilisation du concept de (dé)victimisation et non de (dé)culpabilisation est volontaire : pour C. DAMIANI, la déculpabilisation est un aspect très restrictif : en thérapie on ne va pas culpabiliser, mais plutôt utiliser et questionner cette culpabilité. Cette dernière fait partie du fonctionnement de tout être humain.
La (dé)victimisation consiste à passer d’un état de non-identification comme victime à sujet agissant.
La non-identification comme victime :
Dans cette première phase, la personne victime ne se considère pas comme victime ; elle est souvent dans le déni. Le déni est un moyen inconscient de se protéger en ne regardant pas une réalité difficile à assumer . Les sentiments de peur, la honte, la culpabilité et l’isolement peuvent empêcher la personne de réagir, pour l’instant.
La « victime objet » :
Dans cette période, la personne va se dire, se montrer pour se plaindre de son vécu. Elle va vérifier qu’elle est « bien victime » et attend que l’extérieur lui confirme cette position. Beaucoup éprouvent un intense besoin de rompre le silence ; lorsqu’elle commence à parler, elle devient « sujet, lieu de parole ». Elle va commencer à devenir maîtresse de son histoire , mais culpabilise toujours sur ce qui lui arrive.
La « victime sujet » :
Le sentiment de peur s’amoindrit et la déculpabilisation progresse. Mais elle aura aussi peur de l’avenir, par l’apparition de nouveaux obstacles (difficulté de se faire entendre de la justice..). Elle va chercher à se faire reconnaître comme victime auprès de la société. Elle s’informe sur ses droits sociaux et juridiques en allant voir un avocat, travailleur social…., puis à se défendre. Elle devient entièrement actrice de son histoire.
Le sujet agissant :
Dans cette dernière phase, elle fait des démarches, s’inscrit dans des démarches juridiques (engager une procédure pénale avec dépôt de plainte ; demande de dommages et intérêts…)
Importance de la reconnaissance sociale : une des conditions du traumatisme réside dans la passivité de la victime. C’est pourquoi il est tellement important qu’elle redevienne ensuite sujet de son histoire en jouant un rôle actif durant la procédure judiciaire. La réparations psychologique s’appuie sur la réparation juridique, dans un but de liaison.
Le procès constitue une étape fondamentale dans la vie de la victime ; dans la mesure du possible, il désigne la victime et le coupable, il nomme l’acte subi, permettant ainsi une reconnaissance sociale du préjudice.
Bénéfice du procès : déniée en tant que personne par l’agresseur, la victime se fait désormais reconnaître comme sujet à part entière. C’est aussi à partir du moment où elle est reconnue comme victime qu’elle peut enfin se délier de ce statut et reprendre sa place au sein de la collectivité.
L’intégration psychique d’un événement traumatique sera facilitée par une réflexion personnelle qui permettra à la victime d’élaborer le sens que cet événement a pris pour elle. Seule une aide à la verbalisation de la souffrance, même douloureuse, lui permet de rester sujet de son histoire personnelle.