Bibliographie sur la Grèce ancienne

Civilisation et mythologie


En première approche - Pour lire Homère - De grands classiques des études anciennes - Autres ouvrages recommandables.

En première approche

M. C. Howatson dir., Dictionnaire de l'Antiquité - mythologie, littérature, civilisation, "Bouquins" Robert Laffont, 1993. C'est la traduction française de l'Oxford Companion to Classical Literature publié par l'université d'Oxford (la première version remonte à 1937, mais il a été constamment revu et entièrement mis à jour en 1989). Un dictionnaire généraliste, comme son sous-titre l'indique, et une mine inépuisable. On a du mal à en sortir. Très accessible au grand public, mais aussi précieux pour les étudiants. Un défaut ? Le khâgneux scrupuleux aimerait des références plus précises aux sources !

Pierre Grimal, Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, PUF, 1951 (nombreuses rééditions). Parmi les multiples dictionnaires, ABCdaires, Trucs et Machins sur la mythologie grecque qu'on peut trouver et qui sont plus ou moins sérieux, plus ou moins fiables et plus ou moins complets, voici un ouvrage de référence, un grand classique dont on connaît bien les avantages et les défauts. Ce qui est sûr, c'est que quand on ne connaît pas beaucoup la mythologie grecque et/ou qu'on veut avoir un utilitaire solide sur le sujet, c'est celui-là.

M.C. Amouretti, F. Ruzé, Le monde grec antique, "HU Histoire", Hachette supérieur, dern. rééd. 2003. Un bon manuel universitaire de base sur l'histoire et la civilisation grecque, de l'époque crétoise à la période hellénistique. Clair et accessible, avec juste ce qu'il faut d'images, de plans, de petites notes, d'extraits... Bien connu des khâgneux en Lettres classiques, puisqu'il figure dans la bibliographie d'histoire ancienne du concours d'Ulm.

Pierre Lévêque, L'aventure grecque, 1964. Initialement chez Armand Colin en 1964, actuellement disponible au Livre de poche, "Références", n°449. Un très grand classique des études grecques, qui couvre l'histoire de la Grèce de la préhistoire à l'époque hellénistique. Une mine, avec une foule d'informations, des cartes, des plans, des images (même dans l'édition poche), une chronologie, un petit lexique, des index et des tables très utiles... Sans doute un peu daté sur certains points, mais précis, clair, vivant, moins onéreux qu'un manuel universitaire, précieux pour un étudiant et encore accessible pour le non spécialiste.

Pour lire Homère

Il y a de multiples éditions et traductions de l'Iliade et de l'Odyssée. Le but n'étant pas de se lancer ici dans des comparaisons détaillées, voici seulement quelques indications et références pour ne pas s'y perdre.

Les principales traductions

La traduction de Leconte de Lisle, qui date du XIXème siècle et a nettement vieilli (ce qui peut aussi lui conférer un certain charme... si on a déjà lu d'autres traductions plus abordables !), se trouve facilement sur Internet car elle est libre de droits. Ce n'est pas le cas des traductions "canoniques" : celle de Paul Mazon pour l'Iliade et celle de Victor Bérard pour l'Odyssée, initialement publiées dans la fameuse Collection des Universités de France aux Belles Lettres (la CUF, qui regroupe ce qu'on appelle couramment "les Budé") puis reprises dans les éditions de poche et dans beaucoup d'autres. Malgré leurs défauts (dont des infidélités de détail et un style parfois... un peu guindé, disons ?), ces traductions restent l'oeuvre de deux hellénistes virtuoses - ça se voit quand on essaie de faire mieux ! - et ont un souffle épique indéniable. Elles restent probablement la meilleure traduction pour découvrir Homère, d'autant qu'elles sont très connues et qu'il faut les connaître, ne serait-ce que pour ne pas ignorer leurs versions des formules homériques, presque passées dans la langue ("l'Aurore aux doigts de rose", Ulysse "l'Homme aux mille tours", Athéna "aux yeux pers"...). La traduction de Bérard a un défaut, celui de découper le texte en épisodes selon des critères devenus depuis obsolètes ; mais elle a aussi un avantage : tout comme la traduction de l'Iliade de Robert Flacelière pour l'édition Pléiade, elle est entièrement composée d'alexandrins blancs, tour de force difficile à égaler pour les hellénistes contemporains. Une traduction récente connue est la traduction de l'Odyssée en vers libres par Philippe Jaccottet (éditions La Découverte, 1982).

Principales éditions

Traduction française seule :

- Pour découvrir l'Iliade et l'Odyssée en français, le mieux est de les acquérir dans une édition de poche fiable - au hasard Folio ou GF - dans les traductions canoniques. En cas d'incompatibilité d'humeur avec Mazon et Bérard, on pourra essayer une traduction nouvelle (non sans s'être renseigné sur sa qualité). Les éditions de poche comprennent en général une introduction et des notes - s'en dispenser serait audacieux pour qui n'a encore jamais lu Homère...

- Une traduction nouvelle honnête, celle de Jean Bardollet, est publiée en "Bouquins" Robert Laffont. Elle a l'avantage de suivre le texte de près et d'adopter un style moins "touffu" que les traductions canoniques. Les choix du traducteur, bien qu'inégalement heureux, sont expliqués dans une note à la fin du livre. De plus, cette édition est très pratique à utiliser pour travailler sur Homère, car elle comporte un petit lexique mythologique complété de références au texte, et une table des matières précise détaillant les événements de chaque chant.

- L'édition Pléiade, qui date de 1955, présente une traduction de Robert Flacelière pour l'Iliade et la traduction de Victor Bérard pour l'Odyssée, toutes deux divisant le texte en épisodes à la façon des anciens analystes, mais toutes deux entièrement faites d'alexandrins blancs. Le texte est complété par une introduction générale, deux notices et des notes, ainsi qu'un Index repris de l'édition Budé. Pour le reste, le principal avantage de cette édition est que c'est un Pléiade, et son inconvénient principal est que... c'est un Pléiade. Nullement indispensable pour découvrir Homère, heureusement.

Texte grec et traduction française :

- L'édition de référence est celle des Belles Lettres dans la CUF, qui comprend toujours le texte grec, la traduction française et un solide apparat critique (notices, notes, variantes, index, cartes, plans...). L'Iliade, traduite par Paul Mazon, comprend quatre volumes ; l'Odyssée, avec la traduction de Victor Bérard, en comprend trois. Comme d'habitude avec les Budé, c'est volumineux et coûteux, mais c'est incontournable pour travailler sur Homère puisque c'est l'édition érudite de référence. A consulter en bibliothèque, au moins dans un premier temps.

- Le texte grec d'Homère est heureusement accessible à un moindre coût et au format poche dans la collection Belles Lettres "Classiques en poche", qui reprend le texte et la traduction de la CUF sans l'apparat critique, avec tout de même une préface et quelques notes. Il y a trois tomes pour l'Iliade et trois pour l'Odyssée.

De grands classiques des études anciennes

Une bonne partie des références notées ci-dessous sont des ouvrages relevant de l'école structuraliste récente des membres du centre Louis Gernet. Ils ne sont pas parfaits, bien sûr, il y aurait beaucoup de choses à corriger, contester, compléter, prolonger, etc., mais ils ont le mérite d'être représentatifs des dernières grandes avancées dans le domaine des études grecques. De plus, c'est avec ces livres - passionnants - que j'ai véritablement découvert l'études des mythes (et que je la découvre encore), d'où une certaine subjectivité dans le choix de cette liste.

Jean-Pierre Vernant, Mythe et pensée chez les Grecs, 1965, actuellement aux éd. La Découverte/Poche, n°13. Ce livre, qui regroupe des "études de psychologie historique" (pour reprendre le sous-titre), est l'un des premiers ouvrages d'anthropologie historique. Les différents textes prennent pour objet les mêmes textes et les mêmes sources que les helle'nistes, les historiens et les archéologues, mais cherchent à en dégager des structures de pensée, une mentalité propre à l'homme grec ancien, à travers sa culture et son cadre social. Un de ces ouvrages qui ont bouleversé le paysage des études grecques et profondément renouvelé l'étude des mythes. Deux textes fameux de ce livre sont l'analyse du "mythe des races" dans la Théogonie d'Hésiode et celle du mythe de Prométhée.

Marcel Detienne & Jean-Pierre Vernant, Les ruses de l'intelligence - la mètis des Grecs, 1974, actuellement en Champs Flammarion, n°36. Dix chapitres et dix études sur une catégorie mentale : la "mètis", ni seulement intelligence raisonnable, ni seulement fourberie, mais capacité à saisir le moment propice, à maîtriser une réalité mouvante en devenant soi-même imprévisible. Une réalité que l'on retrouve dans tous les domaines, pratiques ou théoriques, y compris les plus inattendus, des travaux d'Héraklès aux ruses de chasse du poulpe en passant par la course de chars.

Moses A. Finley, Le monde d'Ulysse, Point Seuil Histoire n°314 (2002, édition originale The world of Odysseus, 1954, nombreuses rééditions et mises à jour). Bien que déjà ancien (et encore), ce livre encore solide constitue à la fois un grand classique des études homériques et une excellente introduction, claire et agréable, à l'étude de l'Iliade et de l'Odyssée.

Marcel Detienne & Jean-Pierre Vernant, La cuisine du sacrifice en pays grec, NRF Gallimard, 1979
. Autre classique des études grecques récentes, qui étudie le sacrifice sanglant sous toutes ses formes, communes, irrégulières ou étranges.

Pierre Vidal-Naquet, Le chasseur noir, 1981, actuellement aux éd. La Découverte/Poche, n°194. Le sous-titre, "Formes de pensée et formes de société dans le monde grec", dit bien le but de l'ouvrage, qui aborde quatre thèmes principaux : l'espace et le temps ; les jeunes et les guerriers ; les femmes, les esclaves et les artisans ; la cité pensée et la cité vécue.

Marcel Detienne, Apollon le couteau à la main, NRF Gallimard, 1998. Apollon n'est donc pas celui que vous croyez. Ce dieu en apparence si lisse et si pur est aussi un dieu de sang, d'orgueil et de crime, qui s'arme volontiers du couteau pour écorcher son concurrent au concours de musique ou égorger l'ennemi vaincu qui le supplie. L'approche nouvelle de Marcel Detienne vise à mettre en lumière ces visages troubles d'Apollon, trop souvent oubliés, afin de comprendre, enfin, comment ils peuvent coexister chez un même dieu, en le replaçant dans l'ensemble du polythéisme grec, dont il est inséparable.

Autres ouvrages recommandables

Utilitaires et manuels

Paul Faure, Marie-Jeanne Gaignerot, Guide grec antique, Hachette supérieur, 1991. Ni parfait, ni très poussé par rapport à une vraie étude, ce semi-manuel a tout de même l'avantage d'être très synthétique et de présenter des dossiers illustrés sur tel ou tel site antique, avec en plus de nombreux plans, cartes, chronologies, etc., dans une présentation assez claire et agréable.

Robert Morkot, Atlas de la Grèce antique, 6500 à 30 av. J.C., éd. Autrement, 1999. Un petit livre bien fait, très agréable à consulter et très utile, comprenant non seulement des cartes et des plans, mais aussi des textes synthétiques et de nombreuses illustrations couleur.

Edmond Lévy, La Grèce au Ve siècle, de Clisthène à Socrate - Nouvelle histoire de l'Antiquité t.2, Point Seuil Histoire, H213. & Pierre Carlier, Le IVème siècle grec jusqu'à la mort d'Alexandre, Nouvelle histoire de l'Antiquité t.3, Point Seuil Histoire, H214. Les deux manuels de base (sempiternels, dira le khâgneux) sur la période classique.

Louise Bruit Zaidman & Pauline Schmitt Pantel, La religion grecque dans les cités à l'époque classique, Armand Colin "Cursus", 1991. Un bon manuel pour aborder l'étude du culte des dieux chez les Grecs, avec quelques illustrations et de petites choses précieuses, comme ces plans, ces nombreux encadrés, ou encore ce tableau complet de la généalogie des dieux selon Hésiode (pourquoi diable ne l'inclut-on pas dans toutes les éditions de la Théogonie ?).

Jean-Charles Moretti, Théâtre et société dans la Grèce antique, Livre de Poche "Références" n°585, 2001. Une synthèse dense mais claire sur le théâtre en Grèce antique : les concours, les différents spectacles, les auteurs, les édifices retrouvés... le tout s'étend de l'époque archaïque jusqu'à la fin de l'Antiquité.

Etudes

Françoise Frontisi-Ducroux, L'homme-cerf et la femme-araignée, Paris, Gallimard coll. "Le temps des images", 2003. Sous-titré "figures grecques de la métamorphose", ce livre clair et  superbement illustré présente une série d'études sur des mythes connus, mais en les étudiant à partir des représentations figurées. Les vases grecs sont tout sauf de simples illustrations de mythes connus par ailleurs : ils en font découvrir des variantes nouvelles, et utilisent un langage figuré qui a ses propres conventions. Loin de la simplicité primitive qu'on aurait vite fait de leur attribuer, les représentations figurées du monde grec ancien témoignent d'une façon d'aborder l'image radicalement différente de la nôtre, et qu'il faut apprendre à aborder dans toute sa complexité. S'il y a un livre à recommander à qui cherche à comprendre les scènes mythologiques des vases grecs, c'est celui-là.

Paul Veyne, Les Grecs ont-ils cru à leurs mythes ? Seuil, 1983, actuellement rééd. Point Seuil Essai, n°246. Le premier talent de Paul Veyne est de savoir poser les questions qui fâchent.

Jean-Pierre Vernant dir., Problèmes de la guerre en Grèce ancienne, 1968, actuellement éd. Point Seuil Histoire, H265. Cet ouvrage collectif regroupe des études de spécialistes français et étrangers. Il comprend à la fois des études plutôt historiques sur les réalités pratiques de la guerre, armes, entraînement militaire, tactiques, et des études plutôt sociologiques sur son rôle dans le monde grec, la place du guerrier dans la société, la fonction guerrière dans la mythologie...

Jean-Pierre Vernant dir., L'homme grec, 1993, actuellement en Point Seuil Histoire H267. Autre ouvrage collectif, qui détaille l'homme grec sous tous ses aspects : dans ses relations à l'économie, à la guerre, aux âges de la vie, à la citoyenneté, à sa vie privée, aux différentes formes de socialité, aux dieux... L'introduction de Jean-Pierre Vernant, courte et claire, est précieuse pour comprendre la mentalité des Grecs anciens et la façon dont ils voyaient le monde.

Jean-Pierre Vernant, Les origines de la pensée grecque, PUF "Quadrige", n°5, 1975 (rééd. 2000). Un livre court et synthétique exposant la formation et l'évolution de la pensée grecque, de la pensée mythique à la pensée rationnelle en passant par les premiers sages.

Pierre Vidal-Naquet, L'Atlantide, petite histoire d'un mythe platonicien, Les Belles Lettres, 2005. Une étude courte mais riche, reprenant les thèses de Vidal-Naquet sur le mythe platonicien de l'Atlantide, et étudiant les réapparitions et récupérations de ce mythe au Moyen-Âge et jusqu'au XXème siècle, de la découverte de l'Amérique à W ou le souvenir d'enfance de Perec. Une explication très pertinente qui coupe enfin court aux pseudo-redécouvertes de l'Atlantide un peu partout dans le monde, et un avertissement précieux sur les dangers du "sommeil des mythes".





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