Je m'attends à être surpris en sortant de l'aéroport, et de fait, je ne suis pas déçu: j'ai bien choisi mon jour, il y a apparemment une vedette de la politique locale en tournée qui arrive par le même avion que moi, et l'accueil est pour le moins chaleureux et bruyant! C'est de toute façon la première chose qui me frappe en Inde, l'agitation perpétuelle et le bruit effrayant dans les rues. Dans la voiture qui est venue me prendre à l'aéroport, je peux constater que la grande ville indienne typique ressemble pas mal à ce à quoi on s'attend: des véhicules qui déboulent dans tous les sens, des tas de piétons au milieu de tout ça, pas de trottoirs, peu de vrais immeubles (pas mal de maisons sont à la limite du bidonville) et beaucoup d'échoppes diverses qui vendent leur marchandise à même la rue. Ce premier contact me fait assez chaud au coeur (peut-être les trente degrés de différence avec Paris ont-ils une également une influence :-) ), on ne ressent pas du tout ici l'absence d'humanité qui caractérise les métropoles occidentales.
À l'arrivée sur le campus de l'Université d'Hyderabad, je découvre mon premier logement indien: à la limite de l'insalubrité pour nos standard européens, mais pour moi, ça ne posera pas de problème. Évidemment, il va falloir prendre l'habitude de ne plus boire de l'eau du robinet...
Peu après, j'ai l'occasion de me perdre pour la première fois de mon séjour: ma Guest House est un peu excentrée sur le campus, et pour le repas du soir, on s'est contenté de me donner le nom du hall où il a lieu, sans plus de précisions. Inutile de chercher quoi que ce soit qui ressemble à un plan sur le campus, j'aurai de toute façon l'occasion dans la suite de mon séjour de constater que la plupart des indiens sont incapables d'utiliser un plan pour se repérer.
Les premiers repas indiens se passent plutôt mieux que ce que je ne craignais: ce n'est pas trop épicé (peut-être les cuisiniers ont-ils fait des efforts, dans la mesure où une majorité des participants à la conférence sont étrangers), le riz est bon (vu la quantité qu'on en avale là-bas, ça vaut mieux...), les chapatis (petits pains plats que l'en mange en grande quantité en Inde du Sud) aussi, et on a même droit à de la viande! Finalement, je me rends compte assez vite que cette semaine au calme à l'intérieur du campus est ce qui pouvait m'arriver de mieux pour m'habituer au mode de vie indien (au moins à la chaleur et à la nourriture...)
La visite est assez intéressante: le Charminar, sorte d'arc de triomphe de style indo-arabe, offre une belle vue sur la ville (mais j'y expérimente pour la première fois les tarifs à l'indienne: 5 Roupies pour les autochtones, 100 pour les autres...), la Mosquée d'à côté est grande, mais c'est à peu près tout ce qu'il y a à signaler à son sujet, les magasins de saris qu'on trouve à tous les coins de rues enchantent les yeux par leurs couleurs éclatantes. Les indiens sont très curieux et n'hésitent pas à venir discuter avec les touristes ... du moins quand ils parlent plus de trois mots d'anglais, ce qui est finalement assez rare! J'aurai l'occasion de répondre quelques centaines de fois aux traditionnels «What is your name?» et «Which country you are from?» (ajouter les w prononcés comme des 'v' français et l'accent indien pour faire plus couleur locale). C'est amusant, mais un peu lassant à la longue. De plus, il faut éviter les mendiants qui sont assez nombreux dans les rues (mais moins que ce que j'imaginais). Avantage: les mendiants en question sont d'habitude plutôt sédentaires, à l'exception des gamins qui peuvent être très difficiles à lâcher. Inconvénient: un touriste blanc en Inde se fait repérer terriblement facilement, alors un roux, je vous laisse imaginer...
La journée s'achève assez péniblement pour moi: autant il est facile de se diriger vers les lieux touristiques, autant revenir à l'Université demande une certaine patience, d'autant plus qu'il y a plusieurs universités dans la ville et que je ne sais pas quelle est la bonne! Après une heure et demie de route, trois rickshaws, un détour par une mauvaise université et un supplément pour le voyage de nuit certainement beaucoup trop élevé versé au dernier rickshaw, je finis par retrouver ma chambre, finalement plutôt satisfait de la façon dont je me suis débrouillé pour cette première journée dans la jungle urbaine indienne.
Autre lieu d'intérêt, le fort de Golconde, lieu de résidence des empereurs en question. Il n'en reste plus grand chose aujourd'hui, mais ça reste assez impressionnant.
À l'arrivée à Aurangabad, première expérience désagréable avec les rabatteurs qui cherchent à m'aiguiller vers l'hôtel de leur choix (moyennant pourboire du dit hôtel, bien sûr), lequel est toujours tenu par un frère ou un cousin, qui a de très bons amis en France, d'ailleurs regardez dans mon carnet l'adresse d'un de mes proches à Paris etc... Pas toujours facile de faire face poliment quand on est fatigué et qu'on trimbale une valise de plus de 20 kilos, mais l'avantage de l'énervement est qu'il fait fuir illico les fâcheux. Je me fie aux guides que j'ai pris avec moi (Routard et Lonely Planet, à peu près aussi peu efficaces l'un que l'autre, mais indispensables pour s'y retrouver dans un pays comme l'Inde) pour trouver mon hôtel. Je ne prends pas de risques en visant dans le relativement haut-de-gamme (comprendre que je paie plus de 5 euros par nuit) ; c'est effectivement raisonnable niveau confort, et le restaurant attenant à l'hôtel est vraiment très bon (peut-être même les meilleurs lassis que j'ai bus de tout mon séjour, mais l'habitude aidant, il se peut que je ne sois pas réellement objectif).
Je commence le jour même mes visites, avec d'abord le Panchakki, grand moulin à eau qui rend très bien sur pellicule photographique et qui a en fait pour seul intérêt l'ombre qu'il procure au touriste épuisé en début d'après-midi. Un peu plus loin se dresse le Bibi-ka-Maqbara, alias Mini-Taj, qui se veut une réplique du célèbre mausolée d'Agra. De loin, il ferait presque illusion, mais force est de constater en s'approchant que les murs en plâtre font pâle figure en face des superbes marbres du vrai Taj Mahal. Mais bon, ne soyons pas méchants, ayant du renoncer à la visite de l'original (Agra est tout simplement beaucoup trop loin de Chennai...), ça vaut tout de même le coup d'oeil. Pour finir la journée, j'envisage de pousser jusqu'au grottes qui se situent à deux ou trois kilomètres en dehors de la ville. Après une négociation serrée avec les rickshaw-men, j'arrive à me faire conduire pas trop loin de l'entrée (au retour, j'aurai plus de chance, un autochtone se proposera de me ramener gratuitement en moto !). Les grottes (qui renferment des monastères et temples bouddhiques) n'ont en fait pas un intérêt extraordinaire et le clou de la visite sera la prise en photo d'un groupe d'indiennes en visite, qui apparemment n'avaient jamais vu d'appareil photo numérique auparavant (ce qui n'a finalement rien d'étonnant).
Pour le reste, Aurangabad est une ville indienne typique : bruyante, sale, assez stressante pour un occidental dès que la nuit est tombée (c'est bête, mais quand les grandes artères ne sont pas plus éclairées qu'une ruelle de deux mètres de large chez nous, on se sent moins en sécurité...), mais plutôt agréable à condition d'aimer le dépaysement (le contact avec les gens est beaucoup plus naturel que chez nous, les magasins qui vendent tout et n'importe quoi à même la rue contribuant beaucoup à ce sentiment).
Je commence ma visite à un rythme tranquille, mais il faut dire qu'on est tenté de passer beaucoup de temps sur chaque grotte. Le site est constitué, comme à Ajanta, de grottes creusées à même la falaise, mais uniquement sculptées et consacrées non plus seulement au bouddhisme mais également à l'hindouisme et au jaïnisme, les deux autres principales religions indiennes (du moins il y a quelques centaines d'années). Je commence par les grottes bouddhiques (les plus anciennes), qui sont un peu dans le même style que celles d'Ajanta (encore des bouddhas sculptés) mais avec une atmosphère sensiblement différente : déjà, il y a des singes aux abords du site et des chauve-souris dans les temples, et surtout, le site étant assez étendu et relativement désert le matin, je suis à peu près seul, un peu de calme fait du bien dans un pays aussi animé (hélas, rapidement, les touristes sont arrivés, et je crois que les groupes de gamins indiens sont encore plus bruyants que leurs homologues français :-) ). En tout cas, ces deux premières heures m'ont fait ressentir un peu du fameux esprit mystique indien (pas celui du chanvre, hein, entendons-nous bien), et m'ont vraiment définitivement ressourcé. Ce moment reste a posteriori l'un des meilleurs de tout mon séjour en Inde.
Les dernières grottes bouddhiques, à deux et trois étages, sont particulièrement impressionnantes, mais je ne suis pas encore au bout de mes surprises. Suivent les grottes hindoues, plus richement décorées, avec des sculptures et bas-reliefs spectaculaires partout, représentant Shiva et autres dieux dans leurs exploits. Parmi ces temples se détache sans contexte le Kailasha Temple (c'est d'ailleurs, le seul a être payant...), qui regorge de sculptures dans tous les coins. C'est le plus grand (80 mètres de long, 50 de large et plus de 30 de haut, il parait qu'il s'agit de la plus grande structure monolithique du monde), et on reste pantois devant la précision et la monumentalité de l'édifice. On resterait facilement tout l'après-midi à détailler les multiples fresques, même si la foule bruyante des touristes locaux rend la visite un peu plus pénible. C'est d'ailleurs l'occasion de créer une mini-émeute dans une classe de petits indiens : une photo de groupe avec l'appareil numérique, et tous les gamins veulent voir le résultat, ne prêtant plus aucune attention au professeur censé les surveiller.
Enfin, un kilomètre plus loin (que j'ai coupe a travers la montagne sur le conseil d'un gars du coin ; c'était effectivement plus court, mais aussi un peu plus sportif), 5 temples jaïns, un peu dans le même style que les temples hindous (nombreuses fresques narratives), mais avec bien entendu des thèmes différents. Comme je commence à fatiguer un peu et que ces temples n'ont pas un intérêt extraordinaire après le Kailasha, je passe un peu plus vite.
Ma journée n'est pas encore finie, pour me rendre à mon étape suivante, j'emprunte un nouveau moyen de transport: le taxi-jeep. Le principe est simple, une jeep fait le tour du village en braillant sa destination, et on ne part que quand c'est archi-plein. Et il en tient du monde dans une jeep, puisqu'on était pas moins de 20 dedans! C'est beaucoup moins cher que le vrai taxi, beaucoup plus amusant, mais évidemment plus lent et moins confortable. Je me suis ainsi rendu a la forteresse de Daulatabad, vestiges d'une ville fortifiée du 17ème siècle. Pour la petite histoire, un sultan de l'époque, trouvant le coin sympa, décida d'y déplacer toute la population de sa capitale Dehli (1000 kilomètres plus au Nord!), soit quelque 100000 habitants. Ils étaient dix fois moins en arrivant... Le comble étant que tout ce beau monde est remonté à Dehli quelques années plus tard. La forteresse elle-même est plutôt en ruines, a l'exception des remparts et d'une tour de 60 mètres de haut dédiée a la Lune, mais la grimpette jusqu'au sommet, via un pont-levis, des escaliers plongés dans le noir total et des grottes infestées de chauve-souris, vaut le détour, et la vue qu'on a sur la plaine depuis le sommet également. Quelques dizaines de "My name is Guillaume" et "I am from France", je suis redescendu dans la plaine, puis retourné à Aurangabad pour une deuxième nuit dans le train, direction Bombay !
En bon touriste, je ne peux pas éviter la traversée vers Elephanta Island, le site le plus touristique de Bombay, mais autant la Gateway of India (une espèce d'arc de triomphe d'un goût douteux installé là par les Anglais) est assez impressionnante (même s'il est interdit de la photographier depuis le bateau pour des vagues raisons d'installations militaires sur la côte, ce qui oblige à prendre la photo à contre-jour avec des palmiers devant l'arc ; forcément, ça rend moins bien...), l'île elle-même ne mérite pas vraiment la visite : encore des grottes, mais beaucoup moins intéressantes que celles que j'ai déjà visitées, et surtout une quantité de vendeurs de souvenirs ultra-collants qui donne furieusement envie de s'enfuir au plus vite. Un conseil donc aux lecteurs qui auront l'occasion de se rendre en Inde, vous pouvez laisser tomber Elephanta Island.
Le soir est l'occasion d'une ballade à pied le long de la mer d'Oman (enfin une ville indienne où il fait bon se promener une fois la nuit tombée), les plages n'ont rien de très accueillant mais la vue de la mer est agréable. Je croise une touriste brésilienne déjà vue aux grottes d'Ajanta, comme quoi même en Inde, le monde est petit. Je vais ensuite sur Chowpatty Beach, la plus célèbre des plages de Bombay (d'ailleurs il y a foule) pour un classique de touriste : le massage de crâne. C'est particulièrement revigorant (voire un peu trop en fait), mais le coeur n'y est pas vraiment ce soir. Je ne sais pas pourquoi je ressens particulièrement aujourd'hui un sentiment de solitude, mais je me rends compte que passer Noël à 7000 kilomètres de chez soi, loin de ceux qu'on aime et avec une blessure mal soignée au coeur ne va pas forcément être facile. Je compte les jours qui me séparent de mon retour en France, mais celui-ci est encore bien loin. Bon, j'ai l'habitude de ce genre de sentiment, je vais aller me coucher, ça ira mieux demain.
Une fois à Hospet (vers 20H), le voyage n'est pas tout à fait fini, Hampi est distante d'une quinzaine de kilomètres. Une paille, et pourtant l'une des expériences les plus éprouvantes de mon séjour : dans un rickshaw qui fait zigzague de gauche à droite pour éviter les plus gros trous dans la chaussée, de nuit, avec des côtes où on n'a l'impression que le moteur va rendre l'âme à chaque instant, et surtout sans le pot d'échappement qui nous a abandonné après quelques centaines de mètres, je ne suis pour une fois pas vraiment rassuré. Tout ça, accumulé avec la fatigue du voyage, augmente mon énervement quand je trouve les deux premiers hôtels pleins en arrivant sur place. Je finis par presque me fâcher avec le rickshaw-man, ce qui a posteriori ne me plaît guère (disons que j'ai juste du passer pour un connard de touriste occidental à qui tout est du), mais je trouve de quoi dormir à un prix défiant l'imagination du français moyen : 80 roupies la nuit, soir l'équivalent d'1,4 euros. Et pour ce prix-là, l'hôtel est plutôt raisonnable. C'est d'autant plus étonnant que le village d'Hampi est certes petit et très isolé, mais est à cette période de l'année rempli de touristes qui paieraient cinq fois plus cher sans broncher. Il semblerait que nos amis indiens n'ont pas encore tout compris à certaines subtilités d'ordre économique...
Ces deux jours de ballades constituent vraiment ma plus belle expérience depuis mon arrivée en Inde. Lever matinal (comme d'habitude, il n'y a pas grand chose à faire le soir et des deux pavés d'Umberto Eco que j'ai amenés pour me tenir compagnie pendant mon voyage, Le Nom de la Rose approche déjà de la fin), un bon petit déjeuner occidental dans un des restaus du coin (qui ont pour curieuse particularité de presque tous proposer des choix de plats indiens, italiens et ... israéliens !), et c'est parti pour quelques heures de marche dans la nature (et même un peu plus que prévu le deuxième jour suite à un léger défaut d'orientation de ma part). Le site est particulièrement calme (c'est assez grand pour que les quelques dizaines de touristes soient disséminés aux quatre coins du site et se croisent assez peu), je suis d'autant plus surpris de croiser une statue de Narasimha (la créature la plus célèbre et la plus représentée de la démonologie indienne) de six mètres de haut au détour d'une allée de palmiers. En tout cas l'une des plus belles sculptures que j'aie vues de tout mon séjour. Autre curiosité, un temple souterrain envahi par les chauve-souris et à moitié inondé, ambiance Indiana Jones garantie. D'autres temples parsèment le chemin, le plus impressionnant étant le Vithala Temple (parfois appelé dans les guides français Temple de la Musique, à cause de ses piliers qui résonnent quand on les frappe), en cours de rénovation au moment de ma visite. Le coeur de la Cité Impériale est également riche en monuments : le Lotus Mahal est un très bel exemple d'architecture indo-musulmane (comme la plupart des bâtiments d'Hampi), les étables éléphantesques sont impressionnantes, tout comme le Bain de la Reine (qui vaut bien nos piscines olympiques). Je crois que je pourrais rester des heures et des heures à me promener ainsi dans ces paysages de rêve.
Le seul inconvénient notable que je ne peux m'empêcher de constater à Hampi, c'est l'invraisemblable lenteur du service dans les restaurants. certes, on ne va pas se plaindre que tous les plats soient cuisinés à base de produits frais et préparés au moment de la commande, mais bon, attendre une heure à une heure et demie d'être servi, c'est tout de même très long ! Mais cela me permet au moins de faire une rencontre sympathique, celle de français installés à Pondichéry, avec qui je passe un réveillon finalement beaucoup plus sympathique que ce que je n'aurais imaginé quelques jours plus tôt. Bien sûr, pas de dinde ou de champagne au menu, malgré une tentative désespérée auprès du patron du restaurant, mais les habitants d'Hampi, certainement habitués à une forte présence occidentale, ont sorti les banderoles (sont certaines affichent fièrement un « Happy New Year 2003 » un peu périmé), et après tout, on n'a pas tous les ans l'occasion de manger en plein air le soir du 24 décembre.
À l'arrivée à Chennai, je suis attendu par le conducteur du minibus du Chennai Mathematical Institue, qui brandit une pancarte Matthieu Lafond. Bien essayé... Notons que ledit Matthieu, qui me rejoindra deux jours plus tard, aura droit à la même pancarte à sa sortie de l'avion. En tout cas, on me mène à la Guest House où je vais passer près de deux mois. C'est assez paumé, à une dizaine de kilomètres du coeur de la ville, et le confort dans les chambres est plutôt inférieur à ce qu'on nous avait laissé imaginer (en fait, nous sommes mis provisoirement tous les deux dans une chambre pas très grande, mais nous aurons droit ensuite à un appartement plus confortable), mais ça reste vivable. On a même une télé qui nous servira souvent pendant notre séjour... Par contre, l'accrochage de la moustiquaire, en l'absence de crochet au plafond, nécessitera une certaine maîtrise du système D et une discussion inénarrable avec un commerçant local pour obtenir de la ficelle. En tout cas, ça fait plaisir de pouvoir enfin se poser vraiment et vider une bonne partie de la valise.
Je ne vais pas raconter tout ce que j'ai ensuite fait à Chennai (d'une part parce que ce serait long et lassant, d'autre part parce que j'ai oublié des tas de choses), mais en gros, Matthieu m'a rejoint deux jours après mon arrivée, nous avons découvert ensemble le CMI, glandé la plupart du temps au lieu de préparer nos cours, rigolé devant la télé et fait du tourisme le week-end. Je me contenterai de détailler ces quelques points essentiels de notre vie à l'indienne.
La bouffe : indiscutablement l'une des découvertes les plus intéressantes en Inde. Une fois installés à Chennai, nous avons commencé avec Matthieu à tester au hasard plusieurs restaurants dans le quartier du CMI, et accessoirement à manger avec les doigts. Eh bien, on est rarement déçus (en tout cas, un restaurant choisi ainsi se révèle souvent au moins aussi bon que les quelques conseils des guides touristiques...) et on finit par se plaire à impressionner les serveurs en montrant notre maîtrise du thali, le repas traditionnel indien. Le thali, c'est simple, c'est du riz au milieu, des tas de sauces, plats de légumes épicés et autres autour, un ou deux chappatis (ou n'importe quel autre pain indien), et on fait de joyeux mélanges avec tout ça, en se servant uniquement de la main droite. Pas facile au début de manger le curd rice (riz mélangé avec du yaourt) avec les doigts, mais on d'y fait très bien, et ça a un côté gamin très réjouissant (un peu comme les douches au seau). Et tout ça à volonté et pour un prix dérisoire la plupart du temps. Bref, la cuisine indienne, c'est bien, et quand on en a marre du riz, il y a des tas de restaus chinois qui servent des nouilles. Avec le temps, on finit par avaler sans broncher les plats épicés, et par savoir ce qu'on aura dans l'assiette avant que celle-ci n'arrive sur la table (ben oui, vous savez, ce que ça désigne, vous, un aloo gobi mutter, par exemple ? En l'occurrence, il s'agit de patates (aloo) et de choux-fleur (gobi) avec une espèce de sauce assez relevée).
Un truc impressionnant avec les restaus indiens, c'est aussi le nombre de serveurs. On en a vu un certain nombre où ils étaient plus nombreux que les clients, et surtout il y a une sorte de hiérarchie entre eux, celui qui prend la commande n'étant pas le même que celui qui amène le plat ou celui qui vous sert à boire. Par contre, difficile de trouver des endroits où on ne fait pas travailler les enfants, surtout dans les endroits un peu populaires. Nous avons aussi testé un restaurant "chic" (nous avons payé la fortune de 9 euros chacun, apéritif compris) à Chennai, le service y est encore plus étouffant, la cuisine plus raffinée (et on n'y mange pas avec les doigts !), mais une inévitable faute de goût indienne gâchait un peu l'ambiance en la personne d'un éléphant rose ultra-kitsch.
Autre élément primordial de la cuisine indienne, les fruits exotiques. On a testé pour vous des tas de choses dont on ignore toujours le nom et que je n'ai jamais vues chez nous, et la plupart du temps, c'est très bon. Et puis l'un des avantages des échoppes qui pullulent en pleine rue dans les villes indiennes, c'est qu'on peut acheter un fruit frais ou un jus à tout moment, et je peux vous conseiller en particulier le jus de canne à sucre si vous allez un jour dans le coin, c'est super bon. Quand aux lassis (sorte de yaourt à boire) aux dizaines de parfums différents, c'est l'une des choses qui me manquent le plus depuis mon retour en France.
Les transports : C'est toujours une aventure de se déplacer en Inde et le fait d'être dans une des plus grandes villes du pays n'y change pas grand chose, surtout quand on loge dans un quartier un peu éloigné comme c'était notre cas. D'ailleurs, il ne nous a pas fallu longtemps pour nous en rendre compte, puisque nous avons du revenir par nos propres moyens le 31 décembre, après nous être un peu attardés au restaurant pour faire semblant de fêter le réveillon. Pas de problème pour trouver un rickshaw, mais encore faut-il savoir quelle direction lui donner. On arrive finalement à sa faire mener jusqu'à l'institut de technologie qui est censé être sur le même campus que nous, reste à rejoindre la Guest House en pleine nuit (et il ne faut bien sûr pas compter sur l'éclairage public...). Une heure et une dizaine de rues à droite plus tard (ben oui, à chaque fois, on nous disait avec une belle unanimité "The next on the right"), nous finissons par retrouver notre lit. Pour les retours suivants, ça ira en s'améliorant ; on finit par arriver à se faire mener à cinq minutes à pied de la Guest House ... mais du mauvais côté de la route ! Et traverser une route indienne à forte circulation, ben c'est pas rassurant du tout, surtout si on a le malheur de devoir s'arrêter au milieu, on a alors l'impression que c'est le piéton qui évite les voitures et pas le contraire...
Autre moyen de transport amusant, le bus. Que celui qui s'est plaint un jour d'être tassé dans un bus en France aille faire un jour chez nos amis indiens pour mieux comprendre la sensation d'une sardine dans sa boîte de conserve. J'ai d'ailleurs fini par adopter une nouvelle terminologie en inde : un bus est non-vide s'il y a des personnes debout (le contraire est extrêmement rare), il est plein s'il y a des personnes dehors (accrochés aux fenêtres, certains indiens arrivent à suivre le bus pendant plusieurs stations...). Enfin bref, très amusant sauf quand on revient d'un week-end fatigant et qu'on a un sac un peu lourd sur les bras. Mais admirons au passage l'habileté des contrôleurs locaux qui arrivent à se frayer un chemin au milieu de la foule et à poinçonner leurs tickets sans se casser la gueule, ça tient de l'exploit. Ah, aussi, j'ai eu l'occasion de voir quelque chose de spectaculaire lors d'une ballade le soir à Chennai, une explosion de roue de bus en direct. Très impressionnant, surtout que le bus à réussi à s'arrêter sans dommage !
La télé : Nous avons passé au total un certain nombre d'heures devant la télé, et ça a été la source d'une bonne partie de nos fous rires pendant le séjour. bon, c'est pas facile à décrire, il faut le voir pour le croire, mais la télé indienne, c'est vraiment terrible. Les programmes sont très peu variés : des matchs de cricket, des clips et des films. Les clips sont eux-mêmes tous calqués sur le même modèle : un playboy indien ridicule et une charmante indienne en duo sur fond de montagnes ou autre décor grotesque, parfois un groupe de danseurs en plus, le tout est d'un romantisme kitsch du plus bel effet (la palme à un clip où l'indien est déguisé en poisson argenté et l'indienne en poisson doré, avec des bancs de poisson rouges traversant l'écran, il nous a fallu dix minutes pour nous en remettre). Évidemment, tout cela reste très soft (les couples font la plupart du temps semblant de s'embrasser, mais pas question de passer à l'acte) mais souvent hyper suggestif dans les limites imposées, ce qui donne des choses assez étonnantes.
Autre denrée estimable à la télé indienne, le film d'action des années 80. Un héros très ténébreux se fait piquer sa fiancée par un gros méchant très très méchant (lunettes noires et cigare de rigueur), alors il se fâche tout rouge. Ça fait très mal ... aux zygomatiques ! Les combats sont hilarants tellement c'est mauvais : effets spéciaux foireux, gars qui volent à travers les murs au ralenti, infirmes qui se battent (ah, le gars qui s'est fait couper les bras et qui fout cinq méchants à terre juste en leur mettant des coups de boule !), c'est grandiose. J'ai ramené un ou deux DVD d'Inde mais j'ai pas encore pris le temps de regarder entièrement, croisons les doigts pour que ce soit du bon (enfin du mauvais).
Autre expérience amusante : aller regarder un film en tamoul (non sous-titré, bien sûr) au cinéma. Les autres spectateurs se demandaient un peu ce qu'on foutait là, certains nous ont d'ailleurs demandé si on comprenait quelque chose. De fait, évidemment, on ne comprenait pas un mot des dialogues, mais bon, ce n'empêche pas de très bien suivre les péripéties, en l'occurrence un couple de jeunes indiens qui font le trajet Hong-Kong-Inde clandestinement, et passent les frontières les unes après les autres en usant de méthodes pour le moins abracadabrantes (la plus grotesque à mon goût étant le déguisement en écolières à vélo). Enfin bref, rien d'inoubliable, mais toujours quelques bastons et chansons grotesques (et aussi un passage d'arnaque de touristes grandiose) pour nous donner l'occasion de rigoler un bon coup (en étant les seuls dans la salle, accessoirement, car les indiens prennent apparemment très au sérieux ce genre de scène, comme quoi le second degré est probablement tout ce qu'il y a de plus involontaire). Un bon moment donc, mais un conseil : ne pas tester une glace indienne bizarre au resto en sortant du ciné (ni à aucun autre moment de votre séjour, d'ailleurs), c'est vraiment dangereux !
Le CMI : J'ai en fait peu de choses à dire sur la partie sérieuse de mon séjour. Le CMI est un institut de recherche et d'enseignement, un peu comme l'ENS, mais en beaucoup plus petit. Le bâtiment qui l'accueille est un bête immeuble dans un quartier animé de Chennai, mais il faut savoir qu'il existe pour le repérer. Pas le moindre signe disctinctif avant d'arriver au troisième étage, qui constitue à lui tout seul la moitié de l'Institut ! Du coup, l'atmosphère est particulièrement familiale, et on n'hésite pas à venir embêter le secrétaire (qui s'occupe de tout au CMI) pour des détails. L'essentiel des journées se passait à faire et préparer les cours et à discuter via les PC de nôtre bureau (qui ont été fortement sollicités durant ces six semaines) avec les amis restés en France. Pour ce qui est des cours eux-mêmes, je laisse ceux que ça intéresse consulter le rapport officiel que j'ai fait de mon séjour, il n'y a de toute façon pas grand chose à en dire (si ce n'est que j'écris comme un sagouin, mais je le savais déjà, et que ma vision de l'anglais ne coïncidait pas exactement avec celle de mes rares élèves, mais que dans l'ensemble, ils avaient l'air de bien comprendre ce que je faisais). Pour le reste, dans la mesure où j'avais déjà décidé d'arrêter la recherche lors de mon séjour en Inde, je n'ai pas eu beaucoup l'occasion de discuter avec les chercheurs sur place. En fait, dans la mesure où je connaissais déjà bien Matthieu, nous avons passé plus de temps ensemble qu'avec les autres personnes du CMI, ce qui ne nous a pas empêché par ailleurs de nous imprégner le plus possible de la culture indienne.
Les excursions : Enfin, même une fois à Chennai, nous n'avons pas laissé tomber le côté touristique, puisque nous sommes allés nous balader à peu près tous les week-ends. Je finirai donc ce journal par la description de nos excursions dans quelques-uns des plus beaux paysages de l'Inde du Sud.
La ville de Madurai est beaucoup plus agréable que Chennai (bien qu'étant également assez grande). Le centre de la ville est essentiellement piéton et l'atmosphère globalement plus détendue. Principale curiosité du coin, le Sree Meenakshi Temple nous occupe tout l'après-midi. C'est un temple immense, avec une bonne dizaine de gopuram (les espèces de pyramides ; pour ceux qui veulent voir à quoi ça ressemble, tapez gopuram sur Google Images, au moment où j'essaie, la première image renvoyée provient justement du temple de Madurai) qui ont la particularité d'être entièrement peints. Quand on voit le nombre de personnages sculptés présents sur chaque gopuram, cela doit représenter un travail considérable ! D'autant plus que, pour être en si bon état, les peintures doivent être refaites régulièrement. Autre particularité du lieu, le temple est encore actif, et est donc plein de fidèles (sûrement plus que de touristes, en fait !), ce qui lui donne un côté mystique beaucoup plus naturel que les autres temples que j'avais jusqu'alors visités. L'inconvénient est que les non-hindous ne peuvent pas se balader partout, mais il reste beaucoup de choses à voir, du mandapam aux mille colonnes (un mandapam est une grande salle pleine de colonnes, mais là, n'allez pas vérifier sur le web, c'est un échec ; en l'occurrence, on a compté, ils ne mentent pas de beaucoup) à la galerie marchande, où des invraisemblables babioles en plastique sont vendues aux touristes au beau milieu d'un lieu sacré ! Difficile d'ailleurs de convaincre les vendeuses que, non, décidément on ne veut pas de leur atroce bracelet de cheville en ferraille. On est presque tenté d'en acheter un (pour le prix que ça coûte...) pour ne plus être embêté ensuite.
Autres curiosités valant le coup d'oeil à Madurai, un palais à l'architecture résolument musulmane, et un musée consacré à Gandhi qui expose quelques reliques du Mahatma. On reste perplexe devant le soi-disant manteau tâché de sang qu'il portait le joue de sa mort : combien de musées en Inde possèdent le même (et à chaque fois indiscutablement authentique) ? Ce qui est certain, c'est que Gandhi reste une idole dans le pays plus d'un demi-siècle après sa mort.
Ce n'est naturellement pas une raison pour se priver de la visite de la ville, qui n'a pas grand chose de mémorable à offrir (si ce n'est peut-être le Vidhala Sousa, bâtiment que les guides nous assurent être de style néo-dravidien, ce que personnellement je me garderai bien de contredire), mais est plus verte que la moyenne des grandes métropoles indiennes (et les bâtiments officiels y sont ... rouge vif, ce qui ne manque pas de frapper au premier abord ; de toute façon, les indiens n'ont peur de rien, on a trouvé au milieu du jardin botanique une horloge naturelle kitchissime avec des statues de Blanche-Neige et les Sept Nains éparpillées sur le gazon alentour). Autre aspect visible, la ville se veut moderne et libérée. Ça donne des choses parfois étranges, comme ces jeunes qui se baladent en blouson de cuir noir dans un quartier copié sur le modèle occidental, mais ça permet en tout cas de faire la seule tournée des bars de tout mon séjour en Inde. Rien de révolutionnaire par rapport à ce qu'on trouve dans le Quartier Latin (si ce n'est que la période de grande affluence semble être le dimanche en début d'après-midi...), mais c'est toujours un plaisir de siroter un cocktail, devant un match de cricket pour changer. Autre souvenir amusant de notre séjour à Bangalore, un restaurant plus ou moins chic ayant poussé le concept de lumière tamisée à l'extrême : impossible de lire son menu sans le côté à la lampe. Au moins, on ne risque pas de se plaindre du contenu de l'assiette, on ne le voit pas.
Pour ceux qui ne connaissent pas leur géographie indienne sur le bout des doigts, le Kerala est un état côtier à l'extrême Sud-Ouest de l'Inde, et sa particularité est d'être parsemés de canaux le long des côtes, cibles idéales des croisières pour touristes paresseux. Mais pour commencer notre week-end, nous avons décidé d'un peu plus nous investir en nous baladant à Kochi, ancienne ville coloniale portugaise. Déjà, dès l'arrivée, le climat est différent de ce qu'on avait sur la côte Est à Chennai : végétation luxuriante (des palmiers partout) et une douceur de vivre qui nous rappelle enfin qu'on est sous les Tropiques. Le temps est d'ailleurs à la limite du supportable pour moi (il fait chaud et surtout très humide), mais la ville est très agréable. Les fameux filets de pêche chinois attirent l'attention des touristes (on se sent beaucoup moins extraterrestre ici au vu du nombre d'européens), quelques belles églises et musées complètent la visite, et la cuisine kéralaise est un régal (même le poisson, cuit dans une sauce à base de lait de coco, deviendrait presque bon !). Bref, on a un peu l'impression d'avoir découvert un coin de paradis sur Terre.
Le pire (ou plutôt le mieux) c'est que le meilleur est encore à venir. Le lendemain, nous embarquons pour la classique croisière sur les backwaters (les canaux évoqués plus haut) en compagnie d'une brochette de touristes pour la plupart occidentaux. C'est parti pour huit heures de navigation tranquille au milieu des palmiers, ça peut paraître tout bête mais c'est un vrai bonheur de se laisser porter au fil en admirant les paysages sublimes, de découvrir une maison sur pilotis au beau milieu de la jungle, de manger un délicieux ananas frais en guise de déjeuner, et d'admirer un splendide coucher de soleil sur un lac survolé par des dizaines d'oiseaux attirés par la récolte des filets de pêche chinois. Dans ces condition, j'arrive même à faire de belles photos (en en effaçant une bonne moitié sur la cinquantaine que j'ai prises dans la journée, tout de même ;-) ), c'est dire. Sans aucun doute la plus belle journée de mon séjour, avec en prime une fin de parcours rocambolesque pour arriver à Varkala avant la nuit et y dîner sous les étoiles. Ben oui, panne d'électricité, chose très courante dans le coin, mais un peu pénible quand on veut s'installer dans sa chambre d'hôtel et qu'on y voit déjà plus rien depuis un moment...
Le lendemain, journée farniente au programme, mais comme nous ne reculons devant aucun sacrifice, nous sommes debout dès six heures du matin. Pourquoi diable tant de hâte, me direz-vous ? Tout simplement pour profiter de la plage avant que le soleil ne devienne un ennemi redoutable, et accessoirement que les touristes ne l'envahissent. Bon, la plage est grande, mais là, on est vraiment loin d'être seuls, ce qui se comprend aisément tellement l'endroit est superbe. Une plage de sable fin en-dessous d'une falaise décorée de palmiers, les pêcheurs s'affairant près de leurs bateaux, une eau à une température idéale (mais des courants hyper traîtres et des vagues assez violentes, Matthieu y a d'ailleurs laissé une paire de lunettes...), tout ce qu'il faut pour que passer la journée à la plage devienne presque envisageable, même pour moi. Enfin bref, je conseille vivement le coin pour ceux qui ont envie de se faire un séjour sous les cocotiers, mais faites vite, car les cimetières de bouteilles en plastique et autres bâtiments en construction au bord de la falaise ne laissent guère envisager un avenir rose...
La dernière journée sera beaucoup plus calme, nous sommes arrivés à Trivandrum (enfin, maintenant ça s'appelle officeillement Thiruvanantapuram - à vos souhaits), capitale de l'État. Pas grande chose à y faire, mais nous avons quand même l'occasion d'assister à une démonstration de kalaripayatt, l'art martial local, ce qui est toujours intéressant. Et puis j'en profite pour me faire couper les cheveux par un artisan du coin, apparemment tellement content de coiffer un rouquin (sûrement pour la première fois de sa vie) qu'il semble ne jamais être décidé à ma lâcher (le tout pour moins d'un euro). Ensuite, retour douloureux vers Chennai. À l'aller, nous avions pu avoir un train, mais là, ce sera dix-sept heures de bus (aïe), sans compter l'heure et demie supplémentaire dans un bus local ultrabondé pour revenir de la gare routière (qui a changé d'endroit récemment et qui ne figure donc sur aucun plan dans les guides, ce qui ne facilite pas les choses). Sieste garantie toute la journée au bureau après ça, mais l'agréable sensation d'avoir atteint une sorte de sommet dans notre séjour ce week-end.
À la fin de cette après-midi, je me sépare de Matthieu, qui préfère rentrer directement à Chennai (la pauvre a des exposés à faire au CMI la semaine suivante), pour continuer en direction de Pondichéry, où je passerai la journée de dimanche. En fait, pas grand-chose à voir dans notre ancienne colonie. L'influence française ne s'y fait plus sentir que par le nombre d'indiens y parlant notre langue, la présence d'une certaine quantité d'expatriés, et quelques bâtiments officiels d'un kitsch absolument épatant. C'est tout de même pour moi l'occasion de manger un repas français dans un des quelques restos où se bousculent les européens vivant à Pondichéry. On y trouve du Camembert cheese à un prix annihilant toute envie de vérifier qu'il a bien le même goût que chez nous, mais je me contente d'un repas classique à base d'escalope à la crème et aux champignons. L'effort des cuisiniers est louable, ça a même une bonne allure, mais ce n'est pas tout à fait ce qu'on pourrait espérer du même plat dans un restaurant parisien, et ça coûte évidemment bien plus cher qu'un repas indien. Enfin bon, c'est tout de même sympathique, et ce court séjour à Pondichéry m'aura aussi permis de revoir une des personnes avec qui j'avais réveillonné à Hampi quelques semaines plus tôt. Bon, maintenant je peux lui dire : Pondi, c'est peut-être sympa, mais je crois que je vais retourner vivre à Paris quand même.
Conclusion
Voilà, les dix semaines auront finalement passé relativement vite, et après quelques derniers achats de souvenirs (entre autres un sari dont je laisse à mes fans le soin de deviner la couleur), il est temps de remonter dans l'avion. Assez étrangement, si la perspective de revoir tout mes amis à Paris me réjouit naturellement, l'attente du retour me semblait beaucoup moins forte pendant les dernières semaines qu'au début de mon séjour. En tout cas celui-ci m'aura permis de réellement me ressourcer, non pas tant physiquement (j'ai quand même perdu 4 kilos pendant ces dix semaines, que j'ai certes largement repris depuis) que moralement. Et surtout il m'a donné envie de repartir loin, à l'aventure (naturellement, tout est relatif, on n'est jamais réellement perdu en Inde, mais je me suis rendu compte que je préférais cette façon de faire au jour le jour à un voyage trop organisé où on ne prend pas le temps de laisser ses envies décider), à la découverte d'un pays, d'une culture, de gens différents. Et je ne peux que conseiller à tous ceux que ça tente de voyager vers de nouveaux horizons de se lancer, sans se poser trop de questions. un peu de linge dans le sac à dos, et hop, pas besoin de plus pour passer des vacances inoubliables.