Mon avis personnel sur les disques de Gamma Ray
- Gamma Ray - Heading for tomorrow (1990) ★ ★ ½
En 1990, alors qu'Helloween vient à peine d'exploser avec les
deux volets de Keeper of the seven keys, c'est déjà la crise dans
le groupe : certains veulent continuer dans la même veine, d'autres
veulent explorer d'autres horizons. Les seconds ayant finalement eu
raison (ce qui ne va pas vraiment conduire le groupe à pondre des albums
inoubliables dans les années qui suivront), Kai Hansen se barre et va
créer son propre groupe, avec lequel il enregistre un "Keeper 3" à peine
déguisé, la structure de ce disque étant complètement pompée sur celle
du dyptique d'Helloween (intro pompeuse débouchant sur un titre speed,
chanson conclusive interminable). Le risque d'être comparé au classique
ultime qu'est le premier Keeper (je ne suis toujours pas un grand fan du
second volet) n'est que partiellement payant : pour sa première sortie,
Gamma Ray s'en sort honorablement, mais en fait un peu trop (les titres
délirants Money et Hold your ground partent vraiment
complètement en cacahouète, et la ballade The Silence est hors
sujet), et est accessoirement desservi par une production datée. En
fait, il faut attendre le morceau de bravoure de la chanson-titre pour
voir l'album décoller au-delà du sympathique un peu agaçant, même si les
14 minutes (bah oui, fallait bien faire un peu plus long que les
ex-copains d'Helloween...) sont atteintes à grands coups de longueurs un
peu voyantes (le passage atmosphérique au milieu s'éternise).
Finalement, tout cela confirme que ce disque ressemble comme deux
gouttes d'eau au deuxième Keeper (qui naviguait lui aussi sur le fil du
rasoir), mais n'est hélas pas au niveau du premier.
- Gamma Ray - Sigh no more (1991) ★ ★ ★
Après un premier album sous très forte influence helloweenienne, Kai
Hansen, apparemment influencé par le sale état dans lequel se trouve le
monde (oui, ça ne date pas d'hier, ça), propose un deuxième essai
beaucoup moins orienté "happy metal", nettement plus heavy, et même
globalement sombre. On retrouve certes un ou deux titres bien speed (pas
les plus inspirés du lot d'ailleurs), mais la plupart du temps, ça ne
rigole guère, et même un titre en apparence joyeux comme Rich and
famous laisse poindre une forte ironie sous-jacente. Combiné à une
volonté d'expérimentation assez nette (les cuivres de (We won't) stop
the war, l'ambiance étonnante de Dream healer, entre heavy
classieux et délires sous psychotropes), ça donne un résultat pas
toujours satisfaisant, mais finalement beaucoup plus intéressant que
leur première tentative. Les refrains sont efficaces (sur As Time
goes by par exemple), les ambiances variées, mais on regrettera
encore un son pas fameux (assez confus notamment sur le morceau
d'ouverture, Changes, qui à l'image de tout l'album propose
beaucoup de choses sans être une réussite indiscutable). Finalement, on
tient là un véritable album "début de discographie", plein de promesses
mais pas très sûr de la direction à prendre. Je sais déjà en
l'occurrence que la suite des aventures de Gamma Ray se fera à nouveau
sous le signe d'un power metal beaucoup plus festif, ce qui justifie
peut-être encore plus de jeter une oreille à ce disque à part dans leur
legs.
- Gamma Ray - Insanity and genius (1993) ★ ★ ★ ½
Troisième album pour Gamma Ray (le dernier avec Ralf Scheepers au chant,
avant que Kai Hansen ne reprenne le micro), qui semble encore chercher
ici sa voie : si les trois premiers titres sont clairement orientés
speed, avec du bon vieux refrain choral un peu facile comme on l'aime
(dommage que la production soit une nouvelle fois un peu datée, avec un
son trop riche, car dans le genre c'est vraiment très bon), le groupe
expérimente ensuite beaucoup plus, dans des directions assez variées.
Des bruitages électroniques qui lorgnent carrément vers la techno sur la
curieuse reprise Gamma Ray, une ballade avec piano queenesque
(Heal me, comme d'habitude je ne suis pas vraiment convaincu) et
un ou deux titres délirants rappelant le style happy metal des débuts
d'Helloween (Future madhouse réussit à éviter le ridicule,
mais Brothers est une conclusion navrante d'une nunucherie
insupportable). Il y a donc un peu à boire et à manger dans tout ça,
mais nettement plus de positif que de raté, avec notamment une première
moitié de disque très réussie. Le groupe n'est pas encore complètement
arrivé à destination, mais il est clairement sur la bonne voie.
- Gamma Ray - Land of the free (1995) ★ ★ ★ ★
Le quatrième album de Gamma Ray est généralement considéré comme son
premier grand album de maturité, et c'est pour une fois assez justifié.
Après avoir un peu tâtonné sur les précédents, Kai Hansen prend les
choses en main sur celui-ci, et le micro par la même occasion (ce qui
n'est pas forcément une excellente nouvelle quand on se souvient des
débuts d'Helloween, mais là il s'en sort assez correctement), et propose
un album cohérent et efficace, en laissant pratiquement tomber le côté
speed festif (à part sur Time to break free, où intervient
Michael Kiske, et qui n'est pas vraiment à sa place sur cet album) pour
privilégier des titres heavy mélodiques au tempo plus retenu mais à la
construction soignée. Rebellion in dreamland, Gods of
deliverance ou l'épique Abyss of the void sont vraiment de
belles réussites, et les chutes de tensions sont rares (j'aime moins
Man on a mission, un des rares titres speed du lot, trop
brouillon à mon sens), malgré la présence d'intermèdes de moins d'une
minute assez curieusement insérés à plusieurs moments dans l'album (ils
sont plutôt réussis, même si les synthés ont bien vieilli, alors
admettons). Un très bon classique du genre, tout simplement.
- Gamma Ray - Somewhere out in space (1997) ★ ★ ½
En plus d'avoir mis du temps à trouver son style sur ses premiers
albums, Gamma Ray a aussi mis du temps à trouver un line-up stable
puisque les changements ont été incessants jusqu'à ce cinquième disque,
qui voit l'arrivée d'un nouveau guitariste et d'un nouveau batteur
(ensuite, ça ne bougera plus pendant un bon moment). Et ces changements,
accompagnés aussi d'une imagerie un peu renouvelée (on est à 100% dans
le trip SF ici, avec bruitages et samples assez désuets), s'entendent
vraiment niveau sonore. Production nettement plus clinquante, batterie
rouleau-compresseur, on a changé d'ère... et c'est dommage, car ça
appuie assez nettement là où ça fait mal : cet album est bourrin (à
l'image du nouveau batteur, dont je n'aime vraiment pas l'absence totale
de subtilité, à grands coups de double grosse caisse permanente). Pas de
respirations (même la ballade Pray, par ailleurs assez mauvaise,
est d'une grandiloquence malvenue), des titres vraiment speed enchaînés
les uns aux autres, la variété et les constructions réfléchies de
Land of the free semblent déjà bien loin. Même les interludes
manquant de finesse (le solo de batterie de Cosmic, à jeter à la
poubelle), et les quelques réminiscences de happy metal lourdingues
(Rising star, Lost in the future). Et malgré tout, on sent
encore qu'il y a un groupe plus que compétent derrière tout ça, les
premiers titres, malgré le côté passage en force, sont efficaces avec
leurs petites pointes orientales, et les claviers sautillants de
Valley of the kings excellents (avec l'étonnant prélude The
Landing et son ambiance inimitable, c'est le sommet de l'album).
Juste quelques retouches à faire, et Gamma Ray redeviendra peut-être un
très bon groupe de speed mélodique.
- Gamma Ray - Power plant (1999) ★ ★ ★ ★ ½
Un album avec un tel titre juste après un disque que j'avais très
moyennement aimé car beaucoup trop bourrin, ça ne sentait pas très bon.
Et pourtant, Gamma Ray propose ici son meilleur album, l'inspiration est
revenue et tout ce qui semblait poussif sur Somewhere out in
space passe ici comme une lettre à la poste. Pourtant, ça commence
bien brutalement (malgré une petite intro aux relents orientaux
cohérente avec la pochette très Stargate de l'album), Anywhere in the
galaxy est un hymne speed d'une absence de finesse totale mais
complètement irrésistible. Les titres speed vont d'ailleurs s'enchaîner
sans grand répit mais avec une belle inspiration mélodique, un plus
grand équilibre, et surtout une certaine variété d'inspiration malgré
tout (on est carrément sur les terres de Rhapsody sur un Wings
of destiny, quand Send me a sign est un titre joyeux au
refrain inoubliable très typé Helloween). Même la curieuse idée
de reprendre le tube It's a sin s'insère parfaitement dans ce
disque festif à la production spectaculaire. Quelques titres plus
faibles en fin d'album (en particulier, le Armageddon conclusif
n'est pas le sommet épique qu'il aurait sûrement fallu), mais l'ensemble
reste vraiment excellent.
- Gamma Ray - No World order ! (2001) ★ ★ ★
Après un Power plant de tout premier ordre, il ne restait plus à Gamma
Ray qu'à confirmer qu'il avait enfin fait son trou comme porte-étendard
du speed metal. Hélas, le tournant des années 2000 va au contraire
signifier pour le groupe un virage vers une musique moins rapide,
nettement plus influencée par des groupes de heavy mélodique
traditionnels, mais surtout une baisse d'inspiration certaine. La
combinaison des deux va contribuer à faire apparaître dans cet album et
les suivants des similitudes avec certains titres antérieurs des idoles
de Kai Hansen qui ne vont pas manquer de faire crier au plagiat chez les
plus complotistes des fans du groupe. Je ne prête habituellement pas
vraiment une grande attention à ce genre d'accusation (tout simplement
parce que ma culture metal n'est pas assez étendue pour les remarquer
!), mais là il faut quand même bien avouer que la similitude entre le
Rapid fire de Judas Priest et le Solid proposé par
Gamma Ray sur ce disque est trop flagrante pour être une simple
coïncidence. Un hommage ? Dans ce cas, autant l'annoncer ou carrément
faire une reprise, ça laisserait moins planer le doute. Là, même si le
titre est très bon (forcément...), une certaine gêne s'installe. Tout
comme sur The heart of the unicorn, où Hansen tente très
maladroitement de singer le chant suraigu de Rob Halford alors qu'il
n'en a pas du tout les capacités vocales (il est d'ailleurs très moyen
niveau chant sur tout cet album). Après, si on met de côté ces
désagréments, l'album reste plus que correct, avec une intro symphonique
aux choeurs monstrueux inattendue (mais excellente !) enchaînée sur un
Dethrone tyranny très efficace (l'un des seuls titres encore
speed sur ce disque, au moins sur la fin de la chanson). Les titres
mélodiques plutôt bien troussés s'enchaînent ensuite, sans chef-d'oeuvre
mais avec peu de déchet, jusqu'à une ballade finale très ampoulée mais
plutôt convaincante dans son genre. Rien de foncièrement novateur dans
tout ça, mais du travail bien fait, aux réserves mentionnées plus haut
près.
- Gamma Ray - Majestic (2005) ★ ★ ★ ½
Après le virage heavy mélodique de l'album précédent, Gamma Ray a laissé
couler un peu d'eau sous les ponts (quatre ans, c'est assez long par
rapport à leurs standards), mais semble revenir avec une furieuse envie
d'en découdre et d'aller explorer de nouveaus horizons franchement
violents pour eux, avec un My Temple qui ouvre le disque de façon
tonitruante (et qui est assez excellent qui plus est !). C'est tout de
même un trompe-l'oeil, car les titres suivants vont alterner entre du
speed aux relents orientaux déjà entendu mille fois, et à nouveau une
majorité de titres heavy, mais cette fois une inspiration plus
clairement maidenienne que priestienne (l'intro de Blood
religion, entre autres...). Peut-être parce que je préfère Iron
Maiden à Judas Priest, j'y trouve un certain regain
d'inspiration, même si Hansen imite aussi mal Dickinson que Halford (il
semble surtout vocalement fatigué, à vrai dire), et si les titres qui
tentent de sortir un petit peu des sentiers battus sont les moins
réussis (le côté franchement décousu de la chanson-titre, assez
difficile à cerner). Finalement, c'est quand il donne dans le classique
rebattu que Gamma Ray reste le plus convaincant, avec ses claviers
gentillets et ses refrains efficaces chantés en choeur (Hell is thy
home, How long). C'est sûr, les allemands n'inventent plus
rien depuis quelque temps, mais ce disque-là reste plus que correct,
sans les petite réticences que j'avais pour le précédent.
- Gamma Ray - Land of the free II (2007) ★ ★ ½
Il y a un côté provocateur chez Kai Hansen. Après deux albums ayant créé
la polémique à cause d'emprunts plus ou moins marqués, non seulement il
récidive de façon inratable (il faut dire que quand on pompe allégrement
les albums de la période dorée de Maiden sur Opportunity, ça ne
risque pas de passer inaperçu...), mais en plus il présente ce nouvel
album comme une suite de l'un des classiques de Gamma Ray. Ce n'est
d'ailleurs pas totalement absurde, puisqu'un certain nombre de titres
ici reviennent à un style très helloweenien (To Mother earth>,
From the ashes) à la limite du happy metal, un peu délaissé par
le groupe depuis quelques années. Pour le reste, rien de nouveau sous le
soleil, Hansen est toujours limite au niveau du chant, mais on a quand
même droit à un bon pot-pourri de heavy speed mélodique, avec quelques
titres vraiment réussis (Into the storm) et une majorité qui sont
efficaces mais n'ont rien de mémorable. Un exemple assez typique d'album
plutôt plaisant mais qui n'apporte rien à la discographie du groupe.
Encore une fois, on ne peut s'empêcher de penser que, quitte à faire du
pas très neuf avec beaucoup de vieux, Gamma Ray ferait mieux d'assumer
complètement et de faire un vrai on album de reprises...
- Gamma Ray - To the metal ! (2010) ★ ★ ½
Malgré une perte de vitesse évidente, et un passage chez un nouveau
label (le son est moins bon que sur les disques précédents mais ça reste
très très correct), Gamma Ray continue à sortir un disque de temps à
autres, et n'a bien sûr rien changé de sa politique discutable
d'hommages plus ou moins discrets. Et pourtant, cet album commence bien
: Empathy (qui fait fortement penser à Iron Maiden) ouvre le disque de
fort belle manière, Time to live a déjà été entendu mille fois
(du speed sauce Helloween au refrain efficace) mais est
indiscutablement entraînant, on se dit que finalement on va passer un
très bon moment. Et puis arrive la chanson-titre dont le manque de
finesse (c'est un euphémisme) interroge. Et la fin du disque est une
longue suite de titres où Gamma Ray fait tout ce qui lui passe par la
tête (au moins ça s'éloigne des influences habituelles), sans grand
souci de cohérence (les couplets piaillés de Shine forever sans
rapport avec le refrain très mélodique), mais surtout en tombant
franchement dans le n'importe quoi dans les dernières pistes (le passage
solo de Chasing shadows, et surtout le naufrage de la ballade mal
nommée No need to cry). Bien sûr, il est difficile de reprocher
au groupe de se diversifier un peu après l'avoir accablé pour son manque
de prise de risque, mais force est de constater qu'ils sont meilleurs
quand ils font du speed bien calibré...
- Gamma Ray - Empire of the undead (2014) ★ ★ ½
Cet empire des morts-vivants, dont la pochette et le titre laissent plus
penser à un bon vieil album de thrash qu'à une livraison d'un groupe
heavy speed, sera-t-il le chant du cygne de Gamma Ray ? On peut le
penser puisque, malgré le recrutement d'un nouveau chanteur pour
soulager Kai Hansen en 2015 (donc juste après la sortie de ce disque),
ce dernier n'aura pas enregistré le moindre album studio en 10 ans, Kai
étant entre temps parti rejoindre ses vieux potes chez Helloween.
Bon, mais au moins, s'il s'agit de la fin de la discographie du groupe,
sera-t-elle à la hauteur, après quelques albums moyens et entachés de
plagiats plus ou moins visibles ? S'il n'est clairement pas pire que ses
prédécesseurs, cet album n'est pas franchement transcendant non plus.
Varié, oui, mais pas aussi agressif que ce que le visuel promet, et trop
souvent poussif (la ballade queenesque Time for deliverance est
chiante au possible, mais quelques titres heavy comme Pale rider
ne valent pas beaucoup mieux), avec un Kai qui rame pas mal sur le
chant. Pourtant, les neuf minutes du très maidenien Avalon
ouvrent le disque de façon ambitieuse, mais il faut bien admettre que le
Gamma Ray des années 2000 et postérieures a du mal à fournir plus que du
réchauffé correct. Allez, le titre final, I will return, est
plutôt rigolo avec ses allusions à Terminator (oui, le film !). Si on
peut regretter que le groupe ait quitté la scène par la petite porte, il
était de toute façon assez clair qu'il ne retrouvait plus le niveau de
ses meilleurs albums.