Mon avis personnel sur les disques d'Ensiferum
- Ensiferum - Ensiferum (2001) ★ ★ ★ ½
Histoire de se reposer un peu les oreilles après une dose de metal
technique ou extrême, un peu de viking metal ne peut pas faire de mal.
Mais attention, du viking metal versant facile d'accès, avec beaucoup de
mélodies faciles très souvent inspirés d'un folklore médiévalisant qui
n'a sûrement pas grand chose de viking mais passons (on est plutôt
quelque part du côté dansant de gigues plus ou moins irlandaises), des
choeurs clairs joyeux comme il faut, une batterie en mode cavalcade à
peu près permanente et un côté speed épique assez prononcé, et bien sûr
une voix black pour accompagner le tout. Euh, y a pas eu erreur de
casting là ? Ah ben non, en fait, on a vraiment un chant complètement à
côté de la plaque, mais bon, vu ce que donne le chanteur principal quand
il s'essaye au chant clair (sur Abandoned notamment), on va
volontiers garder la version extrême, après tout ça donne un certain
cachet à un groupe qui se vautrerait sinon furieusement dans la
caricature. Mais en même temps, quand c'est bien fait et entraînant, et
qu'on aime ce genre de choses comme moi, que demander de plus ? Bon,
l'introduction en mode console 8-bit laisse craindre le pire, mais
Hero in a dream est un bijou de speed folklo, Guardians of
fate étale au grand jour son mauvais goût (ces choeurs, mon dieu !)
de façon complètement irrésistible, la mélodie de Little dreamer
reste en tête, les passages en guitare acoustique sonnent bien, bref on
finit par se rendre compte que, dans un genre assez peu défendable,
c'est quand même un bien bon album !
- Ensiferum - Iron (2004) ★
Après un premier album d'une fraîcheur épatante, Ensiferum allait-il
réussir à transformer l'essai ? Hélas non, là où leur disque éponyme
semblait réussir tout ce qu'il tentait ou presque, celui-ci aligne les
titres au mieux maladroits, au pire franchement ratés. La construction
des titres n'est plus aussi limpide et part même parfois dans le
n'importe quoi (Tales of revenge), la chant est toujours mauvais
quand il est clair (sur Lost of despair, dommage car c'est une
chanson où il est au coeur du concept) mais commence à également à
forcer de façon assez moche sur le versant black (Sword chant),
les influences deviennent de plus en plus difficiles à décrypter (ce ne
sont plus des gigues irlandaises qu'on entend dans l'intro Ferrum
Aeternum, mais bien une espèce d'improbable BO de western spaghetti
oublié), et surtout les mélodies sont beaucoup plus quelconques, et ça
ne pardonne pas dans ce genre de musique (la chanson titre qui lorgne
vers un style à la Rhapsody, si ce n'est pas accrocheur, ça
devient vite usant). En fait, les meilleurs moments sont peut-être
l'interlude instrumental Mourning et les dernières pistes du CD,
qui retrouve un peu d'allant avec Lai lai hei (malgré une intro
bien longuette) et se conclut plutôt joliment avec une ballade chantée
par une invitée (en chant clair, peut-être qu'ils devraient penser à
virer leur chanteur extrême finalement, histoire d'avoir quelque chose
qui colle définitivement mieux à leur musique). Bon, la note est sévère,
c'est pas nul non plus, mais il faut bien admettre que c'est le genre de
disque qui n'a absolument rien pour se démarquer du lot.
- Ensiferum - Victory songs (2007) ★ ★ ★
Après un deuxième album décevant, Ensiferum a plus ou moins écouté mes
conseils puisque le chanteur a été remplacé par un autre... dans le même
style en moins bien (le chant est toujours typé extrême, mais avec un
son vomitif particulièrement peu agréable). Bon, raté de ce point de vue
(et c'est quand même un gros point noir), mais le disque est malgré tout
nettement meilleur que son prédécesseur. En effet, l'inspiration est de
retour au niveau des compositions, avec sans surprise un mélange de
choeurs "vikings", de mélodies faciles à retenir, de cavalcades
soutenues par la batterie, d'héroïsme bon marché (après une intro "mise
dans l'ambiance" assez réussie, Blood is the price of glory
démarre très bien le disque), de danses plus ou moins folkloriques
(mention spéciale à l'addictive One More magic potion) et
d'intros aux flûtiaux quasi systématiques. Et justement, si l'album
n'arrive pas à dépasser le stade de la sympathique réussite, c'est bien
parce que ça sent quand même très fort le procédé un peu facile répété
chanson après chanson (avec tout de même la belle exception de
Wanderer, sorte de ballade lente en voix claire bienvenue) et
qu'on est en droit de se demander comment le groupe va réussir à évoluer
dans la mesure où sa musique se mord déjà bien la queue après seulement
trois albums (ça vaut d'ailleurs aussi pour les pochettes, quasi
identiques d'un album à l'autre).
- Ensiferum - From afar (2009) ★ ★ ★ ★
Je me demandais dans ma critique de leur album précédent ce qu'Ensiferum
allait bien pouvoir inventer pour renouveler un peu sa musique. La
réponse était en fait assez facile à deviner (et déjà partiellement
incluse dans certaines tentatives des albums précédents), il suffit
d'accentuer les inspirations "westerniennes" (on a carrément droit à des
citations de Morricone ou presque dans Stone cold metal, assez
jubilatoire mélange de "folk viking metal" et donc de musique de western
(y a même un piano de saloon à un moment), c'est n'importe quoi mais moi
je prends), et d'ajouter quelques touches orchestrales par-ci par-là
pour augmenter fortement le côté spectaculaire de la chose et en mettre
plein la vue, quitte à ce que ce soit un peu poudre aux yeux. On y perd
forcément sur certains aspects (les pistes plus introspectives comme le
Wanderer de l'album précédent n'ont plus trop leur place), mais
il faut quand même bien admettre que c'est rudement bien fichu. L'intro
mélancolique, la chanson à boire Twilight tavern, c'est pas
spécialement recherché, mais tant que les mélodies fonctionnent, y a pas
grand chose à redire. On sera un peu plus circonspect sur les deux
longues pistes (Heathen throne et sa suite qui conclut l'album)
qui s'essoufflent un peu sur la durée (plus de 10 minutes à chaque fois)
et ont pour le coup un côté BO de film un peu trop marqué (on pousse un
peu trop sur le côté grandiose, sur la fin de la première piste
notamment). Mais personnellement, c'est vraiment le genre de musique que
j'adore, alors je veux bien que les finlandais se calent sur ce style
pour quelques albums de plus.
- Ensiferum - Unsung Heroes (2012) ★ ★
L'album précédent d'Ensiferum avait semblé indiquer une volonté de la
part du groupe de se diriger vers quelque chose de nettement plus
spectaculaire, notamment avec l'introduction de touches orchestrales.
C'est encore autre chose pour ce nouveau disque : l'orchestre est
toujours là, mais relativement discret, et on revient à une influence
folklorique très nette, et surtout on a droit à un gros ralentissement
général du tempo pour proposer un album à l'atmosphère globalement
mélancolique, à peine entrecoupée de quelques pistes speed qui semblent
là uniquement pour contenter les fans de bourrinages épiques
(Retribution shall be mine notamment). Les mélodies sont belles,
mais gare tout de même à ne pas tomber dans la niaiserie, ce qui
s'approche dangereusement quand on a droit à du chant masculin en voix
claire (faut dire que la justesse n'est pas la qualité première du
chanteur). Ah oui, je ne l'ai pas précisé, mais on a droit ici à une
soprano qui partage les vocaux avec le chanteur usuel, pourquoi pas mais
ça a quand même tendance à pousser encore plus Celestial bond
vers un côté "ballade irlandaise un peu mielleuse" qui n'a plus rien à
voir avec du metal. On la retrouvera aussi dans la piste finale
Passion proof power, gros machin de 17 minutes qui mélange
absolument tout et n'importe quoi sans aucune cohérence (et parfois
aussi sans inspiration), on trouve déjà ça trop long quand on atteint la
moitié mais le pire est à venir avec des passages vraiment pitoyables
sur la fin (bruits de fermes, dialogues en allemand !?). Dommage car le
début était plutôt prometteur, mais globalement le groupe, dont le
potentiel reste très intéressant, n'a pas su tirer le meilleur de cet
album trop inégal (les très beaux passages chorals à la fin de
Burning leaves, ça pour le coup ç'aurait été à creuser un peu
plus).
- Ensiferum - One man army (2015) ★ ★
Après un Unsung heroes plutôt calme et introspectif, retour à
quelque chose de beaucoup plus directement épique (et à un orchestre
nettement plus présent), dans la lignée de From Afar. Dans la
lignée certes, mais beaucoup moins maîtrisé et franchement inégal une
fois de plus. Les pistes rapides tournent vraiment au bourrinage
caricatural (avec plein de choeurs histoire d'ajouter au côté épique),
comme sur Axe of judgement qui ouvre le disque (après la
sympathique intro orchestrale de rigueur) de façon vraiment trop
frontale, ou encore la chanson titre et sa batterie qui finit par
franchement taper sur les nerfs. On a à nouveau l'impression que les
influences se situent désormais beaucoup plus clairement du côté de la
BO de film un peu trop burné (même s'il y a toujours un fond de western
un peu rigolo caché derrière). Quelques réussites indéniables tout de
même, notamment un Cry for the earth pourtant pas très subtil
mais qui utilise les choeurs a cappella de façon vraiment convaincante
(de toute façon, je l'ai déjà dit, Ensiferum devrait creuser beaucoup
plus du côté des choeurs, y a clairement des choses sympa à faire avec).
Par contre, l'intervention féminine en chant clair au milieu, bof. Et
puis quand même, à côté des classiques du groupe, le disque est aussi
bien plein de trucs assez improbables, distrayants à défaut d'être
réussis : un mélange speed metal/dance improbable dans Two of
spades (c'est assez hilarant, mais objectivement vraiment pas bon),
un machin chanté en finnois (du moins j'imagine) qui sonne pourtant
comme un générique d'anime (Neito Pohjolan) et plein de bonus
plus ou moins sympa, dont une reprise de l'excellent générique de
Rawhide (original signé Dimitri Tiomkin). Globalement, il faut
bien l'admettre, c'est quand même à nouveau un album très moyen, même si
on passe de bons moments à son écoute.
- Ensiferum - Two Paths (2017) ★ ½
Ensiferum est vraiment un groupe frustrant : à chaque nouveau disque, on
aimerait aimer sans réserve la musique sympathique qu'ils nous
proposent, et apprécier les belles mélodies (il y en a encore beaucoup
dans celui-ci) sans avoir à émettre des réserves sur la réalisation.
Mais voila, leurs choix artistiques sont régulièrement suffisamment
mauvais pour gâcher au moins une partie du plaisir. Déjà, il y a un
problème récurrent au niveau des chanteurs. À leurs débuts, je me
plaignais du choix d'un chant guttural par forcément en adéquation avec
la composante folk de leur musique (mais plus avec le côté héroïque
également très présent), désormais il y a pas moins de trois chanteurs
différents... et aucun n'est vraiment convaincant ! Le chant guttural
est souvent forcé et moche (sur Way of the warrior, dommage car
le riff est assez irrésistible), le chant clair masculin est carrément
horrible (timbre laid, justesse approximative, par exemple sur l'affreux
machin pop Don't you say), et le chant féminin manque de
personnalité. Mais le principal défaut de la chanteuse, c'est surtout
qu'elle joue de l'accordéon, et que l'introduction de cet instrument
transforme hélas régulièrement la musique du groupe en gentille ambiance
kermesse de village... Mais malgré tout ça, il y a quelques titres speed
avec grosse présence orchestrale qui valent largement le coup (For
those about to fight for metal, malgré son titre ridicule) et un
excellent God is dead, dont on est toutefois bien obligé de
constater qu'il repompe allégrement la reprise de Rawhide
proposée par le groupe dans son album précédent. Au final, encore un
album qui aurait mérité un nettement meilleur traitement.
- Ensiferum - Thalassic (2020) ★ ★ ★ ★
Dernier opus en date des finlandais, cet album propose, comme on pouvait
s'y attendre au vu du titre, des ambiances globalement bien marines
(comprenez par-là que qu'il y a des bruits de vagues en fond la moitié
du temps et que la chanson de poivrots habituelle a été remplacée par
une chanson de matelots, faut pas non plus espérer trop de subtilité).
Mais surtout, les errements des albums précédents ont enfin été
corrigés, plus d'accordéon ni de chant clair faux, on a un groupe qui
tient la route, et accessoirement un retour à des orchestrations bien
tape-à-l'oeil, ce qui n'est évidemment pas pour me déplaire. C'est
parfois un peu trop (Rum, women, victory, ça tourne vraiment à la
caricature de folk-speed sans cervelle), surtout quand les chanteurs en
rajoutent (le chant clair aigu sur la fin de One with the sea
fait un peu mal aux oreilles et vient ternir un titre pourtant très
réussi). Mais la plupart du temps, ça fonctionne (Andromeda),
voire c'est carrément irrésistible (The Defence of the sampo et
son choeur sur le refrain, j'adore). Même la piste finale Cold
Northland qui en fait des tonnes dans la surenchère symphonique
(avec une belle intro au piano sur fond de vagues...) conclut de façon
efficace ce qui est peut-être bien le meilleur album du groupe. À
n'écouter tout de même que si on apprécie le genre.