Mon avis personnel sur les disques de Death
- Death - Scream bloody gore (1987) ★
Je ne rentrerai pas les débats consistant à essayer de déterminer si
Death est l'inventeur du type de metal qui porte aujourd'hui son nom,
mais une chose est indiscutable : à une époque où le thrash metal n'a
que quelques années derrière lui, on franchit un gros palier vers
l'extrême avec des disques de la trempe de ce Scream bloody gore. Le
titre et la pochette sont grotesquement caricaturaux ? Non, non, ils
annoncent juste la couleur, c'est exactement pareil point de vue musical
: thèmes volontairement outranciers (la liste des titres vaut son pesant
de cacahouètes, de Zombie ritual à Regurgitated guts,
c'est probablement ce qu'il y a de mieux dans l'album d'ailleurs), son
dégueulasse, et surtout chant horrible de rigueur, c'est en soi
extrêmement fatiguant. Mais comme en plus le fond musical est une espèce
de thrash technique rapide (dommage d'ailleurs car les quelques intros
lentes ne sont pas mal) sans aucune volonté de donner dans le mélodique
qui est forcément transformé en bouillie sonore par la volonté de ne pas
fournir un son un minimum propre, c'est à peu près inaudible. On a quand
même droit à des solos techniques et autres ruptures de tempo assez
arbitraires qui auraient pu donner un vague intérêt à l'ensemble, mais
c'est globalement beaucoup trop caricatural pour moi. Le reste de la
discographie du groupe est du même acabit ? Pas sûr d'aller au bout dans ce
cas (même s'il y a peu d'albums à écouter).
- Death - Leprosy (1988) ★ ½
Evolution dans la continuité pour ce deuxième album du groupe. Il y
clairement un effort pour équilibrer les choses, tant au niveau du
contenu (on n'a plus droit aux titres ridicules, c'est presque dommage,
mais surtout les chansons présentent une constructions plus réfléchie)
que du son, qui reste assez sale mais nettement moins moche que sur le
premier album (on garde bien sûr des guitares bien saturées, mais quand
même nettement audibles, c'est plutôt au niveau de la batterie que ça
reste à mon goût difficile). Niveau musical, c'est un peu plus posé (les
tempi ont globalement ralenti), on garde quand même des variations de
tempo assez abruptes et on insère des solos techniques relativement
souvent, qui ne sont pas aussi inintéressants que ce qu'on pourrait
craindre. Il y a même une sorte de touche mélodique par moments, qui
rend certains titres tout à fait passables (la chanson-titre qui ouvre
l'album, Left to die). Le reste du temps, je n'accroche toujours
que très peu à ce qui est proposé (c'est assez terrible, on est censés
s'en prendre plein la tronche en écoutant ce genre de musique, mais là
je m'ennuie plutôt...), et le chant de Schuldiner n'a pas vraiment
évolué et reste donc assez fatiguant. Globalement, ça ne me donne pas
envie de le réécouter.
- Death - Spiritual healing (1990) ★
Pour son troisième album, Death (ou plutôt son leader Chuck Schuldiner
puisque les musiciens qui l'accompagnent ne sont jamais les mêmes)
continue sa lente évolution : si le chant est toujours écorché, la
volonté d'avoir un son dégueulasse semble avoir à peu près complètement
disparu, et on va encore un peu loin dans la direction d'un metal plus
posé et assez technique que dans l'album précédent. Au point même de
devenir limite scolaire tant c'est carré, les guitaristes ont l'air de
s'appliquer à mort pour produire des choses qui sont pourtant parfois
d'une banalité affligeante (les gammes en intro de Killing spree,
ça ressemble à une mauvaise blague !), et le batteur s'emmerde
manifestement tout au long de l'album. Je dois bien avouer que je ne
suis pas loin de partager son sentiment, c'est très bien fait,
manifestement réfléchi au niveau de la composition, mais bon,
émotionnellement c'est vraiment l'encéphalogramme plat, de l'alignement
de notes sans âme, jamais un élément vraiment mélodique ou une rupture
de ton qui accroche l'oreille pour éviter de tomber dans un espèce
d'état de somnolence qui me semble encore une fois assez contradictoire
avec le type de musique produit...
- Death - Human (1991) ★ ★ ★
Plus j'avance dans la discographie de Death (j'ai triché, j'ai déjà
écouté une ou deux fois tous les albums restants), plus on oublie le
côté extrême (sauf niveau chant, hélas) pour se diriger vers une sorte
de démonstration technique où l'élément mélodique est de moins en moins
sacrifié (avec mêmes des fragments orientalisants par moments), plus ça
m'intéresse. Malgré tout, je reste encore mitigé concernant ce quatrième
album (on est pile poil au milieu de la courte carrière du groupe) :
franchement, ça part bien avec un Flattening of emotions qui a
vraiment une construction intéressante et de beaux passages à la pelle,
mais pourquoi cette batterie soûlante (et accessoirement cette fin
abrupte que je ne comprends pas) ? Les pistes qui suivent ressemblent
trop à la première (mais sont du coup également assez intéressantes),
toujours le même type de rythmes et de ruptures, c'est un peu lassant
(mais bon, le disque est très court, donc on n'a pas franchement le
temps de s'ennuyer cette fois-ci). Les vraies (bonnes) surprises
viendront un peu plus tard, avec d'abord des introductions inattendues
(celle extrêmement hachée de Secret face et surtout l'ambiance
assez space de Lack of comprehension). Et puis, il y a
l'instrumental Cosmic sea, complètement planant et hors cadre par
rapport à ce que propose habituellement Schuldiner, je ne suis pas
encore totalement emporté mais voila une prise de risque qui intrigue
vraiment. Je note en tout cas que cet album (et ceux qui suivent) me
plaît de plus en plus au fil des écoutes successives (initialement
j'étais plutôt parti pour un petit deux étoiles), je commence peut-être
enfin à rentrer dans le trip de Death, mais la batterie continue à me
poser problème.
- Death - Individual thought patterns (1993) ★ ★ ★
Je continue à progresser assez péniblement dans la disco de Death, et
désormais j'ai l'impression de ne pas vraiment savoir ce que j'en pense.
À l'écoute, je ne vois vraiment rien à reprocher à cette musique, à part
peut-être une certaine uniformité dans les riffs et autres éléments
mélodiques qui structurent les chansons. Même le chant écorché de
Schuldiner me semble nettement moins pénible que sur les premiers albums
de son groupe. Non, vraiment, rien à redire, c'est hyper bien fichu,
propre, précis, réfléchi, avec quelques éléments étonnants qui donnent
une personnalité à ce disque (les bzoing de basse très audibles sur tous
les morceaux, même si je ne suis pas sûr que ça apporte vraiment
énormément au contenu musical, ça lui donne un cachet assez inimitable),
qui s'éloigne par ailleurs finalement pas mal de l'esprit metal, extrême
ou pas (les montées dans l'aigu des guitares sur Nothing is
everything ou l'intro de Destiny, par exemple, je trouve
qu'on est vraiment dans un autre univers). C'est peut-être ça d'ailleurs
qui fait que je n'arrive pas à rentrer totalement dans cette musique, il
me manque sûrement le côté "je prends mon pied" que je cherche en
général quand j'écoute du metal. Là, l'écoute est très agréable (et ça
fait un certain nombre de fois que je réécoute le disque, sans aucune
lassitude), mais elle me laisse relativement distant. D'ailleurs, c'est
assez symptomatique, je serais incapable de ressortir une piste de
l'ensemble, comme s'il n'y avait aucune tuerie ni aucun moment de moins
bien, simplement un tout homogène de 40 minutes, tellement parfaitement
ficelé qu'il finit par manquer de véritable profondeur.
- Death - Symbolic (1995) ★ ★ ★ ½
J'approche de la fin de mon petit bout de chemin avec Death, mais ça
fait un moment maintenant que mon avis n'évolue plus vraiment d'un album
à l'autre (et même d'une chanson à l'autre, à vrai dire !). Toujours
aussi bien fait et parfaitement exécuté, mais je n'arrive toujours pas à
trouver ça totalement emballant. En fait, je passe un (très) bon moment,
mais je ne suis jamais transporté, en étant vraiment méchant je dirais
que c'est parfait comme musique de fond. Bon, tout de même, les bzoing
de basse ont disparu sur ce disque, on a un son vraiment très propre (le
chant de Schuldiner parait presque déplacé par rapport au reste
d'ailleurs), et il y a tout de même cette fois-ci quelques titres que je
mettrais en avant par rapport aux autres : Zero tolerance avec
ses motifs mélodiques étonnants mais bien fichus, et Without
judgement assez impressionnante, avec un break assez planant qui
fait son petit effet. Mais bon, je crois tout simplement que, sans y
être allergique du tout, je ne suis pas hyper sensible à la musique de
ce groupe.
- Death - The sound of perseverance (1998) ★ ★ ★ ★
Dernier album de Death, même s'il ne s'agit pas tout à fait du dernier
disque de son créateur Chuck Schuldiner, ce Sound of perseverance a
forcément une aura particulière, encore renforcée par le changement
assez spectaculaire introduit niveau chant (le chant "simplement
guttural" a laissé place à une espèce de croassement redoutablement
laid, mais bon, vu qu'à mon sens le chant a toujours été très secondaire
chez Death, ça ne gêne pas plus que ça). Niveau musical en tout cas,
Chuck continue sur sa lancée des albums précédents, en se lâchant encore
plus clairement : breaks inattendus dans tous les sens, alternance entre
passages ultra techniques (les intros de Scavenger of human
sorrow ou To forgive is to suffer ne font pas dans la
dentelle) et d'autres beaucoup plus apaisés, des soli souvent bien
perchés mais jamais totalement vains, un (très bel) instrumental en
cours de route, on ne sait franchement pas trop où ça veut aller. Et
curieusement, ça me plait plus que ses albums précédents, il se passe
toujours quelque chose qui attire l'oreille, et après quelques écoutes,
on se rend compte que c'est en fait loin d'être décousu et même que ça
fonctionne souvent très bien (Bite the pain et ses passages assez
délirants à la guitare, Flesh and power it holds sont de très
bons morceaux). Finalement, je me retrouve avec ce groupe face à un rare
cas où j'ai l'impression d'une progression quasiment continue, sans
aucun à-coup, pour atteindre des choses franchement attirantes (même si
ça ne procure pas encore pour moi le surcroît de jouissance auditive que
je peux trouver ailleurs). C'est tout de même bien dommage que tout ça
se soit arrêté en si bon chemin.